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Séance en hémicycle du 22 janvier 2008 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu, le 22 janvier 2008, de M. Pierre Moscovici, président de la commission d'enquête sur les conditions de libération des infirmières et du médecin bulgares détenus en Libye et sur les récents accords franco-libyens, le rapport fait au nom de cette commission par M. Axel Poniatowski.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi adopté par le Sénat, après déclaration d'urgence, relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi (n° 578, n° 600).

Cet après-midi, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

La parole est à Mme Pascale Gruny.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Monsieur le président, madame la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, mes chers collègues, il est du devoir d'un élu de participer au développement économique de son pays et je voudrais justement intervenir sur un sujet au coeur du projet de loi dont nous débattons actuellement et dont l'initiative revient aux élus locaux : les maisons de l'emploi.

Je souhaite en effet attirer l'attention sur la nécessité de conserver, et, au-delà, de pérenniser, l'action de cet acteur essentiel du service public de l'emploi aux côtés de l'ANPE et de l'UNEDIC.

Je soutiens l'architecture générale que le projet de loi tend à mettre en place et je souhaite que le rôle des maisons de l'emploi y soit reconnu.

La force des maisons est de fédérer en un même lieu tous les acteurs locaux d'un bassin d'emploi au plus près du terrain. Leur légitimité repose sur le fait qu'elles travaillent avec les acteurs traditionnels de l'emploi sur des projets adaptés aux besoins locaux, à un espace géographique cohérent où se réalise l'essentiel des rencontres entre l'offre et la demande. Une échelle adaptée, au point qu'elle permet même parfois d'anticiper, car c'est également un instrument d'observation des mutations économiques des territoires.

Les maisons de l'emploi sont bien souvent récentes et pourtant elles sont déjà bien accueillies et intégrées sur leur territoire et sont assimilées aux yeux des demandeurs d'emploi comme un maillon indispensable à leur recherche. Il en existe aujourd'hui 227 sur l'ensemble du territoire et les projets naissent un peu partout, à chaque fois dans un format unique parce que pris en main par des élus et des acteurs locaux qui connaissent les besoins et les caractéristiques de leur bassin d'emploi. C'est aussi au sein des maisons de l'emploi que les entreprises trouvent enfin un interlocuteur à leur écoute.

Dans ma circonscription de l'Aisne, à Saint-Quentin, les demandeurs d'emploi, les salariés et les créateurs d'entreprise savent que la maison de l'emploi constitue pour eux un véritable guichet unique au coeur de la ville.

Dans un département plus lourdement touché par le chômage que le reste du pays, l'attente est très forte en matière d'accompagnement dans la recherche d'un emploi et la maison qui s'est installée à Saint-Quentin sait répondre à cette attente en plaçant la formation, l'évaluation de l'employabilité des personnes et la simplification de l'accès des jeunes à l'emploi au coeur de ses priorités d'action. C'est une approche moderne et concrète de la lutte contre le chômage qui améliore les conditions de recherche d'emploi de tous les chômeurs.

En tant que membre de la mission d'information sur les maisons de l'emploi, j'ai pu constater leur activité et leur utilité dans la mission de service public de l'emploi et c'est pour cela que je soutiendrai les amendements déposés par la présidente de la mission, Marie-Christine Dalloz, qui visent à garantir la prise en considération des maisons de l'emploi dans la nouvelle architecture institutionnelle.

Bien sûr, je voterai, madame la ministre, votre projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Pinville

Madame la ministre, sous le titre de « réforme de l'organisation du service public de l'emploi », vous nous proposez en fait la fusion de l'ANPE et des ASSEDIC. Pourtant, ce n'est pas tout à fait la même chose !

Réformer le service public de l'emploi afin de répondre aux deux objectifs majeurs que vous a fixés le Président de la République, c'est-à-dire un taux de chômage à 5 % à la fin du quinquennat et une progression de 63 à 70 % du taux d'emploi au cours de la même période, cela aurait dû être, tout d'abord, concevoir le contenu de la réforme plutôt que d'en réaliser l'outil.

Réformer le service public de l'emploi, cela aurait dû être préciser le type d'accueil indispensable pour les publics très divers auxquels il s'adresse.

Réformer le service public de l'emploi, cela aurait dû être aussi le développement de la formation continue et le renforcement d'actions dans ce domaine, en liaison étroite avec 1'AFPA, l'éducation nationale, les associations, afin de permettre à chaque salarié d'évoluer au cours de son activité professionnelle, d'en changer s'il en ressent l'envie et de bénéficier d'un vrai droit à une formation qualifiante, comme les demandeurs d'emploi.

Réformer le service public de l'emploi, cela aurait dû être aussi une véritable orientation, et un véritable accompagnement de la personne en recherche d'emploi.

Réformer le service public de l'emploi, cela aurait dû être une véritable réforme de l'assurance chômage, qui respecte le paritarisme et indemnise correctement les personnes à la recherche d'un emploi.

Réformer le service public de l'emploi, cela aurait dû être enfin une véritable gouvernance territoriale et une clarification du rôle et des compétences de chacun.

Telle est, madame la ministre, notre conception d'un véritable service public de l'emploi.

Au lieu de cela, vous engagez une opération de communication pour faire croire à l'opinion que l'exécutif agit en vue d'aider les chômeurs à retrouver un travail beaucoup plus rapidement.

Tout cela est de l'affichage, car je ne vois pas en quoi l'instauration d'un guichet unique palliera le manque d'offres d'emploi, contribuera à l'augmentation de la croissance tant attendue par notre Président de la République et permettra de proposer aux chômeurs un emploi stable et rémunéré à hauteur des qualifications demandées, en leur offrant un véritable accompagnement.

En fait, avec cet ersatz de réforme, vous voulez surtout, madame la ministre, faire, à terme, des économies au détriment des agents et des demandeurs d'emploi.

Économies, tout d'abord, en matière de personnels. Ils ont tout à perdre dans cette opération : leur statut pour les agents de l'ANPE, le bénéfice de leur convention collective pour les salariés de l'UNEDIC. Par de nombreuses grèves, ils se sont d'ailleurs fortement mobilisés et ont exprimé à juste titre leurs plus vives inquiétudes depuis qu'ils ont eu connaissance de votre projet, et aujourd'hui encore, dans la région Limousin Poitou-Charentes, la mobilisation des personnels est de plus de 50 %.

Économies également en matière de lieux d'accueil. Il existe actuellement environ 1 600 sites, ANPE et ASSEDIC confondus. Or vous avez promis, madame la ministre, que 1 000 sites au moins resteraient ouverts. Le calcul est simple : cela signifie la fermeture de 600 sites, soit presque un tiers. Ces fermetures auront des incidences sur l'aménagement des territoires péri-urbains et ruraux, déjà sinistrés par la fermeture des bureaux de poste, des hôpitaux et des maternités, des tribunaux de proximité, des gendarmeries, et cela ne facilitera sûrement pas la vie de nombreux demandeurs d'emploi.

Mais ce qui me paraît le plus grave, c'est que, sous couvert d'un regroupement technique de deux entités, vous entendez mettre la main sur les fonds de l'assurance chômage, puisque vous transférez le recouvrement des cotisations chômage aux URSSAF.

Le Président de la République n'a-t-il pas dit lui-même dans sa lettre de mission : « Sur le modèle des new deals mis en oeuvre en Grande-Bretagne, vous engagerez rapidement, en associant, le cas échéant, des partenaires privés rémunérés sur la base d'obligations de résultats, les programmes spécifiques nécessaires pour aider ceux qui veulent travailler, mais rencontrent les obstacles objectifs les plus grands, à retrouver un travail ».

Comme vous avez, une nouvelle fois, agi dans la précipitation, le flou le plus total demeure sur de très nombreux points, et non des moindres : quelle sera la répartition des compétences avec les régions, qui ont un rôle essentiel en matière de formation professionnelle et de développement économique, en matière scolaire ? Quel sera le rôle de l'AFPA ? Quel sera le devenir des maisons de l'emploi, créées il y a deux ans à peine ? Quel sera le devenir des missions locales, des PAIO ? Quelle sera la gouvernance ?

Cette réforme ajoute de la confusion et n'apporte aucune cohérence et aucune logique à ce nouveau service public de l'emploi. Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons, madame la ministre, soutenir ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alfred Almont

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de réforme du service public de l'emploi soumis à notre examen affiche, nous en sommes bien conscients, l'objectif de réduire sensiblement le taux de chômage à l'horizon 2012, de mettre en oeuvre à cet effet une politique active qui facilite la rencontre entre demandeurs d'emploi et employeurs pour encourager la création d'emplois.

Debut de section - PermalienPhoto de Alfred Almont

C'est ainsi qu'il prévoit, dans un premier temps, en fusionnant l'ANPE et le réseau opérationnel des ASSEDIC, de créer un opérateur unique pour assurer à la fois le placement et l'indemnisation des demandeurs d'emploi, pour mettre l'accent sur l'accueil et l'accompagnement des demandeurs d'emploi en simplifiant leurs démarches.

Une telle politique, qui concerne en somme l'avenir du service public de l'emploi au sein de la République, pour ambitieuse qu'elle soit, ne saurait manquer de prendre en compte la situation particulière de l'emploi outre-mer, et bien sûr à la Martinique, sous peine d'apparaître comme discriminatoire.

Il est vrai que dans le cadre de la concertation qu'il a voulue, le Gouvernement a confié à la mission de l'IGAS le soin de réaliser un audit sur l'ensemble du territoire national en amont de ce grand projet de réforme. Il faut cependant regretter que cette mission ne se soit pas intéressée à l'outre-mer où pourtant, pour ne citer que cet exemple, les taux de chômage y sont encore extravagants – près de 28 % aux Antilles, et de 40 % à la Réunion – avec l'incidence que l'on sait sur la précarité.

Cette réforme, madame la ministre, suscite des préoccupations très légitimes de la part des salariés des ASSEDIC et de l'ANPE. Chez nous, ils s'interrogent, ils craignent des suppressions d'emplois du fait notamment du transfert de la collecte des cotisations d'assurance chômage à l'URSSAF, par ailleurs de nature, selon eux, à altérer la gestion paritaire du régime d'assurance chômage et ils appellent encore des garanties sur le statut futur des personnels.

Je suis, dès lors, conduit à vous faire part de mes observations, madame la ministre, sur certains points.

Lors de la présentation de ce projet de loi, vous avez fait référence au respect des partenaires sociaux en précisant que le régime d'indemnisation demeurait sous la responsabilité de l'UNEDIC et en indiquant que la gouvernance se ferait autour des deux financeurs, l'État et les partenaires sociaux. Cela est effectivement prévu dans votre projet, mais au niveau national uniquement.

Pour la Martinique et, d'une manière générale, pour les régions d'outre-mer, il est essentiel que le rôle et l'apport des partenaires sociaux soient précisés pour garantir la prise en compte des réalités économiques régionales et, bien entendu, les résultats recherchés. Les représentants des employeurs et des salariés apportent la connaissance des besoins des entreprises régionales, nous le savons. Ils peuvent ainsi orienter la politique régionale de l'emploi et de la formation. Pour illustrer mon propos, je rappelle que sur dix stagiaires formés par les ASSEDIC, huit sont reclassés. Le financement de l'assurance chômage provient des cotisations des employeurs et des salariés. Dans ces conditions, il est opportun que les financeurs aient également un rôle décisionnaire au plan régional.

Pour répondre à cet objectif de prise en compte des problématiques régionales, le positionnement des partenaires sociaux pourrait dès lors se situer au niveau d'une « instance régionale » de coordination du service public de l'emploi, avec un rôle décisionnaire, ayant pour mission de favoriser la concertation entre les différents acteurs et d'assurer la meilleure coordination des politiques de formation professionnelle et d'emploi. A cet égard, le Sénat a préconisé la création d'un « comité régional pour l'emploi », mais sa composition rappelle celle d'autres institutions du même type créées naguère et qui n'ont pas pu remplir leur mission faute de moyens administratifs et budgétaires. Le moment me paraît de ce fait venu d'instituer un véritable paritarisme qui permette aux représentations salariales et patronales d'assurer, avec les moyens nécessaires, l'administration de telles structures paritaires.

Sur un deuxième point, le nouvel organisme aurait notamment pour mission le reclassement des salariés privés d'emploi et l'analyse du marché du travail. Le transfert du recouvrement à l'ACOSS en 2012 aura pour conséquence la perte de la relation privilégiée à l'entreprise.

On peut craindre que le transfert du recouvrement ne soit de nature à pénaliser, à terme, ce nouvel organisme dans sa mission de reclassement et d'analyse du marché du travail. L'intervention de l'URSSAF dans la collecte des fonds peut en effet altérer les capacités et la fiabilité de l'UNEDIC à produire des statistiques et des analyses en matière d'emploi. Pour pallier cette difficulté, il est indispensable de garantir la mise à disposition du fichier des entreprises actualisé en temps réel. Cela nécessite la réalisation d'outils performants permettant ce transfert de données en continu.

On peut craindre en outre que le transfert du recouvrement à l'ACOSS en 2012 ne porte atteinte à la carrière des agents affectés aujourd'hui à cette fonction au sein de l'assurance chômage – 1 500 agents au niveau national, dix agents en Martinique. Il faut donc pouvoir garantir le repositionnement de ces agents dans le nouvel organisme, avec la mise en oeuvre de parcours de professionnalisation adaptés.

Le projet de loi prévoit enfin un droit d'option pour les agents de l'ANPE entre leur statut actuel et la convention collective du nouvel organisme. Les agents de l'assurance chômage n'ont pas ce droit d'option puisque c'est la convention collective du nouvel organisme qui leur sera appliquée, sans garantie de maintien des conditions actuelles. Si un amendement du Sénat prévoit le maintien de la convention collective de l'assurance chômage jusqu'au mois d'octobre 2010, il est nécessaire que, au-delà, les conditions de rémunération et de déroulement de carrière du personnel de l'assurance chômage soient garanties, sans préjuger de l'issue des négociations.

Debut de section - PermalienPhoto de Alfred Almont

Tendre à baisser le taux de chômage dans nos régions éloignées, dans une proportion analogue à celle qui est affichée, pourrait relever de la méconnaissance de la situation actuelle de l'emploi qu'elles connaissent.

Le dispositif d'assurance chômage doit, dans ces conditions, garder sa pleine autonomie avec l'obligation pour les gestionnaires de négocier enfin un avenant spécifique et dérogatoire, tel que cela est préconisé par le décret du 27 février 1980, et qui tient compte de notre contexte économique et social.

Debut de section - PermalienPhoto de Alfred Almont

Il s'agit plus que jamais de rationaliser un véritable service public de l'emploi au niveau régional. Je reconnais, madame la ministre, que la tâche n'est pas simple, mais le moment nous paraît venu de prendre toute la mesure de ce défi qu'ensemble nous sommes invités à relever et qui consiste à assurer à la fois la cohérence et l'efficacité du service public de l'emploi au niveau régional.

Je souhaite vivement, en conséquence, que les dispositions de ce projet de loi fassent vraiment l'objet d'adaptations appropriées.

Debut de section - PermalienPhoto de Alfred Almont

Aussi apparaît-il nécessaire d'engager une concertation avec l'ensemble des parties concernées. Je vous fais confiance, madame la ministre, pour la démarche à mettre en oeuvre à cette fin. Bien entendu, je soutiens votre stratégie qui consiste à encourager la création d'emplois, à favoriser l'accompagnement des demandeurs d'emploi, en bref à moderniser le service public de l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, j'aurais tendance à considérer qu'un projet de loi concernant l'emploi devrait, au-delà de nos divergences politiques, nous imposer une certaine complicité intellectuelle.

Se donner comme objectif de parvenir au plein-emploi d'ici à 2012, voilà une ambition que je serais prêt à partager ! Je me sens d'autant plus concerné que la Martinique, c'est 23,6 % de chômeurs, contre 8 % pour la France.

C'est donc avec esprit ouvert que j'ai procédé à un examen de votre projet, madame la ministre. Aussi, permettez-moi de vous dire ce qui me semble opportun et fondé et ce qui, de mon point de vue, relève de ce que Jacques Attali appelle les « conservatismes généralisés » dont les conséquences risquent d'être catastrophiques, car ils témoignent d'une vision peu moderne d'une démocratie sociale et économique. Je ne mettrai l'accent que sur quelques éléments.

Tout d'abord, votre réforme consiste en une recomposition d'outils existants. Elle ne s'attaque pas au mal profond qu'est l'inexistence d'une politique publique territoriale de l'emploi. Si elle entreprend la fusion de certains outils de la politique publique dans le domaine de l'emploi, elle n'en assume pas l'indispensable réorganisation d'ensemble.

Ensuite, votre projet ne remet pas en cause la séparation artificielle, jusqu'alors entretenue, entre les politiques de développement économique, de formation et d'insertion, y compris par l'économique, alors que la loi d'août 2004 a, sur ces différents points, conforté la place des territoires. L'arsenal législatif existant et tant la loi précitée que la révision constitutionnelle de mars 2003 vous offraient pourtant l'opportunité d'une démarche d'expérimentation compatible avec le souci partagé d'une évaluation de toute nouvelle politique avant d'en généraliser la portée.

Enfin, votre démarche révèle une confusion entre l'outil et la méthode. Je m'interroge en effet sur les fonctions réelles que vous entendez attribuer à ce nouvel outil. Est-ce un véritable instrument stratégique ? Si oui, quelle politique de l'emploi va-t-il servir ? Est-ce au contraire un outil d'apurement qui, par pure éviction statistique, aurait pour objet de diminuer en affichage le chômage ? Les mesures annoncées de suppression des droits des intéressés après deux refus d'offre d'emploi « valable » ou « acceptable » accréditent fortement cette idée et participent d'une volonté manifeste de stigmatiser les demandeurs d'emploi. Mais est-ce un hasard ? Déjà en Martinique, on a proposé à un comptable ayant perdu son emploi dans une exploitation agricole une activité d'ouvrier agricole au motif qu'il s'agit du même secteur d'activité.

Au-delà de ces considérations de fond, le projet gouvernemental remet en cause le paritarisme et procède à une recentralisation de la politique de l'emploi proche d'un processus d'étatisation libérale. Pourquoi transférer le recouvrement des cotisations chômage à l'URSSAF alors que cette structure est dépourvue d'outils statistiques ? De même, le dispositif actuel ne comporte aucun document fiable pluriannuel. Vous me répondrez que le SPER – service public de l'emploi régional – en fait fonction. Malheureusement, ce service ne comporte en réalité et sur le terrain qu'un intérêt limité. Quelles sont les obligations de l'État en matière de financement ? Comment évoluera le statut du personnel des ASSEDIC ? Voilà résumées quelques-unes des interrogations que suscite votre démarche.

Mais votre réforme bute sur une vraie question, celle de la légitimité de votre politique de l'emploi. Aujourd'hui, les politiques publiques en faveur de l'emploi souffrent d'un déficit global de pilotage territorial alors que les politiques développées par l'État, les régions, les départements ou les communes sont à la fois insuffisamment coordonnées et insuffisamment connectées aux réalités économiques et sociales des différents bassins d'emploi. L'absence de réelles stratégies territoriales assurant l'articulation entre ces différents éléments empêche dès lors une politique cohérente et efficace, en matière tant de lutte contre le chômage que de développement économique.

Votre projet laisse de coté cette considération essentielle. Il ne tient pas compte des effets de la réforme de l'architecture territoriale faite par votre majorité en août 2004. Il ne donne pas à la région la place qui devrait être la sienne dans la réforme engagée.

Madame la ministre, chers collègues, les régions sont les échelons pertinents pour définir et mettre en pratique cette stratégie concertée. Elles sont à la fois suffisamment vastes pour animer des projets ambitieux de développement et suffisamment restreintes pour coller plus directement aux spécificités économiques structurelles propres aux différents territoires. Cette démarche doit être complétée par un instrument global de planification territoriale qui pourrait prendre la forme d'un schéma régional de l'emploi n'ignorant aucun niveau de collectivité, notamment les communautés d'agglomération et les communes. Ce sont là des exigences essentielles. Je n'ai pas trouvé un tel mouvement dans votre texte et c'est là l'une de ses nombreuses carences.

Au final, après avoir examiné votre projet avec l'ouverture d'esprit qui est la mienne, j'en conclus qu'il s'agit moins d'une simple réforme de l'outil que d'une étape essentielle du processus de dérégulation du marché du travail que vous mettez progressivement en oeuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Ce faisant, vous laissez de côté un certain nombre de principes indispensables à une économie solidaire, sachant que le plein-emploi n'est pas pour demain. C'est sous le bénéfice de ces considérations que j'ai proposé d'amender votre projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Mathis

Le Président de la République l'avait promise, le Gouvernement y a travaillé. Dans moins de quarante-huit heures, la majorité de cette assemblée l'aura adoptée, comme le Sénat il y a quelques jours. Il s'agit de la réforme de l'organisation du service public de l'emploi avec pour objectif de ramener le taux de chômage autour de 4 ou 5 % pour 2012. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Il est, de façon évidente, impératif de faire en sorte que l'offre et la demande de travail soient mises en adéquation de façon plus satisfaisante. L'objectif est donc double.

D'abord, il s'agit d'améliorer le service rendu aux demandeurs d'emploi en simplifiant leurs démarches et en consacrant plus de moyens à leur accompagnement.

Ensuite, cette fusion doit améliorer le service rendu aux entreprises qui rencontrent des difficultés de recrutement.

Parmi les problèmes pratiques de la fusion figurent ceux relatifs au statut et au transfert des personnels, au maillage du territoire national par la nouvelle institution et au durcissement éventuel des conditions d'indemnisation des chômeurs. En effet, la coexistence de plusieurs statuts du personnel sera pour le moins compliquée à gérer.

Les agents de l'ANPE sont en grande majorité des contractuels de droit public à durée indéterminée, tandis que les personnels de l'assurance chômage sont des salariés de droit privé régis par une convention collective. Le texte prévoit que les statuts actuels des personnels de l'ANPE et des ASSEDIC seront conservés, jusqu'à la mise en place de la convention collective de la nouvelle institution.

Cette réforme suscite aussi une préoccupation légitime chez les salariés des ASSEDIC qui s'interrogent sur le devenir de leurs collègues affectés aux tâches de recouvrement.

Le délai prévu avant l'entrée en vigueur du transfert devrait permettre d'organiser en douceur le reclassement professionnel de ces salariés soit auprès des URSSAF, soit au sein du nouvel opérateur dans d'autres fonctions, ce qui nécessitera de les former.

Comme vous l'avez indiqué, madame la ministre, la fusion des réseaux ne devrait pas entraîner de réduction d'effectifs et il ne devrait pas y avoir de mobilité géographique imposée.

Enfin, la prise en compte de la différence des cultures des salariés des deux pôles de la nouvelle institution ne devra pas être négligée.

Pourtant, nombre de responsables de collectivités locales manifestent des inquiétudes à l'égard de cette réforme, craignant des fermetures d'agences,…

Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Évidemment !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Mathis

…et s'interrogent sur la nécessité de maintenir les maisons de l'emploi préconisées par le précédent gouvernement.

Les maisons de l'emploi ont en effet le même objectif que la réforme à venir du service public de l'emploi. Les élus craignent que l'empilement des structures n'aboutisse à la mise en place d'une usine à gaz (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) et ne fasse naître une concurrence néfaste au lieu d'une dynamique bénéfique. Madame la ministre, puissiez-vous rassurer ces élus !

II semble, en effet, que si la fusion donne lieu à des inquiétudes concernant le maillage territorial de la nouvelle institution, il faut tout faire pour que le texte permette de les lever puisque l'objectif est bien de disposer sur l'ensemble du territoire d'implantations polyvalentes et non de réduire la présence du service public de l'emploi dans les zones rurales.

Par ailleurs, les trois principaux syndicats de l'ANPE craignent que cette réforme ne se traduise par des « pressions sur les demandeurs d'emploi pour qu'ils acceptent n'importe quel travail ». Le Président de la République a en effet demandé la mise en place d'un calendrier pour l'instauration de sanctions à l'encontre des chômeurs qui refuseraient deux offres d'emploi dits acceptables.

A ce sujet, il n'existe pas en France de critères précis – type de contrat, niveau de salaire notamment par rapport à celui de l'ancien emploi, durée du travail, etc – définissant un emploi « acceptable ». Tous les pays européens ont pris des mesures pour suspendre les droits des demandeurs d'emploi ayant décliné plusieurs offres valables. La France ne peut pas se permettre d'être une exception dans ce domaine. En effet, on constate statistiquement des effets d'accélération du retour à l'emploi quand l'échéance des droits à indemnisation approche.

La fusion de l'ANPE et des ASSEDIC marque une première étape de la réforme du marché du travail qui a besoin d'être complétée dans les prochains mois par une réforme du contrat de travail et de notre système de formation professionnelle. En effet, créer des emplois ne suffira pas. Encore faut-il qu'ils puissent être pourvus ! Des chiffres ont été cités : environ 500 000 offres ne sont pas pourvues.

Nous le voyons bien, les uns et les autres, dans nos circonscriptions aujourd'hui, nombre d'entreprises ont beaucoup de difficultés à trouver les personnes susceptibles d'occuper les emplois disponibles à la fois en qualité et en quantité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Mathis

Notre pays est confronté à un défi considérable, que nous devons tous ensemble relever. Pour cela, il faut améliorer notre système de formation.

Pour terminer, je me réjouis que le texte qui nous est soumis, et qui devrait être judicieusement amendé au cours de nos débats, soit largement propice à l'emploi, pour le bien du plus grand nombre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Marsac

Madame la ministre, une évolution des missions et une réforme de l'organisation du service public de l'emploi sont nécessaires. Mais les injonctions du Président de la République, qui visent à faire baisser le taux de chômage à tout prix et à répondre immédiatement à l'impatience des entreprises, vous conduisent à une improvisation totale. Votre projet ne repose sur aucune évaluation réalisée avec l'ensemble des parties prenantes : partenaires sociaux, personnels du service public, acteurs de l'insertion ou demandeurs d'emploi eux-mêmes.

Ancien responsable national d'une fédération d'insertion par l'activité économique, j'ai entendu, durant dix-huit ans, tous les reproches faits par de nombreux chômeurs – y compris d'anciens cadres – à un système qui écrase par sa complexité administrative, qui déstabilise par ses injonctions contradictoires, qui angoisse en maintenant une pression permanente. Or, contrairement à ce qui vient d'être dit et à ce que beaucoup croient, une pression très forte sur des chômeurs conduit plus souvent à la rue et à l'exclusion qu'à l'intégration et à l'emploi. On ne peut pas s'apitoyer chaque hiver sur les SDF et ne pas considérer que leur situation est aussi, en grande partie, le signe de l'échec des politiques publiques de l'emploi. Comme tous les députés, j'entends, dans mes permanences, les histoires de vie et les parcours de licenciés économiques, de chômeurs de longue durée et de travailleurs très précaires, qui attendent des réponses concrètes et durables.

Madame la ministre, votre réforme s'adresse-t-elle à l'ensemble des demandeurs d'emploi ? Si oui, pourquoi ne pas attendre les résultats du Grenelle de l'insertion qui devrait, s'il est important à vos yeux, avoir aussi un impact sur l'organisation du service public de l'emploi ? Comment ne pas penser que, puisque votre objectif principal est de réduire le taux de chômage à 5 %, vous concentrez vos efforts sur la catégorie 1 des demandeurs d'emploi, la seule que prennent en compte les statistiques officielles ?

Par ailleurs, seuls 47 % des demandeurs d'emploi comptabilisés sont indemnisés par les ASSEDIC. Outre les incertitudes sur le résultat de la négociation d'une nouvelle convention UNEDIC, qui restreindrait encore les indemnisations, comment ne pas voir que vous concentrez le service public d'État sur ces chômeurs indemnisés plus proches de l'emploi, laissant encore davantage aux collectivités territoriales et locales la responsabilité du devenir des chômeurs de longue durée et des exclus du marché du travail ?

Il est sans doute utile de rappeler que l'indemnisation relève encore d'un système d'assurance payé conjointement par l'employeur et le salarié, et qu'il s'agit, non d'une assurance privée individuelle, mais d'un système de solidarité collective, qui mutualise le risque chômage que court l'ensemble des salariés du secteur privé. On pourrait croire parfois, à lire ou à entendre certaines déclarations, qu'on veut accréditer dans l'opinion l'idée selon laquelle une générosité exceptionnelle serait accordée par la nation à des chômeurs qui feraient trop peu d'efforts pour s'insérer, de sorte qu'il faudrait durcir encore les conditions de maintien de la couverture UNEDIC. Nous ne sommes pas hostiles à l'exigence individuelle, mais celle-ci doit trouver son cadre dans un accompagnement beaucoup mieux structuré et dans une sécurité financière durable. Il ne faut jamais oublier que le chômage est en soi un traumatisme qui déstabilise profondément, y compris ceux qui se croient les plus forts.

Peut-être est-il aussi utile de rappeler que le préambule de notre Constitution indique très précisément que « tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. » Nous sommes déjà très en deçà de cette exigence commune. Jusqu'où comptez vous aller dans la négation de ces principes fondamentaux ?

En fait, dans votre réforme, vous vous intéressez peu aux chômeurs eux-mêmes, vous préoccupant essentiellement du marché du travail, du « stock » et des « flux », comme on dit à l'ANPE. Vous ciblez les tensions sur ce marché du travail, sans prendre en considération que la moindre attractivité des métiers dits « en tension » est due essentiellement aux mauvaises conditions de travail, à la précarité, à la faiblesse des rémunérations, aux problèmes de mobilité et de logement saisonnier, et, plus globalement, à la faible considération sociale accordée à ces métiers. D'ailleurs tous ceux qui dissertent, ici et ailleurs, sur l'importance d'y pousser les chômeurs, à coups d'injonction et sous la menace de supprimer leurs moyens d'existence, se garderaient bien de le faire pour leurs propres enfants en recherche d'emploi. Dissertation, d'un côté ; réalité, de l'autre. Métiers de la réussite sociale, d'un côté ; métiers de la survie économique, de l'autre.

Madame la ministre, le débat portera durant deux jours sur l'institution, sur le devenir des personnels du service public, sur les besoins des entreprises, sur votre vision trop abstraite, à mon sens, du marché du travail, et sur l'option portée par des entreprises qui exigent du service public de l'emploi la mise à disposition, en flux tendu, de la partie la plus réactive et la plus mobile des demandeurs d'emploi. Mais, je souhaite, chers collègues, que nous remettions les besoins et la réalité des demandeurs d'emploi, particulièrement des plus fragiles, au centre de nos choix et des missions du service public de l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Cosyns

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est soumis a pour objectif de mettre en place un service public de l'emploi efficace, permettant à moyen terme le retour au plein-emploi. J'évoquerai quatre points qui me semblent particulièrement importants pour la réussite de ce projet.

Le premier touche à la nécessaire unité des implantations. En effet, c'est au quotidien que l'ANPE et l'ASSEDIC doivent travailler ensemble, afin de créer une culture commune du travail au service des chercheurs d'emploi et des entreprises à la recherche de main-d'oeuvre. Le regroupement permettra par ailleurs une simplification des démarches, avec un véritable guichet unique. Au-delà du regroupement des agences de l'ANPE et des ASSEDIC, il faut, à mon sens, élargir ce regroupement à toutes les structures intervenant dans l'accès au marché du travail, comme les PAIO ou les missions locales.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Cosyns

Toutefois, élu d'un territoire rural, j'appelle votre attention, sur le fait que la fusion ne saurait, servir de prétexte à un recul du service public de l'emploi dans les zones rurales.

Par ailleurs, je souhaite que cette fusion participe à une amélioration des outils mis à la disposition des conseillers, en particulier au niveau des systèmes informatiques. Je n'évoquerai qu'une anecdote, qui a peu fait rire les collaborateurs de nos collègues non réélus en juin dernier. Le ROME, le répertoire opérationnel des métiers, qui est encore en cours d'actualisation, prévoit dans sa version papier un code pour le métier d'attaché parlementaire. Toutefois, lorsque ces collaborateurs parlementaires se sont inscrits, le code ROME n'est pas apparu. En effet, la transcription dans le système informatique prendra près de deux ans. Une telle situation est inacceptable, pas seulement pour nos collaborateurs, mais aussi pour tous les chercheurs d'emploi. Alors, profitons de la fusion pour renforcer l'efficacité des systèmes d'information utilisés dans la future structure.

Un autre dysfonctionnement que je souhaite voir gommé tient à la formation des conseillers. En effet, j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer dans cet hémicycle la proposition d'emploi d'un chauffeur livreur, qui avait été faite à une personne handicapée visuellement. En plus du bon sens, il importe qu'il y ait un plus grand nombre de conseillers mieux formés tant aux métiers qu'à la psychologie dans leurs relations avec les chercheurs d'emploi. En effet, le marché du travail évolue rapidement et la nouvelle entité devra mettre en oeuvre une politique de formation continue, afin que ses conseillers soient parfaitement au fait des métiers, des attentes des entreprises et des chercheurs d'emploi.

Il existe, au sein de l'ANPE et de l'UNEDIC, des personnes formidables, qui font tout leur possible pour aider les chercheurs d'emploi. Il faut qu'elles trouvent dans la nouvelle structure des outils leur permettant de rester aussi investis et aussi efficients dans leur travail. Il faut également que chacun parvienne au niveau et à l'esprit de service qui doit régner dans la nouvelle entité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Madame la ministre, nous ne sommes pas hostiles au principe d'une réforme du service public de l'emploi, qui n'est pas, comme vous l'avez dit au début de la discussion générale, madame la ministre – dans un lapsus assez révélateur de vos intentions – un marché public de l'emploi.

Oui, nous sommes favorables à une réforme du service public de l'emploi, à condition qu'elle permette véritablement une amélioration du service rendu aux demandeurs d'emploi, et qu'elle se traduise par un « plus » pour les personnels de l'ANPE et des ASSEDIC concernés par la fusion. Or nous en doutons fortement, car vous avez créé, une fois de plus, après la loi TEPA et le projet de loi sur les heures supplémentaires, une usine à gaz bureaucratique, qui n'atteint pas ses objectifs. Ces derniers jours, j'ai rencontré dans ma circonscription, à Saint-Étienne, dans la Loire, les personnels de l'ANPE et des ASSEDIC. Ils étaient, pour ces derniers, 75 % à faire grève dans la région Rhône-Alpes, le 8 janvier. Ils ne comprennent ni le sens ni la finalité de votre réforme. Ils ne comprennent pas où vous voulez les emmener, sinon vers des économies d'échelle en moyens humains et en moyens budgétaires. Vous conviendrez que c'est là un problème, car ce sont eux, les acteurs de terrain, qui devront mettre en oeuvre votre réforme, et c'est peu de dire que, pour le moment, ils y vont à reculons.

Le combat qu'ils mènent ne porte pas seulement sur la garantie de leur statut. Ils auraient souhaité de votre part une meilleure compréhension de leurs différents métiers, et une vision claire de l'avenir de leur mission. En voulez-vous un exemple ? Les 1 500 personnes du service employeur chargé du recouvrement des cotisations d'assurance chômage des ASSEDIC représentent à peu près 160 emplois en région Rhône-Alpes. Vous voulez confier ce service à l'URSSAF. Mais leur rôle n'est pas simplement d'encaisser des chèques – d'ailleurs, cette tâche est aujourd'hui sous-traitée –, mais, pour 95 % de leur activité, d'analyser des comptes, d'accompagner les entreprises de leurs conseils, de gérer des aides de retour à l'emploi ou le volet formation des reclassements pour les demandeurs d'emploi. Surtout, ce service fait aujourd'hui de la prospective sur les bassins de main-d'oeuvre, au plus près des réalités locales. Dans ce cadre, il produit un outil statistique indispensable pour le service public de l'emploi au niveau local, qui est à la disposition des pouvoirs publics et de l'INSEE. L'URSSAF, vous le savez, est incapable de remplir de telles missions.

Les personnels de l'ANPE et des ASSEDIC sont également inquiets pour la couverture territoriale du service public de l'emploi à terme. Vous avez évoqué des plateformes intégrées, avec une taille critique de 40 à 45 personnes pour les futurs sites fusionnés. Mais que deviendront, dans les villes de taille moyenne, les sites de dix ou vingt personnes, comme ceux de Firminy, Andrézieux ou Montbrison, dans la Loire ? Allez-vous, après la casse du service public de la justice, organiser celle du service public de l'emploi dans nos territoires ?

Quant à savoir si cette réforme se traduira par un « plus » pour les demandeurs d'emploi, là encore, nous éprouvons de sérieux doutes. Ainsi, il existe aujourd'hui, dans les ASSEDIC, des commissions paritaires, au niveau local, chargées d'examiner les recours des demandeurs d'emploi, en particulier quand ils ont perçu des sommes indues. Elles examinent au plus près des dossiers individuels et parviennent huit fois sur dix à trouver une solution adaptée aux demandeurs d'emploi concernés. Ces commissions paritaires, qui fonctionnaient comme des amortisseurs au plan local, ne figurent plus dans la nouvelle organisation que vous proposez. Leur disparition se traduira, pour les demandeurs d'emploi, par moins de garantie.

Plus largement, la loi va accroître, comme la lettre de mission du Président de la République vous incitait à le faire, le recours aux organismes privés de placement des demandeurs d'emploi, qui seront rémunérés sur la base d'une obligation de résultats. Traduisez : plus de pression sur les chômeurs pour faire du chiffre, ajoutez-y la nouvelle règle concernant le refus de deux offres valables d'emploi, et vous aurez tous les ingrédients d'un service public de l'emploi qui devient l'instrument d'un marché du travail à deux vitesses, délaissant les personnes les plus en difficulté et entraînant une déqualification massive.

Moins de garantie, plus de pression sur les demandeurs d'emploi : nous sommes bien loin de l'objectif d'amélioration du service public de l'emploi que vous affichez. Votre projet fait l'impasse sur l'essentiel, auquel Jean-Patrick Gille est revenu tout à l'heure : le retour à un emploi de qualité, c'est-à-dire à un emploi stable, durable, bien rémunéré, qui garantisse des perspectives d'évolution professionnelle et de bonnes conditions de travail. En somme, votre texte est une formidable occasion manquée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Scellier

Qu'il me soit permis, madame le ministre, de me réjouir que vous nous ayez entendus, en notre qualité de représentants des départements, et de me féliciter de l'amendement adopté par le Sénat, qui intègre un représentant des collectivités territoriales au conseil d'administration de l'institution nationale publique à créer.

Ainsi, le rôle des départements est-il mieux reconnu. Et ce n'est que justice car, depuis l'origine, il existe un réel partenariat entre ces derniers et l'ANPE dans le cadre de la gestion du RMI. Cette coopération peut aller jusqu'à se traduire par la présence d'agents de l'ANPE au sein des services départementaux afin d'améliorer la collaboration dans la recherche d'emplois à destination des RMIstes.

À ce sujet, je me félicite qu'ait prévalu, lors de la refonte du RMI, la logique forte qui vise à mettre enfin l'emploi au centre du dispositif. En effet, un grand nombre de départements, qui assurent maintenant le pilotage du dispositif du RMI, ont fait du retour à l'emploi des RMIstes une priorité, répondant en cela au souhait de la très grande majorité des intéressés.

Par ailleurs, le lancement, à titre expérimental, du revenu de solidarité active apparaît, aux yeux de beaucoup, comme une démarche essentielle pour réussir le retour à l'emploi des publics en difficulté et renforce, par là même, la nécessité de partenariat entre les départements et le futur réseau public de l'emploi. Il est donc logique et nécessaire que des liens privilégiés puissent exister entre l'institution départementale, qui est un acteur majeur et reconnu de la cohésion sociale, et le futur établissement qui naîtra de la fusion de l'ANPE et de l'ASSEDIC.

J'ai bien noté qu'une mission a été confiée àM. Jean-Paul Anciaux, sur la place des maisons de l'emploi dans le nouveau dispositif. Je voudrais, comme l'ont souhaité plusieurs de mes collègues, que la réforme en cours, qui permettra d'améliorer l'accompagnement des demandeurs d'emploi, puisse aussi, à terme, concerner la multitude d'acteurs et d'organismes chargés d'accompagner les jeunes dans leur orientation et leur insertion et dont l'efficacité n'est malheureusement pas toujours évidente. L'action de ces organismes – comme les missions locales ou les permanences d'accueil, d'information et d'orientation, les PAIO – qui agissent en faveur de l'insertion professionnelle des jeunes et de leur accès à l'emploi doit pouvoir être évaluée et éventuellement réformée, afin de répondre pleinement aux attentes fortes des familles à l'égard des pouvoirs publics, pour que les jeunes puissent plus facilement accéder à un emploi. La lisibilité de ces actions est souvent loin d'être suffisante, parfois en raison même de leur multiplication.

Le mouvement de réforme engagé avec la fusion de l'ANPE et de l'ASSEDIC doit donc se poursuivre pour une plus grande efficacité du réseau de l'emploi et aller jusqu'à l'intégration dans une organisation commune de tous les acteurs chargés spécifiquement de l'accompagnement des jeunes.

Cet objectif est d'ailleurs envisagé par le Gouvernement puisqu'il est indiqué dans l'exposé des motifs du projet de loi que le dispositif nouveau a aussi comme but de resserrer les liens entre les différents réseaux d'accueil et d'accompagnement des personnes sans emploi, ce qui doit, bien sûr, concerner tous les publics, sans distinction d'âge.

Une meilleure coordination – et même l'intégration – de ces dispositifs dans un ensemble unique devrait permettre d'améliorer le service rendu aux jeunes, tout en évitant les doublons, et renforcer ainsi l'efficacité des moyens pour favoriser leur accès à l'emploi.

En un mot, on ne peut que se réjouir de la présentation de cette réforme devant notre assemblée, tout en regrettant qu'il n'ait pas été possible de la mener à bien plus tôt ; mais mieux vaut tard que jamais ! Bien sûr, je voterai ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Robin-Rodrigo

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, présentée dans le souci de simplifier les démarches des demandeurs d'emploi, la fusion de l'ANPE et des réseaux de l'UNEDIC s'apparente en réalité à une volonté de faire des économies sur le dos du service public de l'emploi.

Certes, nous appelons de nos voeux depuis longtemps la simplification des démarches administratives qui jalonnent le parcours laborieux des chômeurs, ballottés entre antennes locales de l'ANPE, missions locales, agences de l'ASSEDIC…

Pour autant, la nécessaire réforme du service public de l'emploi ne sera pas au rendez-vous de ce texte, plutôt inspiré par l'expérience britannique des jobs centers, dont on oublie de dire qu'ils ont contribué à développer la précarité Outre-Manche. Et je n'y trouve aucune réponse qui permette de faire passer le chômage sous la barre des 5 % à l'horizon de 2012.

En effet, la réduction du chômage ne se décrète pas, encore faut-il qu'il y ait création d'emplois ! Et déjà, les mesures adoptées par votre majorité, dans le cadre de la loi TEPA, ne font plus illusion. Le « travailler plus pour gagner plus » ne s'appliquera pas aux oubliés de votre politique. Je pense aux salariés à temps partiel, à ceux qui ne sont pas aux 35 heures, à ceux dont le temps de travail est annualisé, aux chômeurs, et à bien d'autres encore.

Au contraire, les déclarations du Président de la République, agitant le chiffon rouge des chômeurs- fraudeurs, font plutôt craindre un recul de l'ensemble des garanties collectives du monde du travail.

Ce projet de loi aidera-t-il les chômeurs à trouver un emploi stable et à mieux se former ? Non ! Le cadre est clair, il s'agit d'organiser un marché du travail à deux vitesses. D'un côté, une première réforme, conduite par Martin Hirsch, concerne les minima sociaux et la généralisation du revenu de solidarité active, payé par les conseils généraux. De l'autre, une seconde réforme s'adresse aux chômeurs les plus employables. Selon la déclaration du Président de la République, ils seront obligés d'accepter n'importe quel travail après deux offres d'emplois « valables ou acceptables ». Madame la ministre, je vous pose la question, qu'entend-on réellement par ces mots « valables » et « acceptables »?

Pour simplifier les démarches des demandeurs d'emploi, il n'est nul besoin de fusionner l'ANPE et l'ASSEDIC. Le principe du guichet unique pouvait se généraliser à la faveur du développement des maisons de l'emploi, outil chargé de cordonner les actions menées dans le cadre du service public de l'emploi. Mais, un an après leur création en 2005, le Gouvernement a choisi de se désengager et parfois de geler leur conventionnement, faute de financement !

Il est vrai que précipitation et urgence guident l'action gouvernementale, pressée par la volonté de réformer à tout prix. C'en est à un tel point que le Gouvernement réforme ce qu'il n'a pas encore fini de mettre en place !

Oui, une réforme du service public de l'emploi est nécessaire, c'est l'évidence même. Des dispositifs d'accompagnement vers l'emploi ont été multipliés sans beaucoup de succès ce qui aboutit, aujourd'hui, à un service public de l'emploi éclaté et complexe qui ne gagne, ni en efficacité, ni en lisibilité. À l'ANPE, chargée du placement des demandeurs d'emploi, s'ajoutent l'UNEDIC qui gère leur indemnisation, l'AFPA qui propose des actions de formation, les services de l'État chargés de mettre en oeuvre la politique de l'emploi, les missions locales pour les moins de 25 ans, les plans locaux pour l'insertion et l'emploi ou PLIE, pour les plus éloignés de l'emploi, les conseils généraux pour l'insertion des RMIstes, les conseils régionaux pour le développement économique et la formation, et j'en passe.

Debut de section - PermalienPhoto de Benoist Apparu

C'est bien pourquoi qu'il faut rationaliser tout cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Robin-Rodrigo

Vous auriez été mieux inspirés de mettre à plat tous ces dispositifs, d'en évaluer leur efficacité, et d'engager une véritable réforme.

Le vrai problème reste la pénurie d'offres d'emplois correctement rémunérés et l'insuffisance d'offres de formations qualifiantes. Ce projet de loi n'y répond pas. Les radicaux de gauche aspirent à une véritable réforme du service public de l'emploi et considèrent que ce projet de loi est dangereux car il est malheureusement dans la droite ligne de ce que réclame le MEDEF : le détricotage de la protection sociale et du droit du travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est présenté aujourd'hui organise la fusion de l'ANPE et l'ASSEDIC pour créer, enfin, un service public unifié de l'emploi.

C'est une mesure que j'approuve pleinement, étant très favorable à la politique des guichets uniques, qui organisent les services publics en fonction des usagers et non en fonction du confort du fonctionnement des administrations. Malheureusement, j'ai l'impression que nous ne nous dirigeons pas forcément vers une amélioration du service public de l'emploi. Les discussions sur ce texte sont d'ailleurs éloquentes,

On a parlé de l'organisation d'une nouvelle entité administrative de droit public et débattu longuement pour savoir qui allait la piloter ou la contrôler. On a aussi beaucoup évoqué le statut du personnel, ses avantages, sa convention collective et le « droit d'option ». Mais, j'ai envie de dire : « Et les usagers dans tout cela ? »

Quid du service que l'on entend rendre, et de la philosophie de l'action de cette nouvelle entité ? Jusqu'à maintenant, pas grand-chose, pour ne pas dire rien. C'est pourtant là l'essentiel ! N'oublions pas que, bien au-delà du sauvetage de la convention collective, revendiqué par l'UNEDIC, le nouvel organisme aura pour tâche prioritaire l'accueil, l'orientation, le placement et l'accompagnement des demandeurs d'emploi.

Chers collègues, nous avons tous reçu, dans nos permanences, des demandeurs d'emploi, perdus dans le maquis administratif, radiés pour s'être trompé et avoir envoyé un document à l'ANPE, alors qu'il fallait l'expédier à l'UNEDIC, ou encore, des demandeurs d'emploi qui ont manqué un rendez-vous avec leur conseiller ANPE, parfois pour d'excellentes raisons, par exemple à cause d'un entretien d'embauche, et qui se trouvent radiés quelques jours plus tard, avant même d'avoir pu s'expliquer.

J'ai dû traiter le cas d'un demandeur d'emploi, travailleur à temps très partiel, convoqué un jour où il avait pourtant précisé qu'il n'était pas disponible, car il travaillait, qui a été radié trois jours après la date du rendez-vous, pour ne s'être pas présenté ! Et encore, ne suis-je député que depuis juin 2007 !

En tant que chef d'entreprise, et comme beaucoup de mes confrères, je n'ai jamais fait appel à l'ANPE. Les raisons en sont simples : le manque de réactivité (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) et le fait que l'ANPE ne présente pas de demandeurs d'emploi disponibles sur les métiers en tension, sur les métiers d'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre ! Haro sur le service public !

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

La plupart du temps, les patrons de PME recrutent, via leur propre réseau, par le bouche à oreille, ou en débauchant chez leurs concurrents : ce n'est pas normal. (« Il a raison ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Un réel travail reste à faire en direction des patrons de PME pour les réconcilier avec l'ANPE et j'espère que la nouvelle entité s'y attellera.

Si le service public de l'emploi ne donne satisfaction, ni aux demandeurs d'emploi, ni aux entreprises, ce n'est pas seulement à cause des problèmes de fonctionnement liés à la division des tâches entre l'ANPE et l'ASSEDIC. Certes, la fusion des deux entités permettra des avancées et une meilleure qualité de service. Mais il faut aller au-delà.

Madame la ministre, cette réforme du service public de l'emploi ne doit pas se limiter à une réforme des structures chargées de gérer celui-ci. C'est tout un état d'esprit qu'il faut réformer, c'est véritablement un second souffle qu'il faut insuffler.

Comment cette nouvelle entité va-t-elle prendre en charge les demandeurs d'emploi, quel accompagnement proposera-t-elle et quelle sera sa réactivité par rapport aux demandes des entreprises ? Comment les personnels de l'UNEDIC, peu formés au contact avec les usagers et dont les effectifs, sont pléthoriques, en comparaison de ceux de l'ANPE, seront-ils redéployés vers des emplois d'accueil, de placement et d'accompagnement ? Ce sont ces sujets qui intéressent les usagers, et c'est là qu'est la clé du succès de cette réforme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

Monsieur le président, madame le ministre, messieurs les rapporteurs, excellents,…

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

…mes chers collègues, nous avons entendu beaucoup de choses sur ce projet de fusion. Ainsi, de la présentation de l'exception d'irrecevabilité de Mme Iborra, je retiendrai l'image de la carpe et du lapin – je me demande d'ailleurs qui, des salariés de l'ANPE et de ceux de l'ASSEDIC, est la carpe, et qui est le lapin ? Plus sérieusement, pour répondre à la situation, maintes fois dénoncée, caractérisée par la dispersion et la complexité des divers services qui interviennent dans le domaine de l'emploi ; la création d'un opérateur national unique, au service de la personne sans emploi et simplifiant son parcours, était une réforme indispensable et urgente. Nous ne devons pas perdre de vue cette réalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

Je me réjouis donc, madame le Ministre, que ce grand projet de fusion de l'ANPE et des ASSEDIC puisse, enfin, aujourd'hui, devenir une réalité.

Pierre Mauroy, au début des années quatre-vingt, promettait déjà la création imminente d'un vaste service public de l'emploi : nul jusqu'à présent n'avait eu le courage de s'y atteler.

Cette instauration d'un interlocuteur unique, nous en expérimentons chaque jour la nécessité au sein des maisons de l'emploi créées dans le but de réunir très largement les acteurs institutionnels, économiques et politiques qui travaillent pour l'emploi et de faire naître une synergie autour de projets. Nous avons pu constater combien cet état d'esprit, cette réunion des acteurs facilitent grandement les démarches des chercheurs d'emploi, et bien au-delà.

Ce vaste service public unifié de l'emploi est un outil majeur de cet accompagnement individuel des chômeurs, corollaire indispensable à la souplesse du marché du travail. En cela, le projet de loi va bien au-delà de ce qui avait déjà été entrepris dans le plan de cohésion sociale.

Toutefois, je tiens, en tant que présidente de la mission d'information sur les maisons de l'emploi, à attirer votre attention sur divers points qui devraient être précisés. J'ai d'ailleurs déposé des amendements en ce sens, dont certains ont été repris par la commission des affaires sociales, dont je salue le président.

En premier lieu, si, en résolvant la problématique du guichet unique, le nouvel opérateur va beaucoup plus loin que ne l'avait permis la création des maisons de l'emploi, il me semble important qu'il puisse poursuivre la collaboration instaurée dans les centaines de maisons de l'emploi déjà conventionnées et que soit réaffirmé le rôle de ces dernières. Créées par une volonté politique locale caractérisée par une approche territoriale forte, elles ont en effet un rôle fédérateur plus large, très complémentaire du nouvel opérateur. Le Sénat a amendé le texte en ce sens, mais il nous faut aller plus loin. La valeur ajoutée, reconnue par tous, de structures telles que les maisons de l'emploi réside en effet dans la dimension territoriale qu'elles apportent aux politiques nationales, en raison de leur composition. Il faudra en tirer les conséquences en coordonnant la nouvelle institution avec leur réseau.

Les maisons de l'emploi, fondées à l'initiative des élus, contribuent, dans chacun des bassins d'emploi où elles ont été créées, à la coordination de missions d'observation et de reconversion des territoires. Elles sont le lieu de rencontre entre un opérateur national et des problématiques relatives aux besoins de développement économique d'un territoire et aux situations, toutes très diverses, des personnes vivant sur ce territoire.

Nous gagnerons en efficacité en clarifiant leurs relations avec le nouvel opérateur. Je me réjouis donc que la commission ait adopté mon amendement précisant que les maisons de l'emploi seront consultées par le conseil régional de l'emploi sur les termes de la convention définissant notamment leur coopération avec la nouvelle institution. Dans une approche plus globale, je note aussi avec satisfaction que la décision a été prise de leur assurer une représentation au sein du Conseil national de l'emploi qui sera créé.

Je souhaiterais, en outre, que nous modifiions la composition du conseil d'administration de la nouvelle instance, afin d'intégrer un représentant des maisons de l'emploi. Encore une fois, ces dernières étant actuellement les seules instances à pouvoir coordonner les actions de tous les opérateurs participant au service public de l'emploi, il est logique qu'elles soient représentées au sein du conseil d'administration de la nouvelle institution.

En conclusion, je tiens à vous remercier, madame la ministre, pour votre écoute attentive et l'accueil que vous avez bien voulu me réserver, répondant à mes inquiétudes et à celles des membres de la mission d'information par une reconnaissance plus importante du travail accompli par les maisons de l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Benoist Apparu

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, tout ou presque a été dit sur ce projet de loi portant réforme du service public de l'emploi. Je ne reviendrai donc pas sur sa philosophie générale – que, comme beaucoup dans cet hémicycle, j'approuve –, préférant attirer l'attention de Mme la ministre sur la problématique particulière de l'emploi des jeunes.

L'entrée dans la vie active est, depuis longtemps, une des plaies du chômage français. Si nous avons ramené notre taux de chômage dans la moyenne européenne, il n'en est pas de même pour le chômage des jeunes. Ceux-ci présentent des fragilités particulières et leur prise en charge doit donc être spécifique. Si un diplôme de l'enseignement supérieur demeure un atout majeur pour trouver un emploi, il n'est en rien un sésame. Deux ans après avoir terminé leurs études, près de 20 % des diplômés de l'enseignement supérieur n'ont pas d'emploi, mais ce taux atteint 40 % chez les non-diplômés de la même classe d'âge. Ces chiffres masquent évidemment des disparités considérables. Ainsi 40 % des diplômés de l'enseignement supérieur ont connu le chômage au cours des trois années qui ont suivi leur sortie de formation, principalement les diplômés de l'université et, plus précisément, les titulaires d'un diplôme de lettres, de sciences humaines ou de sciences sociales.

L'ANPE n'est pas responsable du chômage des jeunes, mais elle est mal outillée pour traiter ces publics. C'est pourquoi je vous ferai deux propositions très simples, madame la ministre. Tout d'abord, il convient de préciser, dans le projet de loi, que l'insertion par l'accès au premier emploi est une des missions fondamentales et spécifiques de la nouvelle structure.

Ensuite, il convient de réfléchir au paysage des institutions consacrées à l'emploi des jeunes. Outre l'AFIJ et les missions locales, destinées aux jeunes les plus en difficulté, je pense au « bureau insertion », que la récente loi sur l'autonomie des universités vient de créer. Il serait surprenant qu'à l'heure où le Gouvernement s'efforce de rationaliser les institutions en charge de l'emploi, on laisse de côté une institution publique à peine créée et qui sera amenée à se doter d'une fédération nationale.

Au-delà de la mission vers le premier emploi, il serait judicieux d'associer la nouvelle institution à celles que nous avons créées il y a quelques semaines afin de donner une cohérence d'ensemble à la politique du Gouvernement en la matière. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis le début de l'examen de ce texte, nous nous interrogeons sur l'ambition réelle du Gouvernement et de la majorité en matière de lutte contre le chômage.

Le service public de l'emploi n'est pas un Meccano : ce sont des hommes et des femmes assis de part et d'autre d'une même table. D'un côté, les demandeurs d'emploi attendent des conseils, un accompagnement efficace, des offres concrètes et crédibles. Nous savons leur détresse, leur désespoir parfois et, souvent, leur résignation. Nous devons leur redonner de la sécurité. De l'autre côté, des équipes, chargées de missions difficiles, sont soumises à des pressions multiples, à des changements permanents d'organisation, à des réformes inachevées et à des stratégies incomplètes. À ces équipes, nous devons redonner les moyens de l'efficacité.

Il était donc grand temps, madame la ministre, de réinventer l'action publique dans ce domaine. Mais l'on ne peut se contenter d'une fusion des guichets, dans un climat d'ailleurs assez anarchique car, ainsi que l'ont dit de nombreux orateurs, il n'y a pas, et il n'y aura pas davantage demain, de véritable pilote. La fusion des guichets est une idée séduisante à laquelle nous pouvons souscrire, (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) au moins dans son principe, mais, telle que vous la présentez aujourd'hui, elle s'apparente à un paravent chinois, séduisant mais fragile. Or il n'y a pas grand-chose derrière.

C'est en effet un formidable abus de langage que de prétendre que votre texte réformerait l'organisation du service public de l'emploi : il ne traite même pas la moitié du sujet. Comme l'ont dit M. Gille et Mme Iborra, depuis le milieu des années 1970, les réseaux du service public de l'emploi se sont additionnés, sédimentés. Or vous ignorez les services du ministère de l'emploi et du travail dans les départements et les régions, dont on ne sait pas ce qu'ils vont devenir. Il est vrai que la composition du Gouvernement est entachée d'une faute originelle – et je le dis sans vouloir vous être désagréable, madame la ministre –, car il n'y a pas – on s'en aperçoit encore ces jours-ci, dans l'ambiance de crise financière internationale que nous vivons – de véritable ministre de l'emploi.

Le projet de loi traduit par ailleurs une vision incroyablement étatiste des politiques publiques, en tout cas de celle de l'emploi. Cette nouvelle étatisation est un contresens historique. Par idéologie, les néolibéraux feignent de croire que la politique de l'emploi se résume à un face-à-face entre les chômeurs et les agents du service public de l'emploi, qu'entre Bercy et les guichets, il n'y a rien. Comme si cette politique pouvait se passer du lien irremplaçable avec les territoires, du pilotage très fin des stratégies locales ou de la formation professionnelle.

Mais la politique de l'emploi menée depuis 2002 ne témoigne-t-elle pas d'une constante improvisation ? Vous avez d'abord voulu gommer le traitement social du chômage…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Eh oui, madame Faure. Puis, après 2004, sans doute instruits par les résultats des scrutins régionaux, vous avez tenté de le relancer, avant de porter à nouveau atteinte, il y a quelques mois, aux crédits des contrats aidés.

L'affaire des maisons de l'emploi est sans doute la plus emblématique des errements de votre politique de l'emploi. Elle illustre bien, malgré les efforts de quelques-uns d'entre vous – notamment les vôtres, monsieur Anciaux, que j'aimerais voir couronnés de succès –…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

… le climat de désorganisation qui s'est installé.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

C'est pourquoi nous vous soumettons, à l'occasion de l'examen de ce texte, les principes d'un contre-projet, caractérisé par l'engagement de l'État, garant de l'égalité des droits sur le territoire national, et par un pilotage régional, dont les orientations, exposées ce soir, ont permis de tracer une perspective historique.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

J'espère, monsieur le président de la commission des affaires sociales – puisque je vous sais attaché aux expérimentations –, que nous aurons la possibilité d'expérimenter le pilotage régional de la politique de l'emploi. C'est la seule façon d'assurer la proximité complète avec les territoires qu'attendent les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, je limiterai mon propos à quelques brefs commentaires, car j'aurai l'occasion de répondre sur le fond à un certain nombre de propositions ou d'observations que vous avez faites lors de la discussion des articles.

Je souhaiterais tout d'abord tordre le cou à quelques idées fausses, qui me semblent témoigner d'une mauvaise compréhension de notre approche. Ainsi que je l'ai indiqué, nous souhaitons mettre au coeur du dispositif les usagers que sont, d'une part, les demandeurs d'emploi et, d'autre part, les entreprises.

À ceux qui nous ont reproché de stigmatiser le demandeur d'emploi en le désignant comme un coupable, je veux dire que ce n'est absolument pas l'esprit de notre projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Bien sûr que si ! Et cela dure depuis six ans !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Notre projet, c'est le service aux demandeurs d'emploi. Nous ne stigmatisons pas davantage les entreprises, que nous refusons de considérer comme la personnification du « grand capital » qui abuserait des demandeurs d'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Les entreprises sont au coeur du projet dans la mesure où elles sont l'un des deux usagers de l'institution nouvelle et, elles aussi, des chercheurs d'emploi. C'est au moyen de cette recherche collective que nous atteindrons les deux objectifs impératifs consistant à réduire le chômage et à augmenter le taux d'emploi en France.

Certains disent avoir le sentiment qu'il n'y a pas de pilote, pas de ministre de l'emploi aux commandes en ces temps de crise. Que serait-ce si les chiffres étaient mauvais ! Seulement, voilà, ils sont plutôt bons… (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

…le chômage baisse en France, le nombre de demandeurs d'emploi est passé sous les deux millions…

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

…et les emplois et les nouvelles entreprises sont au rendez-vous pour l'année 2007 – ce qui devrait d'ailleurs continuer en 2008 si l'on se réfère aux prévisions.

Plusieurs acteurs locaux de l'emploi méritent d'être évoqués – je pense notamment aux PLIE, aux missions locales, à l'APEC, à l'AFPA –, mais je veux d'abord parler des maisons de l'emploi, un sujet que vous avez été nombreux à aborder sur tous les bancs de cet hémicycle. Comme cela a été dit, un certain nombre d'entre elles – plus de 200 à ce jour – sont déjà parfaitement organisées, labellisées, avalisées, et fonctionnent sur le territoire français.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Et elles sont financées ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Elles sont financées au titre de l'année 2008 dans le cadre du plan triennal.

Toutes celles qui prennent leur mission au sérieux jouent un rôle important. Je remercie au passage M. Anciaux pour le travail approfondi de suivi et d'appréciation qu'il a conduit sur cette question, et qu'il continuera à conduire dans le cadre de la mission qui lui est confiée. La mission des maisons de l'emploi est différente de celle qui sera confiée à l'institution nouvelle. Du fait de leur rattachement à un bassin d'emploi, elles accomplissent plutôt une mission de terrain, un travail d'anticipation, de prévision et d'adéquation entre les besoins locaux des entreprises et les demandes d'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Leur mission, consistant à mettre en cohérence et en concertation les acteurs locaux de l'emploi, est indispensable. Je crois en ces maisons de l'emploi et je n'envisage donc pas un seul instant de les supprimer. J'espère que cela est bien compris, et je le redirai aussi souvent que nécessaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre - Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

N'allez pas croire que cette réforme a été décidée d'en haut, au sein d'une superstructure technocratique…

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

En réalité, je me rends souvent sur le terrain et je suis beaucoup plus proche que vous ne le croyez – y compris sur le plan personnel et familial – des demandeurs d'emploi, dont la logique et les problèmes ne me sont pas étrangers. À ce sujet, je voudrais rappeler que la mission de l'institution nouvelle aura vocation à couvrir non seulement les questions habituellement traitées par l'ANPE et les ASSEDIC, mais aussi, de façon plus globale, l'accueil, le diagnostic, le placement, l'accompagnement, le suivi et l'indemnisation. C'est toute la gamme des services qui sera ainsi mise à la disposition des usagers.

J'espère que nous aborderons l'ensemble de ces questions dans un esprit de conciliation et d'intelligence. Je souhaite, en particulier, que nous puissions évoquer avec la commission des affaires sociales les perspectives en matière d'expérimentation. En effet, il est de l'intérêt de tous, au niveau national comme à l'échelle des circonscriptions, que nous aboutissions à des résultats concrets.

Je veux dire aux élus d'outre-mer que, conformément au principe que j'ai rappelé, il sera tenu compte de leurs caractéristiques spécifiques, car la logique territoriale est au coeur de notre projet. En l'occurrence, nous sommes parfaitement conscients du fait que les taux de chômage sont, aux Antilles ou à la Réunion, beaucoup plus élevés qu'ailleurs, ce qui nécessite un traitement spécifique, notamment en matière de formation. À cet égard, des avancées ont déjà été accomplies, puisque ces territoires sont pilotes sur plusieurs points, et vous pouvez être assurés que nous poursuivrons dans la même voie.

Tels sont, monsieur le président, les commentaires préliminaires que je souhaitais faire. L'examen des amendements sera pour moi l'occasion d'évoquer un certain nombre de questions de fond sur ce débat que j'aborde avec beaucoup d'intérêt. Il me paraît fondamental de souligner que je vois dans ce projet de loi une première étape. Il s'agit, non pas d'un projet conçu dans la précipitation et proposé dans l'urgence, mais du fruit d'une réflexion structurée, de la première étape d'un processus beaucoup plus long qui comportera notamment une réforme approfondie de la formation professionnelle. (Applaudissements sur les sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'ai reçu de M. Jean-Claude Sandrier et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du règlement.

La parole est à M. Patrick Braouezec.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme chacun le sait, puisque ce constat est fait au quotidien par les usagers de l'ANPE comme par les agents du service public de l'emploi, la recherche d'un travail relève du parcours du combattant. Au-delà de l'incapacité propre du marché à absorber toutes les demandes, le fonctionnement de la machine administrative reste fastidieux. Les agents en conviennent et sont prêts à réfléchir avec les autres partenaires concernés à un projet de réforme. Encore faudrait-il les écouter et les entendre, mais ce n'est pas le choix fait par ce gouvernement, puisque l'urgence a été déclarée pour ce projet de loi. Cette urgence prive d'un réel débat les parlementaires que nous sommes, mais aussi et surtout les syndicats, les salariés et l'ensemble des demandeurs d'emploi.

Certes, la volonté d'une réforme n'est pas nouvelle : depuis vingt ans, les gouvernements successifs se sont attaqués au monopole du service public de l'emploi. Ils ont bâti leur logique sur deux axes de réforme. Le premier consiste à libéraliser l'activité de placement. Ainsi, en 1986, une ordonnance ouvre une brèche dans le monopole de l'ANPE en autorisant les communes à effectuer des opérations. Mais c'est la loi Borloo, dite de « cohésion sociale », qui met fin au monopole en 2005. À cette occasion, le gouvernement Raffarin, qui veut transformer l'ANPE en une « entreprise publique de service », ratifie la convention 181 de l'Organisation internationale du travail qui ouvre la voie à la concurrence. La loi Borloo autorise ainsi les opérateurs privés à placer et à accompagner des chômeurs.

Par ailleurs, le principe de gratuité du service public est remis en cause. L'ANPE est ainsi autorisée à créer des filiales lui permettant de développer des activités payantes. Selon Jean-Pierre Guenaten, délégué national du Mouvement national des chômeurs et des précaires, « en 2005, l'expérimentation avec cinq officines privées a été jugée positive, alors que les résultats sont les mêmes qu'avec l'ANPE. Fin 2006, dix-sept agences privées ont été retenues pour s'occuper de 100 000 chômeurs ». Pourtant, l'ANPE évalue le coût moyen par chômeur à 730 euros quand l'agence s'en occupe, et à 3 500 euros avec les placements privés. L'analyse de nombreux agents de l'ANPE est sans appel : pour biaiser les chiffres et s'en prendre à l'efficacité de l'ANPE, on réserve les chômeurs faciles à placer aux officines privées, et on laisse les chômeurs de longue durée, plus difficiles à reclasser, au service public. Plus qu'une victoire idéologique, le véritable but de cette libéralisation est de permettre un meilleur contrôle des entreprises sur la main-d'oeuvre. Ainsi, on revient au commerce de placement du xixe siècle, quand les placeurs étaient des sous-traitants des entreprises.

Le contrôle accru des chômeurs, l'augmentation des radiations, les offres d'emploi peu sérieuses, les malencontreux glissements de catégories qui permettent de cacher la véritable ampleur du chômage, la pression hiérarchique exercée au sein des agences ANPE pour répondre aux prérogatives statistiques du Gouvernement, les placements au forcing pour pourvoir, bon gré mal gré, aux emplois ingrats et mal payés, la restriction des offres de formation, sont autant d'éléments qui attestent que la rénovation du service public de l'emploi, prônée par ce gouvernement pour défendre son projet de fusion ANPE-UNEDIC, a déjà été amorcée par la mandature précédente. Ce projet s'inscrit donc dans une politique de continuité, qui laisse présager le pire pour une fusion qui fait avant tout figure de démantèlement du service public de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Allez donc le dire aux chômeurs et aux salariés, que c'est n'importe quoi !

La mainmise du patronat est à l'oeuvre dans le deuxième axe de réforme, qui consiste à rapprocher l'ANPE de l'UNEDIC. L'ANPE est un organisme public, crée par l'État en 1967 comme instrument de sa maîtrise de la politique de l'emploi, et les agents de l'ANPE relèvent d'un contrat de droit public. L'UNEDIC, quant à elle, est un organisme de droit privé créé en 1958 et géré par les partenaires sociaux ; les salariés de l'UNEDIC et des ASSEDIC ont des contrats de droit privé.

Cette fusion est une aubaine pour le MEDEF, qui siège à la direction de l'UNEDIC en position de force, puisqu'un protocole d'accord y est conclu dès qu'une organisation d'employeurs et une seule organisation de salariés se mettent d'accord. Certains syndicats sont opposés à la fusion « parce qu'elle ferait entrer le MEDEF dans l'organisation des politiques de l'emploi et parce que l'indemnisation doit être déconnectée du placement pour que le nouvel organisme ne soit pas juge et partie ».

« La fusion est l'aboutissement d'une logique qui veut transformer le placement des chômeurs en un secteur de profit » explique l'association Agir Ensemble Contre le Chômage. Cette « privatisation rampante », comme la décrit le président du Mouvement national des chômeurs et précaires, Jean-François Yon, est souhaitée par le MEDEF. La fusion va renforcer son pouvoir, déresponsabiliser les entreprises et accroître la pression sur les chômeurs. Sous prétexte de « simplifier le parcours du chômeur », la réforme risque plutôt de lui rendre la vie impossible.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

La confusion des genres et la fusion des budgets s'inscrivent dans une politique de rigueur, dans des objectifs d'économie d'échelle, et vont servir à préparer une série d'attaques contre les droits des demandeurs d'emploi.

Déjà, en 2000 – sous le gouvernement Jospin, hélas –, la réforme du plan d'accompagnement pour le retour à l'emploi, le PARE, avait malheureusement permis que les ASSEDIC participent au financement de l'ANPE à hauteur de 25 %. La loi de cohésion sociale a enfoncé le clou en permettant que les ASSEDIC participent au contrôle de la recherche d'emploi et puissent suspendre le versement des allocations. Il y a un vrai danger de revenir au travail forcé. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.). Le MEDEF a tout fait pour que les ASSEDIC participent aux contrôles, aux sanctions et au choix des formations. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Je ne suis pas là pour vous plaire, mais pour me faire l'écho des salariés et des demandeurs d'emploi ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Avec cette fusion, les entreprises auront un pouvoir direct sur l'ANPE et les demandeurs d'emploi. C'est ce que justifie la présidente du MEDEF, Laurence Parisot, pour qui la fusion opérationnelle ANPE-UNEDIC fait partie des réformes dans lesquelles les partenaires sociaux se sont engagés et qui estime qu'il faut « penser les modalités d'un rapprochement des deux entités pour qu'elles soient plus efficaces encore à l'égard de leurs clients ». Elle aspire même à ce que ce « service » envers les chômeurs et les entreprises « délivré par une seule entité, soit du coup plus performant ». Mais permettez-moi de m'interroger : quelle amélioration apporterait une ANPE-ASSEDIC fusionnée et qui, malgré sa « modernité », persisterait à mettre à distance ses interlocuteurs « clients » ?

Dans un contexte de chômage de masse et de précarité institutionnalisée, on se demande quel « service » plus efficace pourrait être rendu si la formation professionnelle reste au rebut et si la création d'emplois dignes de ce nom – imputable aux entreprises, et non au service public de l'emploi – ne suit pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Par ailleurs, à trop vouloir trouver un « bon business model », pour reprendre les mots de Mme Parisot, il semble que le Gouvernement ait oublié qu'il s'agissait de structures différentes. L'ANPE, établissement public à caractère administratif, assure l'accompagnement des demandeurs d'emploi et des entreprises. L'UNEDIC, association loi de 1901, gérée selon le régime paritaire, est chargée de collecter les cotisations d'assurance chômage et d'assurer l'indemnisation des demandeurs d'emplois ayant acquis des droits. Il est important que la gestion des fonds et des moyens de l'UNEDIC reste aux partenaires sociaux, car cela constitue un gage d'une reconnaissance du paritarisme. La CFDT, par la voix de François Chérèque, assure que « la fixation des paramètres de l'assurance chômage doit rester de la seule responsabilité des partenaires sociaux ».

ANPE et UNEDIC ont deux rôles différents. Les mélanger revient à permettre au régime d'assurance chômage, pour dépenser moins, d'imposer des conditions strictes, voire drastiques, pour que les chômeurs trouvent un travail dans n'importe quelles conditions, à n'importe quel prix, mais le plus rapidement possible.

En définitive, la lutte contre le chômage passe toujours par la lutte contre ses victimes. Cette réforme du marché du travail, prétendument destinée à « favoriser la compétitivité des entreprises françaises et à stimuler leur production » vise en fait à spolier encore plus de leurs droits ceux qui travaillent. Avec un grand sérieux, la présidente du MEDEF en appelle au « sens des responsabilités » des syndicats : autrement dit, il faut que les salariés continuent de se sacrifier sur l'autel de la mondialisation économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Vite un Kleenex ! (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Des Kleenex, il m'en faut le matin, quand je reçois certains de mes compatriotes !

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Nous aussi, nous en rencontrons !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Il est clair que vous ne rencontrez pas souvent des chômeurs dans vos permanences ! Sinon, vous n'auriez pas osé employer le mot de « kleenex ». Le compte rendu en témoigne, lorsqu'on évoque le sort des chômeurs, vous parlez de kleenex !

La présidente du MEDEF précise que « c'est l'occasion ou jamais que plus personne ne fasse le choix du chômage ». Mais de qui parle-t-elle ? Qui est responsable ? Les chômeurs seraient donc tous des fainéants qui ont fait le choix de perdre leur travail ? Ou les entreprises, certaines d'entre elles, en tout cas, qui n'ont de cesse de rogner sur leur masse salariale et font le choix de licencier, laissant à l'UNEDIC et à la collectivité l'unique responsabilité d'en payer le prix ?

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Caricature !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Avec mes collègues Roland Muzeau et Pierre Gosnat, nous avons reçu plusieurs fois les syndicats réunis en intersyndicale.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Nous aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Manifestement, vous ne les avez pas bien entendus !

N'en déplaise aux membres du Gouvernement, de la majorité et du MEDEF, qui pensent tous le contraire, ces syndicats ont le sens des responsabilités. Ils ont essayé de faire entendre au Gouvernement que, pour simplifier les démarches des demandeurs d'emploi, il n'était nul besoin de fusionner l'ANPE et l'UNEDIC. Ce fut, malheureusement, sans succès ! Ils ont même proposé de réfléchir de manière paritaire à l'élaboration d'un nouveau projet pour l'ANPE autour de questions concernant l'optimisation de son action et la réalisation efficiente de conseils en direction d'entreprises, ou portant sur les dispositifs d'accompagnement des demandeurs d'emploi en lieu et place d'un suivi mensuel personnalisé dénué de sens. Là non plus, rien n'y a fait. Ce projet est marqué par la précipitation – et ce n'est pas pour autant, madame la ministre, que vous avez une tête de précipité – et le choix de la réforme à marche forcée, sans prendre le temps d'écouter les représentants des personnels ou des chômeurs. Ou, en tout cas, de ne pas prendre en considération ce qu'ils ont dit.

Contrairement à ce que dit le Président de la République, la fusion ne va pas « mettre les chômeurs au centre du système ». Il va plutôt faire reposer, par une polyvalence et une mobilité imposées, toute la responsabilité, ou la culpabilisation, sur le chômeur. Ainsi, en proposant de sanctionner les chômeurs qui refuseraient « deux offres d'emploi acceptables », il établit le lien entre les 500 000 offres d'emploi non pourvues et la légitimité du refus par le demandeur d'emploi d'une offre. La CGT (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Apparemment, seule l'évocation de la CGT vous fait réagir car vous n'avez rien dit lorsque j'ai fait allusion à la CFDT !

La CGT, donc, note le passage du concept d'offre valable d'emploi – OVE – à celui d'« offre acceptable d'emploi » et indique que « cela concourt à obliger les chômeurs à accepter des offres d'emploi en dessous de leur niveau de qualification, assorties d'une baisse de rémunération et de contraintes géographiques incompatibles avec la vie familiale ». Ce même syndicat avait réclamé, lors de la négociation de la dernière convention d'assurance-chômage en novembre 2005, une définition plus précise de l'OVE.

Ce concept existe déjà dans le code du travail, mais il reste interprétable. Selon l'article L. 311-5, « sont radiés » ceux qui refusent un emploi, « quelle que soit la durée du contrat de travail offert, compatible avec leur spécialité ou leur formation, leurs possibilités de mobilité géographique compte tenu de leur situation personnelle et familiale (...) et rétribué à un taux de salaire normalement pratiqué dans la profession et la région. »

La présidente de l'UNEDIC, Annie Thomas, note fort justement que « les possibilités de sanction existent déjà au premier refus, le problème n'est donc pas là : aujourd'hui, l'ANPE est dans l'incapacité de proposer deux offres d'emploi en adéquation avec les 2 millions de chômeurs. » Voilà la réalité !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

L'ANPE confirme que le nombre des sanctions pour refus d'offre est infime : 13 672 sur un total de 563 680 radiations, de janvier à novembre 2007, soit 2,4 %. Dans la négociation sur la modernisation du marché du travail, le MEDEF a proposé d'intégrer « l'ancienneté dans le chômage » dans la définition de l'offre valable. Plus le chômage se prolongerait et plus les critères de l'emploi acceptable s'estomperaient.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Cette « dégressivité » de l'emploi valable, « acceptable », « convenable » ou « approprié » est pratiquée dans six des onze pays étudiés par l'UNEDIC en juillet 2007 – Allemagne, Belgique, Espagne, Royaume-Uni, Irlande, Luxembourg. Seul le Danemark a abandonné la référence à cette notion en 2003 et tout chômeur indemnisé est tenu « d'accepter tout emploi qui lui est proposé ». Mais ce qui est sûr, c'est que dans tous ces pays domine une politique très « libérale » – y compris teintée parfois de « social » –, assortie, comme l'exemple du Danemark le montre, de fortes contraintes à l'encontre des chômeurs.

Dans la plupart des pays, les critères sont assez précis. En Italie, le montant du salaire acceptable ne peut être inférieur de plus de 10 % au salaire antérieur. En Espagne, le temps de trajet ne peut excéder 25 % du temps de travail journalier ou les frais de transport excéder 20 % du salaire mensuel.

L'OVE reste à préciser en France. Dans la dernière convention de l'UNEDIC du 18 janvier 2006, les partenaires sociaux ont introduit une nouveauté : un allocataire de plus de cinquante ans ou indemnisé depuis plus de douze mois qui accepte un emploi dont le salaire est inférieur « d'au moins 15 % à 30 % de son salaire journalier de référence » reçoit une aide « destinée à compenser la baisse de rémunération ». L'UNEDIC indique avoir dépensé 18,2 millions d'euros pour cette « aide différentielle de reclassement ».

Tout compte fait, que viserait la suppression des allocations au deuxième refus d'une offre dite valable sachant que pour vous, madame la ministre, l'objectif est de ramener à 5 % le taux de chômage d'ici à la fin du quinquennat et de faire progresser de 63 à 70 % le taux de l'emploi au cours de la même période, quitte à créer selon Frédéric Lefebvre des job centers ? Je me réfère à votre déclaration du 7 novembre dernier. Face à cet assaut d'inventivité, on peut redouter, avec les syndicats et les usagers, « qu'on oblige les chômeurs à accepter des emplois précaires ». Et si cela ne suffit pas, rien n'est plus efficace que la radiation. Ainsi en 2006, près de 462 100 décisions de radiation ont été prises, soit 38 508 en moyenne mensuelle. Bien que le nombre officiel de chômeurs baisse, ces chiffres sont deux fois plus élevés qu'en 2001, et plus de cinq fois supérieurs à ceux de 1996.

Pénaliser les demandeurs d'emploi et déresponsabiliser les entreprises : voilà la véritable fusion que vous voulez opérer avec cette réforme ! Une déresponsabilisation que le MEDEF veut pousser jusqu'au bout en proposant de créer « un nouveau dispositif de prise en charge élargie » du chômage, qui confierait à l'État l'indemnisation de base de tous les chômeurs. Ou comment passer de l'aide aux chômeurs à l'aide aux entreprises ?

Chaque réforme a vu les droits des chômeurs se réduire et les pressions à leur encontre s'intensifier. Celle-ci ne devrait pas déroger à la règle. Sans compter que les premiers concernés – les privés d'emploi eux-mêmes – n'ont toujours aucun droit de cité dans les négociations. Ce qui est bien regrettable, à mes yeux. Je citerai les propos d'une jeune femme, une de celles que vous ne rencontrez vraisemblablement pas, (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) qui, dans un courriel, expose sa situation :

« J'ai 35 ans. On parle toujours des moins de 25 ans mais une grande partie des gens entre 26 et 50 ans a d'énormes difficultés à trouver un emploi ! Je suis en recherche d'emploi depuis 5 ans, n'ayant chaque année, et ce, quand j'ai de la chance, que des CDD qui vont d'une semaine à un mois. Je n'ai aucune indemnité de qui que ce soit depuis 2 ans. Mon ami travaille mais la situation est très dure. Je me sens invisible, inutile, ne pouvant payer les factures car je n'ai aucune indemnité qui me le permettrait...Tous les jours, j'envoie des CV et des lettres de motivation pour des boulots qui correspondent à mon CV mais je n'ai aucune réponse en retour. » Et, des témoignages comme celui-ci, il en existe malheureusement des milliers !

Je m'arrêterai un instant sur certains articles. Ce texte, qui vient du Sénat, ne corrige pas le projet de loi de réforme du service public de l'emploi, même si on a ajouté dans l'intitulé le terme « organisation ». Au contraire, il tend à durcir le texte initial. J'en veux pour preuve l'article 6, alinéa 3, qui fixe au 30 septembre 2010 la validité de la convention collective nationale applicable aux salariés des organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage au profit d'une convention collective agréée par l'État.

Ainsi, les salariés de l'UNEDIC vont perdre le bénéfice de leur convention collective. De plus, les salariés chargés du recouvrement des cotisations ne connaissent toujours pas le reclassement dont ils bénéficieront. À l'heure actuelle, les salaires des agents de l'ANPE ne sont pas ceux des salariés de l'UNEDIC, qui sont de fait plus élevés. Aucune information n'est donnée dans ce projet qui permette de savoir si les salaires des agents de la nouvelle institution bénéficieront d'une égalité de traitement. En métropole, à défaut de prime de vie chère, les agents de l'ANPE sont moins bien rémunérés que ceux de l'ASSEDIC. Pour aligner le salaire des 33 000 agents de la fonction publique sur celui des 22 000 employés de l'ASSEDIC, l'État devra avancer la somme de 400 millions d'euros. Cela répond-il aux objectifs de rationalisation des budgets que s'est fixés l'État ? Va-t-il puiser dans les 3 milliards d'euros d'excédent de l'UNEDIC ? Légalement, il n'a pas le droit de détourner ainsi l'argent des salariés. Mais aujourd'hui, tout est possible ! Cette question majeure des statuts inquiète à juste titre les organisations syndicales, les salariés et les demandeurs d'emploi.

La nature de cette nouvelle institution est peu claire, pour ne pas dire illisible. En effet, elle n'est pas définie. Nous devons nous contenter de quelques indications, à savoir qu'il s'agit d'« une institution nationale publique dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière ». Ce qui manque cruellement, ce sont des éléments précis quant au statut juridique de cette nouvelle institution. Vous n'avez pas laissé le temps au législateur de penser ce statut. C'est bien là le problème !

Il faut souligner, une fois encore, que les demandeurs d'emploi sont particulièrement absents de ce projet de loi. Pour cette raison et pour contrer toute stigmatisation à l'égard de salariés victimes de la violence engendrée par une mondialisation libérale, je propose, comme de nombreuses associations de demandeurs d'emploi et de précaires, que les demandeurs d'emploi soient partenaires, avec statut identique, au sein du Conseil national de l'emploi au même titre que les autres partenaires mentionnés à l'article 1er, alinéa 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Je note également du flou en ce qui concerne la part que l'État entend donner pour le financement de cette institution. Du flou encore à propos de la représentation des collectivités territoriales et notamment des régions. À ce jour, ni les partenaires sociaux ni les régions n'ont été invités à se rencontrer pour aborder cette question, alors même que le Gouvernement avance un calendrier très précis : adoption définitive du projet de loi début 2008, fusion effective d'ici à 6 mois ou un 1 an. Il faut noter, et c'est regrettable, que les quelque 1 500 agences prévues pour mailler le territoire vont certainement remplacer les maisons de l'emploi puisque le Gouvernement a décidé de les « geler », prétendument pour permettre d'évaluer le dispositif et de réfléchir à la coordination entre les maisons de l'emploi et la nouvelle structure.

Je note cependant qu'il a été accepté qu'un représentant des collectivités territoriales siège au sein du conseil d'administration de cette nouvelle institution. C'est une amélioration certes, néanmoins, l'ensemble du texte porte en lui les attaques frontales que ce gouvernement assène à l'ensemble des salariés depuis l'élection présidentielle. Ces attaques sont autant de démantèlements des protections collectives. Je n'en citerai que quelques-unes : la durée hebdomadaire légale de travail, les 40 annuités nécessaires pour une retraite pleine, le droit d'asile et de régularisation, les droits des chômeurs et des précaires avec l'introduction de sanctions, le décret de 1945 sur la justice des mineurs, les services publics livrés à la concurrence.

Pour convaincre, le Gouvernement, qui, comme on le sait, ne craint pas la démagogie, soutient que cette nouvelle organisation permettra de ramener le taux de chômage à 5 %. Qui peut croire que la fusion des deux administrations serait la solution au problème du chômage de masse ? Par quel miracle, cette réforme va-t-elle générer des créations d'emplois ?

Alors, à qui va vraiment profiter cette fusion ? Pour la Confédération nationale du travail, elle entérine la mise en place du dossier unique du demandeur d'emploi, le DUDE, qui permet à tous les professionnels de l'emploi de partager des informations – caractéristiques professionnelles mais aussi personnelles : grève, arrêt maladie, etc. – sur la situation du demandeur. C'est un véritable fichage informatiquement ouvert aux opérateurs privés de placement, choisis par l'UNEDIC, par exemple les entreprises d'intérim ou les employeurs potentiels. Par conséquent, cette fusion ne va certainement pas permettre de défendre un service public de l'emploi indépendant, ayant une véritable utilité sociale. Elle semble plus ouvrir le marché du placement à la concurrence.

En conclusion, cette fusion autorise l'économie des dépenses et du nombre d'agents, la privatisation du service public de l'insertion, le fichage avec accroissement des pressions et des dispositifs de surveillance à l'égard des demandeurs d'emploi, qui sont véritablement considérés comme des vauriens, et la gestion comptable des demandeurs d'emploi.

Pour toutes ces raisons, le groupe GDR ne peut que demander le renvoi de ce projet en commission afin que soient apportées des réponses précises sur toutes les zones de flou. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Je ne pensais pas en effet qu'un modernisateur comme vous pouvait donner dans ces vieilles caricatures. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.) Vous nous resservez toujours la méchante entreprise, le demandeur d'emploi dont nous ne nous préoccuperions pas, la mondialisation libérale… comme s'il suffisait d'être antilibéral pour réussir. Si c'était le cas, Cuba serait un paradis tropical et la Roumanie d'hier un modèle indépassable ! (Vifs applaudissements sur les mêmes bancs. – Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) En toute amitié, je suis donc obligé de vous redire notre déception devant cette intervention extraordinairement schématique.

Sur le fond, je rappellerai quelques faits prouvant que le débat a bien eu lieu. Le 2 octobre, Mme Lagarde a été entendue par la commission – et nous avons, ce jour-là, beaucoup parlé des maisons de l'emploi –, devant qui elle a présenté l'esquisse du projet de loi. Nous étions donc à cette date déjà informés des orientations dudit projet. En décembre, une table ronde s'est tenue à laquelle participaient le président de l'UNEDIC et le directeur général de l'ANPE. Tout le monde pouvait y assister et elle était ouverte à toutes les commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Je rappelle que le rapporteur de la commission des affaires sociales a procédé a plus de trente auditions. Chacun a également pu lire les travaux du Sénat. Nous avons donc eu le temps de la réflexion. Je mentionnerai enfin les deux réunions d'importance qu'a tenues la commission – auxquelles doit s'ajouter celle qui se tiendra demain matin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

208 amendements ont déjà été examinés, dont 84 qui ont été adoptés. Une partie de l'opposition a d'ailleurs pris une part très active aux débats, et 6 de ses amendements ont été acceptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Voilà autant de raisons pour lesquelles, monsieur Braouezec, votre motion de procédure est excessive et qui justifient que nous passions le plus rapidement possible à la discussion des articles : elle sera riche, à n'en pas douter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Monsieur Braouezec, si je vous ai bien entendu, vous adressez cinq reproches à ce projet de loi. Le premier, c'est qu'il serait marqué par un défaut de concertation ; le deuxième, c'est qu'il consiste en un démantèlement pur et simple du service public de l'emploi pour le livrer aux dures lois du marché ; le troisième – et je ne peux pas m'empêcher de vous citer, car j'ai été choqué par vos propos –, c'est qu'avec lui « la lutte contre le chômage passe par la lutte contre les chômeurs », ce qui revient à dire que ce texte ferait la politique du MEDEF et non celle des chômeurs, soit une politique réduite à des sanctions contre les chômeurs. En quatrième lieu, vous reprochez à ce texte un manque de précisions – j'y reviendrai. Enfin, vous dénoncez, dans votre conclusion, trois mots clefs : privatisation, fichage et concurrence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Puisque ma synthèse est bonne, je suis désolé de ne pas pouvoir être d'accord avec vous. Le président Méhaignerie vient d'exposer des arguments qui pourraient nourrir ma propre critique. J'ajouterai simplement que j'ai été moi aussi interloqué par la frontière invisible qui, selon vous, divise notre hémicycle en deux, avec, d'un côté, ceux qui font attention aux gens sans emploi et, de l'autre, ceux qui s'en moqueraient. J'avoue avoir du mal à vous suivre dans cette logique, sans compter que, de ce côté-ci, nous croyons peut-être davantage que vous au fait que la vraie manière de lutter contre la précarité, y compris pour ceux qui ont un emploi, c'est de créer davantage d'emplois. C'est la première manière, même si ce n'est pas la seule, et la politique du Gouvernement, avec l'outil que nous sommes en train de constituer, rendra ces créations possibles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

En ce qui concerne le débat sur la justice et la solidarité, j'ai, là encore, du mal à vous comprendre. Certes, il existe peu de chômeurs de leur plein gré, mais force est de constater que certains se complaisent dans cette situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Ce n'est pas scandaleux, car ça existe, et parmi ceux qui s'y complaisent se trouvent des fraudeurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Peut-être est-ce marginal, mais il y a des lois, et il n'est pas anormal qu'elles tiennent compte de ces cas minoritaires et qu'on en débatte.

À propos du démantèlement du service public de l'emploi, convenez que le terme de monopole n'est plus d'une actualité féroce, si je puis dire, et que les services de l'emploi ont fait la preuve que la pluralité des statuts recèle sans doute une plus grande efficacité. C'est pour cela que ce que vous appelez démantèlement et qui n'est rien d'autre qu'une diversification des acteurs ne nous fait pas peur.

Enfin et j'en termine, vous dénoncez sur quatre points en particulier un manque de précision qui justifierait le renvoi en commission. À propos du statut, les travaux du Sénat, salués par le président de la commission des affaires sociales, ont fourni les réponses nécessaires. Même si des précisions ultérieures peuvent être apportées par voie réglementaire, il est d'ores et déjà établi que nous aurons affaire à un établissement public.

En second lieu, je ne peux pas vous laisser dire que les chômeurs sont absents de ce texte. En effet, dans l'article 2 il n'est pratiquement question que d'eux. Pour ce qui est ensuite du rôle de l'État, il a été largement mentionné, et les articles 1er et 2 me semblent répondre à vos interrogations. Quant à la question de la place des partenaires sociaux et des régions, nous pourrons en débattre, mais les discussions préalables et l'état actuel du texte sont sur ce point satisfaisants.

C'est pourquoi, mes chers collègues, à la suite du président de la commission des affaires sociales, je souhaite que nous débattions des articles du projet de loi et vous invite donc à rejeter cette motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

J'ai moi aussi été déçu par l'intervention caricaturale de M. Braouezec.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

On invoque le pragmatisme quand on n'a plus grand-chose à dire !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Vous avez critiqué certains points qu'il n'est pas interdit, comme certains d'entre nous l'ont fait par voie d'amendement, de soulever – je pense notamment à l'inquiétude légitime des agents de l'ANPE et des ASSEDIC, qui sont en droit de se poser des questions sur l'avenir que leur réserve la fusion.

Faut-il pour autant dramatiser ? La discussion des articles va nous permettre d'obtenir du Gouvernement un certain nombre d'éclaircissements, et il n'est donc pas nécessaire de renvoyer le texte en commission.

Quant à la concurrence, serait-elle bénéfique dans certains cas parce qu'elle fait baisser les prix, et maléfique dans d'autres ? C'est là un type de discours abstrait auquel je ne peux adhérer.

Le Nouveau Centre ne votera donc pas cette motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Notre groupe votera la motion de renvoi en commission car, si nous ne partageons pas tous les arguments avancés par M. Braouezec, nous en acceptons l'essentiel, en particulier son souci d'approfondir certaines questions évoquées dans la discussion générale mais qui n'ont pas reçues de réponses précises pour l'instant.

Je ne suis pas sûr, monsieur le président de la commission, que la référence à Cuba nous évite de tomber dans un débat caricatural que vous avez dénoncé par ailleurs. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) J'en resterai pour ma part aux questions posées par le texte. Elles auront besoin d'être précisées, puisque le travail en commission – qui aurait pu se dérouler plus calmement et plus sereinement – n'a pas permis de le faire.

Concernant le pilotage, plusieurs d'entre nous se sont interrogés sur la façon dont pourra s'opérer la mobilisation de l'ensemble des acteurs – les partenaires sociaux mais plus encore les collectivités territoriales ; de ce point de vue, en effet, le dispositif proposé par le texte n'est guère satisfaisant. Il n'est pas satisfaisant non plus au regard de la multiplicité des acteurs – notamment administratifs – qui demeurent sur le terrain, et l'on peut s'interroger sur la manière dont s'organiseront les rapports avec l'AFPA, avec les directions départementales du travail ou encore avec les maisons de l'emploi.

Je n'ai personnellement jamais été un partisan enthousiaste des maisons de l'emploi. Je l'avais dit lors de la discussion sur le texte les instituant, et je continue à prétendre qu'elles ont le grand défaut de ne pas permettre d'établir clairement de qui relève leur direction. On ne sait toujours pas aujourd'hui qui, sur le terrain, a réellement la responsabilité de la conduite des politiques de l'emploi.

Quels sont enfin les objectifs que l'on se fixe au regard des réalités du terrain et du marché du travail et quels sont les moyens que l'on se donne pour y parvenir ? Comment mobilise-t-on l'ensemble des acteurs ? Comment évalue-t-on les politiques engagées ? Aucun de ces éléments n'est précisé dans le texte, et le dispositif proposé ressemble davantage à un empilage bricolé pour répondre aux préoccupations exprimées par les élus qui ont cru aux maisons de l'emploi qu'à une organisation véritablement cohérente et rationnelle.

J'ajoute – et c'est une des raisons supplémentaires pour lesquelles nous pourrions reprendre ce débat en commission – que les moyens qui vont être mobilisés pour favoriser le reclassement et le retour à l'emploi des demandeurs d'emploi ne sont pas précisés d'une manière satisfaisante. Je pense notamment au nombre de chômeurs qu'auront en charge les conseillers – combien ? – et aux processus qu'ils devront mettre en oeuvre. Plusieurs amendements portent sur ces questions, mais il aurait été utile que la commission puisse les approfondir au préalable. C'est pourquoi le groupe socialiste votera la motion défendue par Patrick Braouezec. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.

(La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'appelle maintenant les articles du projet de loi, dans le texte du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Sur l'article 1er, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à Mme Marie-Renée Oget.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Renée Oget

Madame la ministre, comme l'ont souligné plusieurs interventions, votre texte organise une fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC, sans préciser le rôle, au sein de ce nouveau dispositif, des nombreuses institutions impliquées dans la politique de l'emploi à l'échelle locale, parmi lesquels nous pouvons citer les antennes de l'ANPE, les antennes ASSEDIC et les guichets uniques, mais aussi les 268 maisons de l'emploi et de la formation professionnelle, dont l'avenir reste incertain : après avoir annoncé leur suspension, vous affirmez peu après vouloir les pérenniser alors qu'une mission d'information parlementaire travaille sur le sujet.

Sont aussi concernées les 417 missions locales, dont la place reste indéterminée dans la nouvelle organisation. S'ajoutent encore à ces structures les points d'accueil, d'information et d'orientation, les plans locaux pour l'insertion et l'emploi, les maisons d'information sur la formation et l'emploi, les réseaux Cap emploi, mais aussi les guichets d'accueil dans les mairies et les antennes décentralisées de l'AFPA.

Le problème posé par ce trop plein d'interlocuteurs est triple. D'une part, les demandeurs d'emploi ne s'y retrouvent pas, ne sachant plus à qui s'adresser, sans toujours saisir la logique des démarches qu'on leur demande d'accomplir. D'autre part, concernant votre texte, il est muet sur le rôle et la place de l'ensemble de ces acteurs dans le cadre du nouveau dispositif. Enfin, ce dispositif très disparate ne comporte pas d'approche territoriale ni aucun pilote. Cela constitue sans doute le handicap majeur du point de vue de son efficacité.

Si l'ensemble de ces acteurs travaillent de concert, l'absence de pilote est particulièrement préoccupante, tout autant que l'absence de définition de leur rôle, qui sera renvoyée à un autre texte. Toutefois, une chose est claire : les régions apparaissent aujourd'hui comme l'échelon pertinent pour piloter ce dispositif, et une expérimentation en ce sens serait fort indiquée.

Sur ce point, votre réticence face à l'idée d'étendre les compétences des régions à la coordination des politiques locales de l'emploi est particulièrement incompréhensible, alors que les compétences de la formation professionnelle et de l'apprentissage leur ont été transférées. Vous tournez également le dos à la réalité du terrain où tous les acteurs reconnaissent que les politiques sont plus efficaces dès lors qu'elles collent aux réalités locales, pourvu que l'État définisse leur cadre général et préserve l'égal accès de tous aux dispositifs mis en place, et ce sur l'ensemble du territoire national.

Je souhaite appuyer ce propos par une expérience de terrain, en ma qualité de présidente d'une mission locale – celle du Centre-Ouest Bretagne –, en abordant un des multiples points ignorés par votre texte, à savoir la place des missions locales dans votre dispositif. Revenons pour cela sur le rôle et sur le bilan de ces acteurs de la politique de l'emploi. Créées en 1981, ces missions locales ont pour objectif de prendre en charge un des publics connaissant les plus grandes difficultés face à l'emploi, les jeunes de moins de vingt-six ans, plus particulièrement ceux sans qualification ni expérience significatives, en apportant à chacun un accompagnement personnalisé allant au-delà de la seule recherche d'emploi par une prise en compte de l'ensemble des difficultés – santé, logement, mobilité...

Les missions locales sont aujourd'hui le premier réseau partenaire de l'ANPE avec laquelle elles ont mis en place une véritable politique de co-traitance pour la prise en charge des jeunes sans emploi. Leur connaissance des particularités du terrain sur lequel elles agissent constitue un atout essentiel pour la réussite des politiques publiques.

À ce titre, les excellents résultats du dispositif CIVIS, qui a succédé au dispositif TRACE, sont la preuve du rôle majeur des missions locales dans la politique locale de l'emploi. Il est alors d'autant plus incompréhensible que vous ayez fait l'impasse sur leur rôle et leur place dans le cadre de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Renée Oget

Les missions locales sont également exclues de l'ensemble des dispositifs locaux et nationaux de coordination des politiques de l'emploi. Ne trouvez-vous pas qu'il y a là une formidable anomalie, vu les résultats enregistrés et reconnus ?

Ce mutisme me conduit donc, avec mes collègues du groupe socialiste, à soulever plusieurs interrogations. Comment seront intégrées les missions locales dans le nouveau dispositif ? Quel sera leur rôle ? Seront-elles absorbées par le nouveau dispositif ou seront-elles intégrées à un autre dispositif en charge des publics les plus en difficulté face à l'emploi ? Leur rôle sera-t-il pleinement reconnu à travers leur présence dans les différentes instances de pilotage du dispositif, dont elles sont absentes pour le moment ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Renée Oget

Vous avez annoncé, madame la ministre, dans une lettre adressée début janvier 2008 à Mme Françoise de Veyrinas, présidente du Conseil national des missions locales, qu'une réflexion était engagée « sur les formes que pourrait revêtir [la] nouvelle coopération entre le réseau des missions locales et le futur opérateur unique issu de la fusion [de] l'ANPE et de l'UNEDIC ».

Vos intentions me conduisent à vous demander, d'une part, la raison pour laquelle vous avez choisi de mettre la charrue avant les boeufs en faisant adopter ce texte dans la précipitation, sans aborder en amont les multiples questions posées par l'intégration des différents acteurs au nouveau dispositif, au premier rang desquels figurent les missions locales, d'autre part, la raison pour laquelle vous avez omis de les associer en amont à ces débats.

Madame la ministre, face au silence de votre texte, nous sommes en attente de vos réponses. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Monsieur le président, chers collègues, je voudrais revenir sur ce qui me semble être l'essentiel du débat sur l'article 1er : la question du pilotage territorial.

Je pense que beaucoup de mes collègues à droite de l'hémicycle partagent mon point de vue, sans l'exprimer vraiment. S'il y a absence de pilotage au niveau régional ou de copilotage entre la région et l'État, cela veut dire clairement que c'est le préfet qui assurera ce pilotage. Or, c'est nier la décentralisation, la transversalité des politiques publiques et la nécessaire mise en cohérence entre politique de développement et politique d'insertion. C'est également nier une responsabilité qui a été confiée aux régions, le SRDE, le schéma régional de développement économique. Ce serait alors une gestion statique, alors qu'il me semble nécessaire d'intégrer une série de dynamiques, notamment démographiques. Je vous donne un exemple simple.

D'ici à quelques années, mon pays connaîtra environ 30 000 départs à la retraite. La difficulté est de savoir comment on arrive à mener une politique publique de l'emploi cohérente pour les 25 % de chômeurs par rapport à ces départs à la retraite.

Soit on fait le choix d'un pilotage statique de l'État, du préfet, qui est une gestion centralisatrice et, de mon point de vue, rétrograde. Soit on fait un choix dynamique mettant en cohérence les politiques de la région, du département, de la communauté d'agglomération et de la commune par rapport à ce nouveau schéma du service public de l'emploi.

Il y a deux hypothèses, madame la ministre. Première hypothèse, sans pour cela qu'on soit en dehors de toute logique de partenariat : un pilotage assuré directement par la région. C'est un peu celle qui a été défendue par notre collègue. Deuxième hypothèse : un copilotage territorial entre le préfet et l'État.

Or ce texte, malgré les revendications de partenariat, de discussions, d'ouverture, n'apporte aucune réponse, ne serait-ce que par rapport à une demande de copilotage entre le préfet et l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Je peux difficilement comprendre que la capacité de développement local soit ignorée. Il n'y a pas d'ouverture dans ce texte.

Au-delà de ces deux hypothèses, nous proposons aussi qu'un document d'orientation de la politique publique territoriale de l'emploi en début de période triennale permette de définir la politique territoriale publique de l'emploi. Cela me semble essentiel. Certes, deux conventions sont proposées, mais l'une est une convention entre les instances nationales, notamment l'UNEDIC et l'État pour la partie État, et l'autre est une convention locale entre le préfet et le directeur de l'établissement pour la structure locale. Il n'y a donc aucune prérogative permettant ne serait-ce qu'au conseil régional de pouvoir s'exprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Absolument.

Madame la ministre, vous avez répondu à Alfred Almont que, oui, vous avez tenu compte des particularités des départements et des territoires d'outre-mer. C'est une bonne chose. Mais vu leurs spécificités, comment y répondre au mieux ? Certainement pas de Paris ! On ne peut répondre aux enjeux de l'outre-mer que par une politique régionale, une politique culturelle, sociale, économique locale, sur le terrain. Le seul moyen de tenir compte des particularités en matière de politique de développement territorial pour une politique publique de l'emploi, c'est de laisser naître les imaginations, les initiatives et de ne pas les stigmatiser, ne pas les nier.

Voilà pourquoi je pense que la solution consistant à la fois à avoir un copilotage État-préfet et un document de mise en cohérence de la politique publique de développement de l'emploi est fondamentale.

D'autant plus que, nous le savons, vous le savez, il y aura, que vous le vouliez ou non, un traitement social du chômage. Dans quelques mois, 1 700 personnes en Guadeloupe et en Martinique seront mises au chômage parce que les contrats aidés arrivent à terme. Il faut donc absolument que nous réussissions ensemble une politique publique à la fois cohérente et locale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Je voudrais reprendre un thème que j'ai développé tout à l'heure pendant la discussion générale et sur lequel je souhaiterais que Mme la ministre puisse nous répondre.

Bien sûr, nous voterons l'article 1er, sous réserve des amendements adoptés en commission. L'architecture du texte nous paraît cohérente et convenable.

À cette thématique du pilotage, s'ajoute celle des moyens donnés à l'institution nouvelle dans le cadre des politiques d'accompagnement. C'est la thématique que j'ai développée tout à l'heure. Je redis qu'il y a là un facteur clé de succès qui doit être décliné, madame la ministre, à tous les niveaux de l'organisation de cette future architecture. Voilà pourquoi j'évoque à nouveau cette question à l'occasion de l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Roland Muzeau, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Je voudrais faire un rappel au règlement au titre de l'article 58, alinéa 1, de notre règlement.

Je m'étonne de l'interprétation très extensive de l'article 40 qu'a pratiquée la commission des finances. J'avais en effet déposé un amendement à l'article 1er proposant qu'une loi de programmation pluriannuelle définisse « les axes de développement et les moyens prévisionnels alloués au service public de l'emploi ».

Où est-il écrit que ces moyens prévisionnels seront nécessairement supérieurs à ceux dont disposent aujourd'hui les acteurs de ce service public ? Rien dans la rédaction de notre amendement ne le laisse soupçonner. La suspicion d'un engagement financier supérieur est devenue une règle et une interprétation abusive.

Je regrette donc que la commission des finances n'ait pas fait preuve, ici, de plus de discernement, m'interdisant par là même de défendre une proposition dont le seul travers est de porter crédit à l'idée que « gouverner, c'est prévoir », maxime que le Gouvernement n'a pas faite sienne, il est vrai.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous en venons à la discussion des amendements.

Je suis saisi d'un amendement n° 108 , tendant à supprimer l'article 1er.

La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Lors de la discussion générale et dans notre motion de renvoi en commission, nous avons eu l'occasion de souligner notre hostilité à un projet de loi qui a pour finalité première d'accompagner la flexibilisation intégrale du marché de l'emploi et de réduire le rôle et les missions de l'État. L'objectif affiché d'opérer ainsi une simplification administrative favorable au demandeur d'emploi, de créer une cohérence et une synergie nouvelle relève d'un simple habillage rhétorique.

Vos motivations, nous l'avons dit, sont étrangères aux objectifs d'amélioration de la qualité du service public de l'emploi. Votre propos est de faire peser sur la personne privée d'emploi le fardeau de l'emploi contraint, d'organiser les modalités d'un chantage permanent à la réduction ou à la perte d'indemnités.

Qu'est-ce qui justifie cette pression constante sur les chômeurs ? Cette question est souvent revenue dans nos nombreuses interventions tout à l'heure. Pourquoi cette tendance générale dans l'Union européenne ? En Allemagne, par exemple, la réforme Hartz a renforcé la pression sur les chômeurs.

L'OCDE, à sa manière cynique, apporte la réponse dans son récent rapport sur l'emploi, je le cite : « Les réformes structurelles, qui commencent par générer des coûts avant de produire des avantages, peuvent se heurter à une opposition politique moindre si le poids du changement politique est supporté dans un premier temps par les chômeurs. En effet, ces derniers sont moins susceptibles que les employeurs ou les salariés en place de constituer une majorité politique capable de bloquer la réforme, dans la mesure où ils sont moins nombreux et souvent moins organisés. »

La fusion, c'est aussi pour vous l'occasion de désengager l'État, de le dégager de ses responsabilités en matière d'impulsion des politiques d'emploi et de leur financement, pour confier les clefs à une nouvelle institution, dont l'article 1er comme l'article 2 ne prennent même pas la peine de spécifier la forme juridique, comme si cette définition ne relevait pas de la compétence du législateur.

Nous n'aurions pas été opposés à de nouveaux rapprochements opérationnels entre l'ANPE et les ASSEDIC, élaborés en amont et avec les partenaires sociaux, dans le respect des missions et de l'indépendance de chacun. Mais ce n'est pas là ce que vous avez souhaité.

Au réel accompagnement des salariés privés d'emploi, vous avez préféré l'accompagnement des mesures décidées dans le cadre de la réforme du marché du travail. C'est pour nous une raison plus que suffisante pour demander la suppression de l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Monsieur Muzeau, vous avez indiqué que les auteurs du présent amendement entendaient rappeler leur opposition à la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC. J'ajoute, entre parenthèses, qu'il s'agit plutôt des moyens des ASSEDIC. Puisque vous être contre la fusion, la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 108 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 181 .

La parole est à Mme Monique Iborra, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Cet amendement vise à modifier les missions du service public de l'emploi, en intégrant, en cohérence avec les dispositions de l'accord des partenaires sociaux, les missions d'orientation, indissociables des actions de formation et d'insertion. Nous savons tous que l'orientation pèse de manière quelque peu négative sur les politiques de l'emploi.

Nous vous proposons d'insérer, après l'alinéa 2 de l'article 1er, l'alinéa suivant :

« a) La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « Le service public de l'emploi a pour mission l'accueil, l'orientation, la formation, l'insertion, il comprend le placement, le versement d'un revenu de remplacement, l'accompagnement des demandeurs d'emploi et l'aide à la sécurisation des parcours professionnels de tous les salariés. »

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Dans un premier temps, la commission avait donné un avis défavorable, souhaitant ne pas trop s'éloigner de ce qui avait obtenu l'approbation des partenaires sociaux, après concertation.

Un débat intéressant a eu lieu en commission. Je crois que Mme la ministre est assez favorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Madame Iborra, je souhaite vous prouver que non seulement nous ne sommes pas sectaires, mais que nous sommes ouverts à la discussion dès qu'il s'agit d'améliorer un texte.

Votre amendement me paraît utile, compte tenu des mentions que vous proposez d'ajouter concernant l'insertion professionnelle des jeunes, vous précisez également la notion de sécurisation des parcours professionnels. Ce sont des points sur lesquels, le 11 janvier, les partenaires sociaux sont parvenus à des accords tout à fait exceptionnels.

Dans ces conditions, le Gouvernement est prêt à accepter l'amendement n° 181 . J'ai d'ailleurs évoqué la question avec le président de la commission des affaires familiales et avec le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

En commission, le rapporteur avait éprouvé quelques hésitations, compte tenu des dépenses supplémentaires que l'ajout de la notion de sécurisation des parcours professionnels pouvaient engendrer ; mais je partage, madame la ministre, tout à fait vos conclusions.

Un amendement déposé par M. Gérard Cherpion a, comme celui de M. Muzeau, été rejeté au titre de l'article 40 par le président de la commission des finances.

Il s'agissait de prolonger l'expérimentation du contrat de sécurisation professionnelle des parcours professionnels – appelé contrat de transition professionnelle – dont bénéficient actuellement sept bassins d'emplois et qui doit cesser à la fin du mois de février. Les négociations avec les partenaires sociaux n'étant pas terminées, les salariés qui seraient licenciés dans ces sept bassins d'emploi ne pourraient plus bénéficier des CTP.

Je voudrais avoir la certitude que le Gouvernement reprendra cet amendement, qui concourt à la sécurisation des parcours professionnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

C'est la preuve qu'il fallait renvoyer le texte en commission ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Je confirme que le Gouvernement reprendra cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 181 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements, nos 109 et 182 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est àM. Roland Muzeau, pour défendre l'amendement n° 109 .

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Je me suis étonné, il y a quelques instants, du manque de rigueur de la notion d'institution. Celle d'organisme, proposée par nos collègues, si elle est plus rigoureuse, ne gagne cependant pas en précision, pas plus d'ailleurs que la nouvelle rédaction de l'article 2, qui évoque l'« institution nationale publique ».

Le flou entretenu sur la forme juridique de l'institution, issue de la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC, nous a incités à proposer que l'institution prenne la forme d'un établissement public national à caractère administratif.

Trop de services publics sont aujourd'hui confiés à la gestion des collectivités locales, sans qu'il y ait eu, nécessairement et systématiquement, compensation sur le plan financier.

L'organisme serait doté, grâce au statut d'institution publique nationale à caractère administratif, de l'autonomie administrative et financière. Sa mission s'exercerait alors sans ambiguïté sous le contrôle et l'autorité de l'État et le statut de ses agents serait clarifié.

Nous pensons que les missions d'accueil, de conseil, de placement et d'indemnisation ne peuvent que relever d'un service public administratif.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est àMme Monique Iborra, pour défendre l'amendement n° 182 .

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 109 de M. Muzeau. Cet amendement introduirait un risque de confusion, en utilisant une référence différente de celle consacrée par le Sénat en première lecture : une institution nationale publique dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière.

Mme la ministre a eu l'occasion de rassurer à plusieurs reprises le Sénat, en réaffirmant le caractère d'établissement public de l'institution. Je ne doute pas qu'elle le refera devant notre assemblée.

L'amendement n° 182 est très différent. Après hésitation, je crois que la commission pourrait y donner un avis favorable. Je pense que cet amendement est de nature à emporter l'approbation de Mme la ministre puisqu'il a pour objet de préciser que le service public de l'emploi est organisé, notamment à travers une institution publique définie.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 109 . Je voudrais préciser que l'institution sera bien un établissement public administratif, du fait de sa mission et de son financement.

Ce soir ou demain, vous allez créer un être juridique qui, je le répète, tout en étant un établissement public administratif, présentera un certain nombre de caractéristiques particulières en ce qui concerne l'utilisation de son système comptable, la convention collective spécifique applicable au personnel de l'établissement. Le conseil d'administration présentera aussi un caractère très spécifique dans son mode de constitution, de direction, etc.

Il me paraît donc utile de clarifier, au cours de nos débats, la nature de l'institution et de vous laisser l'oeuvre législative de création de cet être nouveau, qui constituera la nouvelle institution, rassemblant l'ANPE et l'UNEDIC, et, par parallèle, les ASSEDIC.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 109 .

Le Gouvernement est, en revanche, favorable à l'amendement n° 182 . J'ai eu l'occasion de préciser devant le Sénat qu'il s'agissait d'une institution publique – et cela figure à l'article L. 311-7. Il semble également utile de l'indiquer à l'article L. 311-1, qui définit le service public de l'emploi et ses acteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 109 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 182 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 7 rectifié et 183 .

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 7 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Cet amendement a pour objet de préciser que l'on conserve la désignation en vigueur de l'organisme chargé de l'assurance chômage, tel que défini par le code du travail, afin d'apaiser les inquiétudes des organisations syndicales.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Le Gouvernement y est favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 7 rectifié et 183 .

(Ces amendements sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 184 .

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Je voudrais revenir un peu en arrière sur la nature du futur établissement public administratif. Il s'agit en quelque sorte d'un établissement public administratif – génétiquement modifié (Sourire.) –avec des contrats de droit privé. C'est un organisme un peu hybride et il conviendra de mettre en oeuvre le principe de précaution, car personne ne sait quel monstre sera créé. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

L'amendement n° 184 a pour objet de supprimer le recours aux agences de placement privé dans le cadre du service public de l'emploi. Nous ne sommes pas du tout convaincus de l'efficacité du recours aux organismes de placement privés. En effet, si les résultats peuvent paraître intéressants, il faut bien constater qu'ils opèrent sur un public ciblé et ont des moyens dont ne dispose pas d'habitude le service public.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

La commission est totalement défavorable à l'amendement. Les organismes de placement privés sont un acquis de la loi Borloo sur la cohésion sociale, et, à l'époque, le débat avait déjà eu lieu. Les sociétés de placement existent à l'étranger comme en France, et elles ont prouvé leur efficacité.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Même avis que la commission.

Monsieur Gille, je voudrais vous répondre sur la nature génétiquement modifiée de l'établissement public administratif. C'est un établissement public administratif, comme il en existe d'autres. La Banque de France, par exemple, répond à peu près aux mêmes distinctions par rapport à la définition stricte et parfaitement cataloguée de l'établissement public administratif. Or, la Banque de France n'a pas un caractère très génétiquement modifié. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Ménard

Je le répète, les personnes les plus proches de l'emploi sont placées par les agences de placement privées, et on demande après à l'ANPE de s'occuper des gens les plus éloignés de l'emploi.

C'est d'ailleurs ce à quoi tend généralement la politique du Gouvernement. On pourrait citer d'autres domaines : l'hôpital et les cliniques privées. Ce qui est le plus simple à mettre en oeuvre et le plus rentable est confié au privé, et on demande au service public d'assumer le reste.

Il est tout à fait regrettable que les agences de placement privées soient incluses dans le service public de l'emploi. Que ces agences fassent leur travail à la demande d'entreprises qui font appel à elles pour retrouver des salariés, je n'y vois pas d'inconvénient, mais je m'oppose au fait de les inclure dans le service public de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 184 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 8 et 188 .

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement n° 8 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

L'amendement n° 8 vise à insérer à l'alinéa 6, après les mots « des collectivités territoriales », les mots « des maisons de l'emploi ».

Les maisons de l'emploi, contribuant dans chacun de leur bassin d'emploi à la coordination des actions menées dans le cadre du service public de l'emploi, doivent pouvoir enrichir de leur expérience un organisme qui veille à la cohérence des différentes institutions participant à ce service public et définir les orientations stratégiques de la politique de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Monique Iborra, pour soutenir l'amendement n° 188 .

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

L'amendement n° 88 est identique. Nous posons cependant la question de la représentation des maisons de l'emploi. Par qui seront-elles représentées ? Mme Dalloz a proposé M. Anciaux, président de la Commission nationale de labellisation. Pour ma part, je ne pense pas que cela soit une bonne idée.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Je ne mets nullement en doute les qualités personnelles de M. Anciaux, que je connais depuis très longtemps ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

La Commission de labellisation a beaucoup de progrès à faire. Désigner d'emblée une personne à la tête d'une instance avant d'avoir discuté de la pertinence de ce choix ne me paraît pas raisonnable…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 8 et 188 .

(Ces amendements sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 174 .

La parole est à M. Roland Muzeau, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Il s'agit de la composition du Conseil national de l'emploi. Votre texte substitue au Conseil supérieur de l'emploi un Conseil national de l'emploi. Le sigle aurait dû vous inviter à la prudence et vous laisser dubitatifs sur l'opportunité de la création de cette instance.

Votre CNE aura pour mission de définir les orientations stratégiques des politiques de l'emploi, de mettre en cohérence l'action des diverses institutions et – c'est à la mode – d'évaluer les actions engagées. Or ces orientations stratégiques relèvent du pouvoir exécutif et plus précisément de la compétence du Gouvernement.

Si nous ne sommes donc pas très favorables à la création de telles instances, nous sommes encore plus réservés sur l'idée d'y faire siéger des sociétés privées de placement et d'intérim, ferventes adeptes de dérégulation et de casse des droits collectifs.

Nous comprenons que vous teniez à avoir des alliés dans la place, ainsi que des « personnalités qualifiées » que vous invitez autour de la table. Mais c'est une raison suffisante pour que nous proposions de supprimer la référence aux « principaux opérateurs du service public » comme aux « personnalités qualifiées » pour leur préférer des personnes effectivement intéressées à la qualité du service public, à savoir les représentants des demandeurs d'emploi.

Tel est le sens de nos amendements n°s 174 et 175 .

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Monsieur le président, puis-je reprendre la parole ? La commission et le Gouvernement n'ont pas répondu !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Non, le vote est engagé, monsieur Muzeau. Je vous ai déjà la parole pour défendre votre amendement.

Je mets aux voix l'amendement n° 174 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 9 et 185 .

La parole est à Mme Monique Iborra.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 9 et 185 .

(Ces amendements sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements, nos 186 et 175 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 186 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Cet amendement a pour objet d'introduire la représentation des associations de chômeurs au sein du Conseil national de l'emploi, qui sont les premiers concernés par la mise en oeuvre des politiques de l'emploi. Mme la ministre a, du reste, indiqué que les usagers devaient être au coeur de nos réflexions, et par là même de ces dispositifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Je considère que c'est une session de rattrapage, monsieur le président, car je souhaitais reprendre la parole sur mon précédent amendement pour demander à Mme la ministre de m'expliquer pourquoi elle s'est contentée d'un laconique « avis défavorable ».

S'agissant de l'amendement n° 175 , il est essentiel de substituer aux personnalités qualifiées les représentants des associations de chômeurs. Vous ne pouvez pas persister à les considérer comme quantité négligeable ! En effet, seuls 47 % de demandeurs d'emploi sont indemnisés. Et M. Borloo, sous la précédente législature, a indiqué que sept millions de personnes étaient sans emploi ou en situation de « mal emploi ».

Il me semble donc normal que les associations de chômeurs – dont personne ne peut prétendre qu'elles ne sont pas compétentes pour dresser le bilan des politiques publiques de l'emploi – soient représentées dans cette instance.

Je souhaiterais une réponse fournie, madame la ministre, sur votre refus de permettre aux associations de donner, enfin, de la voix.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Avis défavorable. Il convient, en effet, de ne pas accroître à l'excès la composition du Conseil national de l'emploi, laquelle est déjà très large. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

En principe, les chômeurs sont représentées par les organisations syndicales.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Les structures syndicales sont également faites pour les représenter. Enfin, rien n'empêche de nommer un représentant des demandeurs d'emploi, au titre des personnes qualifiées.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Le Gouvernement est défavorable à cette proposition. Il est important, vous l'avez dit, que les usagers soient au coeur du dispositif. Nous avons évoqué le sujet avec l'ensemble des organisations représentatives syndicales et patronales, dans le cadre de la concertation que nous avons menée.

La composition du Conseil, dans la mesure où il regroupe un certain nombre d'organisations syndicales, prend déjà en compte la composante salariale, que les salariés aient un emploi ou en recherchent un. La représentation est donc assurée.

Je précise par ailleurs qu'il y aura des personnalités qualifiées. Il n'est donc pas du tout exclu que parmi ces personnalités figurent des représentants des associations d'usagers.

Comme je n'ai pas pour habitude de ne pas répondre, je veux revenir sur votre amendement précédent, monsieur Muzeau, qui proposait de supprimer la référence aux principaux opérateurs du service public de l'emploi dans le but de simplifier la rédaction. Il me semble que votre approche aurait été trop réductrice. La nôtre a le mérite d'être large et d'inclure tout le monde : maisons de l'emploi et AFPA.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Je suis assez stupéfait par ces propos. Tout à l'heure, Mme la ministre affirmait que le projet de fusion ANPE-ASSEDIC devait permettre d'améliorer le service rendu à ceux qui en ont l'utilité : les employeurs à la recherche de salariés et les chômeurs.

Après avoir expliqué que les chômeurs sont au coeur du projet, elle indique maintenant qu'ils seront exclus du dispositif. Je ne comprends pas cette volonté manifeste d'écarter ainsi les chômeurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

J'ai déposé un amendement identique s'agissant du conseil d'administration de la nouvelle institution parce qu'il me semble important que les associations de chômeurs puissent être représentées dans les structures qui oeuvrent en leur faveur.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Permettez-moi de vous faire remarquer, madame la ministre, que, si nous avions pu discuter de la représentativité syndicale, nous ne serions pas amenés à déposer ce type d'amendement. L'on nous promet depuis longtemps un texte sur la représentativité syndicale ; il en était déjà question sous la précédente législature. Or le débat a toujours été reporté avec pour conséquence que les chômeurs ne se sentent pas vraiment représentés par les organisations syndicales existantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

M. Vercamer est un dangereux gauchiste ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

C'est la raison pour laquelle les associations de chômeurs demandent à faire partie de cette institution, ce qui me paraît légitime. Je voterai donc l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Je ne partage pas du tout cet avis. La réponse de Mme la ministre a été claire. Le chômage n'est pas un état permanent.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Les chômeurs qui sont conjoncturellement ou structurellement au chômage sont représentés par les organisations syndicales ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

De plus, Mme la ministre a assuré que, dans certains cas, elle pouvait tout à fait admettre des représentants des associations de chômeurs au titre de personnalités qualifiées. Elle a répondu à toutes les questions ! Mais je répète que le chômage n'est pas un état permanent.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 186 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 175 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 187 .

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Cet amendement a pour objet d'introduire la représentation des associations de chômeurs au sein du Conseil dans des conditions fixées par décret.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Avis défavorable parce que cette proposition n'est pas à sa place à cet endroit du texte.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 187 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 189 .

La parole est à Mme Monique Iborra, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Cet amendement revêt à nos yeux une importance particulière. Il éclaire votre politique d'un jour nouveau en évoquant un problème dont le Gouvernement parle très peu : les emplois précaires.

Pourtant, si le chômage baisse, la précarité explose. C'est un fait que personne ne peut nier. Nous proposons donc de préciser les missions du Conseil national de l'emploi en indiquant qu'il « concourt à la définition des politiques de réduction des emplois précaires ». Nous ne sommes pas les seuls à insister sur ce point. L'accord sur la modernisation du travail signé par les partenaires sociaux affirme que le « contrat de travail à durée indéterminée est la forme normale et générale du contrat de travail. Le contrat de travail à durée déterminée et le contrat de travail temporaire constituent des moyens pour faire face à des besoins momentanés de main-d'oeuvre. Le recours à ces contrats de travail doit se faire de manière responsable, dans le respect de leur objet, et ne peut se justifier que pour faire face à des besoins momentanés de renfort, de transition et de remplacement ».

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Avis défavorable. (Exclamations sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Parler de « forme normale et générale du contrat de travail » ne renvoie à aucune notion juridique, même si nous nous accordons pour dire que le contrat à durée indéterminée est la forme la plus souhaitable d'emploi. Le Conseil national n'a pas à déterminer le type de contrat que les entreprises proposeront aux salariés. Cela dépend, nous le savons, de la conjoncture et de la nature de l'emploi à pourvoir. Il ne me paraît inutile d'alourdir ce texte par cette mention sans portée opérationnelle.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Madame la députée, sachez que je partage fondamentalement vos préoccupations. L'emploi précaire, qu'il s'agisse des contrats à durée déterminée ou de certains contrats de travail à temps partiel, notamment de temps partiel subi, renvoie à des questions de fond, qu'il faut aborder. Mais je ne crois pas qu'il convienne de le faire dans l'article consacré à la définition des missions du Conseil national pour l'emploi.

C'est pourquoi je vous demanderai de retirer cet amendement, qui ne me paraît pas approprié dans ce contexte, même si nous sommes très nombreux à partager les objectifs que vous poursuivez. Xavier Bertrand examine d'ailleurs certains aspects de ces questions, notamment pour ce qui concerne des secteurs spécifiques comme la maintenance ou la grande distribution où l'emploi précaire nécessite clairement une concertation.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Monsieur le président, nous maintenons notre amendement car nous estimons que le problème est crucial. Accepter notre proposition aurait permis à la commission et au Gouvernement de montrer leur volonté de conforter l'accord signé par les partenaires sociaux. Quelle place le texte qui nous est soumis accordera-t-il donc au respect des accords ? La réponse de Mme la ministre nous laisse dans l'incertitude face à cette inquiétude.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 189 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 190 .

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Par cet amendement, nous entendons préciser que le Conseil national « concourt à la définition des politiques de mise en oeuvre de la sécurisation des parcours professionnels », dans l'esprit de l'accord signé par les partenaires sociaux.

Cela renvoie à une question évoquée cet après-midi. Comptez-vous orienter votre politique principalement vers le placement ou bien, comme l'approbation de l'un de nos amendements le laisse entendre, acceptez-vous de l'engager vers la sécurisation des parcours professionnels ? Si tel est le cas, il est nécessaire de l'indiquer ici.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

La sécurisation des parcours professionnels est une ambition et un objectif que nous partageons. La question est de savoir s'il ne revient pas plutôt au Conseil lui-même de définir ses propres objectifs. Avec ce genre d'amendement, nous risquons de surcharger la loi. Avis défavorable, donc.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Nous avons accepté un amendement portant sur l'article L. 311-1, qui intègre dans la définition du service public de l'emploi les missions liées à l'insertion professionnelle des jeunes et à la sécurisation des parcours, en tenant compte de l'accord signé le 11 janvier dernier.

S'agissant du Conseil national de l'emploi, il ne nous paraît pas utile à ce stade de définir dans les moindres détails son rôle stratégique. Il lui appartiendra, en fonction de la conjoncture, des circonstances et de l'évolution du marché de l'emploi, de définir les politiques à privilégier. Avis défavorable donc.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Nous avons bien perçu votre hésitation, madame la ministre. J'entends bien les arguments que vous invoquez pour ne pas alourdir le texte. Mais la sécurisation des parcours professionnelle se situe au-delà d'une simple liste de missions. Elle permet de définir la philosophie même de la politique de l'emploi. À ce titre, il nous paraît important de l'inscrire dans la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Je ne suis pas d'accord avec cette interprétation et avec l'amendement. Nous nous accordons tous dans cet hémicycle pour dire que la sécurisation des parcours professionnels doit faire partie des préoccupations de l'institution dont nous nous attachons à définir la nature et les missions. Cela étant, il faut aussi veiller à ce que la loi reste la loi et, pour cela, il importe de ne pas la surcharger avec des considérations de ce type, même si elles sont fondées.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 190 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 191 rectifié .

La parole est à Mme Monique Iborra, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Cet amendement aborde un sujet dont nous avons déjà longuement débattu. La loi de 2004 a transféré des compétences nouvelles aux régions en matière de développement économique, d'aides aux entreprises et de formation professionnelle et il paraît illogique, anormal et inefficace de ne pas en tenir compte, à moins que vous ne pensiez que les lois peuvent se suivre dans la plus grande incohérence. Nous proposons par souci d'efficacité que le comité régional de l'emploi soit coprésidé par le préfet de région et le président du conseil régional. Qui peut le plus peut le moins : nous serions d'accord pour des expérimentations. Et même si vous n'en proposiez aucune, cet amendement a minima vous permettrait d'assurer une action efficace sur le terrain. S'il était refusé, la mise en oeuvre de votre politique en serait affectée et le financement de l'institution par les régions ne serait pas possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Je sais que Mme la ministre a écouté avec attention M. Rousset. Le Gouvernement réfléchit à la possibilité d'une expérimentation. Mais les dispositions la concernant prendraient place à l'article 2. Je vous invite donc à retirer votre amendement, madame Iborra.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis défavorable. Le conseil régional de l'emploi est une instance de concertation et de programmation territoriale. Il a pour mission l'élaboration de la convention annuelle qui lie la nouvelle institution avec l'État pour ses interventions territoriales en matière d'insertion qui relèvent de sa responsabilité propre. Compte tenu de la répartition entre payeurs et commanditaires, il est logique que le préfet de région préside ce conseil.

J'ai entendu vos commentaires et, comme je le disais au président de la commission des affaires sociales, je considère que toutes les pistes doivent être explorées, dès lors qu'elles permettent d'améliorer la recherche d'emploi, le placement des demandeurs d'emploi et l'insertion, en particulier pour les publics les plus éloignés de l'emploi. S'il s'avérait que, dans le cadre d'un pilotage – et non un co-pilotage – par les présidents de région, les résultats obtenus fussent plus efficaces, il est évident qu'il faudrait réexaminer notre dispositif.

Je vous propose de faire, d'ici à six mois, une proposition dont nous conviendrions avec l'ensemble des associations représentatives des collectivités territoriales, pour confier à deux régions cette opération à titre expérimental. Une fois les résultats connus, soit au bout de trois ans, on pourrait alors voir si le dispositif pourrait être étendu.

Vous le voyez, je fais preuve d'un esprit non partisan, animée que je suis par le seul souci de lutter contre le chômage.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Si j'ai bien compris, madame la ministre, vous demandez le retrait de l'amendement n° 191 rectifié et vous vous engagez à lancer une expérimentation.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Tout à fait, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Monsieur le président, je demande une courte suspension de séance, afin que notre groupe se mette d'accord sur la réponse à apporter à la proposition de Mme la ministre, qui est un peu plus précise que celle formulée par le rapporteur.

Reprise de la discussion

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue, le mercredi 23 janvier 2008, à zéro heure trente, est reprise à zéro heure quarante.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est reprise.

La parole est à Mme Monique Iborra.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Nous notons avec satisfaction que le principe d'une expérimentation a été admis par Mme la ministre. Néanmoins, nous souhaitons le maintien de l'amendement n° 191 rectifié , ce qui ne préjuge en rien de la suite qui sera donnée à cette demande.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Ferry

Monsieur le président, je suis favorable à cet amendement qui a le même objet que l'amendement n° 104 de MM. Reiss et Maurer.

Le président de la région Alsace, Adrien Zeller, sera sans aucun doute d'accord pour assurer le pilotage de cette instance.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Si ce n'est pas de l'opportunisme... (Sourires.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 191 rectifié de Mme Iborra, et notamment au copilotage, sans préjuger des travaux que nous pourrons engager dans les jours qui viennent et d'ici à la CMP, sur la base du principe dont je vous ai donné acte tout à l'heure en matière d'expérimentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Pour la plus grande clarté possible de nos débats, Mme la ministre vient de repréciser la position du Gouvernement.

Le groupe socialiste, pour sa part, a une position très claire depuis le début. Il demande une coprésidence de cette instance et au fond un copilotage, considérant que c'est dans la mise en commun des stratégies de l'État et des régions de la façon la plus contractuelle possible que l'on peut trouver les moyens de faire vraiment avancer le service public de l'emploi.

Le Gouvernement ne souhaite pas un copilotage, ce qui nous paraît pourtant aller dans le sens de l'efficacité de l'organisation du service public de l'emploi.

Nous prenons acte de l'engagement pris à la fois par Mme la ministre et M. le président de la commission de réfléchir d'ici à la tenue de la commission mixte paritaire, peut-être au sein de notre commission, à un cadre adapté à l'expérimentation du pilotage par la région dans au moins trois régions.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Deux !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Les autres régions françaises devront, quant à elles, prendre une orientation qui n'est pas celle que nous souhaitions.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Pour être tout à fait clair, je rappelle que l'amendement n° 191 rectifié prévoit une coprésidence du conseil régional de l'emploi entre le président et le préfet de région, Mme la ministre s'étant engagée à mener une expérimentation de pilotage régional dans deux régions.

Je mets aux voix l'amendement n° 191 rectifié .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 176 .

La parole est à M. Roland Muzeau, pour le défendre.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 176 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 85 rectifié .

La parole est à M. Benoist Apparu, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Benoist Apparu

La loi relative aux libertés et responsabilités des universités leur a confié une mission d'insertion professionnelle de leurs étudiants. Il nous semble donc logique que les universités et le nouveau service public de l'emploi aient des relations étroites. C'est pourquoi cet amendement propose que l'université soit représentée dans le conseil régional de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Avis favorable. C'est une très bonne idée que d'associer aux conseils régionaux les universités.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, le Conseil national de l'emploi comporte déjà des personnalités qualifiées, qui pourraient tout à fait être choisies parmi les représentants du monde universitaire. Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée tout en rappelant que ce sont les petites instances qui sont les plus efficaces. C'est au nom du pragmatisme et de l'efficacité que je suis réticente à l'extension du conseil régional de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 85 rectifié .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 194 .

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Cet amendement introduit la représentation des missions locales pour l'insertion des jeunes au sein du conseil régional de l'emploi. Il ne faut certes pas multiplier le nombre de ses membres, mais la présence de ces missions, aux côtés des maisons de l'emploi, est légitime alors que la précarité frappe tout particulièrement les jeunes.

De surcroît, les missions locales travaillent en réseau dans chaque région, ces réseaux étant eux-mêmes coordonnés au niveau national par l'Union nationale des missions locales et le Conseil national des missions locales. Une telle organisation est tout à fait compatible avec la désignation d'un représentant des missions locales dans chaque conseil régional de l'emploi. Cela manifesterait notre volonté commune, qui est aussi une nécessité, d'agir spécifiquement en faveur des jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Défavorable. Il y a plus de 200 maisons de l'emploi, au sein desquelles les missions locales sont représentées.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Et là où il n'y a pas de maison de l'emploi ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Il ne faut pas surcharger le conseil régional de l'emploi. Il finira sinon par être pléthorique et inopérant.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 194 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 10 .

La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 10 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 192 .

La parole est à M. Serge Letchimy, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Dans le cadre de l'expérimentation qui sera menée, il faudra définir la politique territoriale de l'emploi. Nous suggérons donc d'ajouter que le conseil régional de l'emploi « est tenu d'élaborer un document de planification de la politique publique territoriale de l'emploi en début de période triennale », document qui devra être approuvé par les collectivités territoriales concernées.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Avis défavorable, dans la mesure où l'amendement va trop loin et manque de souplesse.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis défavorable également. L'élaboration d'études prospectives et de planification des politiques publiques de l'emploi relève bien davantage du comité de coordination régionale de l'emploi et de la formation professionnelle que du nouveau conseil régional de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Votre intention est de mettre en place un véritable pilotage de la politique de l'emploi à l'échelon régional – laissons de côté la question de la désignation de son responsable – et vous avez accédé à notre demande de procéder à une expérimentation. Il faut donc que vous acceptiez l'idée de donner plus de contenu au conseil régional de l'emploi.

Cela étant, Mme la ministre, en objectant à juste titre qu'il existait déjà les CCREFP, a soulevé le problème de l'articulation entre les différentes instances. Le risque est d'aboutir à deux coquilles vides entre lesquelles il faudra créer un comité de liaison. Comment sortir d'une telle difficulté ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 192 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 193 .

La parole est à M. Serge Letchimy, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Je persiste et signe dans l'idée qu'il faut assurer une cohérence des politiques publiques territoriales, d'autant plus qu'une expérimentation de la présidence de la région implique d'associer à cette politique tous les acteurs, y compris pour le financement des opérations. Je propose donc que le conseil « valide » la convention annuelle entre l'État et le représentant régional de l'institution, au lieu qu'il soit seulement consulté sur l'organisation territoriale du service public de l'emploi dans la région.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Mes chers collègues, laissons respirer les structures ! Je suis frappé, à la veille des élections municipales, par le nombre d'élus qui abandonnent leurs fonctions, usés qu'ils sont par la complexité et l'empilement de structures. Votre intention est louable, monsieur Letchimy, mais ne compliquons pas la tâche des responsables en multipliant les objectifs et les cloisonnements.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Au regard du souci exprimé par le président de la commission, j'aimerais comprendre la stratégie du Gouvernement et de la majorité. Comment mettre en cohérence les actions menées sur le terrain par l'État, par l'institution issue de la fusion ANPE-ASSEDIC, par la collectivité régionale et la collectivité départementale qui a également des responsabilités en matière d'insertion, et par les autres collectivités qui sont mobilisées dans le cadre des maisons de l'emploi ? Nos amendements visent seulement à lever ces interrogations.

La nouvelle institution peut être conçue comme une ANPE qui aura étendu ses compétences et ses moyens, tout en continuant à fonctionner comme aujourd'hui. Mais on se sera alors arrêté au milieu du gué. Si la logique de la fusion, c'est d'améliorer l'efficacité des politiques de l'emploi, notamment en matière de retour à l'emploi, il faut corriger l'ensemble des défauts du dispositif, qui ne se limitent pas à la séparation entre les fonctions d'indemnisation et de placement. Il y a aussi une multiplicité d'acteurs dont les responsabilités se confondent parfois. Or l'articulation que vous présentez ne corrige pas cette faiblesse.

La solution réside dans le copilotage ou la contractualisation des objectifs et des moyens au niveau de la région et des bassins d'emploi. Il faudrait vraiment, madame la ministre, que vous nous expliquiez comment s'articuleront les actions des différents acteurs, car, si l'on persévère dans le système actuel, rien ne changera. Autrement dit, se superposeront la politique de l'emploi de la nouvelle institution, la politique de l'État et celle des régions. Dès lors, l'impact sur le terrain de cette fusion, sur le principe de laquelle nous sommes d'accord, sera extrêmement limité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 193 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 11 et 195 .

La parole est à M. le président de la commission, pour défendre l'amendement n° 11 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Gille, considérez-vous que l'amendement n° 195 a été défendu ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 11 et 195 .

(Ces amendements sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 12 et 196 .

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 12 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 12 et 196 .

(Ces amendements sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 197 .

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Nous en venons à la convention pluriannelle. L'amendement n° 197 propose que l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes – l'AFPA –, qui fait partie intégrante du service public de l'emploi, soit associée à cette convention, ce qui n'est pas le cas dans l'état actuel du texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

, rapporteur. L'avis de la commission est défavorable. Si cet amendement est intéressant dans la mesure où il soulève le problème de la gouvernance – il avait d'ailleurs suscité un débat en commission –, il témoigne aussi d'une mauvaise compréhension du dispositif proposé. La convention tripartite qui existait jusqu'à présent ne peut être comparée à celle créée par le projet de loi, dans la mesure où elle répondait à une logique de coopération entre les acteurs du service public de l'emploi : c'est pourquoi elle intégrait l'AFPA. La convention créée par l'article 1er est différente : il s'agit de définir les objectifs stratégiques du nouvel opérateur, lesquels sont fixés par les seuls commanditaires, à savoir l'État et l'UNEDIC. Il ne s'agit pas pour autant de remettre en cause le rôle de l'AFPA, qui fait toujours partie du premier cercle des acteurs du service public de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis défavorable. Je précise, comme je l'ai fait au Sénat, que la convention pluriannuelle prévue à l'article L. 311-1-2 du code du travail ne concerne que la nouvelle institution et ses deux commanditaires financiers, l'État et l'organisme chargé de l'assurance chômage.

J'en profite, si vous le permettez, monsieur le président, pour répondre à la remarque de M. le député Gorce sur la cohérence du système. Et je reprendrai, pour partie, l'argument de M. le président de la commission des affaires sociales : il faut parfois savoir faire preuve d'ouverture d'esprit – comme je pense l'avoir démontré tout à l'heure –,…

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

…ainsi que de créativité et de liberté. Plutôt que d'imposer des cadres rigides qui s'appliqueraient de manière systématique, quels que soient le bassin d'emploi, la situation locale et la volonté des acteurs locaux de travailler ensemble, il me semble préférable de laisser le dispositif fonctionner quelque temps de manière expérimentale, avant d'en tirer les leçons pour le rendre le plus efficace possible.

Cela dit, la nouvelle institution bénéficiera à la fois d'une ligne directrice nationale définie par la convention d'objectifs et d'une politique territoriale déterminée par plusieurs autres conventions, notamment une convention avec l'État, concernant les actions du fonds national pour l'emploi et les contrats aidés, une convention avec les régions et une convention avec les départements. Le conseil régional pour l'emploi sera, quant à lui, une conférence des financeurs, où se retrouveront les commanditaires.

Quant à la question du rapprochement entre le conseil chargé actuellement de l'emploi et de la formation professionnelle et le futur conseil pour l'emploi, la réforme de la formation professionnelle permettra de trancher en faveur de leur cohabitation ou de leur convergence ; il faudra aussi s'interroger sur leur représentativité, en fonction notamment de leur financement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 197 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'amendement n° 198 n'a plus d'objet compte tenu de l'adoption des amendements nos 12 et 196 .

Je suis saisi d'un amendement n° 111 .

La parole est à M. Roland Muzeau, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Nous avions proposé de substituer à la convention pluriannuelle prévue à l'article L. 311-1-2 du code du travail une loi pluriannuelle de programmation définissant les axes de développement et le financement par l'État du service public de l'emploi. Nous estimons en effet que seule une politique ambitieuse d'emploi et de formation est de nature à répondre aux enjeux de la lutte contre le chômage, et qu'il importe qu'une loi de programmation pluriannuelle fixe les missions et les objectifs de la nouvelle institution.

Pour votre part, vous proposez qu'une convention pluriannuelle définisse les missions assignées au service public de l'emploi et précise notamment les personnes devant bénéficier prioritairement des interventions de l'institution. L'objectif peut paraître louable, ou de bon sens, mais, dans la pratique, la définition de publics prioritaires risque d'autoriser des dérives, liées à la rupture de l'égalité entre les usagers ou à la prise en charge ciblée de certains publics. S'agit-il en réalité de personnes sur lesquelles vous comptez exercer une plus forte pression, au mépris de leur projet de vie ? La loi ne le précise pas. En tout état de cause, nous jugeons plus sage de supprimer la référence à ces publics prioritaires, et donc l'alinéa 16 de l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

, rapporteur. Avis défavorable. Je suis même un peu surpris ! La convention précise « les personnes devant bénéficier prioritairement des interventions de l'institution » : il est en effet important de savoir qui a le plus besoin d'être aidé et orienté. Cela semble évident ! Y voir, comme vous le faites, une dérive risquant de porter atteinte aux libertés individuelles me paraît plutôt étrange !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Je n'ai pas parlé de libertés individuelles, mais d'égalité, ce qui est différent !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

, rapporteur. En tout cas, je vous ai entendu parler de « dérive ».

Il s'agit de cibler les publics les plus concernés : c'est une question de bon sens !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Il est défavorable, monsieur le président. Je précise à nouveau que les prestations seront proposées à tous les demandeurs d'emploi, qu'ils soient indemnisés ou non ; il nous paraît néanmoins utile de préciser dans la convention pluriannuelle un certain nombre de prestations destinées à des publics « prioritaires », car très éloignés de l'emploi, comme les seniors, les jeunes ou certaines femmes. Aussi me semble-t-il légitime de maintenir le terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Monsieur le rapporteur, je n'ai pas parlé de dérives concernant les libertés, mais j'ai voulu souligner – et Mme la ministre l'a bien compris – qu'en mettant l'accent sur des publics prioritaires, vous risquiez, de notre point de vue, de contrarier encore un peu plus l'effort global qui doit être consenti en faveur des demandeurs d'emploi. Avec ce genre de spécification, on se retrouve non seulement à la limite de la stigmatisation, mais aussi sur la corde raide dès lors qu'il faut apprécier si des offres d'emplois sont « valables » ou « acceptables ». Je ne réitérerai pas les propos que j'ai déjà tenus, mais nous craignons d'avoir affaire à des dispositifs dont la dimension coercitive est plus importante que l'objectif de réinsertion.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 111 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 199 .

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Sur le même sujet, je reprendrai les arguments de M. Méhaignerie et de Mme la ministre : je pense que l'alinéa 16 alourdit le texte. Si, dans la convention, les parties prenantes veulent définir des publics prioritaires, elles peuvent toujours le faire ; mais le projet de loi en fait une obligation ! C'est, pour le moins, une maladresse ! Comme nous ne voulons pas prolonger le débat, nous retirons l'amendement n° 199 , mais nous souhaitions attirer votre attention sur ce point et en appeler à une certaine sagesse.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'amendement n° 199 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 200 .

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Cet amendement vise à obtenir des précisions sur les moyens humains que le Gouvernement compte mobiliser au service de l'accompagnement des demandeurs d'emploi. Nous souhaiterions que cette priorité soit mentionnée de manière plus explicite dans le texte. Et puisque nous avons eu un débat sur le nombre de demandeurs d'emploi qui devront être suivis par chaque conseiller de la nouvelle institution, ce serait l'occasion pour le Gouvernement de préciser ses objectifs en la matière.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

, rapporteur. Avis favorable. La commission a jugé qu'il était important de connaître le nombre moyen de demandeurs d'emplois suivis par chaque conseiller. Dans l'optique d'évaluation qui est la nôtre, c'est un bon amendement.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Gorce, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée. Sur le principe, je ne pense pas que ce niveau de détail relève de la loi. C'est néanmoins un débat intéressant et nécessaire.

Actuellement, comme cela a été dit, environ quatre-vingt-dix demandeurs d'emplois inscrits depuis plus de quatre mois sont traités par référent ; notre objectif est de passer rapidement à soixante, voire à trente pour les personnes les plus éloignées de l'emploi, qui sont depuis longtemps au chômage. Reste que c'est à l'Assemblée de décider s'il faut ou non aller jusqu'à ce degré de précision.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 200 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 112 .

La parole est à M. Roland Muzeau, pour le défendre.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 112 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 201 .

La parole est à Mme Monique Iborra, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Cet amendement porte sur le recours aux organismes privés de placement. Nous souhaiterions qu'il soit bien inscrit dans la loi que l'évaluation se fait au moyen d'indicateurs de performance précisés par voie réglementaire. L'amendement n° 201 propose par conséquent de compléter l'alinéa 19 de l'article par ces mots : « , ainsi que les conditions d'évaluation à partir d'indicateurs de performance fixés par décret. ».

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

, rapporteur. Loi bavarde, comme dirait le président Méhaignerie ! (Sourires.) L'alinéa 19 précise les « conditions de recours aux organismes privés », et le 20 « les conditions dans lesquelles les actions de l'institution sont évaluées, à partir d'indicateurs de performance qu'elle définit ». On ne va pas multiplier les précisions à l'infini ! L'avis est donc défavorable : il faut simplifier le texte.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Avis défavorable également : les opérateurs privés de placement étant mis en concurrence, ils sont déjà évalués dans ce cadre. Je ne pense pas que le rôle du législateur soit d'entrer dans ces détails. Comme le président Méhaignerie, je dis : « Loi bavarde » !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 201 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 113 .

La parole est à M. Roland Muzeau, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Le texte prévoit que la convention pluriannuelle précise les conditions dans lesquelles les actions de l'institution seront évaluées, à partir d'indicateurs de performance qu'elle définit. Or ces critères sont en général déclinés en objectifs strictement quantitatifs, et non qualitatifs. Cela ne laisse pas de nous inquiéter. Compte tenu des objectifs que vous vous fixez, et qui sont eux-mêmes quantitatifs – je fais allusion à celui de ramener le taux de chômage à 5 % d'ici 2012 –, nous craignons que l'efficacité des activités de placement ne soit elle-même mesurée qu'en objectifs chiffrés, abstraction faite de la qualité des emplois pourvus.

C'est pourquoi nous souhaitons préciser que l'évaluation porte sur le bon exercice par l'institution de ses missions, telles qu'elles sont définies par le code du travail. Comme la situation de l'emploi dans notre pays nous y invite, il semble en effet préférable de raisonner en termes d'obligation de moyens plutôt que d'obligation de résultats. L'amendement n° 113 propose donc, après le mot « évaluées », de rédiger ainsi la fin de l'alinéa 20 de l'article : « par référence aux missions qui lui sont confiées, telles que définies dans le code du travail ».

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

La logique qui préside à cet amendement est à l'opposé de celle de l'amendement précédent, présenté par le groupe socialiste, puisque vous refusez l'évaluation à partir des indicateurs…

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

…de performance. C'est donc sur le fond que nous sommes défavorables à cet amendement car cette évaluation nous semble au contraire des plus souhaitables.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 113 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 207 .

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'amendement n° 207 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 280 .

La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

L'amendement n° 280 est de précision, monsieur le président.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 280 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 244 .

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

L'amendement n° 244 vise à développer la pratique du CV anonyme dans le processus de recrutement, en l'étendant aux organismes de placement, ce que sera l'institution que le projet de loi vise à créer.

Le CV anonyme a beaucoup fait débat au cours de la précédente législature durant laquelle j'avais déposé plusieurs amendements visant à l'instaurer. Après la discussion de la loi de cohésion sociale, le Gouvernement a demandé à la commission Fauroux de plancher sur cette proposition, commission dont le rapport a du reste indiqué qu'il s'agissait d'un moyen utile pour lutter contre les discriminations à l'embauche. La loi sur l'égalité des chances du 31 mars 2006 a finalement instauré l'anonymat du CV, mais, malheureusement, le décret visant à préciser les conditions dans lesquelles cette disposition devait être mise en application dans le code du travail n'est jamais paru, le Gouvernement souhaitant que les partenaires sociaux se saisissent de la question. La négociation sur le CV anonyme a abouti à l'accord interprofessionnel sur la diversité du 12 octobre 2006, visant à l'instaurer de manière expérimentale.

Les expérimentations prévues ont été lancées. En novembre dernier, les syndicats signataires de l'accord appelaient à appliquer le CV anonyme, et, en décembre, le président de la HALDE regrettait qu'il ne soit pas assez utilisé. L'objectif du présent amendement est donc double : le premier, d'étendre la pratique du CV anonyme aux organismes de placement ; le second, de demander à Mme la ministre si elle compte signer le décret d'application.

À tous ceux qui ne manqueront pas de me répondre que le CV anonyme revient à embaucher à l'aveugle, je rappelle que le débat a déjà eu lieu et a conclu qu'il n'en est rien, le CV anonyme visant seulement à éviter un tri préalable des candidats et à s'assurer qu'ils seront choisis sur leur motivation, leur expérience et leur qualification, et non sur leur nom, leur âge, leur origine ou leur lieu de résidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Monsieur Vercamer, comme vous l'avez rappelé, le débat sur le sujet a déjà eu lieu. L'intention qui préside à la création du CV anonyme est évidemment louable, afin de lutter, comme le souhaite la HALDE, contre les discriminations à l'embauche. Toutefois, ce qui a effrayé la commission, c'est que le nouvel organisme aura tellement de problèmes à résoudre qu'on voit mal comment, au plan national, il pourrait procéder au sein des agences à une expérimentation de recherche d'emploi avec CV anonyme. Un tel défi paraît difficilement surmontable à l'heure actuelle. Attendons plutôt de pouvoir tirer les enseignements de l'expérimentation en cours dans le Rhône : ce serait plus sage. Aussi la commission a-t-elle émis un avis défavorable.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le député, je souhaite que vous retiriez votre amendement après avoir écouté les explications du Gouvernement.

Nous sommes d'accord : la lutte contre les discriminations à l'embauche est une cause nationale à laquelle la nouvelle institution, loin de se soustraire, devra participer activement. J'ai du reste observé avec intérêt que l'invité d'honneur du quarantième anniversaire de l'ANPE était M. Louis Schweitzer, président de la HALDE, qui a su convaincre les dirigeants de l'Agence de la justesse de sa cause et je suis persuadée que ces derniers n'auront pas de mal de convaincre à leur tour les salariés des ASSEDIC d'appliquer le principe de non-discrimination à l'embauche.

Le service public de l'emploi, lui, s'est déjà engagé depuis le programme européen Equal sur la professionnalisation des acteurs de l'intermédiation concernant les questions de discrimination, fait qui s'ajoute à la présence du président de la HALDE et au rappel qu'a constitué son intervention. Je m'engage à ce que les règles applicables au sein du service public de l'emploi quant aux offres d'emploi et aux placements relèvent d'une déontologie sans faille en matière de lutte contre les discriminations à l'embauche et à ce que l'ensemble des acteurs du service public de l'emploi mettent en oeuvre cette politique, en lien avec les entreprises, auprès desquelles ils peuvent faire de la pédagogie. On sait qu'un grand nombre d'entre elles, pas toutes, il est vrai, participent déjà au mouvement et sont actives en la matière. Le service de placement effectué par la nouvelle institution devra également prendre à son compte cette obligation en vue d'accélérer la promotion de la diversité.

Au bénéfice de ces engagements, que je prends ici solennellement, je vous demande, monsieur Vercamer, de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Je vais effectivement le retirer, monsieur le président, car je comprends bien que le dispositif n'est pas facile à mettre en place, surtout à la création d'une nouvelle institution. Toutefois, au moment où nous allons parler du plan banlieues et de l'emploi dans les quartiers, il est important, madame la ministre, que vous vous saisissiez à bras-le-corps de cette question afin de la faire avancer, le CV anonyme étant loin d'être la seule disposition envisageable.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

C'est vrai.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

C'est la proposition que je vous fais, mais je conçois aisément qu'on puisse présenter d'autres mesures qui poursuivent le même objectif. Ce qui est important, c'est de travailler sur le sujet si nous ne voulons plus connaître d'explosion dans les banlieues et si nous voulons mettre fin à l'existence de ghettos.

Je retire donc mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'amendement n° 244 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 210 .

La parole est à Mme Monique Iborra, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

L'État ayant transféré aux régions les compétences et les moyens relatifs aux activités de l'AFPA, l'amendement n° 210 propose de prolonger de vingt-quatre mois la période transitoire prévue en la portant au 31 décembre 2010 et d'en profiter pour réfléchir, en lien avec l'AFPA qui est très inquiète quant à son avenir, aux formes juridiques qui pourraient permettre à l'Agence de conserver son statut actuel.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Cet amendement a été déposé trop tard pour pouvoir être examiné en commission. C'est la raison pour laquelle – cela m'a paru d'excellente méthode – je me suis informé de l'avis que Mme la ministre a émis au Sénat sur une proposition semblable, qu'elle a rejetée. Aussi la commission va-t-elle faire de même sur cet amendement qui vise à proroger de vingt-quatre mois une période transitoire qui s'achève de plein droit le 31 décembre 2008, le débat ayant déjà eu lieu au Sénat.

Du reste, comme l'a expliqué Mme Lagarde au Sénat, cet amendement n'a pas sa place dans la discussion du fait que vingt-deux régions ont déjà mis à profit le délai qui leur était imparti pour accomplir le transfert des compétences et des crédits associés en matière de financement des formations des demandeurs d'emplois et qu'il reste onze mois et demi aux deux dernières pour le faire. Elle a en outre précisé que, s'agissant du code des marchés publics, toutes les analyses juridiques concluaient que l'achat de prestations de formation relève de la mise en concurrence.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Défavorable.

Cette question a en effet déjà été débattue au Sénat et un amendement similaire a été rejeté sur un avis défavorable du Gouvernement. J'ai alors proposé de constituer un groupe de travail entre mes services et l'Association des régions de France, afin d'étudier de meilleures conditions de passation des commandes des régions en matière de formation.

J'ai écrit en ce sens à M. Alain Rousset, qui n'est plus là mais qui, je le sais, a reçu ma lettre. Les travaux, qui commenceront dans les tout prochains jours, devront aboutir, d'ici fin mars 2008, à des outils méthodologiques permettant de garantir juridiquement les procédures de passation des marchés de formation, outils qui seront mis à la disposition des conseils régionaux. Tout sera fait pour qu'ils soient disponibles avant le 31 décembre 2008. Il ne me paraît donc pas utile de prolonger la période transitoire.

C'est donc, je le répète, un avis défavorable que le Gouvernement émet sur cet amendement, mais j'ai souhaité faire partager à Mmes et MM. les députés le travail de concertation que nous avons commencé au Sénat et que nous continuons à mettre en oeuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'amendement n° 210 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Mes chers collègues, compte tenu de l'heure tardive, je vous propose de nous contenter d'écouter l'orateur inscrit sur l'article 2, après quoi nous lèverons la séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Je voudrais une nouvelle fois mettre l'accent sur l'absence de gouvernance locale alors que la loi évoque deux conventions très importantes sur lesquelles la politique de l'emploi sera fondée : la première, prévue à l'article 1er qui introduit dans le code du travail l'article L. 311-1-2, est une convention pluriannuelle liant l'État et le régime d'assurance chômage ; la seconde, prévue à l'article 2 qui introduit dans le code du travail notamment l'article L. 311-7-9, lie l'État et le représentant régional de l'institution. C'est pourquoi je regrette que les collectivités locales soient absentes de ces conventions, dont la seconde surtout est fondamentale parce que c'est sur elle que pourrait reposer la construction des politiques de l'emploi. Toutefois, devant l'éventualité d'adopter en CMP une expérimentation dans deux régions, qui me paraît une ouverture très intéressante, j'écourte mon propos en souhaitant que celle-ci permette d'élargir le champ de la gouvernance régionale de la manière la plus efficace possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Prochaine séance, aujourd'hui, mercredi 23 janvier 2008, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 23 janvier 2008, à une heure trente.)

Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

Jean-Pierre Carton