En réponse à une question, madame la ministre, vous avez indiqué tout à l'heure qu'il reviendrait certainement aux ayants droit et aux familles de missionner des intervenants dans ces conditions, puisqu'ils en ont la compétence. Vous avez eu la franchise de nous le dire, et c'est en effet, comme vous l'avez rappelé, ce qui s'est passé dans d'autres pays.
Simplement, l'intervention du juge a lieu à deux niveaux : en amont d'abord, au stade de la recherche des éléments de preuve – y compris des données personnelles, très particulières – et en aval ensuite, dont nous parlerons peut-être plus tard, c'est-à-dire au stade de la sanction.
S'agissant de l'amont, vous savez aussi bien que moi que, dans n'importe quelle procédure, qu'elle soit administrative ou judiciaire, ce sont les éléments de preuve que l'on apporte au départ qui permettent de préciser ce que l'on instruit à charge ou à décharge ; ils revêtent une importance considérable par la suite. Il en va du respect des principes généraux du droit, particulièrement lorsque des sanctions graves sont prises. N'oubliez pas en effet que la loi HADOPI peut être cumulée avec la loi DADVSI et avec les peines de la contrefaçon.
En l'état, personne n'a choisi, una via electa, son mode de saisine d'une juridiction. Or ce dispositif peut aussi bien servir dans le cadre d'une procédure judiciaire sans pour autant offrir les garanties de droit du monde judiciaire, à moins que l'on ne nous dise demain qu'il faut choisir l'une des procédures – ce sera l'objet d'un amendement – et que le choix de la voie administrative ne pourra être cumulé avec celui de la voie judiciaire. C'est un peu comme si, en matière fiscale ou douanière, on pouvait utiliser des éléments de preuve pour une procédure alors même que l'on n'a pas obtenu les garanties nécessaires.
La question de la procédure judiciaire en amont est donc presque plus importante qu'en aval car, par définition, elle risquera de présupposer une décision, qu'elle soit administrative ou judiciaire. Il convient donc d'être très prudent, d'autant que nous avons parlé de secrets et de données personnelles. À mon sens, nous dépassons là le rôle des appareils, des ayants droit ou des fournisseurs d'accès.