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Intervention de Chantal Berthelot

Réunion du 17 octobre 2008 à 15h00
Grenelle de l'environnement — Article 20

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChantal Berthelot :

La députée de Guyane que je suis ne peut rester muette sur un sujet tel que la biodiversité. Il y aurait bien des choses à dire, mais je m'en tiendrai à la rédaction de l'article 20 qui nous est proposée, et d'abord à son incipit qui, alors que la version initiale tendait à « arrêter la perte de biodiversité », consiste à « maintenir et développer la biodiversité sauvage et domestique », précisant que cela « exige des mesures de protection », entre autres choses.

C'est un fait : la biodiversité guyanaise, la plus riche de France et d'Europe, exige de notre part à tous des mesures de protection. Il faut avant tout lutter contre l'orpaillage illégal qui la pille et la détruit. À la biodiversité, il faut toutefois associer les hommes et les femmes qui vivent sur ces territoires, notamment les communautés amérindiennes, bushinengués et créoles. La biodiversité que nous devons protéger n'est pas que végétale ; elle est aussi humaine.

La biodiversité appelle, outre la protection, un autre terme qui m'est cher : la connaissance. L'examen de l'article 19, consacré à la recherche, a révélé combien nous devions continuer à améliorer notre connaissance de cette biodiversité. La Guyane possède des pléthores de chercheurs – au point d'en avoir une importante densité par habitant. Pour autant, la recherche doit être pilotée. Le pilote doit-il se trouver à huit mille kilomètres du terrain ? Je ne le crois pas : mieux vaut qu'il soit à proximité. C'est le cas des collectivités territoriales. En effet, la Guyane est traversée par un flux de chercheurs dont je me demande parfois ce qu'ils cherchent et quand ils trouvent, au regard des besoins du territoire.

J'en viens à la valorisation de la biodiversité. Le Président de la République le disait à Camopi : ne faisons pas une réserve naturelle de la Guyane. Au contraire, il faut en faire un territoire dynamique, à l'image de sa démographie. Encourageons les filières de développement économique qui créent de l'emploi, telles que la chimie verte ou encore les biotechnologies vertes et bleues. C'est sur ses propres ressources naturelles que la Guyane doit bâtir son développement pour répondre aux besoins de ses populations. Il est anormal que j'entende encore ici même parler d'assistanat ou de niches fiscales à propos de la Guyane, comme si l'outre-mer et les Guyanais en particulier passaient leur vie à tendre la main ! La représentation nationale doit prendre conscience de ce qu'est la Guyane et de ce qu'elle veut : le respect et l'égalité à tous niveaux. Cela implique de mettre les ressources naturelles de la Guyane au service de sa population.

Reste le problème de la gouvernance, évoqué à l'article 43. Il ne s'agit pas de nous accuser d'irresponsabilité ou d'ignorance : nous sommes formés aux mêmes écoles et reprenons – parfois trop facilement – les mêmes schémas. La gouvernance qui fut souhaitée ici est souhaitée là-bas. Nous devons être l'interface entre la France et les citoyens guyanais, français et européens qui nous le demandent.

Or, en matière de gouvernance, vous ne les entendez pas assez. Ainsi, la réponse faite hier par la secrétaire d'État sur le schéma minier m'a surprise : comment peut-on affirmer, sur un sujet aussi grave et passionnel que l'orpaillage, que le schéma minier demeure une compétence de l'État ? À chercher ainsi le rapport de force, vous allez le trouver, mais vous aurez aussi l'explosion ! Nous proposons simplement de nous écouter les uns les autres et de partager les richesses du territoire pour mieux répondre aux besoins des citoyens.

Pour distraire votre fin de semaine – entre deux séances de débats parlementaires, sans doute – je vous suggère d'aller voir un film sorti ce mercredi, qui vous en apprendra certainement beaucoup : La Fièvre de l'or, réalisé par Olivier Weber – qui en a fait un livre. Vous verrez alors les effets que l'orpaillage illégal produit sur notre biodiversité. Je dis bien « notre » biodiversité, car j'aimerais qu'à votre tour vous vous appropriiez la biodiversité ultramarine, qui est notre bien commun. Vous aussi avez le devoir de la protéger et d'éviter que ne s'y produisent les ravages en cours dans l'Amazonie voisine et, au fond, pas si lointaine.

J'avais déposé, monsieur le rapporteur, un amendement sur la déclinaison de la stratégie nationale de biodiversité. Dans la nouvelle rédaction de l'article 20, vous vous contentez d'écrire que la déclinaison sera « locale ».

La stratégie nationale de biodiversité a été adoptée en 2004 et déclinée en Guyane par un plan d'action locale. Il suffirait, monsieur le ministre, que vous mettiez en oeuvre cette stratégie nationale et le plan d'action outre-mer. Renforcer, c'est bien, mais ce serait encore mieux de mettre en oeuvre ce que vous avez déjà décidé et d'y consacrer les moyens. Car il ne suffit pas d'en parler ou de l'inscrire dans la loi, il faut l'appliquer, pour répondre pleinement aux attentes. Monsieur le ministre, il y a tout dans la stratégie nationale de biodiversité et dans le plan d'action outre-mer. Mais où en est la mise en place ? Nous devions avoir, tous les deux ans, et donc, en 2008, un bilan détaillé. Voilà ce que j'attends de vous, ainsi que l'affectation de vrais moyens à ce plan d'action, pour répondre aux attentes de chacun d'entre nous.

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