Déposé le 7 février 2011 par : M. Jeanneteau.
I. - Après l'article L. 1131-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1131-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1131-1-1. - Par dérogation aux dispositions de l'article 16-10 du code civil et du premier alinéa de l'article L. 1131-1, l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne à des fins de recherche scientifique peut être réalisé à partir d'éléments du corps de cette personne prélevés à d'autres fins, lorsque cette personne, dûment informée de ce projet de recherche, n'a pas exprimé son opposition. Lorsque la personne est un mineur ou un majeur en tutelle, l'opposition est exercée par les titulaires de l'autorité parentale ou le tuteur.
« Il peut être dérogé à l'obligation d'information prévue à l'alinéa précédent lorsque celle-ci se heurte à l'impossibilité de retrouver la personne concernée. Dans ce cas, le responsable de la recherche s'assure que la personne ne s'est pas opposée à l'examen de ses caractéristiques génétiques.
« Lorsque la personne concernée a pu être retrouvée, il lui est demandé, au moment où elle est informée du projet de recherche, si elle souhaite être informée en cas de diagnostic d'une anomalie génétique grave.
« Le présent article n'est pas applicable aux recherches dont les résultats sont susceptibles de permettre la levée de l'anonymat des personnes concernées. »
II. - Le deuxième alinéa de l'article 56 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les dispositions du présent alinéa ne sont pas applicables aux recherches génétiques réalisées en application de l'article L. 1131-1-1 du code de la santé publique. »
Il est désormais certain que les malades atteints d'un cancer vont pouvoir bénéficier de traitements personnalisés, c'est-à-dire adaptés aux particularités de leur tumeur. Encore faut-il pouvoir étudier les caractéristiques qui concernent les gènes - plus précisément l'ADN tumoral - selon une méthode comparative poursuivie durant un assez longtemps. On peut d'ores et déjà prévoir, chez un malade donné, les résultats d'un traitement y compris une possibilité de guérison, et éviter de prescrire inutilement à d'autres patients des médicaments inutiles et toxiques. Tels sont les enjeux et les espoirs des traitements « ciblés », ou « personnalisés » des cancers. Mais les recherches sont actuellement compromises car la loi est inadaptée et les rend difficiles ou impossibles.
En effet, les échantillons - il s'agit le plus souvent de fragments de tumeur recueillis à l'occasion de soins donnés aux personnes malades- peuvent, sous réserve du recueil de leur consentement en vue d'une recherche dont la méthode et la finalité leur ont été clairement présentées, faire ultérieurement l'objet d'autres recherches, sauf non opposition de leur part. C'est ce que l'on appelle « un changement de finalité ». Dans sa rédaction actuelle, la loi précise que ces personnes doivent être recontactées et peuvent exprimer leur opposition à toute nouvelle recherche à partir de leur échantillon. La loi prévoit également que ces changements de finalités puissent être réalisés sans information préalable lorsque les sujets ne peuvent être retrouvés ou lorsqu'un Comité de Protection des Personnes n'estime pas cette information nécessaire (Art. 1123-7 et 1211-2 du Code de la santé publique).
Toutefois cet assouplissement de la loi exclut toute recherche en génétique qui ne peut être réalisée sans un consentement exprès et recueilli par écrit (art. 16-10 du code civil). En conséquence, soit les personnes sont recontactées pour toute nouvelle recherche en génétique afin d'exprimer leur consentement, soit elles ne peuvent être recontactées ou sont décédées ; la recherche ne peut être réalisée et les échantillons sont détruits pour autant qu'ils comportent des données identifiantes. Si ces dispositions étaient maintenues, la non utilisation de tels échantillons et leur destruction réduiraient considérablement les avancées de la recherche en cancérologie et les espoirs de développer des traitements ciblés. Un certain nombre d'organisations internationales : Recommandation R (2006)4 du Comité des Ministres aux États membres sur la recherche utilisant du matériel biologique d'origine humaine qui sera révisée courant 2011 ; la révision des lois de bioéthique-Conseil d'État, (2009) ; International Cancer Genomic Consortium ; CCNE (avis n°77), ont proposé des solutions afin de résoudre le conflit permanent entre valorisation des échantillons biologiques et respect des droits fondamentaux des personnes, le consentement constituant « le pilier » du respect de l'autonomie des personnes et l'expression de leur volonté quant au devenir des échantillon. Le présent amendement reprend donc la proposition du Conseil d'État visant à assouplir le dispositif de recueil du consentement en cas d'utilisation de prélèvements pour une autre finalité que celle initialement envisagée.
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