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Intervention de François Bayrou

Réunion du 24 octobre 2007 à 9h30
Pluralisme et indépendance des partis politiques — Exception d'irrecevabilité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Bayrou :

Ce fut le cas de la loi du 15 janvier 1990 qui a créé les deux fractions destinées au financement des mouvements politiques : elle n'a été appliquée qu'à compter des élections de 1993. Ce fut encore le cas avec la loi de 2003 dont je viens de parler, qui a fixé le seuil de 1 % des suffrages exprimés pour les élections de 2007, se gardant bien de l'appliquer pour le financement de 2003. Le rapporteur de ce texte, notre collègue Jérôme Bignon, précisait d'ailleurs qu'en fonction de ce principe cette réforme ne pourrait s'appliquer « évidemment que lors du prochain renouvellement, c'est-à-dire en 2007 ». Le Conseil constitutionnel n'admet de rétroactivité que dès lors qu'elle répond à un intérêt général suffisant et sous réserve de ne pas priver de garantie légale les exigences constitutionnelles. En janvier 2006, lors de la présentation des voeux du Conseil constitutionnel au Président de la République, le président Mazeaud rappelait, à propos de ces dispositions rétroactives : « Le Conseil constitutionnel vérifie à chaque fois que de telles dispositions sont dictées par un motif d'intérêt général et que celui-ci est suffisant. » On cherchera dans le cas d'espèce où peut bien se nicher l'intérêt général, puisqu'il ne s'agit que de l'intérêt d'un seul groupement. Mais on trouvera facilement de quelle manière ce changement tardif et rétroactif des règles du jeu électoral peut heurter les exigences constitutionnelles de transparence, de sincérité du scrutin et de garanties apportées aux citoyens.

Autre motif d'inconstitutionnalité : la rupture d'égalité des citoyens et des formations politiques devant la loi. Le législateur de 1988 et de 1990 a fixé deux principes pour l'accès au financement public des partis. D'abord, l'obtention de l'aide publique dépend du choix des électeurs au premier tour des élections législatives. Des électeurs et de nul autre ! Le montant attribué dépend, non seulement du nombre de voix obtenues, mais aussi du choix que les élus font pour la deuxième fraction. Ensuite, on ne peut obtenir de financement au titre de la seconde fraction que lorsqu'on est éligible à la première. Ce n'est pas par hasard que cette disposition a été adoptée. Le législateur a créé ce lien entre les deux fractions pour remettre entre les mains des électeurs – et non des élus – la décision de principe d'accorder le financement à tel ou tel parti, et pour empêcher la constitution de partis de complaisance ou de coalitions d'intérêts bien compris entre des parlementaires motivés par la seule perspective de faire fonctionner une entreprise collective. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Avec la manipulation législative que nous subissons ce matin, ce ne sont plus les électeurs qui décideraient de l'attribution du financement public des partis, mais les partis dominants.

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