L'idée d'inscrire l'équilibre des finances publiques dans la Constitution m'inspire certaines réserves.
Premièrement, je rappellerai que la mission de la Constitution est de fixer les règles de fonctionnement des pouvoirs publics. Or, à force d'y introduire des dispositions à caractère normatif visant à encadrer systématiquement les pouvoirs du Parlement, on sera dans quelque temps en droit de s'interroger sur la réalité de ce qu'il en restera.
Deuxièmement, s'agissant de l'objectif d'équilibre, je rejoins le président de la commission des finances lorsqu'il évoque fort justement le pacte de stabilité que nous impose l'Union européenne. Est-il vraiment nécessaire de doubler les dispositions prévues dans le pacte par des mesures constitutionnelles ? Il est toujours dangereux de prévoir les mêmes règles dans deux dispositifs différents, car cela peut entraîner des interférences. En outre, dans la mesure où nous avons déjà réformé le pacte de stabilité il y a peu, nous risquons de limiter, pour l'avenir, notre capacité de négociation vis-à-vis de nos partenaires européens.
Troisièmement, le ministre a évoqué le risque cyclique. Nous savons bien pour l'avoir vécu que nous ne sommes pas à l'abri de situations extrêmes – guerres, catastrophes naturelles – qui peuvent nous contraindre à nous affranchir des règles de l'équilibre budgétaire. Il est donc très dangereux d'introduire ce type de règle dans notre Constitution.
Quatrièmement, enfin, il y a le problème du Conseil constitutionnel, qui a multiplié les réserves interprétatives. Il nous dit vouloir accompagner et compléter le travail du Parlement. Il n'en reste pas moins que le risque est grand de le voir introduire des réserves interprétatives lorsque les lois de finances lui seront soumises. Il y a là un danger considérable au regard de la liberté d'initiative du Parlement.