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Amendement N° 595 (Retiré)

Engagement national pour l'environnement

Discuté en séance le 6 mai 2010

Déposé le 6 mai 2010 par : M. Dionis du Séjour.

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia 

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

« Après la section 11 du chapitre Ier du titre III de la deuxième partie du livre Ier du code général des impôts, il est inséré une section 11 bis ainsi rédigée :
« Section 11 bis
« Expérimentation des péages urbains
« Art. 1609 quater A. - I. - Dans les agglomérations de plus de 300 000 habitants dotées d'un plan de déplacements urbains approuvé prévoyant la réalisation d'un transport collectif en site propre, une tarification des déplacements effectués au moyen de véhicules terrestres à moteur, dénommée « péage urbain », peut être instituée, à titre expérimental et à la demande de l'autorité organisatrice des transports urbains, pour limiter la circulation automobile et lutter contre la pollution et les nuisances environnementales.
« Le péage urbain peut être institué pour une durée de trois ans.
« La mise en place de l'expérimentation se fait par décision du conseil communautaire.
« Un vote à la majorité qualifiée suffit à faire valider la délibération, soit à la majorité des deux tiers des conseillers communautaires représentant les deux tiers de la population.
« Il est applicable aux véhicules terrestres à moteur qui franchissent les limites d'un périmètre géographique ou circulent sur des voies routières déterminées relevant de la compétence de la collectivité ou du groupement de collectivités concerné ou, le cas échéant, des autres autorités compétentes en matière de voirie et avec leur accord.
« Son montant est fixé par l'autorité organisatrice des transports urbains dans la limite d'un seuil défini par décret en Conseil d'État.
« Son produit est affecté à cette même autorité organisatrice des transports et sert à financer les actions mentionnées au plan de déplacements urbains.
« II. - Les collectivités ou groupements de collectivités intéressés établissent une étude d'impact préalable à charge et à décharge du projet de péage urbain et conduisent une concertation avec l'ensemble des parties concernées.
« À l'issue, ils décident, par une délibération du conseil communautaire votée à la majorité qualifiée, soit la majorité des deux tiers des conseillers communautaires représentant les deux tiers de la population, d'adresser leurs projets d'expérimentation au ministre chargé des collectivités territoriales et au ministre chargé des transports en précisant les modalités d'évaluation de l'expérimentation.
« Le péage urbain ne peut être instauré qu'après la mise en place d'infrastructures et de services de transport collectif susceptibles d'accueillir le report de trafic lié à l'instauration du péage.
« Après avis de l'autorité compétente, les expérimentations visées au I sont autorisées par décret en Conseil d'État.
« III. - Les collectivités ou groupements de collectivités qui mettent enoeuvre une expérimentation sur le fondement du présent article élaborent, après chaque période de douze mois d'expérimentation, un rapport contenant les informations nécessaires à son évaluation et le transmettent au ministre chargé des collectivités territoriales et au ministre chargé des transports.
« Six mois avant la fin de la première expiration mise enoeuvre en application du présent article, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport d'évaluation portant sur les expérimentations de péage urbain en cours. ».

Exposé Sommaire :

Cet amendement a pour objectif de permettre l'expérimentation des péages urbains.

Depuis plusieurs années, les élus locaux misent sur une politique qui combine incitation à l'utilisation des transports collectifs et réduction de la place de la voiture sur la voirie, avec une augmentation des prix du stationnement autorisé et, souvent, la création de parkings périphériques.

C'est tout naturellement que la question du péage urbain s'est alors posée, depuis une dizaine d'années, d'autant que cet outil a été mis enoeuvre, de façon très visible, dans plusieurs grandes villes étrangères, historiquement à Singapour, où l'espace public est sans doute plus rare qu'ailleurs, puis en Scandinavie et à Londres.

Le péage urbain est une réponse à une question de rareté. Quand on ne peut pas agrandir la capacité routière, simplement parce que l'espace urbain est rare, quand on veut limiter les atteintes du transport à l'environnement et au cadre de vie, parce que la qualité de l'environnement doit être préservé.

Le dispositif de péage urbain a systématiquement pour effet de réduire la congestion urbaine et de diminuer les polluants de proximité, une question de santé publique majeure qui est encore très souvent négligée.

Dans une note parue le 19 septembre 2008, le Centre d'analyse stratégique (CAS) soulignait que les péages urbains permettent "une nette amélioration de la fluidité du trafic en ville" : 15 % de circulation en moins à Londres depuis 2003, entre 10 % et 15 % à Stockholm. L'effet de long terme est plus spectaculaire encore : à Singapour, le nombre de voitures pénétrant dans la zone à péage a été réduit de 76 % depuis sa mise en service en 1975. Enfin, le péage fournit une recette, qui permet d'aider au financement des transports en commun.

Les transports collectifs en sont améliorés (30 % de retard en moins pour les bus de Londres) et davantage fréquentés (entre + 3 % et + 6 % à Stockholm). Résultat : 16 % de CO2 en moins dans l'air de Londres par rapport à la moyenne annuelle de 2002 et entre 10 % et 14 % de réduction des émissions polluantes à l'intérieur du cordon de péages de Stockholm.

Elle induit donc la création d'une offre de transports collectifs supplémentaire pour absorber le report de trafic, ce qui aurait pour effet d'aider vraiment les moins aisés, c'est-à-dire ceux qui n'ont pas de voiture.

Il est souvent considéré comme acquis que le péage serait injuste en pénalisant plus fortement les pauvres que les riches. Ce serait une "sélection par le portefeuille". Cette thèse est bien trop générale pour pouvoir être considérée comme exacte. L'équité d'un péage va dépendre de l'utilisation qui sera faite de sa recette, et bien sûr de son montant et de sa forme (zone, cordon, etc.)

Spécialement, le péage serait injuste car un coût financier, de 3 € par exemple, ne représente pas la même chose pour un smicard ou un cadre supérieur et que, en outre, le temps gagné résultant de la diminution de la congestion a une valeur plus importante pour un cadre supérieur…

Or, les études sur les péages existants, à Londres ou ailleurs, et les projections, sur Paris en particulier, démontrent que les automobilistes concernés ou qui le seraient ont des revenus nettement supérieurs aux autres usagers des transports. De plus, utiliser la recette pour subventionner, en prix ou en qualité de service, les déplacements de banlieue à banlieue maximise la redistribution.

Il n'y a que pour les automobilistes qui continueraient à utiliser ce mode de transport après l'instauration du péage que le coût net (coût financier du péage - temps gagné) serait important, et supérieur au gain de temps.

On ajoutera que le péage de zone, contrairement au péage de cordon, est coûteux pour les automobilistes et crée un problème structurel d'acceptabilité. Par contre, un cordon entrant pénalise davantage les pauvres, mais un péage vert (tarif fortement réduit pour les véhicules à faible émission de CO2) les favorise.

On peut concevoir un péage combinant une tarification modérée à l'extérieur du centre de l'agglomération (soit un péage de zone avec suivi satellite, soit un péage restreint aux grands axes) et des tarifs plus forts à l'approche immédiate et dans le coeur urbain (logique de cordon) avec des péages éventuellement modulés heure de pointe/heure creuse, jours ouvrés/jours fériés, etc. ;

L'objectif est d'inciter les usagers à utiliser les transports en commun, particulièrement pour accéder au centre-ville; le péage est plus un péage de financement qu'un péage de décongestion (le niveau ne doit pas être trop élevé, à la fois pour ne pas trop dissuader les gens de circuler, le rendre plus acceptable, et globalement générer plus de recettes pour financer les investissements de transport en commun). Le schéma pourrait donc être très différent de celui de Londres.

Il est en tout cas essentiel de noter que le péage urbain peut être mis en place selon des modalités très différentes d'une agglomération à une autre, en fonction des contraintes locales et de la volonté des élus locaux.

En ce sens, le dispositif de l'expérimentation limitée dans le temps apparaît adapté.

Le péage urbain amène indéniablement une diminution de la circulation automobile, donc une amélioration de l'environnement, un gain d'espace pour d'autres usages, moins de pression à l'expansion des routes, ainsi que des recettes supplémentaires pour financer le report modal urbain.

Il n'a pas pour effet d'accentuer la gentrification des centres villes, il se veut au contraire être un outil d'égalité social fort, le paiement de la taxe étant investi dans une offre plus étoffée de transports collectifs avec la possibilité de peser sur la tarification des titres de transports. Il ne faut pas négliger l'impact certain sur la pollution de proximité de coeur de ville.

Il convient de se projeter au-delà des premières impressions et se préparer à affronter notre futur avec des actions qui, certes, peuvent apparaître étrangères à notre culture et notre tradition, mais qui ont démontré à travers le monde leur efficacité...

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