Déposé le 6 juillet 2011 par : M. Leteurtre, M. Préel, M. Salles.
Supprimer la dernière phrase de l'alinéa 19.
Les outils informatiques de dernière génération sont bien plus efficaces pour permettre une recherche à la fois vaste ou au contraire ciblée, que toute tentative de réduction des informations dans un référentiel national indicatif de certains postes de préjudices.
Adopter un tel référentiel :
- paralyserait le juge, porterait atteinte à sa liberté d'appréciation qui n'est limitée que par la demande de la victime et l'offre de l'assureur et figerait la jurisprudence. Dans la pratique, il a en effet été largement constaté que les référentiels déjà existants ne constituent pas de simples recueils d'information permettant de faciliter la formulation des offres indemnitaires, mais reviennent en réalité à de véritables barèmes d'évaluation des dommages. Ils sont utilisés comme des étalons de mesure limitant les demandes d'indemnisation, et par voie de conséquence les sommes allouées par les juges ou fixées par transactions,
- aboutirait à violer le principe fondamental de la réparation intégrale du préjudice des victimes et celui d'égalité qui suppose, non pas un processus qui sous prétexte d'harmoniser aboutit à uniformiser, mais une démarche qui reconnaisse l'individu dans son unicité. La spécificité de chaque dossier et la singularité de chaque victime, interdisent d'encadrer le montant des indemnisations dans des fourchettes préétablies et nécessairement arbitraires,
- aurait l'effet pervers de figer les données recensées et de contrarier tout le bénéfice de la base de données prévue au présent article et d'anéantir le principe même de réparation intégrale alors que les bases de données actuellement réalisables permettent de répondre aux objectifs d'égalité et d'accès à l'information légitimement recherchés par la représentation nationale,
- serait trompeur pour les victimes qui, s'y référant à titre officiel, se dispenseraient de consulter un avocat spécialisé et de recourir au juge, pourtant seuls garants de la personnalisation de son indemnisation. 95% des dossiers sont déjà réglés en transaction mais il est courant qu'avant d'accepter les victimes consultent un avocat pour s'assurer que l'offre de la compagnie d'assurance est satisfaisante. L'accès des victimes à un référentiel publié encouragerait donc ces dernières à se dispenser de la consultation d'un avocat alors que bien souvent à cette occasion, en plus du chiffrage, d'autres aspects du dossier peuvent être remis en cause (par exemple sur l'étendue du droit à indemnisation qui lorsque les circonstances de l'accident sont indéterminées font systématiquement l'objet d'un partage de responsabilité 50/50 par les compagnies d'assurances alors que le droit à indemnisation est total).
L'idée d'un référentiel national, longuement débattue lors des travaux préparatoires de la proposition de loi (n°2055 et 2297) de M. Guy Lefrand visant à améliorer l'indemnisation des victimes de dommages corporels à la suite d'un accident de la circulation et de l'examen le 16 février 2010 en première lecture de cette proposition de loi, a été unanimement rejetée(1).
- Discussion du 10 février 2010 sur l'article 11 III du rapport n°2297 de la proposition de loi de M .Guy LEFRAND visant à améliorer l'indemnisation des victimes de dommages corporels à la suite d'un accident de la circulation (n°2055) :
« III — CONTRE UN RÉFÉRENTIEL NATIONAL INDICATIF
L'article 1er de la proposition de loi initialement déposée, dont le présent article est issu, prévoyait également « l'élaboration d'un référentiel national indicatif de certaines postes de préjudices corporels », à partir des informations fournies par la base de données. En 2003, le groupe de travail Lambert-Faivre avait appelé de ses voeux l'établissement d'un « référentiel indicatif national statistique et évolutif» qui soit établi en fourchettes et en moyennes. Il lui apparaissait comme une condition nécessaire de l'accès effectif des victimes aux données de l'indemnisation.
À la lumière des observations recueillies au cours de ses auditions, et notamment de la table ronde du 4 février 2010, le rapporteur ne juge pas indispensable la création d'un tel référentiel, dans la mesure où la base de données nouvelle apportera en soi des garanties suffisantes de transparence.Le dommage corporel, source d'un préjudice subi par une personne humaine, ne saurait faire l'objet d'un quelconque tarif ou barème.Même précédé d'un avertissement, un référentiel induirait l'idée que l'indemnisation doit se couler dans un moule. Dans l'économie générale de la présente proposition de loi, telle que l'ont voulue ses auteurs, l'élaboration d'un référentiel n'a donc pas sa place».
- Compte rendu n°52 du 10 février 2010 (séance de 10 h) de la Commission des Finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire examinant de la proposition de loi de M .Guy LEFRAND visant à améliorer l'indemnisation des victimes de dommages corporels à la suite d'un accident de la circulation (n°2055)
« Article 11 :Création d'une base de données en matière de dommage corporel
M. le rapporteur. La loi du 5 juillet 1985 avait déjà prévu la publication des données relatives à l'indemnisation mais l'actuel fichier de l'AGIRA, l'Association pour la gestion des informations sur le risque automobile, qui relève de la seule responsabilité des assureurs, est très lacunaire. Nous proposons donc que soit créée sous le contrôle de l'État une base de données exhaustive, recensant à la fois les transactions amiables et les décisions de cour d'appel. Elle permettrait aux associations de victimes et aux avocats de savoir ce que chaque victime peut attendre.
La proposition de loi initiale prévoyait l'élaboration, à partir de la base de données, d'un référentiel national indicatif. Nous ne retenons pas cette idée car nous avons été sensibles à l'argument du risque de sclérose et d'insuffisante individualisation des réparations ».
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