Déposé le 6 avril 2009 par : Mme Jeanny Marc, M. Charasse, Mme Berthelot, M. Giacobbi, Mme Girardin, M. Giraud, M. Likuvalu, Mme Orliac, Mme Pinel, Mme Robin-Rodrigo, Mme Taubira.
I. - L'article L. 762-4 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les exploitants agricoles exerçant leur activité dans le département de la Guadeloupe et de la Martinique, sur des exploitations dont la production comporte des résidus de chlordécone à des niveaux supérieurs aux limites maximales de résidus, sont, sans conditions de surface d'exploitation et pour la durée nécessaire à la décontamination des sols, exonérés de cotisations relatives aux prestations familiales, à l'assurance maladie, invalidité, maternité et à l'assurance vieillesse, dans des conditions fixées par décret. »
II. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement vise à exonérer, en Guadeloupe et en Martinique, les agriculteurs propriétaires de terrains contaminés par la présence de chlordécone, quelque soit la superficie cultivée, de cotisations relatives aux prestations familiales, à l'assurance maladie, invalidité, maternité et à l'assurance vieillesse dans des conditions fixées par décret. Cette mesure est à mettre en place pour la durée de la décontamination des sols.
Ces agriculteurs, aux productions devenues impropres à la consommation, sont privés de revenus et se voient confrontés à des contentieux sociaux et fiscaux inextricables du fait de cette catastrophe environnementale touchant une partie du territoire national. La pollution des sols de ces deux collectivités françaises d'outre mer est aujourd'hui avérée, et l'expression de la solidarité nationale vis à vis de nos compatriotes doit s'exprimer pleinement à l'occasion de ce premier texte de projet de loi portant sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat.
1- Une pollution avérée
Pesticide organochloré utilisé entre 1981 et 1993 employé pour le traitement des bananiers pour lutter contre le charançon, le chlordécone appartient à la même famille que le DDT, le lindane, le mirex. Il s'agit en effet d'un polluant organique persistant, extrêmement rémanent dans l'environnement qui peut s'avérer très toxique. Il a été classé comme cancérigène possible chez l'homme dès 1979 mais n'a été interdit qu'en 1993 et utilisé notamment aux Antilles.
Le chlordécone est une substance très stable, qui se dégrade difficilement et a eu tendance à s'accumuler dans les sols et les graisses.
Cette pollution se retrouve dans d'anciennes terres de cultures bananières rendues à la culture vivrière. Du fait de sa rémanence, le chlordécone est encore présent dans les sols et contamine certains produits cultivés sur ces terrains. Une quinzaine de sources d'eaux de captage sont aussi polluées par ce produit et sont progressivement traités au charbon actif. Rappelons que le capital premier de la Guadeloupe est constitué de son « or bleu », d'autant que cette collectivité porte pour nom originel « KARUKERA » l'île aux belles eaux. Par ailleurs, les végétaux les plus contaminés sont d'abord les légumes racines (dachine ou madère, malanga, igname, patate douce, manioc), en raison de la migration directe du chlordécone du sol vers la racine. Certains végétaux dont les parties comestibles sont proches de leur racine, ou qui sont en contact avec la terre, peuvent être aussi contaminés, mais à des niveaux plus faibles.
2- une classification des sols pollués
A la demande des ministères de l'agriculture, de la consommation et de la santé, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) a été chargée d'évaluer l'exposition alimentaire de la population antillaise au chlordécone et de proposer des limites maximales de contamination dans les denrées.
Par un arrêté du 5 octobre 2005 du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, sont considérés comme impropres à la consommation humaine les produits ci-après, sous quelle que forme que ce soit : 1° La viande de volaille qui présente une teneur en chlordécone supérieure à 50 µg/kg ; 2° Les denrées alimentaires d'origine animale, non citées au 1°, qui présentent une teneur en chlordécone supérieure à 200 µg/kg ; La teneur est déterminée par rapport au poids de produit à l'état frais.
Par un arrêté du 10 octobre 2005 du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie sont en outre considérés comme impropres à la consommation humaine les produits ci-après sous quelque forme que ce soit : 1° Les carottes, concombres, dachines (madères), ignames, melons, patates douces, tomates qui présentent une teneur en chlordécone supérieure à 50 µg/kg ; 2° Les denrées alimentaires d'origine végétale, non citées au 1°, qui présentent une teneur en chlordécone supérieure à 200 µg/kg. La teneur est déterminée par rapport au poids de produit à l'état frais.
On peut donc constater que les principaux produits touchés sont des cultures vivrières ou de diversification agricole.
3- Une solidarité nationale indispensable vis à vis des agriculteurs.
Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi. Considérant que ce projet de loi vise à promouvoir le développement économique des outre-mer et par voie de conséquence à stimuler l'emploi et le travail. Vu que l'emploi et le travail des agriculteurs de la Guadeloupe et de la Martinique se trouvent être passablement compromis par une catastrophe environnementale sans précédent, il est politiquement justifié et juridiquement établi que les exploitants agricoles n'ayant plus disponibilité de leurs outils de production, bénéficient d'exonérations de charges durant la période de décontamination de leurs exploitations.
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