Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Philippe Vigier

Réunion du 25 novembre 2008 à 9h30
Débat sur la crise économique et sociale et la régulation du système financier — Reprise du débat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Vigier :

La véritable question qui se pose toutefois, au-delà des mesures d'urgence, est celle de la moralisation des pratiques sur les marchés financiers, moralisation que le Nouveau Centre appelle de ses voeux.

Il est à ce titre primordial, afin de briser la spéculation, de mettre un terme à la pratique des ventes à découvert dont la nocivité n'est plus à démontrer.

Cette crise étant dans ses fondements mêmes une crise de la non-régulation, le Nouveau Centre a pris position en faveur d'une régulation qui puisse jouer un rôle contracyclique et concerner les marchés échappant à tout contrôle, lesquels sont le plus souvent en pleine expansion. À titre d'exemple, la commission des finances de l'Assemblée nationale a mis en lumière le fonctionnement des credit default swaps ou CDS : ces marchés non régulés avaient permis de générer des instruments financiers pour près de 60 000 milliards de dollars sans qu'aucun contrôle soit institué. De telles pratiques doivent cesser.

Par ailleurs, cette moralisation des pratiques passe par un encadrement des rémunérations des dirigeants comme des traders. En effet, certains d'entre eux porteront de lourdes responsabilités dans les drames humains qui ne manqueront malheureusement pas de se produire avec la répercussion sur l'économie réelle des déflagrations financières de ces dernières semaines. Ils doivent être sanctionnés. Après le principe « pollueur-payeur », il convient bel et bien, désormais, de faire appliquer le principe « fauteur-payeur ».

La crise que nous traversons exige aussi une nouvelle gouvernance financière. Les défaillances des agences de notation appellent, tant au niveau national qu'européen, une amélioration du mode de fonctionnement de ces dernières. Le Nouveau Centre a d'ailleurs proposé, à ce sujet, deux principales pistes de réflexion. Les statuts des agences doivent ainsi être réformés, afin qu'il leur soit imposé d'intégrer dans leurs évaluations le risque de liquidité et les risques opérationnels, à côté des risques de crédit. Une telle mesure doit se traduire par une refonte complète de la notation. Sont également nécessaires des mécanismes permettant de supprimer le lien entre les émetteurs et les agences de notation.

Le Nouveau Centre a également proposé que soit mis à l'étude, pour ces agences, un projet de label à l'échelle de l'Union, ainsi, à moyen terme, qu'un véritable système européen de superviseurs bancaires, calqué sur celui des banques centrales, comme l'a suggéré Michel Pébereau.

Les agences de notation doivent également être davantage responsabilisées. Un véritable droit opposable à la sincérité de la notation permettrait aux épargnants d'attaquer en justice celles dont l'évaluation d'un risque se serait révélée contraire à la réalité.

À moyen et long termes, le Nouveau Centre a proposé que soit régulée l'industrie des hedge-funds, et que soient revues les règles comptables essentielles. Il serait à ce titre envisageable de réglementer le recours des investisseurs institutionnels, fonds de pension ou assureurs, aux gestionnaires risqués que sont ces fonds.

Enfin, tant au niveau national qu'européen, le Nouveau Centre a proposé deux grandes mesures visant à répondre à la crise financière ainsi qu'à régénérer la confiance. Il faut, tout d'abord, faciliter l'accès des petites et moyennes entreprises au crédit par un grand « emprunt confiance » et proposer, ensuite, à nos partenaires européens un programme de grands travaux à l'échelle de l'Union.

Ce grand emprunt d'un montant initial de 60 milliards d'euros, répartis en trois tranches de 20 milliards d'euros sur trois, cinq et sept ans, ne serait pas destiné à financer les déficits publics et n'accroîtrait donc pas l'endettement de l'État. Il s'agirait seulement, mais c'est essentiel, de financer des crédits à l'économie, distribués via les réseaux bancaires – les banques devant acquitter une marge bénéficiant à l'État et assumer le risque. Un tel emprunt s'inscrit, par ailleurs, dans une logique de participation citoyenne à l'économie, et une partie pourrait servir au financement de travaux d'infrastructures en cohérence avec les engagements pris récemment dans le cadre du Grenelle de l'environnement.

Par ailleurs, les régions doivent assumer leurs responsabilités dans l'accès au crédit des PME. Elles doivent, à leur tour, comme le fait l'État, garantir un certain nombre de prêts accordés à ces entreprises et jouer pleinement leur rôle de colonne vertébrale de l'économie.

Je terminerai en évoquant, en quelques mots, le sommet du G20, organisé à l'initiative du Président de la République pour tracer les contours de ce que pourrait être un nouveau Bretton Woods financier. Sur ce plan, si des efforts restent encore à faire, la dynamique est lancée. En effet, pendant que les socialistes tentaient, en vain, de régler leurs querelles de clochers à Reims, le Président de la République et le Gouvernement étaient à Washington pour apporter des réponses mondiales à la crise.

Pour le groupe Nouveau Centre, deux priorités doivent se dégager. Premièrement, un certain nombre des recommandations éparses qui tirent les leçons de la crise financières doivent entrer dans les faits. Entre autres mesures qu'il faudra mettre en perspective de façon cohérente, je citerai un meilleur fonctionnement des agences de notation, un élargissement du périmètre de la réglementation prudentielle, un ajustement des normes comptables internationales, un accord sur les règles du jeu appliquées par les fonds souverains, une amélioration du contrôle interne et de la supervision externe des institutions financières, un arrêt de la vente à découvert. Sur toutes ces questions, nous ne pouvons nous contenter de grandes déclarations. Il nous faut poser, dès maintenant, les principes fondateurs de ces réformes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion