Madame la ministre de la culture et de la communication, je souhaiterais vous interroger sur la condition de nationalité appliquée dans le cadre de la politique donnant aux jeunes de moins de vingt-six ans un accès gratuit aux collections permanentes des musées, depuis le 4 avril dernier.
La politique tarifaire mise en place dans les musées nationaux prévoyait la gratuité pour les chômeurs, les bénéficiaires de minima sociaux, les personnes handicapées ou les jeunes de moins de dix-huit ans, sans condition de nationalité. Au cours du premier semestre 2008 a été expérimentée la gratuité totale pour l'accès aux collections de quatorze musées et monuments nationaux ainsi que pour l'accès en nocturne, un soir par semaine, à quatre grands musées parisiens – musées du Louvre, d'Orsay, du Quai Branly et du Centre Georges-Pompidou – pour les jeunes entre dix-huit et vingt-cinq ans, également sans condition de nationalité.
L'étude quantitative de la fréquentation des nocturnes, réalisée par le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie, a montré que les visiteurs de dix-huit à vingt-cinq ans, toutes nationalités confondues, représentent un peu plus de 11 % de la fréquentation des musées et monuments de l'État et qu'ils sont à 77 % ressortissants de l'Union européenne et à 23 % ressortissants d'autres pays. Il ressort également de cette étude que la gratuité a fait venir des jeunes d'origine sociale modeste ne connaissant pas ou peu les musées.
Or la mesure de gratuité entrée en vigueur le 4 avril 2009 exclut les jeunes étrangers non communautaires résidant régulièrement sur le territoire national tandis que de simples touristes de passage, venant d'un des pays de l'Union européenne, peuvent en bénéficier.
Cette sélection par la nationalité pose de nombreux problèmes.
Elle est négative pour la francophonie : comment justifier l'absence de gratuité pour les étudiants venus en France du Québec, de la Suisse, de nombreux pays africains ou asiatiques par intérêt pour la langue et la culture françaises ?
Elle est négative pour l'intégration. Avant dix-huit ans, aucune différence n'est faite entre un jeune de nationalité française, un ressortissant d'un pays membre de l'Union européenne ou d'un autre pays. En revanche, un même groupe d'amis de nationalités diverses se verra appliquer deux traitements différents dès qu'est franchi le cap des dix-huit ans : pourront entrer ceux d'entre eux qui sont issus d'un pays de l'Union européenne alors que la gratuité sera refusée à des jeunes résidant régulièrement en France et scolarisés dans notre pays, mais qui auraient une nationalité extra-communautaire. Cela semble quelque peu contradictoire avec tous les discours sur l'intégration, sans parler du paradoxe qu'il y a à imposer une telle règle pour l'entrée à la Cité de l'immigration.
Ces règles s'apparentent à une politique de préférence nationale et communautaire. Elles créent de nombreuses tensions aux caisses des musées concernés, certains jeunes ne comprenant pas cette ségrégation par la nationalité.
Aussi, madame la ministre, vous demanderai-je si vous envisagez de supprimer cette restriction liée à la nationalité et d'étendre la gratuité aux jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans, quelle que soit leur nationalité, en ne retenant que le critère de la résidence en France ou dans l'Union européenne ?