Déposé le 25 septembre 2010 par : M. Giraud, M. Charasse, Mme Berthelot, M. Giacobbi, Mme Girardin, M. Likuvalu, Mme Jeanny Marc, Mme Orliac, Mme Pinel, Mme Robin-Rodrigo.
Supprimer cet article.
Cette mesure est autonome, elle n'est dictée par aucun impératif de transposition d'une quelconque directive européenne.
Outre le fait de porter atteinte aux droits fondamentaux des migrants, cette proposition d'allongement de la durée de rétention constitue une mesure inefficace et coûteuse.
En effet, selon le rapport 2009 du Comité interministériel de contrôle de l'immigration, de 2005 à 2009 la durée moyenne de rétention est demeuré remarquablement stable, très proche des dix jours.
Cette moyenne masque deux grandes tendances. D'une part les étrangers qui sont libérés par des juges ou reconduits dans les tous premiers jours de la rétention, et d'autre part, ceux qui restent en rétention durant 32 jours et ne sont généralement pas reconduits mais libérés.
- En ce qui concerne la première tendance, en 2008, 89 % des personnes présentées à l'embarquement n'ont pas comparu une seconde fois devant le juge des libertés et de la détention. Ce qui implique que les préfectures n'ont eu besoin que de 17 jours, au plus, pour rendre effectif l'éloignement des retenus.
- La seconde tendance concerne essentiellement des étrangers non documentés, qui n'ont pu être identifiés et que l'administration doit libérer (ou déférer devant le tribunal correctionnel) car elle n'est pas parvenue à obtenir un laissez-passer consulaire indispensable pour exécuter la mesure d'éloignement.
Le projet de loi présente l'allongement de la durée de rétention comme une solution à ce problème, arguant du fait que certains consulats demanderaient davantage que 32 jours pour délivrer des laissez-passer.
La pertinence de cet argument et l'efficacité de cette mesure ne résistent pas à l'analyse. En réalité, elle générera un coût encore plus élevé pour les finances publiques et conduira à allonger la durée de privation de liberté de milliers de personnes. Ceci pour les raisons suivantes :
- La part des laissez-passer consulaires délivrés après le délai de 32 jours est marginale (2.28% en 2008 et 2.9 % sur les neufs premiers mois de 2009).
- Dans les centres de rétention, les tensions seront aggravées et les gestes de désespoir aux lourdes conséquences risquent de se multiplier : automutilations, suicides et incendies par exemple.
- L'enfermement des étrangers génère un coût important pour les finances publiques (533 millions d'euros hors coût préfectures et juridictions), et mobilise de nombreux fonctionnaires au sein de la police mais aussi dans les préfectures et les tribunaux. L'allongement de la durée de rétention s'inscrit donc à contre-courant d'une politique générale de réduction des déficits et du nombre de fonctionnaires, sans qu'un bénéfice substantiel ne paraisse pouvoir en être retiré.
En somme, cette mesure coûteuse ne conduirait qu'à une augmentation à la marge du nombre de mesures d'éloignement exécutées. Elle aurait par contre un impact considérable sur des étrangers privés de liberté sur des durées plus importantes.
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