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Séance en hémicycle du 16 décembre 2008 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Jacques Domergue et plusieurs de ses collègues, portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants (nos 1182, 1318).

La parole est à M. Jacques Domergue, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Madame la présidente, madame la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, mes chers collègues, le texte en discussion est un texte fondateur, qui vise à mettre en place une véritable réforme des études de santé.

Chaque année, 57 000 étudiants s'engagent dans ces études, se présentant soit au concours de première année de médecine, commun aux odontologistes et aux sages femmes, soit au concours d'entrée en faculté de pharmacie. Mais, compte tenu des numerus clausus, seuls 12 452 d'entre eux accéderont à l'une de ces filières.

Comment ne pas réagir face à ce gâchis humain, responsable de traumatismes et de désillusions parfois irréversibles ? Comment expliquer à ces étudiants et à leurs familles l'intérêt et la difficulté d'une telle sélection, quand ils entendent dire parallèlement que, manquant de médecins, nous devons en faire venir de l'étranger, alors que nous collons leurs enfants y compris lorsqu'ils ont plus de treize de moyenne ?

Madame la ministre, vous avez souhaité, dans le cadre du plan « Réussir en licence », offrir plus de chances aux étudiants. Étant donné que les professions de santé n'étaient pas encore engagées dans le processus LMD et que des aménagements étaient nécessaires pour concrétiser cette volonté de réussite, vous avez mandaté le professeur Jean-François Bach, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, pour réfléchir au problème crucial de la sélection des professionnels de santé et tenter de réduire le taux d'échec. Le texte que je propose s'inspire directement des conclusions de son rapport.

La réforme des études de santé a pour objectif d'accroître les chances de réussite des étudiants dans les différentes filières. En regroupant les étudiants de PCEM 1 et de pharmacie, nous avons voulu donner aux futurs acteurs de la santé une culture commune. Quoi qu'on en dise, celle-ci doit être acquise dès la première année, d'autant que certaines professions, comme celle de pharmacien, sont amenées à évoluer. Il n'est donc pas anormal de regrouper au sein d'une même filière des étudiants que leur profession amènera à travailler de manière complémentaire.

Je pense d'ailleurs qu'il faudra réfléchir ultérieurement à une véritable organisation des professions paramédicales. La cohérence de notre système de santé impose en effet un parallélisme des professions médicales et paramédicales, entre lesquelles doivent exister des passerelles. Il faut en effet éviter qu'une infirmière soit bloquée dans son cursus et ne puisse guère évoluer que vers une carrière administrative. Le texte ébauche quelques premières propositions dans ce sens.

En mettant en place quatre concours en fin de première année, nous offrons plus de chances de réussite aux étudiants, qui pourront ainsi choisir entre diverses filières comme l'odontologie ou la pharmacie. Mais l'institution de passerelles ouvre également la filière santé à des étudiants venus d'autres horizons, qui n'avaient pas jusque-là la possibilité de l'intégrer.

Le rapport Bach avait envisagé l'éventualité d'un concours parallèle, qui n'était guère applicable. Nous avons préféré prévoir des passerelles destinées à des étudiants issus de filières littéraires ou de Sciences Po. À terme, elles devront également s'ouvrir à ceux qui viennent des facultés de droit, discipline qui entretient des rapports certains avec la santé. Autant de possibilités, pour des étudiants aujourd'hui écartés des filières de santé, de les rejoindre et les enrichir. L'intégration se fera au niveau du master ou du doctorat, en deuxième ou troisième année.

En intégrant la semestrialisation de la sélection, nous favorisons une réorientation active. Je n'ignore pas que ce point a suscité certaines réserves. Mais les étudiants engagés dans une filière de santé et qui n'ont pas le niveau suffisant se heurtent aujourd'hui à un mur en fin de première année. Les statistiques prouvent en effet que, même après un redoublement, les chances de réussite de ceux dont la moyenne est inférieure à 7 sur 20 ou dont le classement correspond à trois fois le numerus clausus sont quasi nulles. On ne peut les laisser dans une telle impasse. La semestrialisation leur permettra de se réorienter vers des filières scientifiques, quitte à ce qu'ils tentent, une fois leurs connaissances consolidées par douze ou dix-huit mois de formation, de réintégrer les filières de santé. Ainsi, cette réforme vraiment positive améliorera leurs perspectives de réussite dans un secteur où ils sont aujourd'hui voués à l'échec.

Conscient que des aménagements sont nécessaires pour que les universités scientifiques se préparent à l'arrivée d'étudiants qui ne peuvent actuellement y accéder, je propose, à l'article 2, un aménagement progressif de la semestrialisation jusqu'en 2011.

L'article 1er concerne, lui, la description des principes de la sélection, avec le tronc commun aux études de santé incluant les médecins, les odontologistes, les sages-femmes et les pharmaciens.

La semestrialisation et la mise en place des quatre concours sont inspirées par le système des grandes écoles. Elles permettront aux étudiants qui entrent dans la filière de santé d'effectuer un choix qui n'est pas possible actuellement. L'existence de passerelles offrira aux professionnels paramédicaux possédant des diplômes supérieurs équivalents à un master – par exemple à une infirmière titulaire d'un master dans le domaine de l'hygiène – d'entrer dans la filière médicale. À ce titre, le texte ébauche une médicalisation des professions paramédicales, qui devra être complétée par un autre texte.

Ces éléments vont dans le bon sens. Au terme de la préparation prévue par les doyens des différentes universités à l'issue de la circulaire du 1er août 2008, il est essentiel que le texte puisse s'appliquer dès la rentrée 2009. Il est en effet urgent de répondre à l'attente de ceux qui sont chargés de l'organisation de l'enseignement des filières de santé. C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à prendre vos responsabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Madame la présidente, monsieur le président et monsieur le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, mesdames et messieurs les députés, c'est avec un grand plaisir que je reviens devant vous quelques semaines après avoir présenté le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche – budget en exceptionnelle augmentation, compte tenu du contexte économique, budget courageux mais surtout budget ambitieux pour notre système de recherche, pour nos enseignants et avant tout pour nos étudiants. Ce sont nos étudiants, en effet, qui sont les forces vives de la nation. Ce sont eux qui, grâce à leurs compétences, feront demain la richesse de notre pays et qui permettront de contrecarrer les effets de la crise. Améliorer leurs conditions de vie est une priorité que nous partageons. C'est pour cela que nous sommes à nouveau réunis aujourd'hui.

Monsieur Domergue, permettez-moi de vous remercier de l'initiative que vous avez prise et du travail que vous avez effectué avec vos collègues députés et sénateurs pour élaborer cette proposition de loi visant à poser le socle juridique de la réforme très attendue de la première année des études de santé. Je l'ai dit, et je le répète : c'est d'abord l'avenir des étudiants, leur bien-être, leur épanouissement, qui est le fil rouge de votre réflexion et de notre action.

Vous l'avez souligné dans votre rapport : nos étudiants vivent aujourd'hui un véritable enfer, tout comme les professeurs, qui enseignent dans des amphithéâtres surchargés, et comme les parents dont les enfants s'investissent dans des études pour se retrouver, le plus souvent, sans résultats et sans perspectives. Cette situation n'est plus acceptable, elle n'est plus durable. À l'évidence, il est de notre devoir d'améliorer les conditions d'études, d'atténuer la pression psychologique et d'augmenter le taux de réussite en première année d'études médicales. Tel est l'objet de cette proposition de loi. Tels sont les objectifs auxquels nous devons consacrer notre énergie.

Regardons la réalité en face : alors que nous agissons pour rendre nos universités autonomes et modernes, alors que nous nous battons pour réduire l'échec en première année, grâce au plan « Réussir en licence », nous laissons, chaque année, 57 000 étudiants s'engouffrer en première année d'études de médecine et de pharmacie, où ils échouent pour la très grande majorité d'entre eux.

Avec 20 % de réussite en PCEM 1 et 27,6 % à l'issue de la première année de pharmacie, ces concours sont extrêmement sélectifs. Ce gage d'excellence est malheureusement synonyme, pour quatre élèves sur cinq, de vocations brisées, de sacrifices et d'efforts consentis pour rien, qui ne déboucheront, au mieux, que sur une nouvelle année de travail et un nouveau concours. Un bon étudiant peut, en effet, à l'aube de sa vie et de son orientation professionnelle, perdre deux ans en première année d'études de médecine, puis deux années supplémentaires en première année de pharmacie – ou l'inverse. Quatre années d'études supérieures ne l'auront finalement mené qu'à un échec, sans qu'il puisse bénéficier d'aucune équivalence, ni emprunter aucune voie de réorientation.

Bien entendu, il ne s'agit pas de remettre en cause la sélection, qui est la même dans toutes les filières de ce niveau d'exigence. Le numerus clausus est le gage de l'égalité républicaine et de la qualité de notre système de santé. Il garantit le recrutement des meilleurs et de ceux qui auront fait le plus d'efforts. L'excellence médicale française trouve sa source dans cette sélection. Celle-ci est juste et s'opère à armes égales, puisqu'elle distingue les meilleurs étudiants, sans exclure personne par principe.

Si nous ne pouvons rien contre la pression qui naît de la perspective du concours, nous avons, en revanche, les moyens d'atténuer considérablement le climat d'angoisse et de tension qui règne dans les facultés de médecine et de pharmacie, et il est grand temps que nous le fassions. Certains objecteront sans doute que cette tension permanente est saine, qu'elle fait partie des règles du jeu qui ont formé avec succès des générations de médecins, de dentistes, de sages-femmes et de pharmaciens. Mais si cette première année d'angoisse et de stress est très rapidement oubliée par les étudiants qui réussissent, il n'en va pas de même pour l'immense majorité des recalés du concours, qui en gardent le plus souvent un souvenir amer – quand ils ne perdent pas durablement confiance en eux. Nous souhaitons tous mettre fin à cette dérive, et cette réforme permet de le faire.

En conséquence, cette première année d'études ne doit plus être seulement conçue pour nos futurs médecins, dentistes, sages-femmes et pharmaciens ; elle doit aussi l'être pour tous ceux qui ne pourront pas le devenir. Nous devons ouvrir des perspectives à ces derniers pour que l'échec en première année ne soit plus synonyme d'impasse. Il faut réduire cet effet de couperet : la proposition de loi de Jacques Domergue vous y invite.

Il n'existe pas d'autres exemples d'une alternative aussi radicale que celle imposée aujourd'hui aux étudiants de première année de médecine et de pharmacie. Les étudiants des classes préparatoires scientifiques et économiques qui échouent à Polytechnique ou à HEC peuvent entrer dans d'autres écoles. Dans tous les cas, ceux qui, au terme de deux ans de classes préparatoires, échouent aux concours se voient reconnaître les crédits équivalents à quatre semestres de licence. Des garanties du même ordre doivent donc être offertes aux étudiants de PCEM 1 et de première année de pharmacie.

J'ai lancé, il y a un an déjà, toute une série de travaux sur ce sujet. En octobre 2007, le professeur Jean-François Bach, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, a ainsi été chargé d'une mission de réflexion et de proposition visant à moderniser la première année d'études médicales. Après quatre mois d'auditions et de réflexion au sein d'une commission composée des représentants des doyens, des présidents des commissions pédagogiques nationales des études des quatre disciplines concernées, de professeurs de lettres et de sciences, il m'a remis dix recommandations. Elles ont, évidemment, fait l'objet de concertations avec tous les partenaires sociaux, à l'issue desquelles nous avons rédigé ensemble les grands principes de la réforme de la première année des études de santé.

Les doyens et les présidents d'universités ont été informés de ces travaux. D'ores et déjà, ils ont été encouragés à prendre les mesures qui ne relevaient pas de la loi. Ils attendent aujourd'hui, avec impatience, la décision du législateur, qui leur permettra de mettre la réforme en oeuvre dans de bonnes conditions, dès la rentrée 2009.

Quels sont les principes de cette réforme ?

Il s'agit, tout d'abord, de réduire le taux d'échec en première année des études de santé. Alors que nous agissons, avec le plan « Réussite en licence », pour réduire de moitié le taux d'échec en première année de licence, il est encore de 80 % en PCEM 1 et de 72,4 % en première année de pharmacie. Ni ce gâchis humain ni l'orientation par défaut qu'implique le concours unique en première année de médecine ne sont plus acceptables ! Vous le savez mieux que moi, monsieur Domergue, le médecin n'exerce pas le même métier que la sage-femme ou le dentiste. Ces trois professions recouvrent des réalités bien différentes, à tel point qu'il semble difficile de demander aux étudiants d'avoir des vocations interchangeables.

Actuellement, le classement en fin de PCEM 1 assure aux étudiants les mieux placés la possibilité de choisir leur filière et contraint les autres à prendre ce qui reste. Ce système est nuisible à deux égards : il brise des vocations et il hiérarchise de futurs professionnels de santé qui seront amenés à travailler ensemble et en coordination. Avec une première année associant les pharmaciens, les conditions favorables au partage d'une culture commune entre tous nos professionnels de santé sont réalisées. Cette démarche est particulièrement cohérente alors que ma collègue Roselyne Bachelot propose, dans le projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoires », la création d'agences régionales de santé qui auront vocation à mettre en relation tous les professionnels de santé, au niveau local, L'ouverture d'esprit et les connaissances qu'en retirera chacun des praticiens seront, j'en suis certaine, une garantie supplémentaire d'un meilleur suivi des patients.

Ensuite, vous l'aurez compris, nous partageons une même préoccupation : former des professionnels de santé compétents, certes, mais aussi épanouis. Tel est bien le but de la nouvelle première année et de la création de quatre concours distincts : les étudiants pourront choisir de se présenter à un ou plusieurs concours selon leur désir, et pourront aussi bénéficier d'un « droit au remords ». En effet, il se peut que certains élèves ayant réussi plusieurs concours fassent un choix qu'ils regrettent ensuite. Il leur sera désormais possible de revenir sur ce choix et de rejoindre une des autres filières dont ils auraient réussi le concours. Cette première année commune permettra d'augmenter le taux de succès aux concours et de guider les étudiants vers la réussite.

Comment obtenir ce résultat si l'on n'augmente pas le numerus clausus, me demanderez-vous ? Nous y arriverons en offrant à chacun un parcours adapté à son choix et à ses résultats. La conséquence en sera une diminution importante des redoublements. Le redoublement ne sera plus la règle, mais sera réservé à ceux qui pourront vraiment en tirer profit. Ceux dont les résultats ne seront pas suffisants pourront, dès le premier semestre, bénéficier d'une réorientation vers les filières de leur choix. Les guider vers la réussite consiste, avant tout, à mieux les orienter. Cette garantie est offerte par le plan « Réussite en licence », grâce à un meilleur suivi des étudiants et à un tutorat renforcé. Ils pourront revenir, s'ils le souhaitent, après avoir validé deux ou trois années de licence. Ces passerelles sont cruciales et doivent être consolidées.

Cette première année de licence santé ne sera plus uniquement conçue dans la perspective des concours : elle sera aussi pensée pour la formation, au sens large, des étudiants. Ainsi, j'ai souhaité que soient retravaillées son organisation et sa maquette pédagogique. Une commission composée des experts représentant les quatre disciplines s'est réunie pendant quatre mois pour bâtir une sorte de feuille de route que j'enverrai, dans les prochaines semaines, à tous les présidents d'université et à tous les directeurs d'UFR médicales. Cette première année sera ouverte sur les sciences humaines et les langues, et l'enseignement des connaissances scientifiques fondamentales sera renforcé afin de favoriser les échanges entre les différentes filières proposées par l'université. En offrant de nouvelles perspectives aux étudiants en situation d'échec, nous voulons dédramatiser les enjeux de la première année.

Enfin, notre dernier objectif s'inscrit dans la même philosophie : il faut que chaque étudiant puisse trouver sa voie. Les nouvelles passerelles que nous propose de créer Jacques Domergue permettent ainsi de donner leur chance aux étudiants qui manifestent une vocation tardive : ils devront avoir les moyens de réaliser leur rêve. Leurs dossiers seront examinés par une commission, et des entretiens de motivation avec les doyens et les professeurs permettront à ces derniers de s'assurer qu'un étudiant venu d'une filière littéraire, par exemple, sera bien en mesure de suivre l'un des cursus de santé. Pourquoi un littéraire ne pourrait-il pas devenir médecin ? En multipliant les passerelles d'entrée – qui resteront, bien sûr, en nombre restreint –, nous souhaitons diversifier les profils de nos futurs professionnels de santé. Demain, un étudiant titulaire d'un master de droit, de lettres ou de sciences sociales, mais aussi, pourquoi pas, un diplômé de Sciences Po ou d'une grande école de commerce, pourra tenter sa chance. Il est important que ces exceptions soient prévues dans notre code de l'éducation. Sous quel prétexte refuserions-nous à ces étudiants le droit de concourir ?

Pour conclure, je salue la petite révolution que nous propose Jacques Domergue en associant les pharmaciens à cette année commune. Elle est pour moi plus que cohérente : elle est essentielle, et elle est un symbole. Je me réjouis très sincèrement de voir travailler ensemble tous les acteurs de la chaîne de santé de notre pays. Cette année de formation commune sera justement équilibrée entre enseignements fondamentaux et enseignements spécialisés. Elle permettra aux étudiants de première année de pharmacie d'acquérir une culture qu'ils partageront avec ceux de trois autres professions, alors que les cursus étaient séparés jusqu'à présent. Avant tout, ils pourront ainsi améliorer leurs chances de réussite.

Mesdames, messieurs les députés, vous aurez compris à quel point cette réforme portée par Jacques Domergue me tient à coeuvre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Pierre Door.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à remercier le groupe UMP d'avoir pris l'initiative d'inscrire à l'ordre du jour de notre assemblée, dans le cadre de l'une de ses « niches parlementaires », la proposition de loi déposée par notre collègue Jacques Domergue et plusieurs membres de notre groupe.

Madame la ministre, le soutien que vous apportez à ce texte nous satisfait car nous allons enfin engager l'indispensable et urgente réforme de la première année de médecine, dont chacun sait qu'elle est aujourd'hui synonyme de gâchis humain. Comme le souligne le rapport du professeur Jean-François Bach, qui vous a été remis en février dernier, le taux d'échec à l'issue de cette première année atteint près de 80 %, mais, surtout, il n'existe dans ce cas aucune possibilité, ou presque, d'équivalence et de réorientation. Ainsi, chacun d'entre nous connaît des jeunes bacheliers qui ont rêvé d'embrasser la carrière médicale, mais dont l'élan a été brisé après seulement une ou deux années d'études. L'échec est traumatisant pour eux, mais aussi, et peut être même plus, pour leur famille. On retrouve ensuite ces jeunes, trop nombreux, dans des filières aventureuses, dans des impasses ou tout simplement pris au dépourvu devant l'interrogation : « Que vais-je bien pouvoir faire ? »

La proposition de loi qui nous est soumise aujourd'hui doit permettre de remédier à ce problème. Elle pose les bases juridiques d'une réforme qui créée une première année commune aux études de santé et facilite la réorientation des étudiants. Cette réforme urgente fait l'objet d'un large consensus sur les bancs de notre assemblée, et sa mise en oeuvre est attendue avec impatience par les étudiants eux-mêmes.

Elle prévoit la création d'un tronc commun entre les quatre filières – médecine, odontologie, maïeuthérapie et pharmacie –, intitulé « licence santé 1 ». Ce dispositif conduira à un rapprochement des actuels PCEM 1 et PCEP 1. Il vise à donner aux étudiants une culture commune aux quatre filières. Ultérieurement, ils seront, en effet, amenés à travailler ensemble, autour du patient, pour la coordination et la qualité des soins.

Cette réforme pose aussi le principe de la réorientation précoce, à l'issue du premier semestre ou de la première année, des étudiants qui n'auraient pas les capacités nécessaires pour suivre un cursus de santé. Sur ce fondement, le nombre de redoublements sera limité : les étudiants les moins bien classés aux concours ne seront pas autorisés à redoubler immédiatement leur première année. Pour se réinscrire, ils devront avoir validé une deuxième année de licence dans un autre cursus universitaire.

La proposition de loi prévoit également de mettre en place de nouvelles passerelles d'entrée dans les filières de santé afin de diversifier les profils de nos étudiants. Ceux d'entre eux qui seront titulaires d'un master ou d'un doctorat, y compris dans des disciplines non scientifiques, pourront désormais avoir accès à la deuxième année de santé.

En outre, le texte maintient ce que l'on appelle un droit au remords, permettant aux étudiants de changer de filière si celle qu'ils ont initialement choisie ne leur convient pas.

Une grande partie de la réforme, à laquelle je vous sais très attachée, madame la ministre, se fera par voie réglementaire. Aussi espéré-je que vous pourrez, à la faveur de nos débats, nous apporter des précisions sur son financement, lequel a toute sa place dans le plan « Réussite en licence » – que vous avez lancé et que je salue –, ainsi que sur son contenu. Je pense, par exemple, à la limitation des redoublements, à l'évolution des programmes, aux nouvelles possibilités offertes aux fameux « reçus-collés », ou encore aux passerelles entre la « L1 santé » et certaines écoles paramédicales, notamment de kinésithérapie : autant de sujets qui suscitent des interrogations légitimes, et sur lesquels je ne doute pas que vous nous apporterez des éclaircissements.

Par ailleurs, chacun est conscient que le nouveau dispositif s'inscrit dans le cadre du vaste chantier de l'application du LMD aux études médicales et paramédicales. Pourriez-vous nous indiquer quel est l'état d'avancement de cette réforme, complexe mais indispensable ?

Pour toutes ces raisons, nous devons, mes chers collègues, nous retrouver pour soutenir ce texte novateur et ambitieux, qui apporte une réponse forte aux attentes du monde étudiant.

En conclusion, je souhaite insister sur un point qui me paraît essentiel : l'urgence de la réforme milite pour que son entrée en vigueur intervienne dès la prochaine rentrée universitaire. Nous n'avons que trop attendu pour agir et proposer enfin un avenir aux milliers d'étudiants, souvent de qualité, qui restent au bord du chemin. C'est pourquoi je regrette qu'un amendement visant à reporter l'entrée en vigueur du nouveau dispositif à la rentrée universitaire 2010-2011 ait été adopté en commission la semaine dernière, contre l'avis de notre rapporteur. Toutefois, la procédure de l'article 88 du règlement permettra de rétablir la situation, et je m'en félicite.

Si le calendrier est effectivement volontariste, le Gouvernement avait largement anticipé la réforme, comme en témoigne la circulaire du 1er août 2008 adressée aux présidents d'université, aux recteurs d'académie, aux directeurs d'UFR et aux doyens. Les facultés de Bordeaux et de Paris VI, par exemple, sont déjà prêtes. Le professeur Bach a eu le temps, lors de la rédaction de son rapport, de préparer les esprits à la réforme. Il nous faut agir sans tarder, dans le seul intérêt des futurs étudiants. Aussi, je vous invite, mes chers collègues, à adopter l'amendement qui sera proposé par notre rapporteur au titre de l'article 88, afin de rétablir l'entrée en vigueur du nouveau dispositif à la rentrée universitaire prochaine.

Sous réserve de l'adoption de cet amendement, le groupe UMP votera avec enthousiasme cette proposition de loi qui engage l'indispensable et urgente réforme des études de santé. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l'objectif initial de la proposition de loi qui nous est soumise est intéressant, puisqu'il s'agit de « proposer des solutions pour lutter contre l'échec massif des étudiants en fin de première année de médecine », en créant une année commune préparant aux quatre concours distincts actuels, destinés aux futurs médecins, odontologistes, pharmaciens et sages-femmes. La possibilité ainsi offerte aux étudiants de passer un ou plusieurs de ces concours permettrait d'éviter la sélection par défaut qu'impose l'actuel concours unique, en leur ouvrant théoriquement de nouvelles perspectives de réorientation. Las, non seulement cette proposition de loi, directement inspirée d'un rapport remis aux ministres de l'enseignement supérieur et de la santé, se révèle insuffisante, voire inquiétante, mais elle ne résout en rien les inégalités sociales qui président à la sélection des étudiants en médecine.

Je commencerai par le caractère inquiétant du texte. Le 4° de l'article 1er crée la possibilité d'une réorientation des étudiants à l'issue du premier semestre de la première année des études de santé ou au terme de celle-ci, et prévoit les modalités d'une éventuelle réinscription ultérieure dans cette année d'études. Il s'agit donc d'organiser purement et simplement une réorientation précoce des étudiants vers les disciplines scientifiques après un échec à l'issue du premier semestre. Les plus fragiles, qui n'auront pas su s'adapter assez vite, se verront ainsi poussés vers la sortie et orientés vers une filière non désirée, avec le risque d'échouer une deuxième fois.

Le nouveau premier trimestre scientifique commun tend donc mécaniquement, et simultanément, à dévaloriser les premières années de sciences, en en faisant un « déversoir » du trop-plein d'étudiants inscrits en première année de médecine – toujours marquée par le numerus clausus, qui devrait être revu – ; à éviter de régler le problème des matières de sélection – l'important, pour un étudiant, sera de cumuler le maximum de points et non d'assimiler des connaissances dans toutes les matières – ; enfin, à laisser de côté la question de la faiblesse de l'encadrement pédagogique, pour lequel l'accroissement des moyens n'est même pas évoqué.

À ce propos, je ne peux que m'inquiéter, au nom des étudiants et des familles les plus modestes, de ce que le nouveau dispositif laisse entière la question du développement continu d'officines privées à but hautement lucratif, ayant pour objet d'entraîner les étudiants à préparer les concours classant des études médicales – médecine, odontologie –, parallèlement aux cours dispensés en première année par l'université.

Ce texte est, par ailleurs, insuffisant. Tout d'abord, il laisse de côté la formation des étudiants infirmiers et kinésithérapeutes, qui ont pourtant vocation à entrer dans le futur dispositif commun de formation en LMD santé, et au sujet desquels on a évoqué ailleurs la possibilité, pour certains d'entre eux, de poursuivre ultérieurement une qualification approfondie en santé. En outre, bon nombre d'étudiants considèrent, à juste titre, que cette réforme donne une prime aux « primo-entrants » au détriment des redoublants, placés dans une situation de double inégalité, car ils devront, après avoir échoué – souvent de peu –, refaire une année, tout aussi sélective, en terrain inconnu.

L'insuffisance du texte tient également au fait que les équivalences qu'il présuppose ne correspondent en rien à la réalité. L'application de la réforme LMD aux filières de santé devrait en effet se faire dans le cadre de l'« universitarisation » – pardonnez-moi ce néologisme – de toutes les filières de santé, seule garantie de l'égalité entre les étudiants et de la qualité de ces formations. Cette « universitarisation » devrait également permettre la création, sur le même modèle que les sciences humaines, d'un pôle santé renforcé au sein des universités, qui faciliterait les passerelles et les réorientations et renforcerait le lien entre les différents métiers de la santé. Elle rendrait possible, de plus, la mutualisation de certains enseignements, tels que l'anatomie pour les études de médecine et de kinésithérapie ou l'embryologie pour les études de médecine et de maïeutique.

Enfin, le texte ne règle en rien la question de la sélection sociale. L'organisation des études de santé, notamment l'absence de diplôme intermédiaire et la difficulté des concours, est un obstacle pour les étudiants d'origine populaire. En effet, il est beaucoup plus difficile de se projeter dans des études qui dureront dix ans que de s'engager dans des filières courtes.

En conclusion, ce texte met en évidence ce qui devrait être fait, sans apporter les solutions adéquates. Il crée incompréhension et inquiétude chez les étudiants ; il laisse de côté la question des moyens effectifs à mettre en oeuvre ; enfin, il réforme sans perspective ni cohérence. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce texte envisage de corriger une situation effectivement très préjudiciable : l'immense gâchis que représente le taux d'échec des étudiants en médecine à l'issue du concours de fin de première année du premier cycle des études médicales.

Si les réponses apportées et la méthode utilisée sont plus discutables – j'y reviendrai –, l'objectif de mettre un terme à ce gâchis est louable. Il s'agit d'abord d'un gâchis humain, puisque, chaque année, environ 80 % des étudiants en première année de médecine échouent au concours. En 2006-2007, 50 000 inscrits se sont ainsi disputé 7 100 places en médecine, 977 places en dentaire et 1 007 places de sages-femmes. Pour près de 41 000 étudiants, dont une bonne part a obtenu la moyenne et souvent beaucoup plus, cette année-là aura donc été une année blanche, sanctionnée par aucun diplôme ni aucun « crédit » - pour reprendre la terminologie du dispositif européen de licence-master-doctorat, arrêté à Bologne. Il s'agit aussi, il faut le souligner, d'un gâchis financier pour l'université, amenée à former plus de 40 000 étudiants pour lesquels cette année n'aura débouché sur rien. Enfin, et surtout, c'est un gâchis pour la politique de santé, d'autant plus inacceptable que notre pays s'offre le luxe de laisser à la porte nombre d'étudiants motivés pour suivre ces études longues et difficiles, alors qu'il manque cruellement de médecins.

Il est décidément essentiel et urgent de poursuivre et d'accélérer le relèvement du numerus clausus, afin de former un nombre suffisant de médecins et de professionnels de santé pour répondre aux besoins dans toutes les régions et toutes les spécialités. Manifestement, ce ne sont pas les candidats qui manquent. Alors, décidons de consacrer les moyens nécessaires pour les former et aider les plus modestes, comme l'a très bien dit Mme Karamanli !

Néanmoins, ce texte apporte sans nul doute quelques réponses utiles. Tout d'abord, en instaurant une première année commune aux études de médecine, d'odontologie, de maïeutique et de pharmacie, il cherche à créer les conditions d'une appartenance commune entre des professions appelées à travailler en synergie. Ensuite, il organise la réorientation des étudiants en situation d'échec, notamment ceux que l'on nomme les « reçus-collés », qui ont obtenu la moyenne au concours mais n'ont pas été admis.

Malgré ces avancées, cette proposition de loi laisse, hélas ! beaucoup de questions sans réponse. S'il est normal que tous les détails, qui doivent être traités par voie réglementaire, ne figurent pas dans la loi, il n'est pas acceptable de demander à la représentation nationale de se prononcer sur un texte dont l'essentiel des dispositions est renvoyé à des arrêtés ministériels, car cela ne nous permet pas d'en apprécier les conséquences.

Il est à tout le moins nécessaire que le débat nous éclaire sur les modalités de la réorientation des étudiants en situation d'échec ou sur les conditions d'admission et d'équivalence pour les diplômés venant d'autres horizons universitaires. De même, nous sommes soucieux du contenu des enseignements, notamment la place des sciences humaines, de l'éthique ou des disciplines indispensables aux étudiants en pharmacie dans ce tronc commun. Nous souhaitons également connaître les orientations gouvernementales concernant le numerus clausus et le nombre d'étudiants envisagés dans les différentes filières, compte tenu des besoins actuels non couverts.

Par ailleurs, les conditions de mise en oeuvre de certaines dispositions de ce texte restent floues. Ainsi, le Gouvernement envisage de mettre en place cette année commune dès la rentrée prochaine, ce qui, de l'avis de tous, doyens comme étudiants, pourtant a priori favorables à ce nouveau dispositif, est impossible : les programmes, les locaux et l'organisation des enseignements ne seront pas prêts.

Quant aux financements, vous prévoyez de les prélever sur les crédits du plan « Réussite en licence », voté dans le cadre de la loi de finances pour 2008. Les moyens utilisés pour mettre en place cette réforme, qui ne bénéficie donc d'aucun financement spécifique, manqueront évidemment aux autres disciplines. Vous déshabillez Pierre pour habiller Paul. Ce n'est pas une bonne politique.

Aussi avons-nous déposé un amendement, qui a d'ailleurs été adopté par la commission, afin de reporter d'un an la mise en oeuvre de cette réforme. Un tel report présenterait le double avantage de permettre, d'une part, la mise en place correcte du nouveau dispositif – comme l'a très bien dit l'un de nos collègues en commission, « il ne faut pas se rater » – et, d'autre part, de prévoir les crédits nécessaires dans le prochain projet de loi de finances pour 2010.

Ce dernier point m'amène à revenir sur la méthode trop fréquemment employée par l'actuel gouvernement. Il s'agit, dans le meilleur des cas, de partir d'un problème préoccupant et connu – voire, trop souvent, d'un simple fait divers – et de proposer dans la précipitation des réponses qui ne résolvent rien ou pas grand-chose, quand elles n'aggravent pas le problème – surtout lorsque les financements ne sont pas prévus. Nous subissons les effets de cette méthodologie dans de nombreux domaines, ce qui est fort dommage.

Encore une fois, ce texte va dans le bon sens, mais pourquoi agir à ce point dans l'urgence ? Si cette réforme était tellement pressante, elle aurait dû et pu être faite plus tôt. Par ailleurs, la précipitation ne permet pas de prendre en compte les arguments de tous, notamment ceux des étudiants en pharmacie qui contestent le contenu des programmes de la « L1 santé » et craignent de ne pas retrouver dans cette année commune les bonnes conditions d'étude qui sont actuellement les leurs – notamment les enseignements dirigés suivis en effectifs restreints. Quant aux étudiants en médecine, ils se posent beaucoup de questions concernant la réorientation ou les délais incompressibles avant toute nouvelle inscription. Il faut prendre le temps, madame la ministre, de réexaminer avec eux les points qu'ils soulèvent. Ce sont des jeunes sérieux, qui font des études difficiles. Ils savent de quoi ils parlent et il faut les écouter.

De même, je vous invite à prendre en compte nos propositions, qui résultent de réflexions suscitées après plusieurs auditions. Avant toute chose, nous considérons qu'il faut respecter la liberté de choix des étudiants et ne pas leur imposer une réorientation dès le premier semestre, c'est-à-dire, dans les faits, après seulement quatre à cinq mois d'enseignement – un enseignement qui, de plus, porte sur des matières très scientifiques, les spécialités n'étant enseignées qu'au second trimestre. Il faut également revoir le caractère obligatoire de ce délai de douze à dix-huit mois en faculté de sciences avant de pouvoir éventuellement s'inscrire de nouveau au concours, qui s'apparente à une sorte de purgatoire !

Vous souhaitez instiller dans les professions de santé une culture autre que scientifique, en permettant à des étudiants diplômés de facultés littéraires ou de sciences humaines d'accéder directement, selon des modalités que vous ne précisez pas, en deuxième ou en troisième année d'études médicales.

L'objectif est louable, mais la méthode ne paraît guère crédible, d'autant moins que le premier trimestre de cette « L1 santé » insistera fortement sur les matières scientifiques. De plus, vous dites vous-même que cette possibilité restera marginale. Cette passerelle va donc permettre à quelques étudiants qui n'auront pas le niveau en sciences d'accéder de façon dérogatoire aux études de santé et sera vécue comme injuste par les étudiants qui auront beaucoup travaillé pour obtenir ce concours si difficile. Nous pensons qu'il serait possible de parvenir à un résultat très supérieur en introduisant simplement des enseignements nouveaux tels que la psychologie, la sociologie, l'histoire ou la philosophie, et en jouant sur leurs coefficients.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Par ailleurs, cette réforme reste au seuil du système licence-master-doctorat. Il en faudrait peu, pourtant, pour intégrer les études de santé ainsi définies au processus de Bologne et au système LMD, ce qui permettrait la reconnaissance des diplômes au niveau européen et une plus grande mobilité des étudiants. Il suffirait de permettre aux étudiants « reçus-collés », c'est-à-dire qui ont obtenu la moyenne au concours mais n'ont pas été admis, d'accumuler néanmoins des crédits dans le cadre du système européen de transfert de crédits.

Lutter contre l'échec, c'est, enfin, agir pour la qualité des conditions matérielles d'étude. La première année de médecine est très difficile et nécessite un investissement intellectuel de tous les instants. C'est pourquoi elle est aujourd'hui quasi systématiquement synonyme d'échec pour les jeunes issus de milieux modestes qui doivent travailler pour payer leurs études.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Or, ce texte ne prévoit rien pour aider ces étudiants.

Lutter contre l'échec, notamment contre le phénomène des « reçus-collés », particulièrement incompréhensible en période de pénurie de médecins, passe également par une hausse significative du numerus clausus.

Telles sont, madame la ministre, mes chers collègues, les observations que nous formulons sur ce texte. L'essentiel de la réforme se fera par voie réglementaire. Nous avons néanmoins déposé quelques amendements et attendons des précisions sur plusieurs points dont le contenu conditionnera notre vote. Si cette réforme est positive dans les objectifs qu'elle se fixe, elle mérite que l'on prenne le temps d'y réfléchir et de se concerter pour que sa mise en oeuvre ne pénalise personne et, surtout, qu'elle permette de surmonter les difficultés actuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à M. Olivier Jardé, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui part du constat selon lequel, sur 50 000 étudiants de bonne qualité inscrits chaque année en première année d'études médicales, seulement 10 000 seront reçus. Certes, la possibilité de redoublement constitue une deuxième chance, mais même en tenant compte de ce facteur, un tiers seulement des inscrits en première année seront reçus. Les étudiants en médecine sont souvent très marqués par ces deux années d'études, ce qui se traduit par une grande tension dans les facultés, y compris chez les enseignants.

Il me paraît donc très méritoire, madame la ministre, de poser le problème – spécifique aux facultés de médecine et qui ne se rencontre pas, par exemple, dans les écoles d'ingénieurs ou les autres facultés, du fait de la présence de passerelles et de parachutes – et d'essayer de le résoudre. Je suis donc très heureux que M. le professeur Domergue présente aujourd'hui cette proposition de loi, qui va dans le sens du rapport rédigé par le professeur Bach, lequel souligne que le problème évoqué a plusieurs causes, liées notamment à l'orientation, à l'encadrement et à l'absence de passerelles.

Il me paraît logique qu'il y ait une première année commune à tous les étudiants appelés à exercer une profession dans le monde sanitaire : les médecins, les dentistes, les sages-femmes, mais aussi les pharmaciens.

Je suis également favorable à la réorientation qui, en offrant la possibilité à un étudiant inscrit en médecine de passer au bout de quelques mois dans une autre faculté, lui permet de ne pas perdre son année. Les mesures favorisant la réorientation sont utiles aux étudiants, mais présentent également des avantages en termes de locaux et d'encadrement.

Enfin, il me semble que les passerelles, qui existent dans de nombreuses matières, doivent être mises en place dans le cadre des études de médecine.

Je regrette cependant que d'autres points du rapport Bach n'aient pas été retenus. Il s'agit, en premier lieu, de l'entretien préalable. À la faculté de médecine d'Amiens, un universitaire auditionne 35 étudiants, ce qui paraît tout à fait correct. Lille présente à peu près le même ratio, et sans doute en est-il de même dans de nombreuses facultés. Il me semble qu'il serait intéressant d'étendre cette possibilité à l'ensemble des étudiants.

Le deuxième point se rapporte au tutorat, pratique qui présente un grand intérêt – la plupart du temps, les étudiants tuteurs sont d'ailleurs rémunérés – et devrait donc être encouragée.

Le troisième point est relatif aux matières, au sujet desquelles on peut regretter qu'il s'agisse de matières essentiellement scientifiques. Le rapport Leonetti sur la fin de vie fait ainsi apparaître, entre autres, qu'il manque aux étudiants en médecine une approche éthique de leur discipline. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

Il me semble par conséquent que nos facultés de médecine devraient enseigner les sciences humaines et l'éthique.

Le quatrième point est celui des concours séparés. Le fait que seuls les étudiants ayant obtenu les meilleurs classements puissent choisir leur spécialité engendre un sentiment d'échec et, qui plus est, heurte parfois la logique. Ainsi, l'année dernière, l'étudiante classée première au concours de Marseille voulait choisir la spécialité de sage-femme. En ce qui me concerne, j'ai eu la chance que ma fille, qui voulait s'orienter vers la filière « médecine » ait obtenu les résultats lui permettant de le faire, mais les choses ne sont pas toujours aussi simples !

Pour terminer, madame la ministre, j'aurais une question à vous poser et je souhaiterais également être rassuré sur un point. Ma question porte sur les kinésithérapeutes qui, dans 70 % des facultés, se présentent au concours commun. Pourquoi ne pas avoir créé une cinquième branche à leur intention ? Je suis bien placé pour savoir que, sans les kinésithérapeutes, les chirurgiens orthopédistes ne pourraient pas faire grand-chose ! J'ajoute que l'application du système LMD à la filière de santé permettrait d'offrir davantage d'équivalences – je pense notamment aux infirmières et aux orthophonistes. Certes, cela coûterait plus cher,…

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

…mais il me semble que les avantages que l'on peut tirer d'un tel système justifient que l'on étudie la question.

Enfin, pouvez-vous nous préciser, madame la ministre, quand la loi va entrer en vigueur ? Sera-ce en 2009 ou en 2010 ? Le doyen de la faculté d'Amiens, que j'ai interrogé, m'a répondu que, pour sa part, il n'était pas prêt. Ce doyen – d'une grande valeur, je m'empresse de vous le dire – doit en effet faire face à de gros problèmes de locaux. Ainsi, alors que nous avons 1 000 étudiants inscrits en première année de médecine et 600 en pharmacie, nous ne disposons pas d'un amphithéâtre de 1 600 places. Certes, nous ne disposerons toujours pas de cet équipement en 2010 (Sourires), mais cela ne nous empêche pas de nous interroger quant à la date d'entrée en vigueur de cette loi. Je n'attends qu'une chose de votre part, madame la ministre, c'est d'être rassuré. Si l'Assemblée décide que la loi doit entrer en vigueur dès 2009, il faudra aider les universités et les facultés. Certaines d'entre elles ont anticipé et ont déjà réfléchi au problème, mais toutes ne pourront pas être prêtes dès 2009.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

Nous attendons donc d'être rassurés, car le choix de 2009, s'il ne peut être exclu, entraînerait en tout état de cause de grandes difficultés d'application.

Comme vous le voyez, madame la ministre, je suis relativement favorable à cette proposition de loi qui répond à une vraie problématique. Je souhaite néanmoins obtenir une réponse de votre part aux deux interrogations que je viens de formuler.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle Delaunay

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes tous d'accord, me semble-t-il, pour estimer que les études de santé doivent être réformées pour se conformer au mieux à l'évolution de la médecine elle-même.

Cette évolution est en rapport avec deux grands ordres de facteurs, d'ailleurs liés : d'une part, la place du médecin au coeur du contrat social par ses choix géographiques, ses prescriptions, son rôle de santé publique et de santé sociale ; d'autre part, le basculement qui est en train de se produire de la médecine pastorienne vers la médecine comportementale et la médecine sociétale. De notre réponse à cette double évolution dépendra la manière dont la médecine sera en mesure de prévenir et de soigner les bouleversements du monde.

C'est pourquoi la réforme des études conduisant aux professions de santé doit se faire dans le cadre d'une réflexion globale, incluant cette dimension sociétale, et soulevant la question du rôle des CHU et de l'aménagement territorial de la médecine.

Ce texte est la première pièce d'un « kit » dont l'usage n'est pas complètement défini et dont nous n'avons pas toutes les pièces. Il n'est pas à rejeter dans son fondement. Adapter les études médicales au système LMD, mettre en phase les diverses professions de santé, éviter le gâchis humain résultant de l'hypersélection de la première année : autant d'objectifs que nous partageons.

Mais, comme beaucoup d'autres en cette période de prurit législatif, ce texte a été élaboré dans une trop grande précipitation. Du fait de la dispersion de leurs sites, de l'absence d'habitude de travailler ensemble, de nombreuses universités ne seront pas en mesure d'appliquer cette loi dans les délais impartis. De ce point de vue, celle de Bordeaux est l'une des mieux aguerries aux changements.

Un nombre considérable d'étudiants seront réunis sur des sites totalement inadaptés, avec pour seule solution la perte de toute relation entre enseignants et étudiants, la disparition des cours magistraux, l'impossibilité de réels travaux pratiques et enseignements dirigés.

En outre, aucune prévision n'a été faite pour les DOM-TOM qui posent des problèmes spécifiques.

Deuxième point : l'absence de réflexion pratique. La réorientation dès la fin du premier semestre, par exemple, paraît insuffisamment réfléchie. Le délai est trop court et cette réorientation se fera uniquement vers les sciences « dures », dans lesquelles ces étudiants n'auront pas de meilleures chances de succès. En revanche, il n'y a aucune passerelle vers d'autres universités, alors que l'inverse est prévu à un stade ultérieur.

Troisième point : l'insuffisance d'encadrement, qui profitera aux officines commerciales que tout le monde ne peut pas s'offrir, et qui favorisera, de ce fait, la sélection sociale, déjà très forte en médecine.

C'est ainsi que 4 500 étudiants vont se retrouver projetés dans le milieu universitaire, confrontés à des méthodes de travail qu'ils ne connaissent pas. En particulier, il n'est fait aucune mention du tutorat, qui pourtant fonctionne bien et que le rapport Bach préconise de soutenir.

Dernier point : l'insuffisance des moyens humains, logistiques et financiers. Cela fait penser à la « grande » réforme de l'hôpital, qui n'est assortie que de petits moyens.

Voilà quatre raisons de ne pas voter ce texte qui vient trop hâtivement encombrer notre agenda législatif. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Fourneyron

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous nous accordons à dire – et j'observe que de nombreux représentants des professions de santé sont présents dans l'hémicycle ce matin – que la lutte contre l'échec en fin de première année de médecine doit être une priorité. On sait en effet que, chaque année, quatre étudiants de première année sur cinq échouent au concours. Les efforts consentis et la charge de travail assumée par les étudiants, qu'ils soient en première année de médecine ou de pharmacie, sont pourtant considérables et devraient déboucher sur des possibilités de réorientation cohérentes et satisfaisantes.

Or la proposition de loi qui est soumise aujourd'hui à notre examen n'est pas à la hauteur des enjeux soulevés par les différents cursus des professions de santé. Ma collègue Catherine Lemorton développera dans un instant les points qui suscitent les réserves du groupe socialiste, radical et citoyen. Ils sont nombreux : réorientation exclusivement en faculté de sciences ; exclusion de ce cursus santé des étudiants en kinésithérapie et des futurs infirmiers et infirmières – auxquels un autre texte délègue pourtant des actes médicaux en bonne et due forme ; conséquences en termes de qualité des cours, place des sciences humaines, postes d'enseignement, absence de valorisation du tutorat, etc.

Je me contenterai pour ma part de revenir sur la question de la date d'entrée en vigueur. Les délais que vous avez fixés, madame la ministre, monsieur le rapporteur, sont irréalistes et relèvent, pour reprendre une expression de circonstance, du conte de Noël. Il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. La commission Bach dit elle-même n'avoir pas disposé d'assez de temps pour étudier l'ensemble des conséquences de ses propositions. Vous affirmez que la circulaire du 1er août 2008 a fourni aux doyens d'université et aux étudiants un cadre de réflexion leur permettant d'anticiper les conséquences de la création d'une « L1 santé ». J'ai l'impression que nous n'avons pas entendu les mêmes choses : la plupart des facultés de médecine et de pharmacie attendent en effet la promulgation de la loi et de ses décrets et circulaires d'application, soit janvier 2009, avant d'évaluer les besoins et de lancer les multiples chantiers nécessaires à la mise en oeuvre de la réforme.

Ces chantiers sont notamment humains et logistiques. Dans de nombreuses villes, une des quatre filières fondues dans cette première année commune manque à l'appel : pas d'odontologie à Amiens, pas de maïeutique à Saint-Étienne, pas de pharmacie à Brest. Il faudra, pour reprendre ce dernier exemple, un enseignement spécifique en visioconférence en première année, avant une deuxième année à Rennes. Tout cela nécessite des aménagements et des investissements, notamment dans les technologies de l'information et de la communication dont sont dépourvus de nombreux établissements – et je passe sur le pis-aller que représente, sur le plan qualitatif, un enseignement « non présentiel ».

La création d'une « L1 santé » entraînera un afflux d'étudiants vers ce cursus, devenu plus attractif puisque les chances de réussite seront censément multipliées. Or, nombreuses sont les universités non préparées à accueillir ces recrues supplémentaires. Classes et amphithéâtres trop petits, nouveaux bâtiments à construire : les travaux seront parfois importants, et inachevés à la rentrée 2009. Je prends l'exemple de Rouen : un nouveau campus santé y est en effet en construction sous maîtrise d'ouvrage de la région, mais il ne sera livré que début 2010.

Ces investissements et aménagements nécessaires, qui concernent toutes les universités, ne seront pas réalisés à temps, surtout s'ils ne sont pas clairement inscrits au budget du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Je n'épingle pas ces éléments pour le plaisir : ce sont des réalités, qui auront des conséquences réelles sur l'égalité des étudiants devant le concours, principe auxquels nous sommes tous attachés et qu'il nous appartient de garantir.

Je terminerai sur les conséquences de cette réforme précipitée pour l'orientation des lycéens. Alors que la plupart des forums, plateformes, rencontres et réunions d'orientation ont lieu, tout comme les inscriptions en classes préparatoires, en début d'année civile, les lycéens de terminale n'auront pas les éléments d'information pour prendre leur décision en connaissance de cause. Cet argument est pour moi très important, et je serais curieuse de savoir comment vous comptez diffuser l'information à temps, autrement que par une vague plateforme Internet, auprès des lycéens et des conseillers pédagogiques.

Je conclus en me félicitant qu'un amendement de notre collègue Jacqueline Fraysse repoussant la date de mise en oeuvre de cette première année commune ait été adopté en commission mercredi dernier. J'espère que nous confirmerons ce vote tout à l'heure. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Cette proposition de loi portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants a tout de la fausse bonne idée. À première vue, quoi de plus naturel que de regrouper dans une première année commune les étudiants de médecine et de pharmacie ? C'est d'ailleurs pourquoi ce texte, encore récemment, n'attirait l'attention ni des personnes concernées ni même de la plupart des parlementaires.

Je crains cependant que, croyant résoudre un réel problème, celui d'un taux d'échec très élevé à l'issue de la première année des études de médecine et de pharmacie, vous n'instauriez, avec cette proposition de loi, de nouvelles difficultés et, surtout, que vous n'ajoutiez de l'injustice en accentuant une sélection sociale déjà très forte, le tout sans concertation mais avec précipitation. On ne change pas les règles du jeu en cours de partie. Songeons ici aux étudiants qui se sont inscrits à la rentrée 2008 sans savoir ce qui les attendait ! Ils connaissent l'angoisse et la tension auxquelles vous avez fait allusion, madame la ministre. Ils sont en ce moment concentrés sur les épreuves du premier quadrimestre, et donc sans réactivité par rapport à cette réforme. Or ceux qui vont redoubler auront la mauvaise surprise de découvrir un renouvellement de 30 % de leur programme, programme d'ailleurs surtout axé sur des matières scientifiques fondamentales qui ne font pas particulièrement appel à l'empathie ni aux valeurs humanistes indispensables à l'exercice professionnel.

On retrouve avec cette proposition de loi la marque de fabrique de cette majorité parlementaire : derrière un vernis pragmatique et un prétendu sens pratique se cachent des dispositions injustes, insatisfaisantes et inabouties, qui, loin de résoudre les problèmes, ne font souvent que les compliquer.

Nul ne conteste que le taux d'échec en première année de médecine, de l'ordre de 80 %, soit un gâchis humain considérable. C'est d'ailleurs le constat que dressait le rapport remis en février dernier par Jean-François Bach, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et à Mme la ministre de la santé. Nous sommes unanimes à considérer qu'il faut agir, proposer des solutions pertinentes et adaptées, tant la déception est grande pour ces trop nombreux recalés qui sont en grande majorité de très bons élèves.

Faut-il pour autant adopter la proposition de loi de notre collègue Jacques Domergue ? Est-elle de nature à améliorer sensiblement la situation en instaurant une première année commune aux études de santé ? En quoi la création d'un tronc commun d'enseignements au premier semestre, complété par des cours spécifiques au second semestre, serait-elle de nature à mettre un terme à l'échec de la première année sans pour autant remettre en cause ce qui fonctionne ?

Sur l'utilité d'un enseignement commun dès la première année, je suis très réservée, car cela me paraît largement prématuré. Des enseignements communs seraient plus pertinents et plus utiles dans les années ultérieures, lorsque le développement d'échanges, de contacts, de relations entre futurs professionnels spécialisés s'avère profitable pour tous et bénéfique pour les patients.

De plus, cette première année commune ne va pas sans poser des problèmes matériels et pratiques : par exemple les étudiants en pharmacie bénéficient aujourd'hui de travaux dirigés regroupant 20 à 30 élèves par groupe alors qu'après l'adoption de ce texte, ils seront entre 200 et 250 – s'ils ont encore des TD. En effet, si 30 % des enseignements de pharmacie se font aujourd'hui selon cette formule, le pourcentage ne sera plus, au mieux, que de 10 % si cette proposition de loi est adoptée. On voit mal où se situent le progrès et l'amélioration, et on comprend mieux l'inquiétude et l'hostilité des étudiants en pharmacie, qui revendiquent leur spécificité. Aujourd'hui, leur programme de première année, directement adapté à leur concours, comporte un certain nombre d'enseignements fondamentaux qu'il n'apparaît pas opportun de supprimer. C'est ainsi que, dès leur stage en officine, en fin de première année, ils possèdent déjà les bases de leur futur métier. Leurs conditions d'études sont donc bien plus satisfaisantes qu'en médecine. Pourquoi perturber et affaiblir une filière qui ne va pas si mal ? Pourquoi la tirer vers le bas ?

Une réelle amélioration passe par plus de moyens financiers, afin de mieux organiser les études de santé et les faire bénéficier de conditions matérielles dignes de notre pays. De ce point de vue, cette proposition de loi manque d'ambition.

Quant à la réorientation dès la fin du premier semestre de la première année, il s'agit là encore d'une fausse bonne idée, puisque un étudiant échouant à ce stade sera contraint de poursuivre ses études dans une faculté de sciences et ne pourra revenir en médecine avant dix-huit mois.

Cette mesure, qui ne va pas sans poser de nombreux problèmes pratiques, témoigne d'une mauvaise connaissance des conditions dans lesquelles étudient les jeunes ainsi visés. Certains devront changer d'université et de payer de nouveaux frais de scolarité, d'autres devront en plus changer de ville et donc déménager, ce qui entraîne des dépenses importantes – sans oublier la quasi-obligation de suivre des cours privés coûteux.

Cette proposition de loi, telle qu'elle est rédigée, aggrave l'injustice et la sélection sociale dans un secteur où elles sont déjà fortes. De nombreux bacheliers ne pourront se permettre de se lancer dans une première année aussi coûteuse, avec le risque d'être très vite réorientés vers un cursus qui ne correspond pas à leurs envies et ambitions. Ceux dont les parents ont les moyens feront le choix de s'inscrire ; la plupart des autres seront tentés, au terme d'un triste calcul coût-avantages, d'aller s'inscrire ailleurs et de renoncer à la médecine, sans même tenter leur chance.

Par ailleurs, l'introduction d'une sanction dès le premier semestre oblige à s'interroger sur la capacité des facultés de sciences à accueillir autant d'étudiants en cours d'année universitaire. Au demeurant, pourquoi s'agirait-il nécessairement des faculté de sciences ? Pourquoi ne pas envisager des passerelles, dans les deux sens, entre les études de santé et les études de sciences humaines, sociales et économiques ?

On peut regretter le flou excessif et plus encore le silence de ce texte s'agissant de l'accompagnement des étudiants et des conditions d'études, souvent désastreuses. Pour améliorer ces dernières, le Gouvernement n'a pas trouvé mieux que de développer, pour certains enseignements, le recours à la visioconférence et aux CD-ROM, qui rompent le lien pédagogique entre professeurs et étudiants.

Mes chers collègues, cette proposition de loi n'est pas à la hauteur des enjeux ni du problème qu'elle prétend résoudre. Je crains qu'elle n'ait plus d'inconvénients que d'avantages, et qu'elle ne permette pas de remédier au gâchis humain que constitue le taux d'échec en fin de première année de médecine.

En l'état, elle maintiendra des frustrations importantes chez les étudiants qui échoueront à la fin du premier semestre, et en ajoutera de nouvelles chez ceux qui se retrouveront dans des filières scientifiques par défaut et non par choix. Elle aggravera la discrimination par l'argent et les inégalités sociales entre les étudiants, quand elle n'incitera pas ces derniers, tout simplement, à renoncer aux études de santé et à ne pas s'inscrire en première année. Dans ces conditions et pour toutes ces raisons, les députés radicaux de gauche ne pourront l'approuver.

En tout état de cause, chers collègues de la majorité, si vous faites le choix d'approuver ce texte, ayez au moins la bonne idée de reporter son entrée en vigueur à la rentrée universitaire 2010-2011 !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Étudiants, professeurs et doyens sont unanimes à dire qu'il est impossible d'instaurer cette première année commune aux études de santé dès la rentrée prochaine. Pensons aussi aux bacheliers qui s'apprêtent à choisir les filières concernées et qui ne sont pas informés de tous ces changements !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Il serait donc raisonnable, madame la ministre, mes chers collègues, de repousser d'au moins une année la mise en place de cette réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, madame la ministre, mes chers collègues, les orateurs de gauche ont dressé le bilan des conséquences qu'aurait cette proposition de loi ; je n'y reviendrai pas, pas plus que je ne reviendrai sur ses aspects techniques ni sur le fait que le rapport Bach dénonce le gâchis humain que représentent les 80 % d'échecs en fin de premier année.

Il est certes urgent de réformer le système, mais nous ne pouvons être d'accord avec la proposition de loi de M. Domergue, car elle comporte beaucoup d'interrogations mais peu de bonnes réponses.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

J'évoquerai brièvement deux sujets qui me semblent primordiaux, et en premier lieu l'inquiétude des facultés et des universités, qui ne sont pas prêtes pour la mise en oeuvre de cette réforme ; j'ai même bien peur qu'elles ne le soient pas à la rentrée 2009.

La réforme soulève en effet des difficultés en matière de locaux et de recrutement puisque, si vous augmentez le nombre d'étudiants, il faudra augmenter celui des personnels enseignants et administratifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Je rappelle qu'à l'université de Grenoble, l'enseignement se fait par CD-ROM, ce qui n'est pas très satisfaisant car, même si l'utilisation des NTIC offre des pistes intéressantes, elle ne saurait se substituer à l'enseignement dit « présentiel », et le contact entre l'étudiant et le professeur reste indispensable.

Le second point problématique est l'orientation de nos étudiants. Le rapport Bach proposait de mettre en place une orientation active des lycéens et des étudiants, notamment en renforçant le tutorat pour ces derniers, afin de les aider, d'une part, à mieux préparer les concours, et, d'autre part, à mieux choisir leur orientation. À ce propos, la suppression de 13 500 postes dans l'éducation nationale aura des incidences sur l'avenir de nos étudiants. Beaucoup d'efforts devront donc être faits, que ce soit pour lutter contre l'échec en première année ou pour améliorer l'orientation des étudiants les plus en difficulté.

Reste le problème des « reçus-collés », qui valideront leurs L1 sans toutefois pouvoir intégrer le numerus clausus. Dans un contexte de surpopulation universitaire, les syndicats étudiants demandent que soient instaurées au niveau national des passerelles entre les facultés. Il souhaitent également que des conventions soient passées par décret entre les universités et les instituts de kinésithérapie ou d'ergothérapie. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur Door, vous m'avez interrogée sur les limitations aux redoublements. Tout l'objet de cette réforme est de guider les étudiants vers leur réussite. C'est pourquoi je pense – et des études statistiques le montrent – qu'il est inutile de laisser des étudiants qui n'ont visiblement pas le niveau ou la maturité pour réussir à dix-sept ou dix-huit ans un des concours du cursus santé perdre une année entière, voire deux ans dans le pire des cas, pour aboutir à un échec ! Les études statistiques montrent en effet que, en dessous de 5 sur 20 aux examens du premier semestre, on a 0 % de chances de réussir sa première année, même en la redoublant.

Le dispositif – mis en place à titre expérimental pendant deux ans – sera simple. Les étudiants classés au-delà d'un certain multiple du numerus clausus seront invités à se réorienter vers la filière de leur choix, en fin de première année mais aussi dès la fin du premier semestre. C'est une des innovations majeures de la proposition de loi qui vous est soumise. Si l'étudiant choisit de se réorienter vers un cursus scientifique, il pourra, après avoir validé deux années de licence, se présenter à nouveau aux concours qu'il désire.

Pour ce qui concerne les « reçus-collés », c'est-à-dire ceux qui ont obtenu la moyenne à leurs examens de première année mais n'entrent pas dans le numerus clausus, ils se verront enfin reconnaître ce qui leur revient, à savoir la totalité des crédits ECTS correspondant à une année de licence, ce qui leur permettra de se réorienter dans le système universitaire vers la filière de leur choix.

Les passerelles avec les filières paramédicales seront encouragées. Les passerelles entrantes prévues à l'article 1er permettront aux étudiants des cursus paramédicaux de poser leur candidature en deuxième année, sous réserve de réciprocité pour les « reçus-collés » de première année de santé qui souhaitent intégrer les cursus paramédicaux.

Par ailleurs, il sera toujours possible à un étudiant en « L1 santé » de se réorienter vers les formations paramédicales. En effet, le code de la santé publique prévoit que les modalités d'admission dans les cursus paramédicaux relèvent du domaine réglementaire. Il n'était donc pas utile de les faire apparaître ici, même si cette réforme ne concerne pas uniquement les filières universitaires de santé mais également les filières paramédicales.

Sur l'évolution des programmes, j'ai souhaité que la nouvelle première année se concentre au premier semestre sur les sciences fondamentales, mais qu'elle s'ouvre également à d'autres disciplines, aujourd'hui totalement absentes de la maquette pédagogique – je pense aux sciences humaines et sociales, mais aussi à l'anglais.

Tout le monde aujourd'hui, a fortiori un professionnel de santé, a besoin d'un minimum de connaissances en sciences sociales et doit maîtriser l'anglais. Comme le rappelait Marc Bernier en commission, tout professionnel de santé doit développer ses connaissances humaines.

Sous l'égide de la direction générale de l'enseignement supérieur, un groupe de travail a oeuvré quatre mois durant à la rédaction d'une sorte de feuille de route de la maquette pédagogique de la première année. Elle a été adressée à tous les présidents d'université, recteurs et doyens concernés, le 21 novembre dernier.

S'agissant enfin des moyens consacrés à la mise en oeuvre de cette réforme, je ne peux laisser pas dire que le tutorat est absent de cette réforme. Pour la première fois en 2009, tous les étudiants de première année d'études de santé ont été pris en compte dans l'attribution des crédits du plan « Réussite en licence », décision en cohérence avec le plan lui-même mais aussi avec la refonte de cette première année.

Ce plan, ce sont 730 millions d'euros cumulés sur 2008-2011, soit des moyens considérables pour la réussite de nos étudiants, et qui permettront la mise en place d'un tutorat rémunéré pour tous les étudiants en difficulté. Se substituant aux officines privées, le tutorat doit permettre de lutter contre les injustices sociales en offrant à des étudiants issus de familles défavorisées des chances accrues de réussite en première année de médecine.

Ces augmentations de crédits, qui bénéficieront à toutes les UFR médicales, sont sans précédent : 4 millions d'euros attribués à Angers l'année prochaine, soit 25 % de crédits de fonctionnement supplémentaires ; 5 millions d'euros à Lille 2, soit 25 % de crédits de fonctionnement supplémentaires ; 4 millions d'euros à Montpellier 1, soit 25 % de crédits de fonctionnement supplémentaires ; 3,2 millions d'euros à Tours, soit 15 % de crédits de fonctionnement supplémentaires.

Les universités ont donc bien les moyens de mettre en place la nouvelle première année des études de santé, et ce d'autant plus qu'à ces crédits il faut ajouter ceux alloués par le Président de la République dans le cadre du plan de relance : c'est une bonne nouvelle pour les universités parisiennes, car une attention particulière sera portée à l'amélioration de leurs locaux.

Madame Karamanli, je ne reviendrai pas sur vos propos concernant les inégalités sociales et le tutorat : les chiffres que je viens de citer parlent d'eux-mêmes. Sur la réorientation en fin de premier semestre, je crois inutile, contre-productif, et pour tout dire mauvais pour les étudiants de les laisser s'enfermer dans un cursus où ils ne pourront pas réussir. Ils perdront une année, peut-être deux, et beaucoup d'énergie ; ils seront sélectionnés par l'échec.

Cette réorientation doit être mise en place progressivement dans les universités. Certaines sont volontaires et ont, de leur propre initiative, déjà entamé ce processus, à la suite de la circulaire que j'ai envoyée aux présidents d'universités et aux doyens d'UFR dès le 1er août. Votre rapporteur estime raisonnable un délai de deux ans d'expérimentation pour tester l'efficacité de cette mesure avant sa généralisation à compter de l'année 2011-2012. C'est la réponse à une inquiétude manifestée par les étudiants au printemps dernier, et c'est tout à fait souhaitable.

S'agissant de l'« universitarisation » des études de santé, c'est-à-dire de leur inclusion dans le système LMD, cette loi en constitue à l'évidence une première étape indispensable.

Quant aux étudiants modestes, dont vous vous préoccupez à juste titre, il est difficile pour eux d'entreprendre des études longues : eh bien, c'est justement pour eux que nous créons de nouvelles passerelles entrantes ; c'est pour ceux qui se révéleront plus tardivement ! Je n'accepte pas, en effet, que tout se décide entre dix-sept et dix-huit ans ; je veux que, dans notre pays, il soit possible, en se révélant à vingt ans, à vingt-deux ans seulement, de devenir quand même médecin – car c'est, pour certains, un signe d'ascension sociale, et c'est une vocation que l'on doit pouvoir réaliser à tout âge ! La deuxième chance fait partie de notre projet pour l'université. (Interruptions sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Madame Fraysse, vous me dites qu'il faut augmenter le numerus clausus : nous allons l'augmenter, de manière progressive, pour répondre aux besoins de santé sur des bases locales.

Vous me dites aussi qu'il faut de nouveaux moyens. Mais pourquoi donc faudrait-il de nouveaux moyens ? Nous intégrons la pharmacie au sein des études de santé, certes ; mais ce sont les mêmes étudiants, les mêmes professeurs, qui sont accueillis aujourd'hui ! C'est donc une simple question de réorganisation des cursus, et je ne vois pas pourquoi le nombre d'étudiants augmenterait. Bien au contraire, la réforme permettant d'orienter les étudiants dans les bonnes filières, elle limitera le redoublement, et donc le gâchis humain et le nombre d'étudiants qui perdent leur temps dans des amphithéâtres bondés ! La lutte contre la surpopulation des amphithéâtres médicaux est nécessaire, vous l'avez souligné : c'est cette lutte que nous menons.

Vous qualifiez les passerelles de « purgatoire », madame Fraysse. La boucle de rattrapage sert, bien au contraire, à dédramatiser la pression du concours en donnant une deuxième chance aux étudiants.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Sur le calendrier de mise en oeuvre de la réforme, on peut résumer ainsi les propos de Mmes Crozon, Orliac, Fraysse et Fourneyron : il est urgent de ne rien faire ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Eh bien, ce n'est pas comme cela que nous voyons les choses !

Monsieur Jardé, je veux vous rassurer : les doyens travaillent à cette réforme depuis plus d'un an ; les commissions pédagogiques nationales des trois disciplines concernées et leur équivalent chez les sages-femmes, ainsi que tous les présidents des conférences de doyens des UFR concernées, ont été associés aux travaux de réforme de la première année dès le mois d'octobre 2007, lorsque je les ai réunis, en compagnie de M. le professeur Bach. Nous travaillons ensemble sur ce projet depuis plus d'un an, et les acteurs de sa mise en oeuvre sur le terrain, c'est-à-dire principalement les directeurs d'UFR, participent à cette concertation.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Il n'y a donc aucun effet de surprise. Tous les partenaires concernés ont été associés à la concertation, pendant trois mois, au printemps dernier, avec tous les partenaires sociaux, pour définir les principes de la réforme. Les étudiants ont été associés et entendus…

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

La preuve en est que la réorientation en fin de premier semestre se mettra en oeuvre de manière douce ; il n'y a plus non plus de concours spécifique pour les non-scientifiques.

Les présidents des commissions pédagogiques ont participé au groupe de travail mis en place par la direction de l'enseignement supérieur au mois de juillet 2008, chargé de réfléchir à l'adéquation pédagogique du programme aux objectifs de la réforme et de s'assurer de la compatibilité de ce programme avec les réorientations envisagées pour les étudiants non admis au concours. Une circulaire cadre, envoyée dès le 1er août 2008, informe les présidents d'universités et les directeurs d'UFR des grandes lignes de la réforme et les invite à prendre au plus vite les dispositions nécessaires à sa mise en place à la rentrée 2009 – soit en réalité un délai de douze mois. En réalité, nous n'attendons plus que le vote de cette loi pour mettre en place la réforme de manière pérenne !

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Certaines universités ont déjà commencé à s'organiser : trente-sept d'entre elles se voient attribuer un numerus clausus en médecine ; les seize UFR d'odontologie et les vingt-quatre UFR de pharmacie sont aujourd'hui, pour la plupart, quasiment prêtes.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je me tourne encore vers vous, monsieur Jardé, qui êtes cosignataire de cette proposition de loi – et qui y êtes donc, ai-je cru comprendre, « relativement favorable ». (Sourires.) Pourquoi les kinésithérapeutes ne sont-ils pas intégrés à cette réforme ? Bien que majoritairement formés dans des écoles privées, les deux tiers d'entre eux passent leur première année d'université en PCEM. Ce système de convention entre les écoles et les universités est fondé sur le principe du cas par cas ; il présente l'avantage de revenir moins cher aux étudiants qu'une année en classe préparatoire privée. La réforme ne changera rien pour ces étudiants, qui pourront toujours être accueillis en « L1 santé » par voie de convention.

Comme les kinésithérapeutes, les orthophonistes ne sont pas intégrés à la réforme, mais ils ont à coup sûr vocation à se rapprocher de la « L1 santé » : nous y travaillerons. Je précise que toutes les professions paramédicales y seront associées grâce aux nouvelles passerelles.

Les collectivités d'outre-mer, madame Delaunay, ont été entendues. L'université de La Réunion, notamment, est prête à mettre en oeuvre la réforme, avec l'aide de l'université de Bordeaux.

Madame Fourneyron, vous me dites que la réorientation aura lieu exclusivement en cursus scientifique : c'est une aberration ! Vous savez que les étudiants en médecine se réorientent principalement vers les filières juridiques. Grâce à ce système, les étudiants se verront garantir l'obtention d'ECTS afin de se réorienter vers le cursus universitaire de leur choix. De la même façon, les passerelles incluront toutes les filières de sciences humaines et leur permettront de revenir. Aussi curieux que cela semble, les choix de médecine et de droit sont souvent vus comme les branches d'une alternative.

Madame Orliac, je vous ai déjà répondu sur la concertation, comme d'ailleurs sur les problèmes pratiques pour les étudiants en pharmacie : les étudiants seront associés, leur nombre global n'augmentera pas. La mutualisation des équipes pédagogiques sera nécessaire, c'est évident : s'il y a plus d'étudiants, il y aura plus de professeurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Vous venez de dire qu'il y aura plus d'étudiants !

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Le nombre global n'augmentera pas : il faut additionner les étudiants qui sont aujourd'hui en médecine et ceux qui sont aujourd'hui en pharmacie, mais il faut aussi additionner les professeurs des deux facultés ! Il n'y a pas de baisse du taux d'encadrement des étudiants.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je crois ainsi avoir répondu à toutes les questions. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du règlement.

La parole est à Mme Catherine Lemorton.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Faisant suite aux interrogations exprimées dès 2002 par Jack Lang et Bernard Kouchner, était remis aux ministres de l'éducation et de la santé de l'époque, MM. Luc Ferry et Jean-François Mattéi, le 20 juillet 2003, le rapport Debouzie. Cette affaire remonte donc à quelques années.

Loin de constituer un énième document sans envergure, celui-ci avait le mérite de poser un constat juste – et accablant – sur la situation du cycle d'études des professions de santé et de proposer des pistes de réflexion cohérentes pour y répondre.

Car s'il est une réalité qui s'impose à nous tous, sur ces bancs, c'est bien celle de la complexité du cursus des professions de santé et de la difficulté humaine que celle-ci fait vivre à des dizaines de milliers d'étudiants.

Le rapport Debouzie posait en effet des objectifs ambitieux mais cohérents, et qui débouchaient sur la volonté de refondre notre système de formation des professionnels de santé : d'abord, le besoin de mettre fin au gâchis humain – des milliers de jeunes, souvent dotés d'excellents résultats au lycée et au baccalauréat, sont concernés ; l'exigence, ensuite, pour les futurs praticiens, de qualités humaines face au patient ; enfin, la nécessité de travailler en équipe avec d'autres professionnels de santé.

Les conclusions de ce rapport exploraient trois pistes extrêmement pertinentes pour reconstruire la structure de notre système de formation : d'abord, la réforme de la première année de formation et de sélection destinée à quatorze professions de santé, élément fondamental pour impulser le nouvel élan souhaité ; ensuite, la réflexion sur la réforme plus globale des cursus des professionnels de santé, imaginant une insertion complète des cursus dans le système LMD ; enfin, la réflexion sur l'évolution des métiers de la santé, fondée sur leur rapprochement.

Le rapport Debouzie apportait donc une pierre à la reconstruction de notre système de formation ; hélas, il n'a pas reçu dans les faits la reconnaissance que la qualité de ses préconisations aurait méritée.

Remis à madame la ministre de l'enseignement supérieur le 21 février dernier, le rapport Bach, qui a servi de base à la proposition de loi Domergue que nous discutons, constitue une nouvelle alerte face à la situation de notre système de formation – mais il comporte, permettez-moi de le souligner, quelques fortes régressions dans l'ambition qui doit animer la réponse des pouvoirs publics.

Sur le constat, nous ne pouvons qu'être d'accord.

Le rapport Bach réaffirme en effet fidèlement la situation de précarité des étudiants en première année de cursus de professions de santé.

Il souligne d'abord le nombre extrêmement important d'étudiants inscrits en première année ; je n'y reviens pas.

Face à cette impressionnante demande des étudiants, qui découvrent un art qu'ils n'ont jamais ou quasiment jamais abordé, le numerus clausus s'apparente à de véritables fourches caudines. Le rapport Bach précise les chiffres pour l'année 2006-2007 : on compte 7 100 reçus en médecine, 977 en odontologie, 1 007 en maïeutique et 2 990 en pharmacie. La situation est rendue plus complexe encore par la présence très importante de doublants au sein des reçus, doublants ayant échoué une première fois avec des notes souvent très honorables – en 2007, 54,8 % des étudiants reçus redoublaient.

Refusant ce taux d'échec, le rapport Bach pose aussi correctement la problématique du temps perdu – souvent deux années pour des étudiants qui sortiront de ce cursus sans aucun diplôme, ou après avoir dû batailler au-delà du raisonnable tout en ayant déjà le niveau de la seconde année.

Pour conclure sur ce constat d'échec, le rapport évoque aussi la frustration de nombreux étudiants, la médiocrité de la qualité de l'enseignement du fait de l'encombrement des amphithéâtres, la compétition à outrance à laquelle doivent se livrer les étudiants, et surtout la perte de temps et d'énergie pour des étudiants pourtant très souvent brillants.

Fort de ce constat, le rapport Bach aurait pu être extrêmement utile pour marquer le besoin de refondation en profondeur de notre système de formation.

Est-ce parce que la demande de madame la ministre ne s'est limitée qu'à la première année de santé, ou bien parce qu'il a eu peur que trop d'ambitions soient nuisibles à son dessein ? Le rapport Bach se trouve être nettement moins pertinent que son aïeul Debouzie.

Les dix propositions avancées marquent un recul, et même une volonté de ne pas trop en faire – par crainte d'on ne sait quelles conséquences.

Si la volonté d'informer les lycéens sur la difficulté et la longueur des études dans les cursus menant aux professions de santé est louable, le rapport échoue d'abord sur l'envergure de la réforme en ne proposant une année commune que pour la médecine, l'odontologie, la pharmacie et les sages-femmes.

L'instauration de ce que je nomme un itinéraire bis pour les étudiants n'ayant pas encore le niveau, à savoir une note inférieure à 7 sur 20 en fin de premier semestre ou au concours de fin de première année, constitue également une fausse bonne idée, et ce pour une raison toute simple ; si le constat actuel pose le problème de la perte de deux années pour de nombreux étudiants, cet itinéraire bis ne permettra pas de résoudre le problème. Un étudiant qui doit partir douze ou dix-huit mois pour se remettre à niveau et tenter à nouveau sa chance risque d'avoir perdu, au bout du compte, jusqu'à deux ans et demi ou trois ans sans décrocher le moindre diplôme ! Or, au vu du nombre d'étudiants et du numerus clausus, cette situation risque d'être celle d'un nombre incalculable de jeunes.

Certes, le rapport prend en compte l'impérieuse nécessité de mettre en place un système de tutorat, outil indispensable dans un cursus aussi nouveau et concurrentiel que celui des professions de santé. Pour autant, le constat n'en est pas moins amer. Le rapport Bach n'a pas su se mettre au niveau de la situation.

J'en viens maintenant à la proposition de notre collègue Domergue.

Là encore, il serait malhonnête de ne pas reconnaître que cette proposition s'inscrit dans une réflexion pertinente sur la qualité de notre enseignement relatif aux professions de santé et sur les réelles difficultés que doivent affronter les étudiants de ces cursus. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Mais, comme pour le rapport Bach, pourquoi poser un constat si juste pour aboutir à une proposition qui ne pourra y répondre ou y répondre que très partiellement ?

Inspirée par le rapport Bach, cette proposition de loi n'en reprend que quelques préconisations, limitant encore un peu plus le champ possible de la réforme.

Avec l'article 1er, cette proposition pose trois grands principes évoqués dans les rapports précédemment cités :

Premièrement, une première année commune aux études de santé, sous format LMD, ouverte donc à la médecine, l'odontologie, les sages-femmes et la pharmacie. Décomposée en deux semestres, le premier en tronc commun, le second intégrant des cours spécifiques, elle serait sanctionnée par des concours distincts, permettant ainsi aux étudiants de s'inscrire à un ou plusieurs d'entre eux.

Deuxièmement, l'orientation des étudiants les plus en difficulté vers des facultés de sciences.

Troisièmement, l'instauration de passerelles entre les différentes filières universitaires permettant à certains étudiants – titulaires d'un master littéraire ou de sciences humaines, diplômés d'une école de commerce ou d'un IEP – d'intégrer la deuxième année de médecine sur dossier et entretien de motivation. Cette proposition a pour objet d'éviter « l'uniformisation trop étroite des professionnels de santé ».

L'article 2 prévoit une entrée en application dès la rentrée 2009-2010 afin de faire bénéficier au plus vite les étudiants des avancées précédemment évoquées – j'espère pour ma part que la date sera repoussée à 2010-2011, comme cela a été voté en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Derrière les belles paroles, derrière la bonne volonté affichée – vous n'en manquez pas, monsieur Domergue –, nous ne pouvons que nous rendre à l'évidence : ce texte est d'une ambition minimale par rapport au problème posé.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Qui plus est, les quelques préconisations du rapport Bach retenues ne sont pas de nature à améliorer la situation, au contraire.

Évoquons d'abord la mise en place de la L 1 santé, limitée à quatre professions de santé.

Dans cette configuration, cette première année ne pourra être un outil de mise en dynamique et en transversalité de tous les futurs professionnels de santé.

La définition juridique des professions de santé, comme le soulignait le rapport Debouzie, est la suivante : « Les professions de santé regroupent les seuls professionnels médicaux et paramédicaux dont le droit d'exercice et les actes sont réglementés par une disposition législative ou par un texte pris en application de la loi. Ces professions sont donc au nombre de quatorze : médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychomotriciens, orthophonistes, orthopédistes, pédicures-podologues, manipulateurs en électroradiologie médicale, audioprothésistes et opticiens-lunetiers. »

Sur les quatorze professions de santé, seules quatre sont concernées par votre texte. Loin d'être anecdotique, cette limitation volontaire empêchera toute vision transversale du monde de la santé. Pourtant, la difficulté à se coordonner est l'un des problèmes constamment évoqués dans les différents rapports portant sur le monde de la santé. Pourquoi ne pas avoir ouvert un peu plus cette Ll santé pour lui donner tout son sens ?

L'ambition est la seule porte de sortie pour permettre à notre système français de ne plus être aussi impitoyable pour les étudiants et d'être efficace pour les patients. Ce texte, à notre grand regret, ne porte pas en lui cette notion d'ambition.

Deuxième exemple, toujours sur la mise en place de cette L 1 santé et du manque d'ambition de la majorité sur le sujet, comment les étudiants vont-ils être accueillis ?

Leur nombre va bien sûr augmenter mais qu'en sera-t-il du nombre de professeurs, notamment en filière sciences ? Comment mettre en place des travaux dirigés avec cent cinquante ou deux cents étudiants à gérer ? Pour information, les étudiants en pharmacie sont aujourd'hui trente-huit en moyenne par groupe d'études dirigées. Les CD-ROM et DVD-ROM seront-ils les nouveaux pédagogues des étudiants de la L 1 santé ?

Sur ces aspects pourtant déterminants, cette proposition de loi ne propose rien.

Pire, l'idée majeure du tutorat, que le rapport Bach reprend d'ailleurs, n'est pas évoquée dans la proposition Domergue. Livrés à eux-mêmes, dans des conditions d'apprentissage encore plus précaires, il ne nous semble pas que ce texte sera de nature à enrayer le « gâchis humain » que nous constatons pourtant tous.

Prenons un troisième exemple, celui de l'orientation des élèves en difficulté.

Il est d'abord étonnant de voir que cette proposition de loi évoque la réorientation dès la fin du premier semestre, sachant que celui-ci, avec une rentrée début octobre, ne durera que quatre mois. Plus longue en revanche sera la période passée en dehors du cursus santé pour celles et ceux considérés comme en échec, c'est-à-dire les étudiants ayant obtenu moins de 7 sur 20 et qui seront redirigés, pendant une période de douze à dix-huit mois, vers les facultés de sciences. Conscients de leur situation d'échec, ces étudiants vont devoir se réadapter à une nouvelle structure en cours d'année, pour tenter de réussir au mieux en sciences afin, peut-être, de pouvoir réintégrer la L 1 santé. Mais que deviendront ces étudiants retrouvant la L 1 après cette petite réorientation s'ils échouent de nouveau ? Trente ou même trente-six mois d'études pour en ressortir sans aucun diplôme, est-ce raisonnable ? Et pourquoi ne les orienter qu'en sciences ? Pourquoi ne pas leur offrir d'autres possibilités ? Mes chers collègues, je vous rappelle que cette proposition a pour objet de « limiter la casse humaine » dans les cursus de santé, pas d'amplifier le phénomène.

Et que penser des facultés de sciences qui vont accueillir des centaines d'étudiants dits en échec en cours d'année ? Auront-elles la place ? Le personnel enseignant sera-t-il en nombre suffisant ? Quels moyens leur seront-ils alloués en cours d'année ? Là encore, nous sommes face à une proposition qui ne propose pas.

Dernier exemple pour marquer la faiblesse de cette proposition face à la réalité, l'instauration des passerelles entre filières universitaires.

Le rapporteur parle « d'uniformisation trop étroite des professionnels de santé » pour justifier cette nouveauté. Là encore, sur l'esprit, nous ne pouvons qu'être d'accord. Mais à quoi tient cette uniformisation ? Essentiellement au milieu social des bacheliers qui intègrent les différents cursus de professions de santé, cursus où les catégories socioprofessionnelles supérieures sont surreprésentées. Par exemple, seules les catégories socioprofessionnelles supérieures peuvent être en capacité de « s'offrir » les officines assurant des cours privés coûteux. Et ce sont ces mêmes catégories socioprofessionnelles qui, depuis le début de la scolarité de leurs enfants, ont pu leur offrir des cours de soutien si nécessaires pour pallier les insuffisances de l'éducation nationale voulue par M. Darcos, avec la suppression notamment des RASED.

Ouvrir des passerelles avec des étudiants d'écoles de commerce ou d'IEP ne corrigera pas à l'uniformisation sociale dénoncée plus haut.

De plus, les préconisations du rapport Bach retenues par cette proposition de loi et celles écartées ne seront pas de nature à faciliter l'ouverture de ces filières.

Mes chers collègues, cette proposition de loi est, pour nous, un acte manqué en direction des étudiants. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Mais, plus que cet acte manqué, c'est le contexte général dans lequel s'inscrit cette proposition qui ne peut que nous amener à être circonspects. En effet, les raisons de ce manque d'ambition et de crédibilité pour répondre aux besoins de notre système de formation sont nombreuses.

Nous constatons d'abord un manque de moyens. Comment mettre en place le tutorat sans engagement financier de l'État ? Comment gérer une véritable L 1 santé ouverte à d'autres professions, quand la seule L 1 a minima proposée va déjà faire l'objet de difficultés financières énormes dans sa mise en oeuvre ? Comment intégrer les élèves réorientés en facultés de sciences si on ne donne pas à celles-ci les moyens de les accueillir dans de bonnes conditions ? Noyée dans des considérations uniquement budgétaires, cette proposition a perdu toute sa substance, tout son sens.

Hélas ! ce cas n'est pas isolé. Rappelons-nous, mes chers collègues, le plan de réussite en licence. Un an après sa mise en oeuvre, il ne s'est pas traduit par des avancées pour une majorité d'étudiants.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Le plan a été mis en place il y a deux mois seulement !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Seules 32 % des universités ont augmenté les volumes horaires de leurs formations. Seules 28 % des universités ont limité le nombre d'heures de cours en amphis. Moins de 40 % des universités ont créé des parcours permettant les réorientations. Seules 10 % des universités ont mis en place des dispositifs d'accompagnement pour les étudiants salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Pourquoi ne pas avoir pris le temps d'une réelle concertation avec les étudiants, avec les présidents des facultés de médecine et de pharmacie et des universités, alors que d'autres lois ne sont pas encore totalement appliquées ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Alain Bénisti

Mme la ministre n'a pas arrêté de faire des concertations !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

S'ils avaient réellement été consultés, il n'y en aurait pas dans la rue.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Je termine, madame la présidente.

Je vous assure, mes chers collègues, que si cette proposition de loi était à la hauteur du gâchis humain auquel nous sommes confrontés, nous aurions voté ce texte.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Oh !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Hélas ! pour nous et surtout pour les étudiants, l'espoir n'est pas dans ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Afin de donner une seconde chance à ce texte d'une part, à la majorité d'autre part, avec laquelle nous sommes prêts à travailler s'il s'agit de donner l'ambition nécessaire à cette proposition, je demande, au nom du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, le renvoi de la proposition Domergue devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Madame Lemorton, en ententant les propos aimables que vous avez tenus à mon égard en introduction, j'ai eu le sentiment qu'un médecin et un pharmacien peuvent s'entendre. Hélas ! à écouter vos conclusions, il me paraît plus difficile qu'un UMP et un socialiste puissent avoir une vision commune sur un tel sujet, que l'on pourrait croire consensuel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Sachez que je suis le premier à le déplorer.

Je me permettrai de vous apporter quelques précisions sur trois points :

Sur la semestrialisation tout d'abord, vous dénoncez le rôle que jouent certains officines privées dans la mise à niveau de certains étudiants. Mais précisément, le principe de la semestrialisation permettra à des étudiants de se renforcer sur le plan scientifique en allant dans les facs de sciences et en ayant la possibilité, au bout de douze ou dix-huit mois, de revenir dans la filière santé avec plus de chance de réussite. C'est un élément important du plan que nous proposons, qui va à l'encontre de cette idée selon laquelle seule des officines privées pourraient renforcer le potentiel de nos étudiants. Nous souhaitons leur donner davantage de chances. S'il est déconseillé à ces jeunes gens de rejoindre des filières de sciences humaines, c'est parce que nous souhaitons que ces étudiants puissent se renforcer sur le plan scientifique afin de revenir dans les filières santé. Ceux qui voudront réellement aller vers les filières de sciences humaines en auront la possibilité ; mais à mon avis, ils devront choisir cette solution à l'issue de la première année de licence et non pas au bout du premier semestre.

La notion de semestrialisation, évoquée par les uns et par les autres, nous semble donc un élément important de cette réforme.

Vous avez par ailleurs développé des éléments contradictoires sur le périmètre de la réforme. D'un côté, vous dites qu'il faut intégrer tout le monde, de l'autre côté, certains d'entre vous ont regretté qu'on y intègre les pharmaciens. Je ne comprends pas : vous voudriez qu'on y mette les infirmières et les kinés, mais pas les pharmaciens ? Il semble qu'il y ait un trouble dans votre esprit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

S'agissant du périmètre, nous avons voulu agir à deux niveaux. Aujourd'hui, ce que nous voulons, c'est mettre en place une véritable réforme des professions santé au niveau médical, au sens large du terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Ensuite, nous nous attaquerons, je peux vous l'assurer, à la réorganisation des professions paramédicales parce qu'il est indispensable qu'on éclaircisse un peu cette organisation des professions paramédicales et surtout qu'on définisse encore plus, comme c'est initié déjà dans ce texte mais en allant plus loin, la possibilité pour des professionnels paramédicaux de rentrer dans les filières santé au niveau médical. Cette loi-cadre est une première étape dans la réorganisation, laquelle se poursuivra au niveau des professions paramédicales.

Toutes les intervenantes se sont ensuite intéressées au délai, en disant pourquoi 2009 ? Pourquoi pas 2010, 2011 ou 2012 ? Mais qu'y aura-t-il de plus en 2010 qu'en 2009 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Mme la ministre l'a rappelé : les doyens comme les étudiants sont déjà informés. Nous les avons rencontrés les uns et les autres à plusieurs reprises. Nous avons entendu leurs craintes et nous sommes ici pour essayer de les rassurer. Aujourd'hui, cette réforme est attendue, par les étudiants, par les organisateurs, les doyens, qui attendent ce cadre législatif pour pouvoir aller au-delà de la préparation qu'ils ont déjà initiée depuis plus de six mois. Voilà pourquoi nous avons intérêt à voter ce texte pour 2009 et non pas à le reporter aux calendes grecques.

Je veux remercier le Gouvernement de soutenir cette proposition de loi, vitale pour la réorganisation des professions de santé. Je remercie également mes collègues parlementaires qui ont été nombreux à m'accompagner, non seulement les cent trente qui ont signé cette proposition de loi, mais également tous ceux qui partagent notre idée.

Des moyens importants ont été accordés dans le cadre du plan réussite licence : 730 millions d'euros qui permettront d'affiner la réforme, de la faire passer auprès des organisateurs, de répondre aux besoins matériels qui sont soulevés également par les étudiants qui ont peur qu'on ne soit pas prêt. Nous serons prêts et nous avons prévu les moyens pour que les universités se préparent.

Je ne vois donc aucune raison, madame Lemorton, de renvoyer cette proposition de loi en commission. Nous avons déjà parlé pendant plusieurs heures de ce texte, discuté de quarante amendements, dont sept, sauf erreur de ma part, ont été adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Nous avons entamé il y a plusieurs mois une concertation avec les étudiants et avec les doyens ; il revient désormais aux parlementaires d'adopter cette loi afin qu'elle entre en vigueur dès la prochaine rentrée. Nous appelons donc au rejet de la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Dans les explications de vote sur la motion de renvoi, la parole est à M. Jean-Pierre Door.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Demander le renvoi en commission revient à retarder sinon à refuser cette proposition de loi de Jacques Domergue. Ce texte vise, je le rappelle, à améliorer l'entrée dans la filière des carrières de santé. Il est regrettable, madame Lemorton, que vous en oubliiez ainsi l'objectif : l'urgence de répondre au gâchis lié à l'échec à l'issue de la première ou de la deuxième année d'études.

Un taux de 80 % d'échec ne vous paraît-il donc pas suffisamment élevé pour que vous souhaitiez le renvoi de la proposition en commission ? Quelle est donc votre arrière-pensée, sinon le choix de l'immobilisme ? Peut-on admettre que tant de jeunes étudiants soient renvoyés dans leurs foyers après un échec à l'issue de la première année ou de la deuxième année d'études ? Je réponds pour ma part qu'il est inacceptable de voir tous ces jeunes repartir depuis zéro après un ou deux ans d'études.

Mme la ministre a bien répondu aux questions que nous pouvons légitimement nous poser, qu'il s'agisse de l'intégration future des carrières paramédicales au sein d'une seule et même filière LMD, qu'il s'agisse du financement, dont Mme la ministre nous a assurés qu'il était prévu à un niveau conséquent, qu'il s'agisse enfin de la date d'entrée en vigueur du dispositif, l'assurance nous ayant été donnée que la majorité des universités étaient prêtes. Un certain volontarisme est nécessaire pour mettre cette réforme en marche. Il est urgent d'agir parce que c'est l'intérêt des étudiants qui vont choisir ces carrières médicales à partir de la rentrée 2009 – la réforme ne concernera pas ceux qui sont en cours d'études.

Nous vous avons écouté attentivement, madame Lemorton : vous dites tantôt « blanc » tantôt « noir » dans votre motion, vous vous prononcez parfois en faveur de telle disposition, parfois contre telle autre. De fait, cette motion est tout à fait irresponsable et nous voterons contre. (« Très bien ! » et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

(M. Marc Laffineur remplace Mme Catherine Vautrin au fauteuil de la présidence.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Je regrette le ton de Mme la ministre et la caricature qu'elle a cru devoir faire de nos interrogations et propositions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Ce ton ne reflète pas le climat qui a présidé aux travaux de la commission et ce n'est pas ainsi que nous pourrons avancer. Reste, madame la ministre, que vous ne répondez pas aux questions posées. Ainsi, pourquoi la réorientation ne s'effectuerait-elle que vers les disciplines scientifiques et pourquoi obligatoirement après dix-huit mois ? Il est facile de nous brocarder, mais c'est sans doute parce que vous n'avez pas beaucoup d'arguments à faire valoir.

Dans ces conditions, je ne suis pas surprise par la force des protestations qui se manifestent en ce moment même devant l'Assemblée nationale. Si vous répondez aux étudiants comme vous avez répondu aux parlementaires, je comprends assez qu'ils n'apprécient pas votre attitude. Il n'y a pas urgence à attendre, dites-vous, madame la ministre. On dirait que vous venez de vous apercevoir brusquement du gâchis que représente la première année de médecine. Fort bien, voilà un réveil tardif mais louable. La question ne peut pas pour autant se régler dans la précipitation. S'il n'y a pas urgence à attendre, il y a urgence à écouter et entendre ce que disent les doyens et les étudiants. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.) Il y a urgence à en finir avec les méthodes précipitées, méprisantes et autoritaires de ce Gouvernement. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Cardo

Pas de leçons, s'il vous plaît, madame Fraysse !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

De toute évidence, ce texte est pavé de bonnes intentions mais ne peut être adopté tel quel. Tous les débats le confirment : il doit être retravaillé. C'est la raison pour laquelle notre groupe votera le renvoi en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle Delaunay

Je m'associe totalement aux propos de Mme Fraysse : nous avons toute été frappées, madame la ministre, par la manière dont vous avez répondu à nos interventions, alors que nous étions montées à la tribune dans un esprit assez consensuel, dans le seul but de formuler des remarques, poser des questions et améliorer le texte, en toute sérénité.

Le sujet est en effet consensuel, monsieur Domergue, vous l'avez dit. Pour autant, il ne s'agit pas d'un texte biblique, d'un texte sacré qu'il serait interdit de retravailler à la faveur d'un renvoi en commission. Nous sommes majoritairement en accord. Seulement, six ans après le rapport Debouzie – pourquoi donc nous précipiter quand nous avons si longtemps réfléchi pour ne rien faire ? –, il nous paraît indispensable, non de retarder la mise en oeuvre du texte, mais de faire en sorte qu'il bénéficie d'une réflexion plus approfondie. Nous nous sommes efforcés de vous montrer qu'il avait été élaboré dans la précipitation, sans concertation suffisante – les universitaires nous l'ont d'ailleurs signifié et nous avons tendance à les croire.

La deuxième raison pour laquelle nous sommes favorables à un renvoi en commission, c'est que cette proposition de loi n'a pas été mise en perspective : elle n'est qu'une pièce d'un kit. Or nous souhaiterions savoir dans quelle dynamique s'inscrivent ces études de santé et quelle est la place de ce kit dans le dispositif global.

Troisième raison, et de taille : nous avons été nombreux ici à travailler auprès des infirmières et des kinésithérapeutes et il ne nous semble ni logique ni légitime qu'ils soient écartés de ce premier tronc commun.

Quatrième raison, nous considérons qu'une sélection au bout de six mois, fondée sur des critères strictement scientifiques, pour renvoyer ces étudiants en faculté de sciences, n'est pas rationnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle Delaunay

Dernière raison, l'absence de formalisation des possibilités d'encadrement et en particulier de tutorat, loin de freiner le développement des officines privées, comme vous le prétendez, nous paraît au contraire de nature à les favoriser.

Voilà pourquoi nous voterons la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

Nous sommes tous d'accord pour constater qu'il y a un problème : 50 000 étudiants échouent en première année, soit 80 % de bons étudiants collés, qui ont perdu deux ans et avec parfois d'importantes séquelles, comme vous le savez – de nombreux médecins sont présents dans l'hémicycle.

Le texte répond peut-être partiellement…

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

…mais en tout cas globalement à ce problème. La mutualisation, ou la première année commune, des quatre disciplines est une bonne disposition. Les médecins ont tous une formation sanitaire. Pour ce qui est de la réorientation, si nous pouvons faire en sorte que l'année ne soit pas complètement perdue, c'est également un bon point. Pour ce qui est des passerelles, j'y suis pour ma part tout à fait favorable.

Même si des questions se posent au sujet des kinésithérapeutes qu'il faudra bien, à mon sens, intégrer au dispositif, même si des points restent à régler à propos du LMD, dans l'intérêt de nos étudiants comme de nos facultés de médecine, notre groupe votera contre la motion de renvoi en commission.

(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Sur l'article 1er, je suis saisi d'un amendement no 13 .

La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Monsieur le président, l'amendement n° 13 me donne l'occasion de défendre par avance l'amendement n° 14 qui va dans le même sens, contrairement à ce que peut prétend M. Door – il est difficile de s'entendre donner ainsi la leçon.

J'ai rappelé dans mon bref historique, à la tribune, que la majorité de la législature 1997-2002 s'était penchée sur ce problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Le rapport Debouzie a été remis en 2003 aux ministres concernés, lesquels appartenaient à l'actuelle majorité…

Outre l'échec de près de 80 % d'étudiants en fin de première année et le gâchis humain qu'il constitue, deux motifs sous-tendent cette proposition de loi, que j'ai quelque mal à comprendre.

Le texte viendrait tout d'abord, nous dit-on, pallier l'inégale répartition géographique des professionnels de santé. Je ne vois pas comment, dès lors qu'il ne prévoit aucune mesure incitative ni coercitive de nature à pousser les médecins s'installer dans des lieux où ils sont sous-représentés. Du reste, les seuls praticiens à peu près bien répartis sur le territoire – pardonnez-moi d'en parler – sont les pharmaciens.

Autre argument avancé, la mutualisation des connaissances. Mais, quoi que vous en disiez, nous serons toujours, dans la L 1 santé, dans le cadre d'un concours où je ne pense pas que les étudiants soient enclins à mutualiser leurs connaissances. La mutualisation des connaissances des professionnels de santé ne peut être productive qu'au terme de quelques années d'apprentissage, d'enseignement, quand les uns seront devenus des pharmacologues et les autres des cliniciens – je pense à la quatrième et à la cinquième année hospitalo-universitaire, pour les pharmaciens notamment.

Ces deux raisons ne me paraissent donc pas valables, d'autant que ce que M. Door prend pour une contradiction de ma part n'en est pas une. Si, en effet, des formation de santé, en première année, doivent avoir la même base de connaissances, cela ne peut valoir, à mon sens, que pour des professions de santé amenées à travailler au quotidien ensemble dans les maisons pluridisciplinaires, dans les cliniques, les hôpitaux. Il ne me semble pas, dans cette hypothèse, que les pharmaciens soient les plus proches des médecins, au contraire des infirmiers et des kinésithérapeutes, cités dans l'amendement n° 14 et qui bénéficient d'une certaine forme de pratique clinique Jamais un pharmacien n'abordera un patient en termes cliniques.

Vous faites un pas pour améliorer la situation, certes, mais insuffisant. Voilà pourquoi je vous demande d'adopter notre amendement n° 13 qui demande que les étudiants en pharmacie ne soient pas intégrés à cette année commune. Réduisons ce qui est proposé au système en vigueur pour en constater les effets – quand bien même votre gouvernement, madame la ministre, a toujours des problèmes avec les études d'impact sur ses lois… Tâchons, dans un premier temps, d'appliquer la réforme aux trois formations qui se retrouvent dans les mêmes amphis aujourd'hui ; et s'il faut en rajouter, ce n'est certainement pas du côté des futurs pharmaciens qu'il faut chercher en premier, mais plutôt du côté des professionnels de santé amenés à « faire de la clinique » sur le patient.

Je vous invite donc à adopter les amendements nos 13 et 14 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Défavorable. Il est illogique de vouloir exclure les pharmaciens tout en demandant l'ajout des infirmiers et des kinésithérapeutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Sans doute, madame Lemorton, mais votre explication n'est pas du tout cohérente.

Vous êtes pharmacienne ; vous savez donc de quoi vous parlez. Ce n'est pas à vous que je l'apprendrai, la pharmacie est amenée à évoluer. Le rôle « médical » du pharmacien devient de plus en plus important. Le rôle de conseil auquel vous faisiez allusion…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Vous faisiez allusion au projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, aux termes duquel le pharmacien doit devenir un acteur de santé de premier recours. Le fait qu'il soit médicalisé et la culture commune que promeut le présent texte plaident par conséquent pour l'intégration des pharmaciens à cette première année commune. Il n'y a donc aucune raison d'accéder à votre demande.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Que faites-vous d'une notion comme l'exercice illégal de la médecine ?

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 13 , comme à l'amendement n° 14 .

Je voudrais répondre à ce qui a été dit. Il y a une réelle cohérence d'ensemble entre tous les projets portés par la majorité parlementaire et par le Gouvernement : il s'agit de faire réussir les étudiants en première année de licence. Si nous ne touchons pas à la première année médicale, nous manquons le rendez-vous du plan « réussir en licence ». Rappelons qu'en pharmacie, le taux de réussite est de 27 % et en médecine de 20 %. Elle est là, la cohérence globale : c'est le plan « réussir en licence ». Et nous y mettons les moyens : 730 millions d'euros en cinq ans, des moyens que jamais l'université n'a eus pour résoudre ce problème de l'échec. Mais nous avons besoin d'une loi : celle que nous propose M. Domergue.

Moi non plus, je ne vois pas bien la cohérence qu'il y aurait à faire sortir les pharmaciens et à faire entrer les kinésithérapeutes et les infirmières, si ce n'est celle qui consiste à vouloir systématiquement le contraire de ce que propose votre rapporteur.

Les pharmaciens ont tout à gagner au L 1 santé. L'association des pharmaciens est essentielle à plus d'un titre, à commencer par la nécessité de poser dès la première année les bases d'une culture commune à tous les professionnels de santé, qui favorisera leur future coopération.

Je voudrais vous livrer la contribution de l'Académie nationale de pharmacie, que son président, Claude Santini, m'a envoyée le 7 novembre dernier : « L'Académie nationale de pharmacie adhère au principe de la création d'une année L 1 santé commune à ces métiers. Elle offrira aux étudiants la possibilité de se présenter à plusieurs concours et améliorera ainsi leurs chances de réussite à bac + 2. Le dispositif pour le L 1 santé est, en outre, de nature à contribuer au rapprochement des formations des futurs praticiens de santé, donc à favoriser leur future coopération au cours de leur vie professionnelle, au bénéfice du patient. Il facilitera aussi les passerelles entre ces différentes formations aux métiers de santé, permettant ainsi, en tant que de besoin, la réorientation des étudiants. »

(L'amendement n° 13 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements, nos 14 et 3 , pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 14 a été défendu.

La parole est à M. Olivier Jardé, pour soutenir l'amendement n° 3 .

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

Actuellement, 60 % des instituts de kinésithérapie recrutent leurs étudiants à partir du PCEM1. Je regrette que les kinésithérapeutes n'aient pas été inclus dans cette année commune.

Mais si le kinésithérapeute fait partie de la chaîne de soins – c'est plus l'orthopédiste qui parle –, le pharmacien aussi. Les infections nosocomiales sont une réalité en orthopédie. Et je suis bien content de discuter avec les pharmaciens pour pouvoir mettre au point des traitements efficaces, souvent complexes dans le cas des infections nosocomiales.

J'approuve donc l'inclusion des étudiants en pharmacie dans cette année commune, et j'aurais souhaité être rassuré en ce qui concerne l'avenir des kinésithérapeutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Je vous rassure, monsieur Jardé, quant à l'avenir des kinésithérapeutes. Cette profession doit donner lieu à une formation universitaire. Cela se fera, mais c'est un peu prématuré pour l'instant. Je vous rassure quant à l'organisation matérielle de la sélection des kinésithérapeutes. Vous avez rappelé que les deux tiers des instituts de kinésithérapie recrutent leurs étudiants à partir du PCEM1. Cela restera le cas. Si les directeurs d'institut veulent passer des conventions avec les doyens des facultés de médecine et de pharmacie, cela se fera. Autrement dit, les deux tiers des kinésithérapeutes pourront continuer à bénéficier de cette sélection.

Il faut bien faire la différence entre le fait d'obtenir une note et le fait d'être intégré à la sélection. Grâce à la note qu'ils obtiendront, ils pourront être sélectionnés dans les instituts de kinésithérapie. Votre amendement doit être rejeté, car vous avez toutes raisons d'être rassuré.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je tiens moi aussi à rassurer M. Jardé sur la question des kinésithérapeutes, comme sur celle des orthopédistes, d'ailleurs. S'ils ne font pas partie de cette réforme, ils ont certainement vocation à se rapprocher de plus en plus du L 1 santé.

Mais ce qu'il faut dire, c'est que la réforme ne changera rien à la situation actuelle : comme l'a très bien dit Jacques Domergue, les deux tiers des kinésithérapeutes sont d'ores et déjà formés en première année de PCEM1. Nous continuerons à signer des conventions avec les universités. La situation actuelle perdurera. Le Gouvernement souhaiterait le retrait de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Vous avez dit, madame la ministre, qu'il serait bon que l'ensemble des professions de santé aient un socle commun. Mais vous venez de vous contredire en excluant la kinésithérapie.

J'entendais un collègue de la majorité dire tout à l'heure que le chirurgien orthopédiste ne pouvait rien, aujourd'hui, quant à la réussite de son acte, s'il ne travaillait pas en symbiose avec le rééducateur. Nous allons donc voter l'amendement n° 3 de M. Préel.

Mais les infirmières aussi font partie des professions de santé, et elles en feront de plus en plus partie. Nous savons très bien les grandes difficultés auxquelles se heurtent les transferts de compétences, mais ces transferts seront de plus en plus nécessaires, et notamment en ce qui concerne les infirmières. Voilà déjà plusieurs années que la réforme de la formation des infirmiers est à l'oeuvre. Pour aboutir à une réforme dans le cadre du système LMD, c'eût été l'occasion d'accélérer les choses que de les intégrer dans ce socle commun et de leur donner une ouverture vers la formation à l'université, comme elles le réclament – c'est du reste d'ores et déjà ce qui se fait dans certains cas. De nouveaux métiers apparaissent dans le domaine de la santé, parfois très sophistiqués : ainsi le « conseil en génétique et médecine prédictive », très important en cancérologie et pour les maladies rares. Une seule faculté, celle d'Aix-Marseille, dispense cette formation. Quand on voit son recrutement, on constate qu'il y a certes des scientifiques qui entrent dans cette filière, mais aussi des professionnels de santé, des infirmières, des sages-femmes, un pharmacien, et même un cadre de laboratoire. Cela prouve bien que ces professions, dans le cadre de l'évolution de la médecine moderne, sont obligatoirement appelées à avoir un socle commun.

Je voudrais également parler de l'interdisciplinarité, du travail de groupe, des maisons de santé pluridisciplinaires. Dans certains pays nordiques, le patient qui se présente dans un centre de santé en premier recours rencontre, dans la majorité des cas, l'infirmière. Et c'est seulement lorsque celle-ci le juge utile que le médecin, présent dans ce même centre, recevra le malade.

La seconde dimension du problème est celle de la coordination, de la mise en place des réseaux. Faut-il absolument, et partout, un médecin pour être coordinateur d'un réseau de santé ? N'est-ce pas du gaspillage de temps médical ? Des transferts de compétences, notamment vers des infirmières spécialisées dans tel ou tel domaine, ne peuvent-ils pas se faire ?

Voilà pourquoi il est tout à fait dommage que, même si cette réforme tardive répond à un besoin, on ne l'ait pas suffisamment élargie pour prendre en compte la réalité des besoins de formation et d'interdisciplinarité. Depuis 2002, on a mis six ans pour arriver à cette réforme. Essayons de ne pas attendre six ans de plus pour reconnaître la nécessité des transferts de compétences et pour favoriser l'émergence de nouveaux métiers dans le domaine de la santé.

(L'amendement n° 14 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

Je souhaitais que soit posée dans cet hémicycle la question des kinésithérapeutes, mais dans la mesure où je suis rassuré en ce qui concerne la sélection des 60 % de kinésithérapeutes en provenance des facultés, et étant donné qu'il y a un avenir pour les 40 % restants, je retire mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Si vous êtes rassuré, c'est que vous ne deviez pas être très inquiet !

(L'amendement n° 3 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 19 .

La parole est à Mme Catherine Lemorton.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Il peut paraître un peu bizarre de préciser que les cours sont dispensés par un enseignant…

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Oui, je comprends les railleries venant des bancs de la majorité…

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

…mais je voulais insister sur ce point parce que l'on voit bien les modes d'enseignement et les supports pédagogiques qui risquent de se développer si on ne réaffirme pas la nécessité de la pédagogie présentielle, autrement dit faite par un enseignant dans un amphithéâtre ou dans un cours de travaux dirigés ou d'études dirigées.

Or je crains de voir se développer – j'espère pouvoir être rassurée, comme l'a été mon collègue Jardé – les DVD, les CD-ROM, les visioconférences, au risque de voir des postes d'enseignants universitaires disparaître.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Je rappelle le chiffre à Grenoble I : vingt-huit postes disparaîtront encore à la rentrée prochaine.

J'aimerais être rassurée. La phrrae que je propose d'insérer paraît tomber sous le sens, mais avec les années qui passent, elle ne me paraît pas aussi inopportune que cela.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Défavorable. Je ne vous ferai pas l'affront, madame Lemorton, de parler d'un truisme… Mais je ne voudrais pas que le parti socialiste paraisse ringard en considérant qu'on ne peut pas utiliser des moyens modernes pour faire de l'enseignement. L'enseignement est assuré par des enseignants, et il appartient à chaque université – qui est autonome, je vous le rappelle – de définir comment elle met en place son enseignement. Cela n'exclut pas d'organiser la retransmission de cours dans différentes salles.

Le recours aux CD-ROM, n'est pas la solution. Ce qu'il faut, c'est pouvoir utiliser des CD-ROM tout comme Internet en appoint, en mettant des cours en ligne à la disposition des enseignants. Mais l'enseignement sera toujours dispensé par des enseignants.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

L'avis du Gouvernement est également défavorable. Le coeur de l'autonomie des universités, c'est la liberté pédagogique.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Cette liberté d'initiative pédagogique se traduit concrètement dans le statut des enseignants-chercheurs par une révolution : la prise en compte de toutes les heures qu'ils font en non-présentiel devant les étudiants, c'est-à-dire tout ce qui touche au suivi des étudiants sur Internet, à l'élaboration de cours en ligne, aux nouvelles technologies au sens très large du terme, au tutorat individualisé.

Au moment même où nous assouplissons leur statut et où nous prenons pour la première fois en compte tout ce qui constitue l'entourage du cours proprement dit, parce que nous pensons qu'il faut diversifier les pédagogies et faire du sur-mesure à l'université, vous nous demandez de figer complètement cette pédagogie à l'ancienne.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Bernard Debré, contre l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

Contre cet amendement tout à fait extraordinaire alors que se développent depuis plusieurs années les CD-ROM et les cours sur Internet.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

Ce qu'il faudrait plutôt souligner, c'est la nécessité que l'enseignant soit accessible. Et il l'est, par Internet. Regardez ce qui se passe aux États-Unis : les étudiants peuvent joindre leur professeur quand ils ont besoin d'explications sur le polycopié, lequel ne devrait d'ailleurs plus exister quand on a des CD-ROM ou des sites Internet.

Je ne voudrais pas entrer dans une polémique, mais la phrase proposée par cet amendement me paraît…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Je trouve ce genre d'amendement profondément inquiétant. On peut aussi le trouver un peu corporatiste – le fait est habituel…

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Mais que l'on en vienne à proposer un tel amendement en dit très long sur notre capacité d'adapter notre système éducatif… Je suis vraiment inquiet d'entendre de telles propositions.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Bernier

Très bien !

(L'amendement n° 19 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 15 .

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

La mise en application en septembre 2009 de la délivrance de l'information aux lycéens me pose problème. M. Bach écrit dans son rapport : « Il est impératif d'améliorer l'information dispensée dans les lycées pour mieux expliquer les contenus des filières de santé et les caractéristiques des professions auxquelles elles donnent accès. » Jusque-là, nous sommes d'accord. Mais il ajoute : « Elle devra être menée en concertation avec le ministère de l'éducation nationale pour inciter professeurs et proviseurs à s'investir pleinement dans cette orientation active, au-delà du rôle des conseillers d'orientation jugé actuellement insuffisant ».

Si l'on estime que le dispositif des conseillers d'orientation, dont le rôle est précisément d'informer et d'orienter les lycéens, n'est pas suffisamment efficace, mieux vaudrait peut-être l'optimiser plutôt que de surcharger les proviseurs qui croulent déjà sous le travail administratif, ou les enseignants qui ont un savoir à transmettre et parfois pas mal de discipline à assurer dans leur classe… Je ne vois donc pas qui s'occupera de l'information des lycées telle que préconisée dans le rapport Bach et j'aimerais que Mme la ministre me donne des précisions à ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Avis défavorable. L'amendement est satisfait par les dispositions de l'article L. 612-3 du code de l'éducation, relatif aux questions d'information. Il n'a donc pas lieu d'être.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Au risque de vous surprendre, madame Lemorton, je partage complètement le souci du rapport Bach et le vôtre d'améliorer la transition entre la terminale et l'université, ce qui suppose davantage d'information des élèves de terminale. Cette information sera également assurée par le nouveau site « Admission post-bac », qui donnera à chaque étudiant qui se préinscrira, puisque c'est désormais la loi, la palette des informations sur toutes les formations. L'étudiant émettra des voeux d'inscription dans des universités, qui lui répondront, au vu de son cursus, sur sa capacité à réussir dans telle ou telle filière. Nous allons consacrer 55 millions d'euros dans les trois ans qui viennent à ce dispositif. Il est particulièrement important que l'université s'investisse dans le conseil aux étudiants parce que ce sont les universitaires, notamment dans les filières de santé, qui connaissent le mieux les difficultés inhérentes à la PCEM1.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Votre amendement n'a donc pas lieu d'être, d'abord parce qu'il relève du champ réglementaire, ensuite parce qu'il déjà est mis en oeuvre dans le cadre de notre grand plan d'orientation active sur lequel M. Bach insistait à juste titre.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

Cela n'a rien à voir avec la loi : c'est une circulaire ministérielle qui doit régler ce problème. On est en train de faire des lois comportant des milliers d'articles alors qu'il devrait y en avoir très peu.

Par ailleurs, Mme la ministre l'a indiqué, l'information sur l'orientation est déjà organisée en seconde, en première, à travers des forums et des crédits ont été débloqués.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Dans la moitié des universités, ce n'est pas fait !

(L'amendement n° 15 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 16 .

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Il est défendu.

(L'amendement n° 16 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 17 .

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Il est défendu.

(L'amendement n° 17 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 18 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Je profite de cet amendement pour poser quelques questions à Mme la ministre. Avec les passerelles entrantes aménagées à partir de la deuxième année pour des étudiants diplômés issus d'HEC, d'instituts d'études politiques ou de masters littéraires, avez-vous évalué le nombre d'étudiants qui en résultera à la fin de la L 1 santé ? Si 5 % à 10 % d'étudiants supplémentaires par rapport au numerus clausus de départ arrivaient en cours de cursus, il y aurait un certain cynisme à avoir refusé, pour quelques dixièmes de points, le concours à des étudiants du L 1 santé qui avaient montré leur motivation à exercer une profession de santé dès l'obtention de leur bac. Avez-vous des chiffres ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Défavorable. L'amendement n'a rien à voir avec le texte, qui constitue une loi-cadre. Des précisions seront apportées par arrêtés, qui définiront toutes les modalités, en particulier celle sur laquelle s'interroge Mme Lemorton.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Défavorable, mais comme l'argumentation de Mme Lemorton n'a rien à avoir avec son amendement, je vais y répondre.

J'ai, il est vrai, fortement réagi tout à l'heure, mais j'aimerais vous convaincre de la pertinence la philosophie des passerelles entrantes. Le concours de première année est très difficile et l'on peut effectivement y échouer pour un demi-point. Voilà pourquoi nous mettons en place un dispositif pour les « reçus-collés », ces étudiants qui ont une moyenne supérieure à 10 sur 20 sur l'année et qui échouent pour un demi-point au concours. Ceux-là auront deux semestres de leur première année de santé validés. Nous ne les oublions pas ; au contraire nous leur donnons la possibilité de se réorienter dans de bonnes conditions, sans se retrouver avec une année blanche. Ça, c'est le dispositif pour ceux qui ont échoué au concours, comme dans les classes préparatoires aux grandes écoles.

Il y a aussi des jeunes qui se révèlent plus tard, qui viennent de milieux plus défavorisés, qui se disent que la première année de médecine n'est pas pour eux, qui sont des littéraires ayant profondément en eux la vocation humanitaire et humaine de la médecine. À ces jeunes-là, il faut permettre, avec un bac plus cinq, de pouvoir revenir. C'est une richesse pour les études médicales et pour les professions de santé d'avoir des jeunes qui ne soient pas seulement des bêtes à concours sélectionnés sur les sciences à dix-sept ans. Cela s'appelle la deuxième chance et c'est le coeur de notre projet pour l'université.

(L'amendement n° 18 rectifié n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Olivier Jardé, pour soutenir l'amendement n° 5 .

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

Il existe une disparité très importante au niveau des régions dans la répartition des filières de santé. La Picardie notamment est particulièrement défavorisée. C'est pourquoi j'aurais souhaité que soit inséré dans la précision « admis par région » afin de prendre parfaitement en compte le fait régional et parfois la désertification de certains de nos territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Avis défavorable. Votre'amendement est satisfait par l'alinéa 4 de l'article 1er, qui mentionne la nécessité de remédier aux inégalités géographiques et de tenir compte des capacités de formation des établissements. Peut-être pourrait-il être retiré.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Défavorable également. L'amendement est effectivement partiellement satisfait puisque le numerus clausus est forcément calculé pour tenir compte des besoins régionaux. Mais techniquement, ce numerus clausus est fixé université par université. Je ne vois pas comment faire autrement, car il faudrait, à l'intérieur d'une région, répartir le numerus clausus entre les universités. Ce genre de décision doit être prise par les ministères, en fonction à la fois du potentiel d'enseignement et des moyens pédagogiques de chaque université.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

L'idée est sortie notamment des EGOS d'essayer de répondre au mieux aux besoins régionaux. On sait très bien que, même dans une même région, certaines zones sont surdotées et d'autres sous-dotées. Je considère important que la dimension régionale apparaisse, et que l'examen classant national pour l'internat soit enfin régionalisé, dans le même esprit. Des étudiants formés qui commencent à se frotter à la réalité médicale dans les zones rurales ou sous-dotées y restent plus volontiers, par attractivité de la profession mais aussi par enracinement local, pour répondre aux besoins. Je ne comprends pas pourquoi vous refusez l'amendement de l'excellent membre de votre majorité qu'est M. Jardé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

C'est trop tôt !

(L'amendement n° 5 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 11 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Notre amendement vise deux objectifs : d'une part, empêcher la réorientation obligatoire des étudiants, notamment dès le premier trimestre, d'autre part, permettre aux étudiants réorientés de capitaliser les compétences acquises.

Concernant le premier point, je crois savoir que Mme la ministre s'est engagée à ce que cette réorientation, dont les modalités seront définies par voie réglementaire, reste facultative. Mais il serait judicieux d'inscrire dans la loi cette liberté de choix.

Ensuite, la capitalisation des compétences acquises va dans le sens des préoccupations exprimées. Il s'agit d'inscrire dans le cadre du processus dit de Bologne la réforme LMD, ce qui permettrait aux étudiants dits « reçus-collés » de faire valider soixante crédits et se révélerait utile pour une réorientation vers une autre filière ou dans un autre pays. Cela favoriserait aussi les échanges entre pays et la reconnaissance des différents diplômes universitaires. Cette proposition va donc dans le bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Avis défavorable. J'insiste à nouveau, car visiblement cela passe mal : la semestrialisation de la réorientation est une chance pour les étudiants, non un inconvénient. Nous voulons, non pas les exclure, mais qu'ils reviennent plus forts dans la filière. Appelons cela le syndrome du GPS : quand vous faites fausse route, il ne vous laisse pas aller au bout pour constater qu'il n'y a rien, il vous réoriente le plus tôt possible. C'est tout l'intérêt de la réorientation. Les étudiants vont sortir renforcés plus tôt. Au lieu de perdre six mois, ils récupéreront du temps. Aujourd'hui, certains étudiants l'ont compris et ont déjà anticipé. Ils font ces boucles en sciences et quand ils reviennent, ils ont plus de chances, Mme la ministre vous l'a dit : statistiquement, un étudiant qui a moins de sept de moyenne n'a aucune chance d'intégrer la première année et quasiment aucune la seconde. Pour lui, cette boucle de réorientation vers les sciences est positive.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Les étudiants auront l'intelligence de se réorienter d'eux-mêmes, ils n'ont pas besoin d'injonction !

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Avis défavorable. Mme Fraysse a dit elle-même qu'il s'agit d'expérimenter le dispositif pendant les deux prochaines années sur les étudiants. Je suis persuadée que cela suscitera chez eux une prise de conscience…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Tout à fait ! Il n'y a donc pas besoin de les obliger.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

… de ce qu'ils peuvent faire. Ils comprendront que bien qu'ayant chevillée au corps la vocation pour les professions de santé, la bonne stratégie pour y arriver n'est peut-être pas de s'engouffrer dans une filière où ils n'ont aucune chance de réussir. C'est la raison pour laquelle nous créons des passerelles entrantes, qui vont permettre à des jeunes plus fragiles, qui n'ont pas eu de mention au bac scientifique et qui sont un peu différents, de trouver leur voie de réussite, avec les conseils de l'université, qui change de rôle et qui ne se contente plus d'accueillir les étudiants pour les lâcher ensuite dans une véritable jungle – vous connaissez l'ambiance qui règne en première année de médecine. Vous savez combien les jeunes sont sous pression pendant cette période : certaines universités ont même été obligées d'installer de la vidéosurveillance pour empêcher des comportements « anti-concurrentiels », pour dire le moins ! Cette pression, on peut l'alléger : c'est, comme l'a dit M. Domergue, une chance pour les jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

On me répondra que c'est d'ordre réglementaire, mais nous avons besoin d'être rassurés. Bon nombre de ces étudiants risquent d'être réorientés au bout de son premier semestre en sciences. Je pose une question pratique : ils auront payé les frais d'inscription sur la L 1 santé. Devront-ils s'inscrire en L 1 sciences en même temps ? Paieront-ils une deuxième fois des frais d'inscription à l'université, ou cela fait-il partie intégrante de leur cursus ?

Le rapport Bach réclamait des informations pour définir la note de 7 sur 20. Cette note n'aura de sens, disait-il, que si leur histogramme est harmonisé entre toutes les universités concernées. Pouvez-vous nous confirmer qu'il le sera ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Je partage les préoccupations exprimées par Mme la ministre et M. le rapporteur. Que l'université dialogue avec les étudiants, leur donne les moyens de mesurer où ils en sont, leurs chances de réussite de façon à ce qu'ils puissent réfléchir à une éventuelle réorientation. C'est très bien, et tout à fait normal. Mais ne veux pas d'une décision couperet. Un étudiant, à la lueur des explications données, doit garder la liberté de choix de sa réorientation.

(L'amendement n° 11 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 7 .

La parole est à M. Olivier Jardé.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

L'amendement n° 7 est défendu.

(L'amendement n° 7 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 4 .

La parole est à M. Olivier Jardé.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

L'entretien préalable est une bonne chose. Cela ne ferait que 35 étudiants par universitaire. C'est tout à fait réalisable.

(L'amendement n° 4 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 8 .

La parole est à M. Olivier Jardé.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

Il s'agit d'un amendement rédactionnel, puisque nous ne sommes pas en présence de diplômes, mais de grades.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Le Gouvernement est favorable à cet amendement, sous réserve d'une modification.

À l'heure actuelle, les seuls grades qui existent dans l'enseignement supérieur sont : le baccalauréat, la licence, le master et le doctorat. Le grade ne recouvre donc pas toutes les situations. Pour l'instant, les études de santé ne débouchent pas encore sur des grades au niveau licence ni au niveau master. Nous pourrions compléter la proposition initiale en indiquant « justifiant notamment de certains grades, titres ou diplômes. »

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

En fait, madame la ministre, vous proposez une rectification de l'amendement n° 8 qui se lirait ainsi : « À l'alinéa 7, après le mot : « certains », insérer le mot « grades, ».

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Tout à fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

La commission est également favorable, dès lors que la référence aux diplômes est maintenue.

(L'amendement n° 8 , ainsi rectifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je suis saisi d'un amendement n° 20 .

La parole est à Mme Catherine Lemorton.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Avis défavorable.

(L'amendement n° 20 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 2 .

La parole est à M. Olivier Jardé.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

Il est défendu.

(L'amendement n° 2 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 28 du Gouvernement.

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Il s'agit de préciser dans la loi que les arrêtés qui seront pris en application du présent article seront publiés au Journal officiel de la République française. C'est une formalité nécessaire pour leur donner toute leur publicité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. À titre personnel, j'y suis évidemment favorable.

(L'amendement n° 28 est adopté.)

(L'article 1er, amendé, est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 23 , portant article additionnel après l'article 1er.

La parole est à Mme Catherine Lemorton.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Il est défendu.

(L'amendement n° 23 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements, nos 24 et 26 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 24 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 26 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

L'amendement n°27 a pour but de repositionner l'application de la loi à la rentrée 2009.

Un amendement en commission avait initialement repoussé cette applicabilité à 2010. Mais ce matin, en commission, au titre de l'article 88, nous avons avancé la date afin que le texte soit applicable dès la rentrée 2009. Nous avons largement répondu, me semble-t-il, aux inquiétudes quant à la préparation des universités, des enseignants, des doyens et des étudiants sur la mise en place de cette réforme. Le report d'un an ne changerait donc rien.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 26 et défavorable à l'amendement n° 24 .

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Jardé

J'avais proposé de reporter la date d'application d'un an, en raison de problèmes tenant d'ailleurs plus aux locaux qu'aux personnels. Les enseignants devront faire face à un afflux important d'étudiants en pharmacie, mais le Gouvernement nous a rassurés : une aide sera donnée à cette installation en 2009. Je suis donc favorable à l'amendement n° 26 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

L'amendement n° 26 du rapporteur est essentiel. Cette réforme est fondamentale. Nous ne pouvons plus attendre. Les futurs étudiants ne doivent pas attendre. Il faut donc impérativement que cette loi soit opérationnelle pour la rentrée 2009-2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Je vais défendre le report de l'application de ce texte en 2010.

Je lis dans l'introduction du rapport Bach,…

Plusieurs députés du groupe UMP. Ce n'est pas la loi Bach !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

…qui est la base du travail de la proposition de loi.

« Le groupe ainsi constitué a auditionné les principaux acteurs du domaine, de façon toutefois non exhaustive, en raison du temps limité imparti à la commission, pour rédiger son rapport. »

À voir l'enthousiasme la majorité, on pourrait avoir l'impression que tous les doyens sont d'accord. Mais lorsque l'on se déplace sur le terrain ou qu'on leur téléphone, on se rend compte que le consensus est loin d'être aussi réel qu'on le dit. Le report de la mise en application à 2010 serait plus raisonnable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

J'avais voté pour le report en commission, mais je vais revenir sur mon vote. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

Tout simplement parce que je me suis renseigné… Seuls les imbéciles ne changent pas d'avis ! Après avoir écouté M. Jardé et Mme Fraysse, j'ai pensé que des difficultés pouvaient se poser. Je me suis donc renseigné auprès des doyens et de mes collègues professeurs. Ils m'ont indiqué que cela ne posait pas de problèmes majeurs. Partant de là, et de tout ce que nous avons entendu sur le fait que nous aurions dû le faire depuis si longtemps, …

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

…je trouve qu'il est inutile d'attendre davantage. Je me rallie donc à l'amendement de M. Domergue. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Rappelons que le rapport Bach m'a été remis le 22 février 2008, autrement dit il y a presque un an. J'ai envoyé une circulaire-cadre le 1er août 2008 à l'ensemble des présidents d'université et directeurs d'UFR, pour les informer des dispositions de la réforme et les inviter à prendre d'ores et déjà les mesures nécessaires en vue de son application dès la rentrée 2009 – la date était bien spécifiée dans la circulaire. Cela fait donc six mois que tout le monde y travaille.

J'ajoute que la représentation nationale a voté les moyens nécessaires à cette réforme à l'occasion du projet de loi de finances pour 2009 dans le cadre du plan « Réussir en licence ».

Les doyens y travaillent depuis plus d'un an. Il est urgent de faire cette réforme. Et lorsque j'ai présenté une communication au Conseil des ministres sur la réforme des études médicales, Bernard Kouchner lui-même a déclaré : « Cela fait tellement longtemps que l'on rêvait de la faire ! »

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Pourquoi ne l'a-t-il pas faite, lui ?

(L'amendement n° 24 n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 26 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 25 .

La parole est à Mme Catherine Lemorton.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Il est défendu.

(L'amendement n° 25 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n°22 .

La parole est à Mme Catherine Lemorton.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Défendu.

(L'amendement n° 22 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 2, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je ne suis saisi d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures trente.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma