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Intervention de Christian Paul

Réunion du 30 mars 2009 à 21h30
Protection de la création sur internet — Reprise de la discussion, amendement 352

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Paul :

Il y a quelques mois, des professeurs de l'université de Washington ont voulu démontrer que l'Internet ne se prêtait en aucune manière au type de détection que vous voulez imposer avec la loi HADOPI. Ils ont testé scientifiquement la façon dont agissent les sociétés de surveillance ; tel est, aux États-Unis, le nom qu'on donne aux agents des sociétés d'auteurs qui tentent d'identifier les téléchargements. Leur expérience a réservé bien des surprises, monsieur Riester, et vous auriez dû les méditer. Cela vous aurait conduit à reconnaître la grande fragilité du dispositif et à conclure qu'il vaudrait mieux faire intervenir le juge.

N'importe quel internaute peut être accusé de piratage ; ce qui, chez nous, lui vaudrait d'être condamné à la coupure. N'importe quel internaute peut même faire accuser n'importe qui de piratage.

Ces scientifiques américains ont réussi à faire confluer des centaines de plaintes, comme celles que vous entendez diffuser, sur treize machines de l'université de Washington qui n'avaient jamais vu la couleur d'un fichier illégal. Parmi ces machines figuraient trois imprimantes et un routeur wifi !

C'est dire, mes chers collègues, qu'on atteint, avec ces propositions, des sommets d'absurdité. On sait ce qui va se passer. Vous allez tenter d'envoyer des dizaines de milliers de mails à des utilisateurs d'Internet qui, pour certains, ne les recevront pas, à des adresses IP qui auront été utilisées de façon aléatoire. Le grand jeu, sur la toile, sera de provoquer l'intervention de l'HADOPI. À votre contrôle automatisé, il sera répondu, préventivement, par des offensives tout aussi automatisées : vous savez bien qu'elles sont déjà en préparation. Nous allons atteindre un degré de confusion qui ne permettra pas à votre texte de fonctionner plus de quelques semaines ou, au mieux, de quelques mois.

Si nous étions cyniques, madame la ministre, nous vous laisserions faire, mais, comme nous sommes porteurs de l'intérêt général, nous préférons vous conseiller de vous arrêter, de regarder ce qu'est l'Internet, au lieu de vous obstiner dans la mauvaise voie où vous ont poussée certains esprits peu avertis.

Voilà pourquoi le juge doit, à un moment donné, reprendre la main. Avez-vous peur des juges ? Avez-vous peur de la justice ?

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