Or il est évident qu'un fléau unique appelle un traitement unique : c'est ce que permettra le rapprochement des deux corps et l'autorité unique du ministre de l'intérieur.
Le rapprochement induit naturellement la mutualisation des moyens. Si celle-ci porte sur les commandes publiques, la gestion de la logistique ou certaines formations civiles, il est clair qu'elle ne signifie pas une fusion. Chacune des deux forces gardera sa liberté à l'égard de l'autre s'agissant de l'utilisation de ses moyens. Le coeur de la présente réforme est d'assurer une plus grande efficacité par le commandement unique, la mutualisation des moyens et l'indépendance totale des deux forces l'une par rapport à l'autre.
Troisième attente : la suppression des réquisitions en matière d'ordre public, au sujet de laquelle on ne peut qu'être sensible aux arguments constamment invoqués par le ministre. Dès lors que le ministre de l'intérieur a une autorité hiérarchique sur les services de la gendarmerie, il est clair que la réquisition n'a plus lieu d'être. Cependant, même sans cette mesure administrative de rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur, la remise en cause des réquisitions restait nécessaire. Tous ceux qui ont eu à traiter des situations intéressant l'ordre public savent bien que les manifestations sont beaucoup plus imprévisibles que par le passé et qu'elles ne se déroulent jamais complètement comme prévu. De sorte que le dispositif imaginé lors de la rédaction de la réquisition ne correspond que très rarement aux situations concrètes auxquelles on est confronté. Dans ce système, les responsables de l'ordre public avaient deux solutions : ou modifier la réquisition en cours de manifestation – mais on conçoit la perte de temps que cela représente et les difficultés qui en résultent pour les opérations de maintien de l'ordre –, ou abandonner la réquisition en donnant la priorité à l'ordre public ; on régularisait alors a posteriori une solution particulièrement choquante au plan juridique.
Le nouveau dispositif permettra d'éviter cet inconvénient. Il présente en outre l'avantage majeur de conférer aux gendarmes, lors des interventions dans les manifestations, la même souplesse de manoeuvre que celle dont ont toujours disposé les personnels de la police nationale. Il n'y avait en effet aucune justification, en matière d'ordre public, pour que l'intervention de la gendarmerie nationale soit soumise à des contraintes, parfois même à des entraves, que ne connaissait pas la police nationale. Cette souplesse, d'ailleurs, existait avant 1924, date à laquelle a été instaurée l'obligation du recours aux réquisitions, qui tenait elle-même à la création des unités de gardes mobiles. C'est parce que ces unités nouvelles n'étaient pas habituées à intervenir en matière d'ordre public qu'il a semblé prudent de les encadrer par la voie des réquisitions. Cependant, personne ne peut dire aujourd'hui que les unités de la gendarmerie départementale ou de la gendarmerie mobile ne sont pas préparées à de telles interventions.
Bref, l'objet de cette mesure n'est en aucun cas de banaliser le statut de la gendarmerie ou de l'aligner sur celui de la police nationale ; il s'agit seulement de donner à la gendarmerie nationale les mêmes moyens d'intervention que ceux dont dispose depuis toujours la police nationale. J'ajoute que cette mesure est l'occasion pour la représentation nationale d'exprimer sa confiance aux gendarmes, non seulement dans leurs activités de maintien de l'ordre, mais plus généralement en matière de sécurité publique, qu'il s'agisse de prévention ou d'actions judiciaires. Je profite donc de cette intervention pour exprimer à l'ensemble des unités de la gendarmerie nationale, départementale et mobile, notre estime et notre reconnaissance pour le travail qu'elles accomplissent nuit et jour sur le terrain.
Pour toutes ces raisons, le groupe de l'UMP votera le présent texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)