Mon deuxième exemple concerne l'évolution du déficit et de la dette. Vous proclamiez ce matin encore que le déficit pour 2007 améliorait celui de 2006. Vous dites éradiquer les sous-budgétisations et maîtriser la dette. Là encore, ce n'est pas la vérité !
Le déficit de 2007 n'est inférieur à celui de 2006 qu'au prix d'artifices liés au décalage des pensions d'État, à la cession de titres EDF, mais aussi à des dettes non réglées, dissimulées derrière des crédits sous-évalués, tels que les arriérés à la sécurité sociale ou le découvert au Crédit foncier pour l'épargne logement. D'une année à l'autre, l'écart est de 10 milliards d'euros ; la réalité est que le trou s'est creusé de 10 milliards d'euros !
C'est dire si la spirale de la dette risque bien de se poursuivre. D'autant que l'effet boule-de-neige joue à nouveau, tant se creuse l'écart entre les taux d'intérêt – à la hausse – et le taux de croissance – à la baisse –, du moins si l'on en croit l'OCDE. Vu les tendances en cours, vous n'y échapperez pas ; c'est bientôt un coup de massue qui va s'abattre sur nous, et notre stock de dette dérivera une fois de plus.
À la fin mars 2008, la dette publique atteint 1 250,6 milliards d'euros ; elle a donc déjà augmenté de 41,1 milliards d'euros par rapport à fin décembre 2007 ! Celle de l'État a augmenté de 35,8 milliards d'euros. Sait-on que la dette publique a augmenté de plus de 100 milliards d'euros entre fin 2006 et mars 2008, passant de 1 149 à 1 250 milliards d'euros ; que, sur la même période, celle de l'État est passée de 892 à 965 milliards d'euros, soit une progression de 73 milliards d'euros ; enfin, que celle des administrations de sécurité sociale est passée de 39 à 57 milliards d'euros, soit une hausse de 18 milliards d'euros ?
Dissimulation du déficit 2007, mécanique infernale des charges financières, accumulation de la dette sociale, quasi-stagnation des recettes fiscales et, surtout, dépenses fiscales d'hier dont on n'avait pas les moyens, tout s'additionne pour, comme l'écrit dans son rapport préliminaire la Cour des comptes, contribuer à une « aggravation de la situation des finances publiques » et une « dégradation de la situation de l'État ».
Alors, qui dit la vérité ? La Cour des comptes, ou vous, monsieur le ministre ?
Enfin, troisième exemple, vous voulez faire porter sur les collectivités locales les conséquences de l'incurie de la gestion financière de l'État.
La croissance à zéro volume des dotations de l'État que vous annoncez se traduira pour ces collectivités par des dotations forfaitaires en stagnation, par des dotations de compensations encore en nette baisse ; cela signifiera encore souvent que les dotations globales baisseront – baisse assez forte même en 2009 ! Comment faire, alors, avec une inflation à plus de 3 %, et avec des dépenses qui augmentent d'autant ? C'est un garrot en puissance auquel vous condamnez bien des collectivités locales.
Oublieriez-vous qu'elles sont le premier investisseur public en France, à hauteur de 73 % du total ? N'auriez-vous pas entendu Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, qui, en commission des finances, nous déclarait, le 25 juin, qu'il était « difficile d'imputer aux collectivités locales la situation difficile des finances publiques » ? Alors, pour se défausser de ses propres responsabilités, l'État, dans sa gestion financière, s'apprête à commettre une erreur économique et politique aux conséquences sociales dramatiques.
Voilà pourquoi, monsieur le ministre, vous que je crois fondamentalement un honnête homme, je crains que vous ne vous livriez dans vos écrits comme dans vos propos de ce matin à un rôle de composition, sans doute, un rôle d'illusionniste du chiffre et du verbe qui dissimule les réalités, et dont la volonté tient en fait de la méthode Coué.