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Séance en hémicycle du 8 avril 2008 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle la discussion et le vote sur la motion de censure déposée, en application de l'article 49, alinéa 2, de la Constitution, parMM. Jean-Marc Ayrault,François Hollande et 226 de leurs collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Hollande, premier orateur inscrit, pour vingt minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, l'opposition ne manquait pas de raisons pour mettre en cause aujourd'hui la responsabilité du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Les Français d'ailleurs nous avaient d'une certaine façon précédés, à l'occasion des élections municipales et cantonales (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et leurs motivations rejoignaient les nôtres.

Monsieur le Premier ministre, il y a bien des raisons à cela : l'échec de votre politique économique, l'erreur du paquet fiscal, la dérive préoccupante des déficits, le plan de rigueur dont vous n'osez même pas prononcer le nom, une réforme de l'État inefficace et injuste, la suppression de postes dans l'éducation nationale, et surtout les manquements répétés à l'engagement de campagne sur le pouvoir d'achat. Oui, autant de sujets qui auraient mérité la censure et qui expliquent, un an après votre accession à la direction du pays, la perte de confiance qui s'est installée chez nos concitoyens.

Pourtant, nous avons voulu placer notre débat de censure dans le cadre des graves décisions que le Président de la République vient de prendre à l'occasion du sommet de l'OTAN à Bucarest. Deux décisions majeures : l'une sur l'engagement de nos forces en Afghanistan, l'autre sur le retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN. Chacun ici, au-delà de sa sensibilité politique, ne peut nier l'importance de ces choix, ne peut contester les changements d'orientation qu'ils annoncent. Chacun mesure la portée, sur notre politique étrangère comme sur notre stratégie de défense, de tels choix. Il ne s'agit pas d'une inflexion, d'une correction. Il s'agit bien d'une double rupture : rupture dans l'usage de nos forces en Afghanistan, rupture dans le consensus sur l'OTAN établi dans notre pays depuis 1966.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Dans toute démocratie digne de ce nom, de tels arbitrages auraient été rendus après un vaste débat dans le pays, et un vote solennel au Parlement. Au lieu de cela, c'est à Londres, devant le Parlement britannique, que le chef de l'État a révélé l'envoi de renforts en Afghanistan. C'est à Bucarest, jeudi dernier, que Nicolas Sarkozy a confirmé la réintégration de notre pays dans les structures militaires de l'OTAN. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Il ne tient qu'à vous que le Président de la République puisse s'exprimer devant l'Assemblée nationale !

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Certes, la semaine dernière, monsieur le Premier ministre, vous avez daigné organiser ce que vous appelez « une information du Parlement ». Vous y avez même pris la parole – ce qui semblait être une concession, et je vous en remercie. Mais vous avez refusé de conclure le débat par un vote alors que rien, je dis bien rien, dans la Constitution, ne vous interdisait de le faire ! Cette désinvolture à l'égard du Parlement pourrait justifier à elle seule la motion de censure.

Mais je pense que notre motion de censure présente un autre sens : celui de la clarté. Cette motion permettra de savoir qui, au sein de cette assemblée, approuve ou désapprouve le changement dans l'engagement de nos forces en Afghanistan, qui approuve ou désapprouve le retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Au terme de ce débat, des responsabilités auront été prises par les uns ou par les autres. Chacun, quel que soit son vote, aura à en répondre, et pas seulement pour les prochains jours, mais pour les prochaines années. Car les décisions qui sont en cause auront des prolongements sur l'utilisation et même sur la sécurité de nos soldats, et, plus largement, auront une influence considérable sur la place de la France dans le monde. (« Justement ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Le vote que j'appelle en faveur de la motion de censure affirmera une conception commune de la France, fondée sur trois principes qui devraient nous réunir : la responsabilité de notre pays dans le règlement des conflits internationaux, la solidarité à l'égard de nos alliés, mais aussi, et j'y insiste, l'indépendance de nos choix, qui jusque-là avait été notre matrice commune. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

C'est cette conception commune qui a permis, monsieur le Premier ministre, au-delà des majorités politiques, au-delà des présidents successifs, de rassembler les Français sur les grandes orientations de notre politique étrangère, et c'est ce consensus qui a permis à notre pays d'être respecté par la communauté internationale. Or cette conception de l'indépendance est aujourd'hui mise en cause par les décisions du Président de la République.

Le vote de la motion de censure est donc une conception commune de la politique de la France, mais aussi l'expression d'un double refus.

Le premier refus, c'est celui d'un changement de nature dans l'engagement de la France en Afghanistan. Au lendemain des attentats du 11 septembre, cet engagement reposait sur le droit de légitime défense collective reconnu par la Charte des Nations Unies. C'était alors de notre devoir d'être aux côtés de nos amis américains pour punir le régime qui avait fait de l'Afghanistan une base arrière d'Al-Qaïda. Ensuite, notre engagement a pris la forme d'une participation à une force internationale, que nous avons approuvée, pour stabiliser Kaboul et encadrer l'armée afghane. Depuis 2003, cette force est sous commandement de l'OTAN et évolue à côté de l'opération américaine de lutte contre le terrorisme.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Et nous devons constater, les uns et les autres, que le bilan de sept ans de présence en Afghanistan est sombre : le pouvoir de l'autorité centrale se met péniblement en place ; les talibans – que nous voulons combattre –…

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

…contrôlent une large part du territoire, y compris à proximité de Kaboul ; la culture de la drogue n'a jamais été aussi florissante. (« C'est vrai ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) L'opération présente toutes les caractéristiques de l'enlisement : les Occidentaux, qui comptaient 17 000 hommes en 2003, en mobilisent aujourd'hui 60 000, sans démontrer plus d'efficacité. Les pertes humaines sont en hausse continue : victimes civiles, pertes miliaires – deux cents morts dans la coalition en 2007. Les talibans ont reconquis une part du soutien de la population, d'autant plus facilement que le volet militaire de l'intervention s'est affranchi des structures locales, et que son volet civil a été progressivement réduit. Sait-on qu'il y a seulement 7 millions de dollars d'aide par jour alors que le conflit coûte 100 millions de dollars par jour aux alliés ? Quelle disproportion entre l'aide civile et l'intervention militaire ! Selon un rapport publié par l'ONU en 2007, l'indice de pauvreté de l'Afghanistan est l'un des pires au monde : 30 % de la population ne mange pas à sa faim, 70 % n'a pas accès à l'eau potable.

C'est dans un tel contexte que le chef de l'État accepte, sous la pression américaine, de renoncer à une promesse de campagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Vous, vous les abandonnez ! Bravo au nom des droits de l'homme, monsieur Hollande !

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Car c'était une promesse de campagne de dire, entre les deux tours de l'élection présidentielle, que la présence des forces françaises ne paraissait pas décisive. Aujourd'hui, il s'agit de renoncer à une promesse de campagne, et, en plus, de décider d'envoyer un renfort militaire dont on ne connaît même pas l'ampleur.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Hier, vous évoquiez, monsieur le Premier ministre, quelques centaines d'hommes, votre ministre de la défense parlait d'un millier, le Président de la République d'un bataillon ! Quelle est donc l'ampleur de l'engagement ?

Nous ne connaissons pas non plus la localisation des renforts.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

On nous dit : « la capitale, Kaboul », puis on nous dit : « l'Est ».

Nous ne connaissons pas davantage la mission. Mais, pour la première fois, et c'est en ce sens que la décision est importante, il n'est plus exclu d'être une force de contact au lieu d'être une force de sécurité, c'est-à-dire de rentrer dans une opération de guerre.

Enfin, on ne connaît pas davantage la durée de la mission. On nous dit : « quelques mois », puis l'OTAN avance une durée de cinq ans, quand votre ministre des affaires étrangères parle même d'une génération.

Monsieur le Premier ministre, si nous sommes conscients de la nécessité de stabiliser l'Afghanistan…

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

…et de lutter contre le terrorisme, permettez-nous de fixer des conditions à toute intervention supplémentaire de nos armées.

Il y a quatre conditions indispensables, sur lesquelles nous pourrions nous réunir. La première, c'est l'évaluation des résultats de l'intervention après sept ans de présence de la force internationale. La deuxième, c'est la clarification des missions : nous ne pouvons accepter que l'encadrement de l'armée afghane et la sécurisation de l'État soient, d'une manière ou d'une autre, une opération militaire, qui se confondrait d'ailleurs avec la force américaine anti-terroriste. Il faut clarifier les missions. Aujourd'hui, elles ne le sont pas, et ce qui nous est présenté comme un renfort est en définitive une décision d'intervenir militairement en Afghanistan. La troisième condition, c'est l'amplification du soutien au développement civil : écoles, hôpitaux ; La quatrième, l'organisation progressive de la gestion du pays.

Or aucune redéfinition de la stratégie n'a été apportée lors du sommet de Bucarest. Au contraire, il a même été décidé un engagement à long terme fondé sur le tout militaire. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Pourtant, cette politique-là a échoué. Elle crée plus de terrorisme qu'elle n'en détruit. Elle exige de rajouter toujours davantage d'hommes et de troupes, au prétexte, comme le disait le Président de la République, que l'on n'a pas « le droit de perdre la guerre » face aux terroristes.

C'est donc le double risque de l'enlisement et de l'engrenage qui est devant nous et qu'il faut prévenir. La menace d'être durablement embourbé n'est pas virtuelle. La coalition n'est pas la première puissance à tenter de contrôler le territoire de l'Afghanistan. Il y a même un proverbe local qui dit : « Il est facile d'entrer en Afghanistan, plus difficile d'en partir. »

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Notre préoccupation doit être à la fois la sécurité de nos soldats et la réussite de leur mission. Dès lors que la stratégie déployée n'est pas la bonne et que nous allons en plus perdre notre autonomie de décision, nous exprimons ici, par notre motion de censure, notre refus d'un renfort militaire de la France en Afghanistan. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

L'envoi de renforts est une décision politique plus que militaire.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Elle s'inscrit dans un processus : celui du retour de la France dans l'organisation militaire de l'OTAN. C'est le second refus que nous voulons exprimer.

Évoquée par le chef de l'État lors de son discours devant le Congrès américain en novembre, engagée à Bucarest, la réintégration dans la structure de commandement de l'OTAN est désormais programmée pour la fin de l'année 2008, et elle sera scellée au prochain sommet de l'OTAN, l'année prochaine.

La représentation politique doit s'emparer de cette décision. Revenir dans le commandement intégré de l'OTAN n'est pas un choix qui peut être pris par un seul. Il s'agit de rien de moins que de l'indépendance de la France. Et le Président de la République ne peut, seul, s'arroger le droit de décider de l'indépendance de la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Il y a aussi un Parlement, il y a aussi une représentation nationale ! Mesdames et messieurs de l'opposition comme de la majorité, vous devez faire connaître votre avis sur ce choix. Car pourquoi mettre fin, aujourd'hui, à un choix stratégique décidé en 1966 par le général de Gaulle (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

Vous n'aviez pas présenté de motion de censure à l'époque !

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

…et maintenu par tous les présidents de la République ? Quel contexte international oblige à rompre, dans une telle précipitation, avec un consensus intérieur et une spécificité internationale ? (« Malhonnête ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Quel motif peut-on avancer pour justifier une telle confiance dans le président Bush, dans son successeur ou dans la politique américaine, alors que nous sommes face à un président en fin de mandat et que nul ne sait quelle sera la ligne de conduite de son successeur ? Pourquoi tant de précipitation, un an avant la fin du mandat de George Bush ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

On nous dit, monsieur le Premier ministre, que ce serait en échange de l'acceptation d'un pilier européen au sein de l'OTAN, alors même qu'aucune preuve – aucune – ne nous a été apportée, seulement quelques mots dans un communiqué des États-Unis, au sortir du sommet de l'OTAN, et auxquels la présidence française s'est accrochée pour bien faire comprendre qu'elle avait obtenu là une concession de taille. Eh bien, je vous l'affirme : cette décision de revenir dans le commandement militaire de l'OTAN est fâcheuse !

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Elle est fâcheuse pour les intérêts de la France, dont le statut d'allié singulier des États-Unis était un marqueur, jusque-là, de sa politique internationale. Votre ministre de la défense – toujours lui – évoque, pour minimiser le retour de la France dans l'OTAN, une décision de pur symbole, au prétexte que la France est présente – ce qui est vrai – dans l'ensemble des commandements sauf deux, et qu'elle est le troisième contributeur financier.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

C'est oublier qu'il y a des symboles qui fondent une politique, qui lui donnent son sens, son autorité, sa valeur. Et ce n'est pas un symbole d'être dans le commandement intégré de l'OTAN. C'est un reniement, un renoncement, un abandon ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

L'enjeu est moins de participer à un comité de plus, sur le plan militaire, que de préserver la spécificité de la France sur la scène internationale. Pas simplement de la France, mais de l'Europe aussi ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Les droits de l'homme, c'est cela le symbole, peut-être ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Car si notre pays renonçait à son autonomie de jugement au sein de l'Alliance, c'est l'ensemble de l'Europe – pas simplement la France – qui se trouverait en situation d'alignement sur les États-Unis. Et que vaut l'argument sur la contrepartie offerte en termes de reconnaissance de l'Europe de la défense ? C'est un jeu de dupes ! Les États-Unis ne peuvent donner aucune garantie tout simplement parce que l'Europe de la défense ne dépend pas d'eux. L'Europe de la défense dépend des Européens eux-mêmes. Il revient aux Européens de décider quelle sera leur défense, leur politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Quels sont les pays européens qui bloquent toute initiative de défense en Europe ? Précisément ceux qui veulent que la France revienne dans l'OTAN. Alors, il y aura bien une défense de l'Europe, mais pas une Europe autonome de la défense : voilà la différence ! On peut faire protéger l'Europe par d'autres, par le parapluie américain. Ce qui est en cause, ce n'est pas seulement protéger l'Europe, c'est lui donner un contenu politique, une politique étrangère et une politique de sécurité communes. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Ce retour vers l'OTAN n'est pas simplement contraire aux intérêts de la France et même de l'Europe, il est aussi contradictoire avec la stabilité du monde. Car la décision du Président de la République intervient au moment où l'OTAN change d'identité. C'est en ce sens que cette décision est inopportune. L'Alliance – chacun en convient – connaît, sous l'influence américaine, un double élargissement. Un élargissement géographique d'abord, puisqu'elle s'étend jusqu'aux confins de la Russie, sans exclure même d'aller au-delà de l'Europe, et qu'elle conduit des opérations hors de la zone naturelle de l'OTAN – on le voit en Afghanistan. Un élargissement politique ensuite, car l'OTAN est dans une fuite en avant, ses missions l'éloignent de ce qu'elle est et doit rester – une alliance militaire – pour la faire devenir l'organisation politique de l'Occident.

Ce que le président Bush veut faire de l'OTAN – et pas simplement lui – c'est une « ligue de démocraties », selon la formule de Mac Cain, le candidat républicain. Cette « ligue de démocraties » dépositaire des valeurs du bien et poursuivant le mal dans une nouvelle illustration de la guerre des civilisations, c'est le modèle dont nous ne voulons pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

L'OTAN, dans ce schéma, deviendrait le bras armé d'un bloc occidental dont la mission principale serait de défendre partout les valeurs de l'Occident, une sorte de substitut de l'ONU permettant aux États-Unis de ne plus agir seuls. (« Et alors ? » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cette dérive qui ne remonte pas à quelques jours mais dure depuis quelques années avait été, jusque-là, rejetée par la France, et notamment par le Président de la République précédent, parce qu'il était hostile à l'idée d'un gendarme d'un monde occidental bien-pensant. (« Mensonges ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Cette dérive est aujourd'hui acceptée par le chef de l'État lorsque, dans son discours devant le Congrès américain, il lie l'avenir de nos valeurs à celui de l'Alliance. La France est bien plus qu'un pays occidental : c'est un pays européen, original ! Et si notre pays reste l'ami et l'allié des États-Unis, « ami » ne veut pas dire « soumis », et « allié » ne veut pas dire et ne dira jamais « aligné » ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Nous n'avons, monsieur le Premier ministre, aucun tabou. Aucune question ne doit rester cachée parce qu'elle soulèverait trop de polémiques. Mais aussi bien sur l'OTAN que sur l'engagement de nos forces, le débat doit avoir lieu. Dans un monde qui bouge, qui change, où les menaces évoluent, bien sûr qu'il faut savoir changer, évoluer, adapter les structures !

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Mais un système d'alliance n'a de sens que par rapport au message politique qu'il porte ; il ne peut pas être celui du bloc occidental. Un système d'alliance doit aussi donner un rôle à l'organisation ; il ne peut pas être une « sous-ONU » ! Et, enfin, il ne peut pas y avoir, pour nous, la France, un système d'alliance où un seul déciderait à notre place, en l'occurrence les États-Unis d'Amérique !

Voilà pourquoi le Parlement devait être saisi des choix du Président de la République. Pour les approuver ou pour les rejeter, en tout cas pour alerter les Français. Avec les choix qui nous sont présentés – réintégration dans le commandement militaire de l'OTAN, envoi d'une force militaire en Afghanistan – nous allons perdre en indépendance ce que nous ne gagnerons pas en sécurité. Nous allons être entraînés sur des terrains et des opérations où nous ne voulons pas aller. Nous allons même donner un nouveau cours à la construction européenne, qui ne sera qu'un pilier du monde occidental au lieu de constituer une capacité autonome de décision et d'action. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Il n'appartient pas au Président de la République de décider seul de notre politique étrangère et de défense. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Le domaine réservé, qui n'a d'ailleurs jamais été reconnu dans la Constitution, ne peut pas être le domaine exclusif d'un seul. Et on ne peut pas apprendre, quand on est parlementaire de la majorité et a fortiori de l'opposition, la création d'une base navale permanente à Abu-Dhabi en regardant la télévision française ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Monsieur le Premier ministre, je souhaite que cette motion de censure soit un exercice de vérité (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), sur l'envoi sans condition de renforts en Afghanistan et sur l'intégration sans restriction à l'OTAN. En votant la motion de censure, nous exprimerons un double refus : celui de voir nos forces sur un terrain qui n'est pas le leur et dans une mission qui n'est pas précisée ; et celui d'un retour vers l'OTAN. Ce faisant, nous défendrons l'indépendance de la France. (Mmes et MM. les députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche se lèvent et applaudissent longuement. – Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le Premier ministre. (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, l'orateur qui a soutenu la motion de censure a pu être écouté dans un calme que je veux saluer (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), je vous remercie de poursuivre cet exercice dans les mêmes conditions, pour l'honneur et l'image de notre institution. Monsieur le Premier ministre, vous avez la parole.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, à l'heure où je m'exprime, la nuit tombe sur Kaboul. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. et sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Autour de l'aéroport, des soldats français patrouillent aux côtés des militaires afghans du 201e corps d'armée. C'est lors d'une patrouille similaire que l'adjudant Pican est mort, en septembre dernier, à la suite de l'attaque d'un véhicule suicide. Aux confins de la plaine de Shamali, les fantassins du 126e régiment d'infanterie de Brive et les cavaliers du 111e régiment de cuirassiers de Carpiagne sont en chemin, avec leurs frères d'armes allemands et bulgares. Ils achèvent une opération de sécurisation. Comme chaque jour, les sapeurs du 31e régiment du génie de Castelsarrasin détruisent les mines qui arrachent la chair des enfants qui vivent dans l'innocence. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Les cris que l'on entend à gauche sont assez significatifs de l'état d'esprit qui est celui de l'opposition à l'occasion de cette motion de censure ! (Applaudissements puis huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Le Roux

Qu'est-ce que ça change ? C'est minable de dire ça !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Les trois équipes d'actions civiles et militaires intégrées à ce bataillon finissent leur ouvrage. Elles construisent et réhabilitent des puits, des dispensaires et des salles de classe. Dans la vallée de Kapisa, deux équipes de la 27e brigade d'infanterie de montagne sont, en ce moment même, en patrouille avec les soldats de l'armée nationale afghane, et si un affrontement devait se produire, ils seront au plus près des combats pour les conseiller. À Kandahar, nos Mirage 2 000 et nos Rafale sont prêts à décoller. La semaine dernière, ils ont effectué 17 missions.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Au nord de l'océan Indien, nos marins de la frégate Surcouf patrouillent pour empêcher les trafics d'armes et de drogue.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Dans quelques minutes, nos médecins finiront leur journée : 117 enfants, 90 femmes et 45 hommes ont aujourd'hui bénéficié de leurs soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Dray

C'est le même discours que pendant la guerre d'Algérie !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Mesdames, messieurs les députés, nous sommes en Afghanistan parce que le 11 septembre 2001 n'était pas seulement un signal sanguinaire adressé aux États-Unis. C'était aussi un affront lancé à toute la communauté internationale. Ce qui est arrivé à New York aurait pu, et pourrait toujours, arriver à Paris. Il faut se souvenir de ce qu'est le terrorisme de masse, et il ne faut pas se leurrer sur les objectifs meurtriers et méthodiques de ses auteurs. Al-Qaida hait et rejette tout ce qui n'obéit pas à ses desseins. Cette mouvance terroriste a fait des dizaines de milliers de victimes, musulmanes à plus de 90 % : attentats à Djerba, au Yémen, à Bali en 2002, à Riyad, à Casablanca, à Istanbul en 2003, à Madrid en 2004,…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…à Londres, à Charm el-Cheikh et Amman en 2005, à Batna, à Dellys, et à Alger en 2007 contre les bureaux de l'ONU. Jusqu'à ce jour, la France a été épargnée…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…en grande partie grâce à son dispositif antiterroriste. Elle est pourtant visée dans les déclarations d'Oussama Ben Laden et de ses seconds, dont l'influence s'étend désormais jusqu'au Maghreb.

C'est ce terrorisme-là que l'ONU, à travers sa résolution 1373, a décidé de bannir.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

C'est lui que nous combattons en Afghanistan, où il a pris sa source et continue de se réfugier, pourchassé par la communauté internationale et le peuple afghan lui-même, qui n'a pas oublié le joug de fer sous lequel le régime des talibans l'a tenu. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

En octobre 1996, une femme afghane est condamnée à avoir le pouce tranché pour avoir porté du vernis ; en décembre 1996, 225 femmes sont fouettées pour avoir violé les règles de l'habillement ; en août 1998, les talibans prennent Mazār-é Charīf, et massacrent en quelques jours 8 000 civils de l'ethnie hazara, femmes et enfants compris ; en février 2001, les deux Bouddha de Bāmyān sont déclarés idolâtres par le mollah Omar et, sous le feu de l'artillerie, les talibans mettent un mois à réduire ces statues de cinquante mètres à l'état de gravats.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Voilà la dictature que nous avons chassée du pouvoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Depuis 2001, les efforts de la communauté internationale, des autorités locales et du peuple afghan ont commencé à porter leurs fruits. L'Afghanistan possède désormais des institutions plus démocratiques ; les femmes y jouissent de droits similaires à ceux des hommes ; le nombre d'enfants scolarisés est passé de 900 000 à 6,4 millions (Murmures sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) ; 80 % de la population a accès aux soins, contre 8 % en 2001 ; 4 000 kilomètres de routes ont été construits ; les pays de l'OTAN ont conduit plus de 1 000 projets de développement ; l'Union européenne a engagé plus de 4 milliards d'euros d'aides, et, à la demande du Président Karzaï, la France organisera à Paris, le 12 juin prochain, une grande conférence pour amplifier la mobilisation de la communauté internationale.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Enfin, dans le domaine sécuritaire, l'armée afghane, dont la formation est notamment assurée par la France, atteint 50 000 hommes. L'Union européenne et les États-Unis travaillent à la mise en place d'une police moderne, déjà dotée de 75 000 hommes.

Évidemment, mesdames, messieurs les députés, bien des défis demeurent en termes de sécurité, de montage de projets, de lutte contre l'économie de la drogue. Mais devant l'ensemble de ce bilan, certes si incomplet, si fragile et parfois même si décevant, l'ONU, l'Europe et l'OTAN n'ont pas à rougir de ce qu'ils ont fait. Ils ont, bien au contraire, toutes les raisons d'amplifier leur effort. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Quant à nos soldats, ils méritent la fierté de la nation et le soutien de la représentation nationale car ils sont engagés pour des valeurs (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre) : celles de la Charte de l'Organisation des nations unies ; celles de l'Europe, qui n'a jamais cessé de dénoncer le funeste scénario du choc des civilisations ; celles de l'Alliance atlantique, qui précise qu'une attaque contre l'un de ses membres constitue une attaque contre tous ; celles de la liberté, de l'égalité et de la fraternité qui sont celles de la France, laquelle n'est jamais aussi grande que lorsqu'elle qu'elle se dresse pour les autres ;…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…celles, enfin, de la souveraineté nationale, car notre but est d'offrir à l'Afghanistan le pouvoir d'être libre. Nous ne sommes pas là-bas pour annexer qui que ce soit, pour du pétrole ou pour signer des contrats. Nous sommes là-bas pour promouvoir nos valeurs et assurer la sécurité collective.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Mesdames, messieurs les députés, en déposant cette motion de censure, l'opposition entend-elle signifier que tout cela est vain ? Entend-elle affirmer que tout effort supplémentaire est désormais inutile ? En escomptant faire tomber le Gouvernement sur la question afghane, insinue-t-elle qu'une autre politique que celle de la détermination et de la solidarité à l'égard du peuple afghan est possible ?

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Et l'OTAN ?

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Si la gauche le croit vraiment, alors, qu'elle expose clairement ses arguments et sa stratégie alternative. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.) Et qu'elle n'hésite surtout pas à s'en faire l'interprète auprès de la communauté internationale, et surtout auprès des vingt-cinq États européens engagés en Afghanistan à nos côtés, dont quinze dans lesquels des socialistes où des sociaux-démocrates sont au pouvoir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais surtout, qu'elle n'hésite pas à aller dire au peuple afghan, les yeux dans les yeux, que c'est fini ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Nous irons !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

À la lecture de cette motion, je ne vois rien qui indique un plan parallèle, un plan sérieux pour l'Afghanistan. Je lis une vague exhortation en faveur, je cite, d'« une évaluation et [d']une complète réorientation de la stratégie politique, diplomatique et militaire de la coalition ».

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Mais encore ? Le sujet est suffisamment grave pour ne pas se lancer dans des recommandations si peu étayées. Si elles le sont, nous les écouterons avec intérêt. Sinon, il faudra considérer cette initiative comme une affaire tristement partisane. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Ne pas « ajouter la guerre à la guerre », proclame cette motion de censure. L'opposition oublie-t-elle que c'est l'un des siens, Lionel Jospin, qui accepta avec le Président Jacques Chirac d'engager des forces françaises en Afghanistan dans le cadre de l'opération « Liberté immuable » ? (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Oublie-t-elle que c'est sous l'autorité d'Hubert Védrine que la diplomatie française soutint l'adoption de la résolution 1386 créant la Force internationale d'assistance et de sécurité ?

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'opposition peut-elle feindre d'oublier que la mission de nos forces n'était alors pas humanitaire mais militaire ? D'ailleurs, nos premières opérations aériennes sur les lieux ont été réalisées par nos Mirage IV et nos avions du groupe aéronaval dès la fin de 2001.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Tout cela a été rappelé ! Vous n'écoutez pas !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Nos moyens terrestres ont été déployés dès le début de 2002, et parmi eux figuraient deux cents membres des forces spéciales, qui, durant quatre ans, furent engagés dans le sud du pays, c'est-à-dire dans la zone la plus dangereuse : on est loin de l'opération strictement humanitaire défendue par une partie de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Tout cela pour vous indiquer que l'engagement militaire de la France fut une décision politiquement partagée, militairement assumée et légalement encadrée sur le plan international. Aucun des protagonistes de l'époque ne cédait à l'illusion d'une opération-éclair. Chacun d'entre eux connaissait la complexité de la situation afghane. Chacun pressentait que la sécurisation et le redressement de ce pays seraient longs. Chacun, du Président Jacques Chirac au Premier ministre Lionel Jospin, était prêt à en assumer les conséquences. Avant d'être tournée contre mon gouvernement, cette motion de censure est donc d'abord tournée contre ceux qui décidèrent avec courage et lucidité d'engager la France dans un processus certes difficile, mais juste. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Ne pas « ajouter la guerre à la guerre » : la formule, mille fois utilisée par ceux qui croient que l'instauration de la paix et du droit se passe de tout usage de la force, n'a pas de sens.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Al-Qaïda et les talibans n'ont que faire de ces formules, qui, au demeurant, ont toujours servi à la victoire des dictatures et à la défaite des démocraties. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

La France n'est nullement en guerre avec l'Afghanistan. Mais il est vrai qu'elle n'esquive pas le conflit avec ceux qui ont fait le choix du terrorisme et qui ont martyrisé leur propre peuple. Notre nation est engagée dans le cadre de six résolutions de l'ONU, aux côtés de trente-neuf pays, pour soutenir le gouvernement légitime du Président Karzaï et pour arracher l'Afghanistan à la violence et à la misère. Certains jugent cette entreprise inutile et chimérique, comme si l'Afghanistan était viscéralement possédé par la fatalité du malheur. Ce n'est pas parce que des violences séculaires traversent ce pays que nous devons renoncer à imaginer une paix possible. Ce n'est pas parce que le commandant Massoud est mort que son rêve d'un Afghanistan réconcilié est mort avec lui. Ce n'est pas parce que les droits de l'homme ne sont pas transposables en un jour qu'ils ne doivent pas devenir la cause sacrée des Afghans.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Et ce n'est pas parce que la mission est difficile que l'on doit y renoncer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Ne pas « ajouter la guerre à la guerre » : la formule, mot pour mot, fut utilisée dans cet hémicycle par le parti communiste lors d'une déclaration du Gouvernement sur la situation du Kosovo. Deux jours après le déclenchement des opérations militaires, Lionel Jospin vint ici, le 26 mars 1999, pour annoncer la participation de nos armées à l'opération menée par l'OTAN contre les armées serbes. Dois-je préciser que le Conseil de sécurité des Nations Unies n'avait pas explicitement autorisé le recours à la force ?

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Et dois-je rappeler à l'opposition que ni l'article 35, ni l'article 49, alinéa 1, de notre Constitution ne furent alors utilisés par mon prédécesseur ? Pour l'Afghanistan comme pour le Kosovo, il y eut un débat sans vote. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

En réalité, cette petite querelle institutionnelle n'a que bien peu d'intérêt, et afin de la dissiper définitivement, je compte sur la gauche pour adopter la révision constitutionnelle. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'opposition parle d'humiliation du Parlement. Plutôt que de céder aux excès de langage, mieux vaut adopter les dispositions constitutionnelles qui accorderont au Parlement un véritable droit de regard sur notre politique étrangère et de défense. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.) Je ne doute pas que l'opposition passera de la parole aux actes. J'ai lu que Laurent Fabius était favorable au principe que le Président de la République puisse s'exprimer devant vous dans les moments solennels. C'est une innovation qui contribuerait à la modernisation de notre démocratie.

Mais revenons au fond. Que proposez-vous, mesdames, messieurs les députés de l'opposition ? (« Rien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Le renforcement de nos efforts et de ceux de nos partenaires ? Vous avez dit que vous y étiez hostiles ! Le statu quo ? À lire votre motion, vous estimez que c'est un échec. Reste donc le retrait. Et le retrait, ce serait la défaite de tout ce que nous avons dit et fait. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Inutile de vous dire combien l'image et l'honneur de la France en seraient atteints. En somme, nous laisserions à nos alliés le soin de régler l'affaire, laissant ainsi entendre que la victoire d'Al-Qaïda ou des talibans ne nous empêcherait pas de dormir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Quand les démocraties sommeillent, leurs adversaires agissent. L'Afghanistan ne doit plus jamais redevenir le foyer du terrorisme.

Mesdames, messieurs les députés, depuis la fin de l'année 2006, la situation sécuritaire en Afghanistan s'est tendue et les sollicitations de nos alliés pour étoffer le dispositif militaire se sont multipliées, émanant de nos partenaires européens et de nos amis canadiens, qui ont 3 400 hommes sur le terrain. La France en a pris acte. Mais elle n'a pas souhaité s'engager davantage sans conditions ni clarification de la stratégie politico-militaire de la coalition. Avec le Président de la République, nous agissons avec gravité. Quatorze de nos soldats sont déjà tombés. La paix a un prix et nous l'assumons, mais selon des modalités et des buts dont nous entendons demeurer maîtres. Nous évaluons les risques auxquels nos forces sont et seront soumises, et nous nous tenons à nos objectifs : sécuriser, reconstruire, responsabiliser les autorités afghanes afin de leur transmettre le flambeau de la paix et l'étendard de leur souveraineté nationale.

Le 26 février dernier, le Président de la République a écrit à ses homologues de l'OTAN…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…pour indiquer nos conditions : l'adoption d'une stratégie politique partagée ; la confirmation par les alliés de leur détermination à maintenir leur effort dans la durée ; la coordination accrue des efforts civils et militaires sur le terrain ; l'accroissement de l'effort de formation des forces de sécurité afghane afin de permettre une véritable « afghanisation » de la sécurité du pays, c'est à dire la prise en charge par les Afghans de leur propre sécurité, laquelle dessine l'autonomie de l'État afghan et l'horizon de notre retrait.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Ce sont ces quatre conditions qui ont été débattues et validées à Bucarest, en présence du président Hamid Karzaï et du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-Moon.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Comme l'a indiqué le Président de la République, la France déploiera, à partir de l'été, un bataillon supplémentaire de 700 hommes.

Nous voulions garantir la cohérence de notre dispositif : il stationnera donc dans la région est, où se trouvent déjà un certain nombre de nos forces, à proximité de la région de Kaboul. Ce déploiement permettra aux Canadiens, présents dans le sud, de recevoir le renfort qu'ils attendaient des Américains.

La France prendra le commandement de la région centre à compter de cet été. Avec déjà 1 600 hommes sur le terrain, notre pays disposera d'une force de 2 300 militaires, ce qui la placera au cinquième rang des contributeurs de la force internationale d'assistance et de sécurité.

Mesdames, messieurs les députés, notre cause en Afghanistan est suffisamment juste et difficile pour ne pas se prêter à des interprétations partisanes. Qui peut croire que nous mettions le sort de nos forces en Afghanistan en balance avec l'avenir de l'OTAN ? Qui peut croire que les décisions du Président de la République s'attachent aux desiderata des États-Unis ou de n'importe quelle autre puissance ? (« Hélas ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Nicolas Sarkozy, comme tous ses prédécesseurs, n'a pas de leçons à recevoir. L'intérêt national éclaire toujours et d'abord les choix de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Nouveau Centre. — « Non ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Les États-unis sont nos amis et nos alliés.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

De la crise de Cuba à la première guerre en Irak, de la crise des euromissiles au 11 septembre 2001, la France ne s'est jamais départie de cette amitié.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

« La France est un ami debout, un allié indépendant, un partenaire libre » : ce sont les mots du Président de la République lors de sa venue au Congrès des États-Unis, le 7 novembre 2007.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

La France, alliée mais pas vassale (« Absolument ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), solidaire mais pas subordonnée : voilà la nature de notre relation avec l'Amérique, dont les valeurs nous sont si proches, mais dont les objectifs nous distinguent parfois. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Ils nous distinguèrent lors de la seconde guerre en Irak. Ils nous distinguent aujourd'hui sur le réchauffement climatique, sur l'organisation du commerce mondial, sur la position de l'Union européenne vis-à-vis de l'adhésion de la Turquie, et sur l'évolution même de l'Alliance atlantique, à propos de laquelle le débat ne fait que commencer. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Sur tous ces points, le Président de la République a fait valoir ses analyses, en toute franchise.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'amitié n'exclut pas les divergences, mais elle n'interdit pas non plus les convergences, et celles-ci, entre nos deux grandes démocraties, sont nombreuses. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

L'opposition nous accuse d' "atlantisme", façon aimable de nous présenter comme étant à la solde du Président Bush. (« En effet ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Chacun l'aura compris, il s'agit pour elle de surfer sur l'un de nos travers les plus discutables : je veux parler de l'anti-américanisme primaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Il est toujours piquant d'entendre la gauche se rassembler pour crier haro sur les États-unis, et encore plus surprenant de la voir faire appel aux mânes du gaullisme,…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…elle qui combattit le général de Gaulle sans relâche, qui le soupçonna d'orchestrer un « coup d'État permanent » (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), qui lui reprocha d'avoir doté la France de la force de frappe nucléaire, cette gauche qui critiqua durement Charles de Gaulle (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) lorsqu'il a décidé de nous retirer des structures militaires de l'OTAN ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'histoire est malicieuse… Il y a quarante-deux ans, pratiquement jour pour jour, le parti socialiste déposait une motion de censure contre le retrait des forces françaises de l'OTAN. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Deux motifs principaux justifiaient, aux yeux de la gauche d'alors, cette motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Desallangre

Le PC faisait partie de la gauche, mais il était d'un autre avis !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

D'abord, le retrait de la France de l'OTAN signait, à ses yeux, le retour d'une politique prétendument « nationaliste ».

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Ensuite, il affaiblissait le lien transatlantique et la présence américaine en Europe, à laquelle le parti socialiste se montrait particulièrement attaché. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Quant à François Mitterrand, qui était signataire de cette motion, il s'est expliqué avec beaucoup de lucidité sur ce « péché atlantiste », selon ses propres termes. Lorsqu'il approuva en 1983 – fort légitimement – l'installation des fusées américaines Pershing II, il écrivit ceci : « Cela m'a valu d'être accusé d'atlantisme, sous-entendu de soumission aux desseins de M. Reagan. »

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

« L'atlantisme comme péché, ajoutait-il, voilà Tartuffe qui se confesse ! » (Applaudissements ironiques et huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

De nombreux députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Tartuffe ! Tartuffe !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

« Je continue de croire, concluait-il, que le pire danger pour nous serait que l'Amérique s'éloignât des rivages de notre continent ».

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

En rappelant ces propos, avec en mémoire une longue et passionnante conversation que j'eus avec lui sur ce sujet, je ne porte pas de jugement sur l'homme qui a dignement servi la France. C'était une autre époque, un certain héritage historique et intellectuel.

Ce bref rappel du passé, mesdames, messieurs les députés, nous rappelle que les « atlantistes », comme vous dites, ne sont pas là où l'on croit.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Il nous invite, surtout, à éviter les postures politiques et les clichés. S'il est une leçon que nous devons retenir du général de Gaulle, c'est que la politique de la France comme sa stratégie ne doivent pas être figées sur les situations d'hier et les concepts du passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Certes, il y a des permanences, et la première d'entre elles, c'est que la France doit être toujours libre de décider par elle-même et pour elle-même de son destin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) L'opposition nous fera la grâce de penser, je l'espère, que ni le Président de la République ni moi-même ne renoncerons jamais à cette faculté sacrée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Nouveau Centre.)

Mais, à côté de cette permanence non négociable, il y a le mouvement de la politique et les circonstances géostratégiques. Depuis la fin de la guerre froide, le monde a profondément changé. La bipolarité d'antan a laissé place à une dissémination des risques. Notre sécurité ne se joue plus à nos frontières immédiates, mais dans le cadre d'une mondialisation des enjeux et des dangers, dont le terrorisme constitue l'un des points saillants. Nos scénarios stratégiques et militaires ne sont donc plus comparables à ceux des années soixante, soixante-dix ou même quatre-vingt.

Oui, mesdames, messieurs les députés, bien des choses ont changé en l'espace de vingt ans.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'URSS est devenue la Russie, et elle s'est ralliée à l'économie de marché. –(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'empire soviétique disloqué, ses États satellites se sont libérés et ont rejoint l'Union européenne. Les États-unis ont retiré 80 % de leurs forces de notre continent, qu'ils ne jugent plus comme une priorité au regard des intérêts que recouvre l'Asie. L'ONU s'est renforcée et constitue à présent l'instance incontournable du droit international.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'Europe s'est affermie et forme désormais l'un des principaux pôles de stabilité et d'influence du monde.

À la lisière de toutes ces transformations, l'OTAN n'est plus l'organisation dont vous parlez.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Il y a quarante ans, le général de Gaulle se retirait d'une organisation compacte, exclusivement dirigée par les États-Unis qui voulaient rester seuls maîtres des opérations. Depuis, c'est la notion de coalition d'États volontaires, à participation variable, qui s'est imposée, au détriment des schémas rigides de la guerre froide. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Il y a quarante ans, la France sortait d'un système militaire qui ne lui permettait pas de disposer librement de ses forces.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Depuis, la configuration du paysage a profondément évolué.

Dans cette grande confusion du monde, les objectifs de la politique étrangère de la France sont clairs : notre pays est d'abord en quête d'un système international mieux équilibré et inspiré par le respect du droit international et des valeurs universelles.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Refusant une mondialisation désordonnée, dominée par les plus puissants, hostile à tout ce qui conduirait au choc des civilisations, la France est l'avocate d'une nouvelle gouvernance mondiale. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Notre nation est la première à avoir fait de l'élargissement du G8 un objectif politique majeur.

Comme l'a indiqué à plusieurs reprises le Président de la République, nous voulons que les grands États émergents siègent désormais dans cette organisation ; nous voulons aussi élargir le Conseil de sécurité des Nations unies, notamment à l'Allemagne, au Japon, au Brésil et à l'Inde. Parce que l'économie mondiale ne doit pas devenir un vaste casino sans règles et sans éthique, nous défendons le principe d'une réforme du FMI soutenue par son directeur général.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Notre pays participe à la plupart des programmes de coopération avec les pays en voie de développement. La France est engagée en Afrique, pour l'Afrique. Elle est engagée au Liban, où elle défend la cause de la souveraineté du pays du cèdre. Elle est engagée auprès des Israéliens comme auprès des Palestiniens, auxquels elle tient un discours sans ambiguïté : Israël a droit à la sécurité, la Palestine a droit à un État viable et souverain. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Sur l'Iran, avec l'Allemagne et le Royaume-Uni, notre approche est faite de fermeté, mais aussi de dialogue.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Oui, mesdames, messieurs, notre ambition est de contribuer à l'instauration d'un monde plus stable et plus juste.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Nous n'avons pas besoin d'être dans l'OTAN pour cela !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Et, pour cela, nous voulons l'Europe ! Dans un monde difficile de six milliards d'habitants, la France a besoin de l'Europe et l'Europe a besoin de la France (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire).

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Une France forte, bien décidée à entraîner et à convaincre ses partenaires que la destinée européenne est une affaire politique, et pas seulement économique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

S'il est une constance française, c'est bien celle-ci : l'Europe politique. Une Europe capable de défendre ses intérêts, de promouvoir un modèle de civilisation singulier et de peser sur l'évolution du monde.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Cambadélis

Vous ne répondez pas à François Hollande, mais à Nicolas Sarkozy !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Il y a quelques mois encore, l'Europe était en panne. Et c'est Nicolas Sarkozy, avec Angela Merkel, qui l'a sortie de l'impasse institutionnelle. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Avec le traité de Lisbonne, les dispositions nécessaires à l'affirmation d'une puissance européenne existent.

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Un référendum !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Face à ce traité, l'opposition s'est montrée telle qu'elle est : divisée, irrésolue et pusillanime ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

En délaissant l'Afghanistan, en négligeant l'Europe, en diabolisant l'Alliance atlantique, la gauche révèle au grand jour son repli hexagonal, sa frilosité diplomatique, son pessimisme profond, qui est tout le contraire de la grandeur nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Nouveau Centre.)

Loin des professions de foi universalistes et moralisantes, l'opposition offre le visage de l'indifférence et de l'impuissance. Elle dénote son incapacité à penser la France en mouvement et en initiative. Si nous avions dû vous attendre, nous en serions encore à façonner le plan B ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. — Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Fort heureusement, la France, avec le Président de la République, le Gouvernement et la majorité, est en action. Au 1er juillet, notre pays présidera l'Union européenne. Nos priorités sont fixées : construire une stratégie commune contre le réchauffement climatique – dans la perspective de la Conférence de Copenhague de décembre 2009 ; lancer un véritable programme de sécurité énergétique ; nouer un pacte commun sur l'immigration ; construire une politique agricole adaptée aux défis du XXIe siècle, et, enfin, donner un coup d'accélérateur à l'Europe de la défense.

Le traité de Lisbonne contient, en la matière, des dispositions utiles, dont celle de la coopération structurée permanente. Mais, au-delà des textes, des discours, des bonnes intentions et de quelques initiatives prometteuses, j'estime que, depuis les accords de Saint-Malo, l'Europe de la défense reste très en deçà de ce qu'elle devrait être – pour ne pas dire en panne. La raison en est simple, et elle n'est pas nouvelle. Pour nos principaux partenaires européens, un pas de plus vers l'Europe de la défense, c'est un pas en arrière dans l'OTAN. Cette crainte a longtemps inhibé les initiatives.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Faut-il pour autant renoncer à bâtir une défense européenne ? Le Président de la République ne s'y résigne pas. C'est la raison pour laquelle il s'est efforcé de créer les conditions d'un partenariat plus étroit avec le Royaume-Uni et a présenté, à Bucarest, un pari sur l'avenir : la France pourrait rénover sa relation avec l'OTAN, dès lors et sous réserve que l'Europe de la défense avance sérieusement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Il convient, mesdames, messieurs les députés, de rappeler certains faits. D'abord, la France est membre de l'Alliance atlantique depuis l'origine, et nul n'y a jamais trouvé à redire, ou presque.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Depuis plus de dix ans, notre pays est, en outre, revenu au comité militaire. Il est associé à plusieurs dispositifs de l'OTAN, dont celui du conseil de l'Atlantique Nord, et est présent au sein des deux principaux états-majors de commandement, à Mons et à Norfolk.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Au sein de l'Alliance, notre nation fait entendre une voix singulière. Pour la France, l'OTAN doit être un instrument du droit international et non l'outil d'un interventionnisme unilatéral. Pour la France, une OTAN rénovée est compatible avec une Europe de la défense renforcée. À Bucarest, sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy, l'OTAN et les États-Unis ont admis, pour la première fois, l'apport que représenterait une Europe de la défense plus forte et plus performante.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

La France milite pour une OTAN plus souple, plus flexible, dont les moyens militaires puissent être mobilisés par l'Union européenne. La France, dans cet esprit, contribue à la rédaction d'un concept stratégique qui sera débattu lors du prochain sommet de l'OTAN, organisé conjointement par la France et l'Allemagne en 2009, à Strasbourg et à Kehl.

La France insiste enfin – comme elle l'a fait avec force à Bucarest, en pleine harmonie avec son partenaire allemand – sur la nécessité de respecter la Russie. Cette grande nation européenne, sortie de soixante-dix années de dictature communiste, s'est engagée sur le chemin tourmenté de la démocratie et contribue de façon constructive aux équilibres du monde.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Le dialogue et la nécessaire collaboration avec la Russie ne doivent pas être bousculés par un élargissement précipité de l'OTAN et par l'instauration hâtive d'un bouclier anti-missiles qui ne répond que très partiellement à la menace balistique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Voilà, mesdames, messieurs les députés, pour l'état des lieux. Mais revenons à l'initiative du Président de la République qui semble tant émouvoir l'opposition. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Pour audacieuse qu'elle soit, cette initiative n'est pas totalement inédite. En 1990, alors que le débat sur l'architecture européenne postérieure à la guerre froide battait son plein, François Mitterrand s'interrogea sur la façon de résoudre la triple équation qui demeure la nôtre : comment réconcilier le statut particulier de la France et sa participation croissante dans les nombreuses activités de l'Alliance ? Comment peser sur les évolutions de l'institution atlantique ? Comment, du même coup, faire émerger une défense européenne digne de ce nom ? Le Président Mitterrand tenta de résoudre cette équation sans y parvenir.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Entre 1995 et 1997, Jaques Chirac lança, très officiellement, une initiative destinée à replacer la France dans l'OTAN avec, pour contrepartie, l'attribution du commandement de la zone sud, situé à Naples, et le renforcement du pilier européen de défense.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'initiative échoua, mais du moins témoignait-elle d'une véritable volonté française de sortir l'Europe de la défense de sa paralysie.

Aujourd'hui, le Président de la République renouvelle les termes de cette ambition. « Laissons cheminer l'Europe de la défense et nous continuerons à cheminer vers l'OTAN ». Voilà ce qu'il a dit à Bucarest.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

La France est prête à se rapprocher de l'OTAN mais, pour cela, l'Europe de la défense doit réellement avancer.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Que souhaitons-nous ? Premièrement, accroître les moyens militaires des Européens, et ceci passe par un effort financier qui doit être équitablement assumé par tous. Sans moyens, pas de défense ! Deuxièmement, doter l'Union européenne d'une capacité de planification et de conduite des opérations militaires et civiles.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Troisièmement, rapprocher les industries d'armement européennes en accentuant les efforts de l'Agence européenne de l'armement. Quatrièmement, donner une perspective à la politique spatiale de défense. Cinquièmement, compléter la stratégie européenne de décembre 2003. L'ensemble de ces progrès conduira l'Europe à une réelle autonomie. Ces initiatives ne doivent pas être subordonnées à un accord préalable de l'OTAN. Voilà les dossiers que nous voulons faire avancer et qui décideront de notre position finale.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'effort que la France réclame de ses partenaires, elle l'exige d'abord pour elle-même. La rédaction du nouveau Livre blanc arrive à son terme et il vous sera soumis avant l'été. Il formalisera le concept de sécurité globale dans lequel s'intègre notre outil de défense et soulignera les nouveaux risques et défis de la mondialisation.

La loi de programmation militaire sera débattue par votre assemblée à l'automne. Cette loi confirmera notre effort financier en faveur de la défense. Elle marquera notre attachement à la dissuasion nucléaire…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…et accentuera la capacité de projection de nos forces conventionnelles.

Mesdames, messieurs les députés, la France ne baisse pas sa garde. Sa sécurité se situe d'abord dans sa capacité à se défendre et à agir par elle-même et pour elle-même. Le monde a changé, mais l'idée que nous nous faisons de la France ne s'est pas épuisée.

Dans ces murs, résonnent les voix de Gambetta, de Clemenceau, de Malraux et du général de Gaulle.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Ces voix nous parlent de l'honneur. Elles nous invitent au courage. Ces vertus accompagnent les hommes et les femmes qui, en Afghanistan, servent le droit et la liberté. Cette motion de censure ne leur rend pas justice ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Oui, les temps changent, oui, la mondialisation bouscule les conditions de notre influence et de notre prospérité, mais la grandeur de la France demeure. Elle demeure d'abord dans le coeur de ceux qui y croient et qui s'emploient à lui donner vie. C'est ainsi, notre nation est grande lorsqu'elle est grande pour le monde. Repliée sur elle-même, à l'image de cette motion de censure, la France s'abaisse et se perd. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Mais la grandeur n'est pas un postulat. Elle est la récompense d'une politique nationale audacieuse et réformiste. La France est sur le chemin de la modernisation. Elle s'y est engagée avec des valeurs qui consacrent le travail et l'innovation. Elle s'y est engagée avec des réformes économiques et sociales qui ont pour but d'aller à la conquête de la croissance et du plein emploi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Elle s'y est engagée avec des objectifs diplomatiques exigeants, au profit d'un monde désordonné qui a besoin de repères politiques et éthiques.

Indépendante, mais fidèle à ses alliances, la France fait entendre son message universel. Ce message couvre celui du conservatisme et du repli frileux de l'opposition. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Libre à la gauche de censurer le Gouvernement : elle ne censurera pas la France que nous aimons ! (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre se lèvent et applaudissent longuement.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, je demande à ceux d'entre vous qui décideraient de quitter l'hémicycle quelques instants de le faire dans le plus grand silence.

La parole est à M. Noël Mamère, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, avant d'aborder la motion de censure, au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, et je pense que l'ensemble de la représentation nationale s'associera à mes propos, je veux dire d'abord notre indignation, notre dégoût et notre condamnation de la profanation, dans la nuit de samedi à dimanche, du cimetière musulman de Notre-Dame-de-Lorette. (Applaudissements sur tous les bancs.) Je tiens aussi à exprimer à Mme Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, notre solidarité (Mêmes mouvements), après que son nom a été sali au cours de cette nuit obscure.

Enfin, je veux dire à M. le président de l'Assemblée nationale que cette motion de censure a été présentée par deux groupes : le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et le groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Je ne sais pas si M. le président a décidé que les orateurs parlent lors de la séance de nuit, mais il aurait été plus conforme au règlement de notre assemblée de donner la parole aux orateurs de ces deux groupes avant que le Premier ministre ne réponde. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur Mamère, c'est la conférence des présidents qui en a ainsi décidé, et personne n'a contesté cette décision.

Vous avez la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Pour l'instant, en effet, la parole est à l'orateur du groupe démocrate et républicain. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous avons encore le droit de nous exprimer dans ce qui est la maison de la représentation nationale, et non celle du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Cet acte de l'opposition unie est le premier depuis la défaite en rase campagne que vous avez subie, monsieur le Premier ministre, lors des élections municipales et cantonales. Votre majorité a été censurée par les électeurs, non pour un défaut de style de gouvernance, comme on l'entend souvent, mais parce que vous ne respectez pas vos promesses ni vos engagements, parce que vous gouvernez contre la majorité de la population, des plus modestes des Français aux classes moyennes, qui sont les principales victimes de votre politique.

La politique économique et sociale est aussi le sujet de cette motion de censure. Celle-ci permettra de faire le bilan des promesses, des mensonges et des reniements de votre majorité depuis dix mois, pour en finir avec la langue de bois officielle, devenue communication de propagande organisée de l'Elysée. Dans cette novlangue pratiquée au quotidien, le plan de rigueur se déguise en « plan d'économies », le Président qui serre la vis prétend rester celui du pouvoir d'achat, stresser plus pour gagner moins se traduit par « travailler plus pour gagner plus » ; fermer 160 tribunaux, c'est « rapprocher la justice des citoyens », supprimer plus de 10 000 postes de professeurs par an s'appelle « intéresser les enseignants », taxer les malades est rebaptisé « responsabilisation des patients », et chasser les sans-papiers qui, la peur au ventre, vont jusqu'à se suicider, c'est « organiser le co-développement » !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

À ce sujet, je voudrais rappeler ce qui est arrivé à un jeune Malien de vingt-neuf ans, M. Baba Traoré, qui, en fuyant la police, parce qu'il n'avait pas de papiers, s'est noyé. Il n'est pas la première victime de la chasse aux sans-papiers et de la politique anti-immigration menée dans notre pays. Ces morts laisseront des séquelles indélébiles. On se souvient de Mme Chunian Liu, Chinoise, qui s'est défenestrée à Belleville, à Paris, en tentant de s'échapper quand elle a vu arriver la police. On se souvient d'Ivan, jeune Tchétchène, tombé de son immeuble à Amiens, en tentant, avec son père, de fuir la police qui entrait dans l'appartement pour les arrêter au motif qu'ils n'avaient pas de titre de séjour. On se souvient du jeune sportif kenyan John Maïna, qui s'est suicidé quand le droit d'asile lui a été refusé, il y a deux mois, alors que la police et la milice, dans son pays d'origine, lui promettaient une mort certaine. On se souvient aussi, à Toulouse, de Tarek, Tunisien de vingt-quatre ans, qui s'est jeté du quatrième étage, transporté dans le coma à l'hôpital et dont personne ne sait ce qu'il est devenu. Et que dire de tous ceux qui se sont suicidés dans les centres de rétention ?

Il y a une certaine incohérence de votre politique aberrante du chiffre, qui entretient un climat de terreur chez les sans-papiers et dont le manque d'efficacité ne peut constituer un alibi. Quatre lois en quatre ans ! Elles sont loin, les « valeurs de tolérance, de démocratie et de liberté » dont le Président de la République s'était fait le héraut au soir de son élection !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Est-ce vraiment le pays des droits de l'homme, ce pays où un homme en vient à se jeter à l'eau par peur de la police ?

Et que penser de ce qui s'est passé hier : la ville de Paris assiégée par une armée de policiers, et la flamme olympique, supposée symboliser les valeurs universelles et la dignité humaine, devenue flamme de la honte ? Les Parisiens, eux, dénoncent cette politique hypocrite et ambiguë, et exigent, contrairement à vous, que le Comité international olympique et le Comité national olympique français réclament haut et fort le respect des droits de l'homme en Chine et au Tibet. Nous avons gagné une première bataille, celle de la censure et du boycott de la flamme olympique. Et cela, nous le devons au peuple français, pas à ce gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Et nous attendons du Président de la République qu'il se mette en conformité avec les exigences de notre peuple, adopte enfin une position claire et refuse de se rendre à la séance inaugurale des Jeux Olympiques de Pékin !

Monsieur le Premier ministre, dès votre arrivée à la tête du Gouvernement, il y a près de onze mois, vous avez donné le ton en décidant d'accorder à votre clientèle 15 milliards de paquet fiscal par an, durant toute la législature. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Un bon élève de CE1 peut facilement faire le calcul : cela représente 75 milliards d'euros en cinq ans. (Mêmes mouvements.)

Dans le même temps les adultes handicapés, qui manifestaient le 29 mars dernier à Paris, bénéficient d'une allocation scandaleusement insuffisante de 628 euros par mois (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) ; les retraités, qui manifestaient le même jour, reçoivent un minimum vieillesse de 633 euros par mois ; et le RMI pour une personne seule est de 448 euros. Une misère pour ces catégories de Français les plus vulnérables, obligés de faire face à l'augmentation des prix des produits de grande consommation, sans oublier les travailleurs pauvres dont le nombre continue de croître de manière inquiétante.

Pendant ce temps, La Tribune constate qu'en pleine crise du pouvoir d'achat, alors que les revendications salariales prennent de l'ampleur dans tout le pays, les 40 milliards d'euros versés à leurs actionnaires sous forme de dividendes par les plus grands groupes français du CAC 40 prennent l'allure d'une provocation, …

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

…d'autant plus, monsieur le Premier ministre que, parmi les promesses non tenues, vous aviez annoncé l'interdiction des parachutes dorés.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Au lieu de cela, vous vous êtes borné à renvoyer aux conseils d'administration des grandes entreprises le soin de lutter contre les abus, ce qui revient à ne strictement rien changer aux pratiques actuelles. Mais peu vous importe, du moment que le MEDEF y trouve son compte. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Votre politique provoque un mécontentement généralisé dans l'opinion, comme viennent de le démontrer les incidents de Gandrange à la suite des promesses inconsidérées du président de la République. Celui-ci parie, comme au casino, sur des événements qu'il ne contrôle pas. Les gens le croient parce qu'il est le président, mais leur colère explose quand ils constatent qu'il leur a menti effrontément.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Le plan d'austérité – quel autre nom peut-on lui trouver quand on considère l'ampleur des coupes budgétaires ? – annoncé par le président la semaine dernière va démanteler de nombreux services publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

La formation, l'éducation, l'inspection du travail, les services de l'emploi, le rail, les services téléphoniques et postaux : tout y passe. Vous multipliez les coupes claires dans l'éducation, la fonction publique, les hôpitaux. Vous réduisez par milliers le nombre d'agents de l'État, tout en cadenassant le pouvoir d'achat des fonctionnaires. La Révision générale des politiques publiques n'est en effet qu'un prétexte pour liquider le service public. Elle vide l'État de sa substance mais ne redéfinit pas son rôle de gouvernance et d'animation des politiques publiques. Vous avez installé, de façon brouillonne, la désorganisation et l'immobilisme au coeur de l'État. Vous paralysez la capacité d'initiative de la fonction publique et vous contribuez au démantèlement du service public, dont les personnels sont tétanisés. Il n'y a plus de pilote dans l'avion : voilà ce que pensent les fonctionnaires dans leur immense majorité.

Cette motion de censure est présentée au moment où vous vous préparez à faire avaliser par votre majorité le passage à quarante et une annuités de la durée de cotisations retraite, ce qui va évidemment augmenter le nombre de pauvres dans notre pays, notamment chez ceux qui ne trouvent pas de travail après cinquante-cinq ans, sans résoudre pour autant le problème du déficit public.

Cette motion de censure est présentée au moment où vous laissez votre majorité, malgré quelques voix courageuses, porter un mauvais coup au Grenelle de l'environnement. Les lobbies des semenciers font encore la pluie et le beau temps au Parlement. (Exclamations sur les bancs du groupe Nouveau Centre.) Le Grenelle de l'environnement est en panne, paralysé par les contradictions internes de votre majorité. Les projets de contournement autoroutier se développent de plus belle, le nucléaire est la réponse magique à la crise climatique, les pesticides continuent à se répandre sur nos champs.

Cette motion de censure est présentée alors que des dizaines de milliers de lycéens sont dans la rue pour protester contre les suppressions de postes, le non-remplacement d'enseignants, la suppression des BEP et le passage du bac pro de quatre à trois ans, ce qui dévalorisera le diplôme…

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

…et mettra sur le marché du travail des salariés moins qualifiés.

Au moment où vous diminuez le budget de l'éducation, vous augmentez les crédits de guerre pour garantir l'envoi des troupes en Afghanistan. Une fois de plus, le mensonge est à la base de cette politique. Faut-il rappeler, là encore, les paroles du Président durant sa campagne, le 16 avril 2007 sur le plateau de À vous de juger, sur France 2 : « La présence des troupes françaises à cet endroit du monde ne me semble pas décisive. […] Il y a eu un moment donné où pour aider le gouvernement de M. Karzaï il fallait faire un certain nombre de choix, et d'ailleurs le président de la République a pris la décision de rapatrier nos forces spéciales et un certain nombre d'éléments. C'est une politique que je poursuivrai. Si vous regardez l'histoire du monde, aucune armée étrangère n'a réussi dans un pays qui n'était pas le sien, aucune ! » Vous disposiez alors des mêmes informations qu'aujourd'hui sur la dégradation de la situation. Mais, une fois de plus, vous vous reniez.

La politique internationale, et notamment l'intervention militaire en Afghanistan, est la raison principale qui a poussé la gauche à déposer cette motion de censure, parce qu'on ne joue pas à la roulette avec la vie de nos soldats, et parce qu'on ne s'engage pas imprudemment dans une situation de guerre sans se soumettre au verdict de l'opinion. Je voudrais d'abord insister sur la désinvolture avec laquelle le Président conduit la politique extérieure et de défense de la France. En tant que représentants du peuple français, nous ne pouvons qu'être choqués par l'intervention politique du Président de la République devant la Chambre des communes britannique. Après des louanges appuyées au modèle économique anglo-saxon, le Président a annoncé l'envoi de centaines de soldats supplémentaires en Afghanistan, s'ajoutant aux quelque 2 000 militaires français des forces spéciales déjà présents sur place. Cette annonce a donc été faite devant les députés de Grande-Bretagne sans information préalable de la représentation nationale – sans parler d'en discuter avec elle –, contrairement à François Mitterrand, qui avait demandé au Parlement de se prononcer avant l'intervention française dans la première guerre du Golfe, en 1991. Cet acte en dit long sur la conception monarchique du pouvoir que le Président compte faire avaliser début juillet par le Congrès réuni à Versailles pour adopter la nouvelle mouture de la Constitution.

Dans ce projet, rien ne permettra de contrôler le « domaine réservé » de l'Élysée qu'est la politique étrangère et de défense. Ce n'est certes pas nouveau, mais alors que le monde plonge dans une guerre de civilisation promue par George Bush, d'Irak en Afghanistan, alors que les conflits écologiques majeurs au sujet de l'eau, des ressources énergétiques ou du climat sont devant nous, alors que les crises identitaires liées à la mondialisation embrasent la planète, cette étrangeté de la démocratie française devient un enjeu essentiel. Allons-nous accepter longtemps encore que la représentation nationale soit ignorée quand il s'agit d'envoyer des jeunes soldats mourir pour des causes qui n'ont fait l'objet d'aucun débat ?

Dans le cas précis de l'Afghanistan, cette consultation était d'autant plus nécessaire que, sous couvert d'une opération de police, c'est en fait une sale guerre qui est engagée depuis six ans. Avec la décision que vous venez de prendre sans nous consulter, la France prend le risque de s'enliser dans un bourbier qui commence à ressembler à celui qu'ont vécu les Soviétiques dans ce même pays. La reconstruction économique et sociale de l'Afghanistan en est au degré zéro. En l'état, la guerre est perdue.

Après le 11 septembre 2001, il fallait refuser de choisir entre la vengeance et l'impunité. Le président des États-Unis, Georges Bush, a choisi et la vengeance et l'impunité. Ce qui nous a été présenté comme une opération de police contre Al-Qaïda n'a jamais été mené à son terme, comme s'il s'était agi de laisser en l'état un ennemi bien commode à diaboliser. Malgré toutes les promesses de financement, la reconstruction de l'Afghanistan s'est perdue dans les montagnes. Au point qu'aujourd'hui les Américains et les forces de l'ISAF apparaissent à beaucoup – par exemple aux tribus pachtounes – comme des occupants, mais des occupants sans plan Marshall, et qui ne proposent aucune politique susceptible d'améliorer le sort des populations. Aucune initiative d'envergure n'a été entreprise qui aurait pu avoir une influence réelle sur la population, qu'il s'agisse de l'éducation, de l'eau, de l'électricité ou des transports en commun, sans parler de la santé. Rien n'est fait pour lutter contre la pauvreté. Malgré de nombreux dons internationaux, la situation du peuple afghan se dégrade, et ces dons se sont rapidement taris. C'est particulièrement patent dans le domaine de la santé.

Les émeutes du 29 mai 2006 ont montré à quel point les forces armées étrangères peuvent être détestées par les Afghans. Ces derniers se sentent méprisés par des militaires qui sont là moins pour les protéger des talibans, comme ils s'y étaient engagés, que pour essayer de protéger les pays occidentaux de ceux qui veulent propager le terrorisme. Quant au président Karzaï, qui ne gouverne pas plus loin que son palais, il mènerait une politique de réconciliation avec les talibans s'il le pouvait réellement.

Le détournement de l'argent de la communauté internationale au profit des seigneurs de la guerre et d'un gouvernement corrompu est avéré. La relance du trafic de drogue a fait de l'Afghanistan le principal producteur et exportateur de morphine base. Elle est en train de transformer l'Afghanistan, comme naguère la Colombie, en premier État narcotrafiquant du monde. Les talibans eux-mêmes qui, avant la guerre, avaient pris des mesures radicales contre la production de drogue, sont en train de construire une coalition hétéroclite promouvant à la fois la guerre contre les Occidentaux et le narcotrafic.

La guérilla talibane n'a jamais été aussi active, intervenant dans la majorité des provinces afghanes et déstabilisant le Pakistan avec ses alliés d'Al-Qaïda. Plus de 800 soldats de plusieurs nationalités, dont 14 Français, ont déjà trouvé la mort. Comme en Irak, les pertes afghanes sont incalculables. Chaque jour, les bombardements font des massacres parmi les populations civiles. On ne compte plus les mariages écrasés sous les bombes, parce que confondus avec des regroupements talibans. L'OTAN mène une guerre « hors sol », en s'appuyant sur le guidage satellitaire plutôt que sur le renseignement humain. Il faut se rendre à l'évidence : la présence des 40 000 soldats de l'Alliance atlantique n'a pas permis de venir à bout des talibans. Sept ans après avoir été chassés du pouvoir, il suffit que les forces occidentales quittent une région pour qu'ils en reprennent aussitôt le contrôle.

Cette guerre n'est pas gagnable parce que ses méthodes, ses objectifs, son contenu sont entièrement dirigés à partir des orientations de guerre préventive voulues par George Bush. Cette opération dite de police, décidée par l'ONU, s'est effectuée sous la direction du commandement militaire intégré de l'OTAN – c'est-à-dire, en clair, sous l'autorité du Pentagone – et s'est transformée en guerre de type colonial. La politique de guerre dite de « basse intensité » se traduit par des bombardements aveugles qui ressoudent la population autour du mollah Omar. Cette politique est donc une faillite sur toute la ligne, sauf pour le Pentagone, qui en a profité pour tester son matériel technologique de guidage satellitaire, a installé plusieurs bases militaires en Asie centrale, se sert de l'Afghanistan comme d'un camp d'entraînement pour ses troupes et met en place une nouvelle OTAN, redéployée stratégiquement.

Rien ne permet de dire aujourd'hui que les États-Unis changeront d'orientation et de méthodes concernant la conduite et les objectifs de cette guerre. Au contraire, l'annonce de l'entrée de la France dans le commandement intégré de l'OTAN, en rupture avec près de quarante-cinq ans de politique étrangère et de défense française, va accélérer le leadership des États-Unis, dont la doctrine militaire repose aujourd'hui entièrement sur le développement de la guerre préventive à outrance. C'est pourquoi, avec le groupe GDR et l'ensemble de la gauche, nous nous prononçons contre l'envoi d'un seul homme de troupe dans cette sale guerre. Nous demandons la redéfinition des objectifs politiques et militaires de la France dans cette région.

Nous devons prendre la mesure de l'alignement atlantiste du Président de la République. En moins d'un an, il a opéré un virage à 180 degrés de la politique étrangère de notre pays, en rupture dangereuse avec la culture politique française. Sans mandat aucun, il a décidé d'engager notre pays dans une réorientation complète de son appareil militaire. Le Président de la République a marqué le début de son quinquennat par un rapprochement avec les États-Unis. Il l'a fait à coups de petites touches symboliques : visite à la famille Bush, discours devant le Congrès – sans jamais prononcer le mot Irak –, voyage à Bagdad de Bernard Kouchner, …

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il a eu raison !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

…prises de position répétées sur l'Iran et l'Afghanistan, installation d'une base militaire à Abou Dhabi, déclarations belliqueuses, à Londres, de Bernard Kouchner et du Président au sujet de l'Iran, envoi de renforts à Kaboul font partie de la même politique. Il s'agit non seulement de donner des gages à Washington, mais de dessiner l'arc d'une coalition politico-militaire nouvelle.

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Le frein mis à l'alliance avec l'Allemagne va dans le même sens. La revanche des néo-conservateurs français contre le gaullisme va désormais à l'encontre des intérêts de l'Europe. En fait, vous êtes en train de donner un nouveau cours à la politique internationale française, en l'adaptant à la mondialisation libérale et à la nouvelle donne géopolitique. On aurait presque envie de dire : « Messieurs Chirac et Villepin, revenez, ils sont devenus fous ! » (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Nous n'irons pas jusque-là !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Sur le plan politique, le retour dans le giron de l'OTAN représente une rupture encore plus significative. À l'encontre de la tradition gaulliste, le président veut avant tout renforcer les « relations transatlantiques» de la France. L'OTAN est donc utilisé, d'abord, comme symbole et comme vecteur de cet objectif. En effet, la dimension réelle de l'affaire est moins évidente. La France participe déjà aux manoeuvres militaires et à l'action militaire directe en Afghanistan.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Mais si, de fait, elle a déjà réintégré l'OTAN, la décision d'entrer dans le premier cercle de commandement vise à un rapprochement euro- américain dans la guerre des civilisations, théorisée par Huntington et mise en pratique depuis le 11 septembre sous le nom de "guerre préventive contre le terrorisme". Elle souligne qu'il s'agit d'intégrer un OTAN en train de changer de nature. La France veut être un des artisans de ce changement de compétence et de dimension. Elle le fait au nom d'une organisation de la défense européenne qui peine à se mettre en place dans le cadre de l'Union européenne et de l'UEO ; l'intégration à l'OTAN signifie donc la mise sous commandement américain des forces européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Pour s'adapter à ce réalignement et trouver un rôle de sous-traitant honorable dans la guerre préventive, votre gouvernement a besoin de redéployer ses forces militaires. La réintégration dans l'OTAN est le prétexte utilisé pour fermer les casernes en France et arriver à un couplage des politiques américaine et européenne de défense. De ce point de vue, la demande explicite de réintégration au sein du commandement militaire de la force intégrée de l'Alliance atlantique, transmise le 3 octobre au Conseil de l'Atlantique nord de l'OTAN, pour "renforcer la transparence et la coopération entre l'Union européenne et l'OTAN" n'est pas anecdotique.

Je ne reviendrai pas dans le détail sur les points abordés au cours de ce protocole. Toutefois, monsieur le Premier ministre, votre gouvernement fait preuve d'irresponsabilité, car il est le paravent d'un pouvoir personnel dont la méthode est le coup d'éclat permanent qui dévoie nos institutions. La réalité, c'est le désordre, le déclin et la division des Français. Nous redoutons pour notre pays la voie du néo-conservatisme et de l'alignement atlantiste que vous avez délibérément choisie en opérant une rupture avec la tradition politique de notre pays. Nous ne pouvons ni ratifier votre politique depuis dix mois ni vous donner notre confiance pour la poursuivre demain.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera donc la motion de censure parce qu'il veut donner un coup d'arrêt à cette politique dangereuse pour la France et les Français, pour l'Europe et pour le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Sauvadet, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, comme toute la représentation nationale, je voudrais d'abord dire notre indignation devant la profanation de tombes et assurer Rachida Dati de notre soutien et de notre amitié. De tels actes doivent être condamnés avec la plus extrême fermeté. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je souhaiterais m'adresser très directement au parti socialiste, à François Hollande et à Jean-Marc Ayrault pour leur dire que je n'ai pas bien compris le dépôt d'une motion de censure (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) sur un sujet qui, précisément, devrait nous rassembler : notre engagement en Afghanistan, pour lequel nous devrions chercher des voies de rassemblement national, comme l'a rappelé le Premier ministre. Si vous aviez dû, monsieur Hollande, déposer une motion de censure, c'était bien plus tôt, dès 2001, qu'il fallait le faire (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche),…

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

…lorsque, comme vous l'avez les uns et les autres rappelé, et notamment M. le Premier ministre, Lionel Jospin et son gouvernement ont engagé pour la première fois nos troupes sur le terrain. Vous auriez pu vous exprimer et demander, à l'époque, le vote que vous réclamez.

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

Ce sujet mériterait d'ailleurs d'être abordé dans le cadre d'une réflexion sur le fonctionnement de nos institutions. Dans de grandes démocraties, en effet, le Parlement est appelé à se prononcer sur un tel engagement. Évitons la polémique sur des sujets qui doivent rassembler l'ensemble de la communauté nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

Que voulez-vous proposer avec cette motion de censure ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

Je vous ai entendu suggérer qu'il y aurait un retrait de nos troupes ou un statu quo, alors que le gouvernement que vous souteniez a lui-même engagé des troupes pour lutter contre le terrorisme et aider ce pays à retrouver la stabilité dont il a besoin. J'aimerais vous livrer la lecture que j'en ai. J'ai le sentiment que vous cherchez tout simplement à jouer la confusion sur ce sujet. Vous prenez prétexte de cet engagement pour jeter le trouble dans les esprits sur un pseudo-alignement de la France sur les États-Unis, comme vous l'avez fait, monsieur Hollande, avec le groupe socialiste, sur les pseudo-cadeaux faits aux riches dans le cadre du texte que nous avions proposé et soutenu et qui avait pour thème le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

Le débat démocratique se grandit toujours dans la clarté des positions, mais s'affaiblit lorsqu'on cherche la confusion.

Pour le Nouveau Centre, il faut rester aussi longtemps que nécessaire pour assurer à terme la stabilité et la sécurité en Afghanistan, parce que c'est aussi celle du monde qui est en jeu, tant le terrorisme est dangereux. Il n'y aura de reconstruction et de paix en Afghanistan que si l'effort militaire est inscrit dans la durée. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) C'est donc à juste titre que la France a pris la décision d'envoyer un bataillon supplémentaire dans l'est et dans la région centre à compter de cet été, et de passer, comme vous l'avez rappelé, monsieur le Premier ministre, de 1 500 à 2 300 hommes.

Selon le rapport sur le développement humain publié par les Nations unies en 2007, les chiffres sur la situation de l'Afghanistan sont alarmants. Nos compatriotes doivent le savoir. C'est un des pays où la pauvreté y est l'une des pires au monde : 30 % des Afghans ne mangent pas à leur faim, 70 % de la population n'a pas accès à l'eau potable et le taux d'alphabétisation des adultes est l'un des plus bas au monde, puisque seulement 23,5 % de la population de quinze ans sait lire et écrire. Cette pauvreté est le terreau du terrorisme.

Un député du groupe Nouveau Centre. Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

De nombreuses ONG françaises sont également présentes sur le terrain, certaines parfois depuis plus de trente ans, et elles y font un travail formidable que je tiens à saluer – je m'exprime ici sous le contrôle du ministre des affaires étrangères. Notre pays, monsieur le Premier ministre, vous l'avez rappelé, y est reconnu pour son intervention dans les secteurs de la santé, de l'éducation, des transports et de la formation, et pour son aide indispensable. Notre façon d'être, de communiquer avec les populations locales, notre attitude et ce que représente la France en termes de valeurs sont une réelle plus-value pour l'effort de pacification dans ce pays.

La question nous est très directement posée, monsieur Hollande : faut-il cesser cet effort ? Au-delà de nos actions que nous devons poursuivre, notre engagement militaire répond à d'évidentes problématiques de sécurité. Le terrorisme international, je le disais à l'instant, a son terreau dans les zones tribales, notamment de part et d'autre de la frontière entre l'Afghanistan et le Pakistan. La guérilla talibane s'est intensifiée en 2007, marquant clairement sa volonté de reconquête du pays. Certaines zones du sud afghan sont retombées aux mains des talibans. C'est pourquoi, il est capital de mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour que l'Afghanistan cesse d'être le foyer du terrorisme international.

Il serait irresponsable – et je pèse mes mots, monsieur Hollande – de laisser le champ libre au retour des talibans. Le régime taliban est l'une de pires dictatures au monde. J'ai notamment en mémoire la violation des droits élémentaires des femmes et l'entreprise de purification culturelle. Nous avons une responsabilité collective.

Depuis 2001, la communauté internationale s'est beaucoup investie et les efforts menés au cours de ces sept années ont porté leurs fruits, même si la situation reste tendue. Des progrès incontestables – vous l'avez opportunément rappelé, monsieur le Premier ministre – ont été accomplis dans tous les domaines de la vie quotidienne des Afghans. Je tiens à rappeler que 4 000 kilomètres de routes ont été construits, 6,4 millions d'enfants sont désormais scolarisés, contre 900 000 en 2001 ; des millions de réfugiés ont pu revenir ; la santé et l'espérance de vie de la population se sont clairement améliorées et la mortalité infantile a baissé, notamment grâce aux vaccinations contre les maladies infantiles. La France a clairement pris sa part dans cette évolution et j'adresse ici un message aux soldats français engagés sur le terrain, qui remplissent des missions de sécurisation ainsi que d'encadrement des troupes afghanes. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ils ont besoin non d'un vote de censure, mais de soutien dans la mission périlleuse et difficile qu'ils conduisent, au nom de la France, aux côtés de quarante autres nations.

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

À nous qui sommes profondément européens, je voudrais rappeler que, sur ce terrain, l'Allemagne compte 3 500 hommes, l'Italie 2 400 et la Grande-Bretagne 8 600. Nous n'avons pas le droit, monsieur Hollande, de faire marche arrière, surtout au moment où une nouvelle offensive des talibans menace.

Vous l'avez compris mes chers collègues, le groupe Nouveau Centre entend réaffirmer avec force sa solidarité avec le Président de la République dans sa décision de contribuer au renforcement des forces alliées contre un ennemi qui nous est commun et qui constitue une menace réelle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Le parti socialiste voit dans cette décision une sorte d'alignement sur la superpuissance américaine (« Eh oui ! »sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) en raison, je cite, d'une « obsession atlantiste du Président de la République » obsession qui aurait été, selon eux, corroborée par la volonté du chef de l'État de réintégrer le commandement de l'OTAN. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Mais on voit bien que, là encore, ces arguments sont agités à des fins uniquement politiciennes pour, comme d'habitude, jouer sur des peurs. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

Lors du sommet de l'OTAN à Bucarest, le Président de la République n'a pas annoncé – et je parle devant le ministre de la défense, Hervé Morin – de décision quant à un retour de la France au sein du commandement intégré de l'OTAN.

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

Comme l'a rappelé le Premier ministre, il a fait part de sa volonté de rénover les relations entre la France et l'Alliance atlantique. Il a précisé également – et j'appelle votre attention, monsieur Hollande – que, si une décision d'intégration de la France au sein du commandement de l'OTAN devait être prise, elle serait subordonnée à des avancés et des progrès concrets sur l'Europe de la défense, qui sera l'une des priorités de la présidence française de l'Union européenne, et à une place importante et stratégique pour les représentants français au sein des instances de l'OTAN. Pour nous centristes, de telles perspectives d'évolution nécessiteront un débat, je l'ai dit d'emblée. Nous devrons aborder ce sujet dans le cadre de la réforme des institutions, comme l'a d'ailleurs suggéré le comité Balladur.

Néanmoins, le ministre de la défense, Hervé Morin, l'a rappelé la semaine dernière, l'option d'une plus grande implication de la défense française dans l'OTAN n'est pas un reniement des choix antérieurs.

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

Nous sommes au sein de l'Alliance atlantique. Nous participons à toutes les opérations militaires de l'OTAN depuis 1995. Des généraux français assurent le commandement d'opérations de l'OTAN, comme au Kosovo. En outre, notre pays se place actuellement – et ce n'est pas anecdotique – parmi les principaux contributeurs au budget et aux opérations de l'Alliance ! Pourtant, et ce devrait être aussi un sujet de débat, la France est aujourd'hui le seul pays à ne pas être membre du Comité des plans de défense, l'une des trois plus hautes instances décisionnelles de l'Alliance, qui a pour objet de fixer les orientations militaires, de définir les besoins capacitaires ainsi que les objectifs à atteindre par chacun des alliés pour les remplir.

Le parti socialiste joue trop souvent sur les peurs pour représenter une alternative pour la France. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Cuvillier

On vient d'entendre un beau discours : calqué sur celui du Premier ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de François Sauvadet

Les craintes quant à la souveraineté et à l'indépendance de notre pays ne tiennent pas. Les Allemands sont au commandement intégré de l'OTAN et pourtant cela ne les a pas empêchés de s'opposer, comme nous, aux Américains sur l'Irak. Ces éléments doivent être portés à la connaissance des Français.

Comme nous l'avons dit à maintes reprises, nous qui sommes profondément européens avons besoin d'une défense européenne. Mais nous avons aussi besoin de l'OTAN. Il ne doit pas y avoir compétition, mais bien complémentarité entre les deux démarches : celle de la rénovation et celle de la construction d'une politique de défense dans l'Union (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), dont vous avez dit vous-mêmes qu'elle était en panne, et que nous avons l'ambition collective de remettre sur les rails, parce que c'est une perspective majeure, y compris pour la paix dans le monde.

Comme pour le traité simplifié, sur lequel les socialistes ont été incapables de se mettre d'accord, la France doit jouer un rôle moteur dans l'élaboration d'un cadre commun de défense européenne.

Il est plus que temps de prendre en compte les intérêts de notre continent, et notamment l'enjeu de la stabilité régionale au voisinage d'une Union européenne qui compte désormais plus de 450 millions d'habitants et dont le PIB pèse le quart de la production mondiale.

Je suis convaincu qu'il est dans l'intérêt du monde et de sa stabilité que l'Union européenne rassemble ses forces, rationalise ses capacités et organise sa défense, pas contre d'autres, mais avec d'autres, pour peser sur la sécurité du monde.

Le dépôt d'une motion de censure sur un tel sujet relève, vous le voyez bien, d'une politique partisane, politicienne (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), et n'est pas à la hauteur des enjeux.

La France doit poursuivre ses efforts pour que l'Afghanistan sorte de la situation où il se trouve et devienne un État libre. La France doit constamment être engagée en faveur de la paix dans le monde.

Le groupe Nouveau Centre a fait le choix depuis le début de la législature d'être aux côtés du Gouvernement pour que les réformes tant attendues par les Français soient mises en oeuvre.

Monsieur le Premier ministre, nous sommes engagés pour la défense du droit, la promotion de la liberté et la paix. Cet engagement, nous sommes fiers de l'assumer à vos côtés devant les Français, parce que la France est belle lorsqu'elle assume et porte ses valeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Pour le groupe UMP, la parole est à M. Jean-François Copé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, près de dix mois après le début de la législature, voici la première motion de censure déposée par l'opposition. Au nom des députés UMP, j'entends bien y répondre point par point, quitte à mettre les pieds dans le plat. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Cette motion, d'ailleurs, n'est pas tout à fait une surprise. Elle s'inscrit dans la logique d'une opposition totalement figée dans ses conservatismes depuis des mois,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

…une opposition qui n'a rien proposé, qui n'a contribué à aucune réforme, qui n'a à aucun moment fait avancer le débat d'idées d'un pouce dans notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Dray

Nous avons juste gagné les municipales et les cantonales !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Il existe deux catégories d'oppositions dans les démocraties européennes.

Il y a celles qui s'opposent en proposant, en participant de façon constructive à la vie politique, par exemple, ou en contribuant à l'émergence de consensus sur les sujets clés. C'est le cas en Allemagne ou au Danemark, où droite et gauche savent parfois s'entendre sur les réformes de la protection sociale ou du marché du travail.

Et puis il y a la vôtre, qui s'affirme uniquement par les hurlements et la caricature, en critiquant à tout va, dans un réflexe quasi pavlovien, en refusant systématiquement la moindre avancée. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Pourquoi avez-vous choisi cette voie, vous les socialistes français ? Vous l'avez choisie par défaut, parce que vous n'avez aucune proposition crédible pour répondre aux défis du siècle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Nous vous avons écouté très attentivement, monsieur Hollande, et vous en avez donné une nouvelle fois une tragique et lamentable démonstration. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

D'ailleurs, ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les vôtres, qui ne cessent de s'en plaindre. Le dernier en date est Jean-Paul Huchon, qu'il m'arrive de lire et qui sait de quoi il parle : « La pensée de la gauche aujourd'hui est une pensée morte, parce que le programme du parti socialiste et ses alliances reposent sur des idées mortes depuis longtemps. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Cette mort de la pensée vous conduit d'ailleurs à dire tout et son contraire, dans la plus grande incohérence. D'un côté, le président de la commission des finances, M. Migaud, s'alarme au sujet des déficits en se demandant comment un gouvernement peut accepter une dégradation aussi forte de nos comptes publics sans réagir. Cinq jours après, Laurent Fabius explique que le Gouvernement écope en fermant partout les services de l'État, ce qui veut dire qu'on aura moins de professeurs, moins d'infirmières, moins de policiers. (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Avec vous, on a surtout la démagogie en plus ! Il est loin le temps où le même Fabius, qui n'est pas venu aujourd'hui, nous parlait, en août 2000, des étatolâtres et des dépensophiles.

Du coup, on comprend vos hésitations sur le choix de l'angle d'attaque pour cette motion de censure. D'après ce qu'on lit dans la presse, chers collègues socialistes, à défaut de débattre sur des propositions pour faire avancer la France, vous vous êtes longuement déchirés pour savoir sur quoi allait porter la motion de censure. Ça vous a occupés toute la semaine. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

J'ai d'ailleurs bien compris vos hésitations car il était difficile d'attaquer la politique économique d'un gouvernement qui met le plein-emploi au coeur de son action, avec un taux de chômage au plus bas depuis 1983, difficile d'attaquer la politique d'innovation et de recherche, avec un investissement sans précédent de plus de 12 milliards d'euros sur cinq ans, difficile d'attaquer les réformes conduites par la majorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Vous avez donc choisi, monsieur Hollande, de parler de politique étrangère, et je vais répondre dans un instant point par point. Mais auparavant, vos allusions un peu graveleuses, comme celles d'ailleurs de M. Mamère, à notre politique économique m'ayant un peu inspiré, je vais vous dire certaines choses que j'ai envie depuis plusieurs jours de vous dire les yeux dans les yeux.

Il y a d'abord le mythe du cadeau de 15 milliards fait aux riches.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Depuis l'été, nous n'entendons que ce refrain à gauche à propos de la loi sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat. En dépit des faits et des statistiques, vous le chantez en tout temps, en tout lieu. Vous chantez faux ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

La réalité, c'est que 90 % des 14 milliards concernés sont revenus intégralement aux classes moyennes (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), grâce aux heures supplémentaires pour les salariés qui travaillent plus pour gagner plus, à la déduction des intérêts d'emprunt pour ceux qui veulent devenir propriétaires, à la suppression de la double peine pour 95 % des Français qui devaient payer l'impôt sur les successions et, enfin, aux exonérations sur les salaires perçus par les étudiants.

Je reconnais que, dans les batailles de communication, vous êtes toujours beaucoup plus organisés que pour faire des propositions constructives mais, ça prendra le temps qu'il faudra, nous ne vous lâcherons jamais. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Quant au bouclier fiscal, contre lequel vous hurlez régulièrement, quelqu'un qui, à un moment, a voulu être sage, a dénoncé « ceux qui ignorent le fait que la France est un pays ouvert et que, si la taxation des personnes et des entreprises était durablement plus élevée que chez nos voisins, les unes et les autres pourraient voter avec leurs pieds », c'est-à-dire se délocaliser, quitter la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Cet avertissement était donné par Laurent Fabius ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Il y a aussi le coup du plan de rigueur, qui n'est pas mal non plus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Non : il remonte à 1983. Le Président était François Mitterrand et certains d'entre vous en étaient d'ailleurs les artisans. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) C'était l'époque où les socialistes, pour sauver la France qu'ils étaient en train de couler, ont trahi toutes leurs promesses et décidé en une semaine la hausse des tarifs publics de 8 %, un prélèvement supplémentaire de 1 % sur tous les revenus imposables, la hausse des taxes sur l'essence et sur l'alcool, des emprunts forcés pour certains contribuables, le contrôle des changes et la limitation des dépenses touristiques à l'étranger. C'était le plan de rigueur des socialistes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Nous n'avons pas à assumer. Nous avons payé vos ardoises, ce n'est pas la même chose. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Inutile de dire que nous n'avons pas du tout, nous, rendez-vous avec la rigueur. Nous avons rendez-vous avec le courage politique. Le courage, c'est de sortir de l'immobilisme et de mettre en oeuvre les réformes sur lesquelles nous nous sommes engagés vis-à-vis des Français.

Vous pouvez effectivement nous faire un reproche, c'est de ne pas avoir fini de réaliser en dix mois le programme que nous nous sommes engagés à tenir sur cinq ans. Rassurez-vous, il nous reste cinquante mois. Nous sommes déterminés à tenir la totalité des engagements que nous avons pris devant les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

J'en viens maintenant à vos critiques sur la politique étrangère, puisque vous semblez à nouveau vous y intéresser, et particulièrement sur l'envoi de renforts en Afghanistan. Tout d'un coup, le PS a redécouvert la présence de nos soldats à Kaboul, alors que, comme l'a très bien rappelé le Premier ministre, l'armée française y est depuis 2001.

Avant d'aborder le fond du sujet, je voudrais revenir sur la question du vote, puisque vous justifiez le dépôt de cette motion de censure par le fait que c'est la seule façon pour vous d'en obtenir un.

En 2001, Lionel Jospin était Premier ministre (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche)…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Pardon d'avoir cité des noms qui fâchent ! Je vais essayer d'être le plus court possible pour ne pas déranger.

Lionel Jospin était Premier ministre lorsque l'engagement de troupes françaises en Afghanistan a été décidé.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Cela a déjà été dit !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Alors qu'il s'agissait objectivement d'une décision plus lourde que l'envoi de renforts, il n'y a eu aucun vote à l'Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Vous avez raison ! M. Jospin nous explique a posteriori qu'il en voulait un mais que le Président de la République a refusé. Il va bientôt nous dire sans rire que c'est Jacques Chirac qui l'a forcé à mettre en place les 35 heures. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Il y a des moments dans la vie où il n'est pas totalement inutile d'assumer ses responsabilités ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Quant à vous, monsieur Ayrault, qui étiez déjà à l'époque président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, si vous teniez absolument à un vote, que ne l'avez-vous pas exigé en 2001, puisque vous étiez majoritaires ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Glavany

Vous ne savez pas ce qu'est la cohabitation ? Ignare !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Auriez-vous des scrupules tardifs ? Cela expliquerait-il que vous n'ayez pas prononcé vous-même le discours à cette tribune, laissant M. Hollande le faire à votre place ?

Comme cette question vous gêne, vous dites que les choses sont différentes par rapport à 2001.

Je vais donc aborder maintenant la question de fond : faut-il ou non envoyer des renforts en Afghanistan ? Le Premier ministre vous a brillamment répondu et il a mesuré à cette occasion l'enthousiasme qu'a provoqué son discours sur les bancs de la majorité. Je veux appuyer à mon tour, monsieur Hollande, là où, sans doute, ça va faire un petit peu mal à gauche. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

La présence française en Afghanistan est une réponse à un enjeu majeur pour nos démocraties. Il ne s'agit pas uniquement d'aider un pays fragilisé par l'instabilité et l'obscurantisme. Il s'agit de lutter contre un fléau terrible, et je suis désolé de devoir insister à ce point. Ce fléau, c'est le terrorisme, qui a déjà frappé cruellement à plusieurs reprises nos démocraties, qui continue de nous menacer dangereusement et contre lequel, nous, responsables politiques, en dépit des quolibets à gauche et à l'extrême gauche, avons l'obligation impérieuse de lutter, avec force.

Pouvons-nous laisser l'Afghanistan demeurer la base arrière de mouvements qui portent directement atteinte à notre sécurité ? Comment, monsieur Hollande, pouvez-vous hésiter, caler, reculer sur une question aussi vitale ?

En 2001, en France, nous avions constitué l'union sacrée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Sept ans plus tard, je regrette que ce ne soit pas le cas, au seul motif que ce n'est pas la gauche qui est au gouvernement, parce que l'enjeu est toujours le même. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il y a, d'un côté, ceux qui tiennent, avec la communauté internationale, et, de l'autre, ceux qui reculent face aux difficultés. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Bien sûr, nos soldats mènent une lutte difficile, mais est-ce pour cela qu'il faut reculer ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Est-ce pour cela qu'il faut donner raison aux forces terroristes ? Est-ce pour cela qu'il faut les laisser penser qu'ils ont gagné ?

Je suis d'autant plus attristé par votre attitude de recul que vous employez, pour tenter de la justifier, des mots qui m'ont profondément choqué. Je lis dans votre motion de censure que l'intérêt de la France n'est pas d'ajouter la guerre à la guerre.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Comment osez-vous qualifier ainsi l'engagement de nos soldats, comme s'il s'agissait d'aventuriers bellicistes ?

Nos militaires et nos services de renseignement sur place accomplissent un travail exceptionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Nous sommes fiers d'eux. Je n'ai pas honte de le dire au nom du groupe UMP et en tant que député de la nation comme en tant que citoyen de ce pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

La vie a fait que j'ai eu l'honneur de rencontrer certaines de ces femmes, certains de ces hommes qui donnent leur vie pour la France,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

…qui luttent pour notre sécurité, dans des conditions extrêmement difficiles. Ils le font simplement, sans haine ni orgueil, avec le seul souci d'accomplir leur devoir et par amour de leur patrie. Tout ce qu'ils attendent en retour, c'est notre considération.

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Vous ne les utiliseriez pas comme vous le faites si vous les respectiez !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Eh bien ! je tiens à les assurer de notre soutien, à leur dire, ainsi qu'à leurs familles, que nous sommes conscients des sacrifices que la France leur demande. Je tiens à leur dire notre reconnaissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

À l'heure où beaucoup se posent des questions sur le sens et la valeur de la vie, à l'heure où l'individualisme et le matérialisme à outrance brouillent certains repères essentiels,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

…à l'heure où nos concitoyens s'interrogent sur les fondements de l'identité nationale et s'inquiètent de voir parfois notre nation se fissurer sans bruit, je forme le voeu que nos soldats soient des exemples, qu'ils inspirent nos compatriotes, en leur montrant que le courage, l'abnégation et le patriotisme sont des valeurs d'avenir. Je veux les saluer pour leur engagement, au nom de la représentation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Et je veux vous dire mon indignation, monsieur Hollande, que, dans votre diatribe extrémiste et sectaire, vous n'ayez pas eu un mot de soutien et de reconnaissance pour nos hommes au combat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. — « C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Je voudrais aussi rappeler aux socialistes, qui se cantonnent souvent dans des débats franco-français, que la décision d'envoyer des renforts en Afghanistan n'est pas une initiative isolée de la France : elle s'inscrit dans une démarche collective sous mandat de l'ONU, avec plus de trente-neuf pays engagés, dont vingt-cinq de nos partenaires européens.

Dans ce contexte, que préconisez-vous, monsieur Hollande ? Le départ pur et simple des troupes françaises, le retour des talibans à Kaboul, avec leur cortège d'horreurs : la lapidation, la soumission des femmes ; le bannissement de l'éducation ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Pardon de devoir encore une fois mettre les pieds dans le plat, mais c'est à cette question-là que vous devez répondre, au moment d'adopter une position. Ce serait formidable qu'une fois, une fois seulement, vous preniez le risque immense de nous dire ce que vous proposez pour la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Au lieu de cela, vous nous avez resservi le bon vieux discours pacifiste qui a nourri vos lectures de jeunesse, au temps où socialistes et communistes parlaient d'une même voix.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Et vos flonflons ringards ! Ils ont bercé l'enfance de votre grand-père !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Votre motion de censure parle d'une évaluation nécessaire de la situation ; vous demandez une approche globale de la situation afghane. Mais c'est une évidence ! La semaine dernière, à la conférence de Bucarest, le Président de la République a proposé cette approche globale. Lui donnant raison, les alliés se sont accordés sur des engagements incluant la sécurité, la gouvernance et les droits de l'homme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Il n'est donc évidemment pas question de s'en tenir a des opérations militaires : il s'agit aussi d'accentuer les efforts civils. C'est ainsi que nous pourrons aller encore plus loin dans les progrès déjà accomplis depuis la chute du régime taliban.

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. On en reparlera !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Ce n'est pas en fuyant nos responsabilités que nous redonnerons à l'Afghanistan les moyens de reprendre en mains son destin.

Ce n'est donc pas la censure qu'il nous faut demander. C'est l'évaluation régulière des résultats obtenus sur place. Monsieur le Premier ministre, une conférence internationale se tiendra à Paris en juin 2008, comme vous l'avez rappelé, pour faire le point sur le Pacte pour l'Afghanistan.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ça va au moins faire marcher l'hôtellerie ! (Rires sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Au nom du groupe UMP, Je demande au Gouvernement que notre assemblée puisse à cette occasion débattre longuement des premières avancées.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

…et je suis persuadé que les socialistes nous rejoindront dans ce débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Faut-il enfin rappeler que nos soldats sont en Afghanistan au nom d'une vieille amitié, et à la demande du gouvernement afghan,… M. Jean-Pierre Brard. Fantoche !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

…qui s'appuie sur une légitimité démocratique reconnue ? Comment oublier l'amitié historique qui lie la France et l'Afghanistan ? Je pense à l'ouverture du lycée francophone de Kaboul, dès 1923 ; à la longue coopération universitaire avec les chercheurs de Kaboul, aux accords qui lient nos pays depuis les années soixante dans les domaines de la santé ou de l'agriculture.

Je pense à la fameuse visite, au début du mois de mai 1968, que Georges Pompidou a tenu absolument à maintenir en dépit des événements que l'on connaît.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Je pense aussi à l'admiration sans bornes que portait le commandant Massoud au général de Gaulle.

En fin de compte, monsieur Hollande, sur la situation afghane, votre critique est très fragile. Vous avez alors, bien entendu, recouru à l'outrance, en nous parlant de « l'obsession atlantiste du Président de la République ». Le mot est lâché ! C'est une grande première dans l'histoire politique de notre pays : l'opposition ne censure pas une politique, mais un préjugé, un fantasme !

Je veux là aussi vous répondre : la politique de la France à l'égard des États-Unis s'inscrit dans une longue continuité d'amitié et de franchise : l'amitié nous impose de réaffirmer l'alliance entre nos deux pays, la franchise de ne rien renier, notamment de nos positions sur l'Irak.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

En acceptant de reconnaître que l'OTAN de 2008 n'a plus rien à voir avec l'OTAN de 1966, nous ne renions pas nos valeurs : ; nous regardons le monde tel qu'il est. Et bien que vos réflexes soient les mêmes qu'en 1966, la situation a profondément changé.

Je veux le dire au nom du groupe UMP tout entier : la clarification de la relation de la France avec l'OTAN ne sera pas un acte de banalisation ou de soumission. (« Si ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Ce doit être un moyen de consolider notre relation avec nos alliés, non seulement américain, mais aussi européens.

C'est une bonne chose – et je l'ai bien compris ainsi – dans la mesure où elle doit nous permettre d'atteindre parallèlement cet autre objectif prioritaire de la France : doter l'Union européenne d'une capacité autonome d'action, appuyée sur des forces militaires crédibles, selon les termes mêmes du traité de Saint-Malo. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Vous le voyez, il nous faut donner une impulsion décisive à l'Europe de la défense : c'est la priorité absolue de la présidence française de l'Union européenne. Il s'agit d'une nouvelle étape majeure dans un processus de long terme. La question n'est donc pas d'opposer l'OTAN et la défense européenne mais de les rendre complémentaires.

Nous pouvons d'ailleurs nous féliciter que les conclusions du sommet de Bucarest reconnaissent pour la première fois l'atout d'« une défense européenne plus forte et plus performante ».

Vous voyez que nos arguments sont imparables de ce point de vue, monsieur Hollande.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

À ce stade, il est encore temps de renoncer à votre motion de censure. Je le dis d'autant plus volontiers que je rêve que, sur ces sujets, nous soyons capables d'imaginer une union sacrée.

Puisque vous nous avez dit, avec des larmes dans les yeux, monsieur Hollande, que vous rêviez qu'il n'y ait plus de domaine réservé et que vous puissiez débattre de politique étrangère, je vous fais une proposition : votez avec nous la révision constitutionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Alors, l'union sacrée sera complète, vous pourrez enfin cesser de vous entre-déchirer et trouver quelques propositions concrètes.

Pour ce qui nous concerne, nous allons continuer d'avancer pendant ce temps.

Nous avons des rendez-vous majeurs avec le pays, des réformes essentielles à mettre en oeuvre, au côté du Président de la République, avec une seule ambition : servir notre pays, faire en sorte, notamment à travers le renforcement de notre contingent en Afghanistan, que la France montre son rayonnement universel,…

Un député du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Montre-le moi, ton gros rayonnement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

…son attachement aux valeurs démocratiques et sa volonté de lutte incessante contre toutes les formes de terrorisme et de dictature. C'est aussi cela qui doit nous conduire à repousser cette motion de censure, afin de continuer, comme il se doit, de travailler au service de la France. (Mmes et MM. les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, je vais mettre aux voix la motion de censure.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je rappelle que seuls les députés favorables à la motion de censure participent au scrutin, et que le vote se déroule dans les salles voisines de l'hémicycle.

Le scrutin va être ouvert pour trente minutes : il sera donc clos aux alentours de dix-sept heures quarante-cinq.

Discussion et vote

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures quarante.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est reprise.

Voici le résultat du scrutin :

Majorité requise pour l'adoption de la motion de censure, soit la majorité absolue des membres composant l'Assemblée …………………………………..288

Pour l'adoption………………………………..227

La majorité requise n'étant pas atteinte, la motion de censure n'est pas adoptée.

Discussion et vote

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-deux, est reprise à dix-sept heures cinquante, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux organismes génétiquement modifiés (n°s 719,746).

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Delphine Batho, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Selon nos informations, Mme la secrétaire d'État aurait été « étrillée » lors d'une réunion de groupe ce matin, nos collègues du groupe UMP, en particulier son président, s'étant émus que, dans sa sagesse, notre assemblée ait adopté le fameux amendement n° 252 de M. Chassaigne.

Soucieux de prévenir toute remise en cause de ce vote, le groupe socialiste à mis en place un comité de défense de l'amendement Chassaigne qui a recueilli plus d'une centaine de signatures en quelques heures.

Lors de précédents rappels au règlement, nous avions déjà interrogé M. le ministre d'État sur ses intentions. Afin que nos travaux se poursuivent dans la sérénité, nous aimerions qu'il réitère devant nous son engagement de respecter le vote émis par notre assemblée sur cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Madame la députée, je vous confirme – comme l'a fait le Premier ministre ce matin lors de cette réunion – que nous n'avons pas l'intention de revenir sur le vote cet amendement.

Je profite de cette occasion pour rappeler que le Gouvernement n'a qu'une position et que je suis totalement solidaire de tous les propos tenus par ses membres, y compris et surtout ceux de Mme Kosciusko-Morizet, avec qui nous travaillons étroitement. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 41 rectifié à l'article 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n°41 rectifié , qui fait l'objet de plusieurs sous-amendements.

La parole est à M. Antoine Herth, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour soutenir l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Cet amendement vise à réintroduire à la fin de l'article L. 663-8 les dispositions relatives aux distances entre les cultures et précise les dispositions préalablement contenues à l'alinéa 4 indiquant que les distances doivent permettre de limiter la présence d'OGM dans d'autres productions en deçà du seuil d'étiquetage fixé par la réglementation communautaire.

Nous déplaçons les dispositions des alinéas 3 à 5 en améliorant leur rédaction. Par exemple, les termes dissémination entre cultures ne signifiant pas grand-chose, nous retenons, tout au long de ce texte de loi, ceux de présence fortuite d'OGM dans d'autres cultures.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un sous-amendement n°446 .

La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Il s'agit de mettre l'amendement n° 41 rectifié en conformité avec l'amendement n° 252 , que nous avons voté à l'article 1er, en considérant que les distances visant à éviter la présence accidentelle d'organismes génétiquement modifiés dans d'autres productions ne peuvent reposer sur le seul critère de la nature de la culture, mais qu'elles doivent aussi être adaptées aux différents systèmes de production présents à proximité et aux écosystèmes locaux.

Nous sommes là dans la continuité de l'échange que nous avons eu sur l'amendement n° 252 : il faut respecter, d'une part, les structures agricoles – la nature des exploitations agricoles, le type de culture pratiquée, la taille des exploitations – et, d'autre part, les écosystèmes locaux, pour éviter les conséquences néfastes sur la biodiversité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

La commission l'a repoussé.

En effet, ces dispositions, qui sont rappelées à l'article 1er et s'appliquent à l'ensemble du texte de loi, font l'objet d'un examen du Haut conseil des biotechnologies, qui doit rendre un avis, mais également formuler des recommandations s'agissant d'une éventuelle mise en culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un sous-amendement n°375 .

La parole est à M. Germinal Peiro, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Nous avons évoqué cette question hier soir.

Ce sous-amendement propose que les conditions techniques relatives aux distances par nature de culture soient fixées non pas par le ministre de l'agriculture après avis du ministre de l'environnement, mais conjointement par ces deux ministres.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un sous-amendement n°493 .

La parole est à Mme Delphine Batho, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

L'amendement n° 41 rectifié dit que « les conditions techniques relatives aux distances doivent permettre que la présence accidentelle d'organismes génétiquement modifiés dans d'autres productions soit inférieure au seuil établi par la réglementation communautaire. »

Cela signifie que les contaminations peuvent avoir lieu dans la limite de 0,9 % d'OGM, ce qui revient à instituer un « permis de polluer ».

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Cette rédaction revient à ce que les conditions techniques relatives aux distances n'aient à protéger ni les AOC, ni l'agriculture biologique si le taux d'OGM est inférieur au seuil d'étiquetage de la réglementation européenne.

Mon sous-amendement propose donc de supprimer la fin de la deuxième phrase de l'amendement et d'ajouter, après le mot « soit », le mot « évitée ». L'amendement n° 41 rectifié serait ainsi rédigé : « [Les conditions techniques] doivent permettre que la présence accidentelle d'organismes génétiquement modifiés soit évitée. », proposition strictement conforme à l'article 26 bis de la directive européenne selon laquelle les États membres peuvent prendre les mesures nécessaires pour éviter la présence d'OGM dans d'autres produits.

Surtout, lorsque nous avons discuté de cette question des seuils à l'article 1er, M. le ministre nous avait part de l'avis que devait rendre le Conseil national de la consommation et nous avait rassurés en nous disant qu'il n'était absolument pas question de définir dans ce projet de loi le seuil « avec OGM » ou « sans OGM » par référence au seuil d'étiquetage européen de 0,9 %. Or, s'il est adopté tel quel, l'amendement n° 41 rectifié sera totalement contraire aux engagements pris par le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un sous-amendement n°347 .

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Il s'agit d'un sous-amendement de cohérence.

Le texte de loi, dans plusieurs articles, concerne la réglementation des cultures végétales : il s'agit donc de plantes améliorées par biotechnologie et, en remplaçant le terme générique et flou « d'organismes » par le mot « plantes », nous apportons clarté, précision et information.

Cette disposition est donc proposée dans chaque article concerné.

Seule l'utilisation en milieu confiné peut s'adresser à « un matériel biologique » – directive européenne – de nature différente d'une plante, comme le rapport de M. Jean-Yves Le Déaut l'avait précisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Quel est l'avis de la commission sur ces trois sous-amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Nous avons tranché hier la question soulevée par le sous-amendement n° 375 . Avis défavorable, donc.

Madame Batho, votre sous-amendement n° 493 indique que toute dissémination doit être évitée, alors que la rédaction de la commission se réfère explicitement à la réglementation européenne, qui peut évoluer et s'impose à l'ensemble des États membres.

D'autre part, votre rédaction fait abstraction d'un principe rappelé dans la directive européenne : la proportionnalité des mesures par rapport aux seuils fixés au niveau européen. En disant simplement qu'il faut « éviter », vous entraînez le Gouvernement dans une surenchère réglementaire que nous ne souhaitons pas. La commission est donc également défavorable à ce sous-amendement.

Enfin, la commission n'a pas non plus adopté le sous-amendement n° 347 défendu par M. Decool. En effet, il propose de remplacer à deux reprises, dans l'amendement n° 41 rectifié , les termes « organismes génétiquement modifiés » par les mots « plantes génétiquement modifiées ». Cela pourrait être cohérent pour la première occurrence, c'est-à-dire dans la deuxième phrase, où il est question de « cultures d'organismes génétiquement modifiés » et où l'on pourrait tout aussi bien utiliser l'expression « cultures de plantes génétiquement modifiées ». De ce point de vue, vous avez parfaitement raison, monsieur le député. Mais, dans la seconde occurrence, c'est-à-dire à la fin du texte, il s'agit bien d'« organismes génétiquement modifiés ». En effet, c'est le trait génétique, et non pas la plante en tant que telle, qui va être recherché à travers les analyses de détection de présence fortuite. C'est donc bien l'expression « organismes génétiquement modifiés » qu'il convient de retenir. Voilà pourquoi, à moins que ce sous-amendement ne soit modifié, la commission y est défavorable.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 446 .

Il est, de même, défavorable au sous-amendement n° 375 . Je m'en explique en quelques mots : il s'agit de la position du Gouvernement. En accord avec moi-même, Nathalie Kosciusko-Morizet s'était, hier, déclarée favorable à ce sous-amendement mais, dans le cadre de l'arbitrage général gouvernemental, l'avis est défavorable. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est bien dommage !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Le Gouvernement est encore défavorable aux sous-amendements nos 347 et 493 , mais favorable à l'amendement n° 41 rectifié du rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je souhaite plaider contre l'amendement de la commission. En effet, il comporte deux mots importants : « distances » et « seuil ». Nous l'avons vu à l'occasion des travaux du comité de préfiguration, aucune distance – que ce soient des kilomètres ou des dizaines de kilomètres – ne peut garantir que la contamination d'un champ sera évitée. La distance ne nous paraît donc pas la bonne réponse au problème des pollinisations interespèces, car elle n'offrira jamais une garantie totale d'imperméabilité. Je l'ai déjà dit de manière un peu poétique : comment peut-on encadrer ou contrôler le vent, le pollen, les abeilles et les oiseaux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Shakespeare a dit quelque chose d'approchant !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Il n'y a pas de limites chiffrées. Il est donc absurde de proposer des dispositions qui prévoient des distances de sécurité. Pour étayer la première partie de mon argumentation, je citerai un article du professeur Wilkinson, paru dans la revue Science…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

On se rapproche de Shakespeare, je le sentais bien ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

…du 17 octobre 2003. M. Debré n'est pas là, mais il doit connaître cette revue. Le professeur Wilkinson considère que les distances d'isolement vont effectivement réduire le nombre de croisements, mais pas les empêcher. Tout dépend du niveau de croisement que l'on considère acceptable. Si vous voulez absolument les empêcher, ce ne peut être par des distances d'isolement.

Quant au mot « seuil », il présente également un caractère ambigu. Ainsi, le seuil de présence d'OGM, fortuite ou techniquement évitable, a été fixé à 0,9 %. Mais, nous l'avons dit, ce n'est qu'un seuil d'étiquetage, pas un seuil de détection. Comme le rappelait excellemment Mme Batho, ce n'est pas un droit à polluer jusqu'à 0,9 %. Qu'on se réfère à l'article 26 bis de la directive 200118, qui stipule que les États membres sont libres de fixer des seuils d'absence d'OGM, indépendamment du seuil européen de minima harmonisé pour l'étiquetage des OGM.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Cet article offre un champ d'application très vaste à des mesures qui sont prises par chaque État membre dans le domaine de la protection. Comme Noël Mamère le disait excellemment hier soir, l'Allemagne, par exemple, a fixé le seuil de détection à 0,1 %. Comme la science ne cesse de progresser…

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

…on pourrait établir ce seuil de détection des OGM à moins de 0,1 %.

Pour terminer, je veux rappeler la réponse que les commissaires européens Stavros Dimas et Mariann Fischer Boel ont donnée à une question posée par le député européen Graefe zu Baringdorf dans un courrier du 7 février 2006. Ils ont expliqué que « tous les lots de semences qui contiennent des OGM autorisés à la culture dans l'Union européenne doivent être considérés comme “contenant des OGM”, étant donné qu'il n'existe aucune valeur seuil pour les semences OGM dans d'autres produits ».

Il est donc clair que ni les distances ni les seuils ne sont des concepts scientifiques valides. Ils ne peuvent servir de fondements rationnels à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Décidément, ce projet de loi nous aura valu quelques-unes des grandes heures du Parlement. Nous sommes en train de débattre d'un article 3 à propos duquel le Gouvernement vient de nous indiquer que la compétence principale était assumée par le ministre de l'agriculture. Il aurait été judicieux que nous puissions avoir un échange avec lui sur le périmètre qu'il avait l'intention de définir, car c'est lui qui, en définitive, tiendra la plume. Je sais bien qu'il faut examiner le problème culture par culture, mais j'ose espérer que le Gouvernement, représenté ici par M. le ministre d'État et par Mme la secrétaire d'État, est en mesure de nous indiquer les condition d'accès ou de non-accès à la dissémination organisée et techniquement inévitable que le ministre de l'agriculture définira.

C'est vous-même, monsieur le rapporteur, qui avez inscrit ce mot d'« inévitable » dans un amendement précédent. Vous l'avez barré par la suite, car il constituait un aveu – que, certes, je ne saurais vous reprocher. J'ai d'ailleurs reconnu votre honnêteté à ce stade d'écriture de l'amendement – nous en sommes à la troisième modification –, mais vous avez considéré, à juste titre, que votre lucidité pourrait nuire au « tout-OGM » que certains préconisent, et que l'aveu était par trop grossier. Il avait en tout cas le mérite de la franchise. Aujourd'hui, la formulation retenue indique bien que, en tout état de cause, nous pourrons prendre acte de la présence accidentelle, « techniquement inévitable », d'OGM dans le périmètre qui est théoriquement un no man's land, ou un « non OGM land ».

Au bout du compte, cette disposition est pain bénit, car elle implique que tout est autorisé, d'autant que le seuil auquel il est fait référence est bien le seuil d'étiquetage, et non pas le seuil de détection de la présence d'OGM. L'heure est grave, monsieur le président : nous avons besoin de savoir quelles mesures de précaution seront prises dans le périmètre et définies dans le décret signé par le ministre de l'agriculture. Avec la rédaction ramassée de cet alinéa, nous avons le sentiment que tout sera permis ou presque. J'espère que le Gouvernement pourra nous donner quelques précisions sur le soja ou sur le maïs. Sans doute, nous ne pourrons pas en obtenir pour toutes les cultures, mais il faudrait au moins que nous ayons des indications sur ce que sera ce périmètre. Prendra-t-on un compas pour tracer un cercle autour du champ d'OGM ? Le périmètre comportera-t-il des angles droits, ce qui peut poser problème ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Tiendra-t-on compte de la vitesse du vent dans le secteur concerné ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Je ne plaisante pas, monsieur le président : il est important que nous puissions avoir cet éclairage.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Je voudrais insister sur ce que vient de dire François Brottes. Si nous étions conséquents, nous demanderions une interruption de séance afin que le ministre de l'agriculture vienne s'expliquer devant la représentation nationale. M. le ministre d'État, considéré comme le numéro deux du Gouvernement, vient en effet de nous annoncer qu'après une réunion interministérielle, son ministère renonçait face au ministère de l'agriculture. Cela veut dire que l'on va continuer, comme au bon vieux temps. On a vu cela sous tous les gouvernements, de gauche comme de droite. Le ministère de l'environnement a pourtant été présenté aux Français comme un super-ministère, un ministère transversal : à sa tête, on a même placé un ministre d'État. Et voilà qu'il cède devant le ministère de l'agriculture, qui reprend la main ! Il y a péril en la demeure. Il nous semblait qu'un Grenelle de l'environnement avait été réuni et que le ministre de l'environnement en était l'incarnation. Monsieur le ministre, vous avez, à deux reprises, montré la duplicité de ce gouvernement : la première lorsque vous avez cédé et accepté de nous présenter un projet de loi contraire aux engagements du Grenelle de l'environnement, puisque, désormais, le principe sera « produire et consommer avec ou sans OGM », alors que la prescription était « produire et consommer sans OGM » ; la seconde lorsque vous avez perdu un arbitrage au profit du ministère de l'agriculture. Nous savons bien qu'il est, avant tout, un ministère des agriculteurs, et de quels agriculteurs ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Ce n'est certainement pas le ministère des agriculteurs biologiques ! Ce n'est certainement pas le ministère de l'agriculture de qualité ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Et ce n'est d'ailleurs pas un hasard si M. le Président de la République, en pleine discussion parlementaire sur le projet de loi OGM, s'est rendu en personne devant le congrès de la FNSEA.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix le sous-amendement n° 446 .

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix le sous-amendement n° 375 .

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix le sous-amendement n° 347 .

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix le sous-amendement n° 493 .

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'amendement n°41 rectifié .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Avis favorable du Gouvernement.

Je mets aux voix l'amendement n° 42 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Les amendements nos 43 et 44 sont également rédactionnels.

Même avis du Gouvernement.

Je mets aux voix l'amendement n° 43 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Même vote sur l'amendement n° 44 ? ...

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 279 et 447 .

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 279 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

L'autorité administrative n'a pas à limiter les sanctions. Nous proposons donc de rédiger ainsi, après le mot « administrative », la fin de l'alinéa 8 de l'article 3 : « prononce des sanctions. Celles-ci comprennent la destruction totale ou partielle des cultures », en cas de contamination fortuite. Nous aurions pu préciser « Celles-ci comprennent notamment » ou « entre autres ». Il s'agit donc d'élargir les possibilités de sanction.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 447 .

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

La commission a émis un avis défavorable à ces amendements identiques. Monsieur Cochet, vous mettez du « notamment » là où il n'y en a pas. Je vois dans votre rédaction une obligation de destruction chaque fois qu'une sanction s'impose.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Ce n'est pas une obligation, mais une possibilité !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Martin

Il y a quelques quarts d'heure, nous avons débattu, dans cet hémicycle, d'une motion de censure qui n'a pas été adoptée. Confusément, j'ai l'impression qu'au fil du présent débat cette loi se transforme en une motion de censure à l'encontre du ministre de l'environnement et de la secrétaire d'État chargée de l'écologie, et, même, en une motion de censure à l'encontre du Président de la République.

Que disait Nicolas Sarkozy le 25 octobre 2007 ? « Je veux revenir sur le dossier des OGM : la vérité est que nous avons des doutes sur l'intérêt actuel des OGM pesticides ; la vérité est que nous avons des doutes sur le contrôle de la dissémination des OGM ; la vérité est que nous avons des doutes sur les bénéfices sanitaires et environnementaux des OGM. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Martin

La vérité, mes chers collègues, est qu'aujourd'hui, nous avons des doutes sur votre solidarité à l'égard du Président de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Un peu de respect pour le Président de la République, monsieur Soisson.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Martin

Vous nous aviez promis un texte d'équilibre, on aboutit à un texte d'excès. D'ailleurs, je remarque que la confusion règne de plus en plus sur les bancs de la majorité : ainsi, M. Sauvadet se demande publiquement où va le Gouvernement avec ce projet de loi tandis que M. Grosdidier considère que ce texte tourne tellement le dos aux intentions initiales qu'il envisage de voter contre.

Je demande donc que le Gouvernement dise de la manière la plus solennelle, notamment en répondant aux amendements que nous déposons, s'il souhaite vraiment un texte d'équilibre ou s'il s'achemine vers une validation des cultures OGM sur le territoire français.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 279 et 447 .

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 135 rectifié et 281 .

La parole est à M. François Grosdidier, pour soutenir l'amendement n° 135 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

En réalité, mon amendement n'est pas totalement identique à l'amendement n° 281 parce que le pourcentage que je visais était 0,1 % et non 0 % comme il est indiqué. Je souhaitais rectifier cette erreur depuis lundi, mais le service de la séance m'a indiqué que je devais le faire de façon verbale en séance.

Ce pourcentage a une importance et nous renvoie au débat que nous avons eu à l'article 1er et à l'article 3. En effet, contrairement à ce que prétend la gauche, je pense que l'objectif de 0 % ne peut être atteint, comme l'avait admis, me semble-t-il, le Grenelle. Nous retrouvons le débat « avec ou sans ». Je préfère un « avec ou sans » relatif et effectif plutôt qu'un « sans » absolu mais virtuel parce que dorénavant impossible sur cette terre, les frontières ne pouvant pas être totalement hermétiques. Je suis pour qu'on approche du 0 % d'une façon relative mais effective.

Dans cette optique, je propose d'ajouter l'alinéa suivant : « La contamination par les organismes génétiquement modifiés et donc l'existence d'un dommage potentiel doivent être reconnues dès lors que plus de 0,1 % de matériel génétiquement modifié est détecté dans une culture ou un milieu naturel qui ne devraient pas en contenir. »

Je rappelle que le seuil de 0,9 % résulte d'un compromis politico-commercial conclu à Bruxelles. Si on veut réellement s'approcher de ce que mes collègues semblent souhaiter, c'est-à-dire une réduction de la contamination ou de la dissémination – je ne reviens pas sur la sémantique, nous en avons discuté hier soir –, il faut atteindre les seuils les plus bas que l'on puisse détecter. Ce n'est pas incompatible avec la réglementation européenne puisque la République fédérale allemande a déjà adopté un seuil de 0,1 %.

J'ai entendu Mme la secrétaire d'État nous dire que cela restait une compétence nationale. Je veux bien la croire. Mais je crains que justement la loi ne retienne ultérieurement le seuil défini par l'Union européenne pour l'étiquetage comme la règle absolue applicable sur le territoire. Si tel était le cas, il faudrait que, d'une façon ou d'une autre, les autorités françaises, le pouvoir législatif ou le pouvoir réglementaire, conservent, malgré les décisions que nous allons prendre dans cette loi, la capacité de réduire ce seuil qui, j'y insiste, n'était qu'un seuil pour l'étiquetage. Tel est l'objet de l'amendement n° 135 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Monsieur Grosdidier, nous avons procédé à la rectification que vous souhaitiez en portant le pourcentage à « 0,1 % ». Votre amendement devient donc l'amendement n° 135 deuxième rectification.

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 281 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

L'amendement est, dans l'esprit, identique à celui de M. Grosdidier. Le projet de loi qui nous est présenté par le Gouvernement fait en réalité du seuil européen d'étiquetage de 0,9 % un seuil de contamination génétique acceptable. Une telle confusion à la fois intellectuelle et politique est inacceptable.

En effet, il n'existe pas de fondement juridique européen selon lequel les agriculteurs et les consommateurs devraient tolérer une contamination génétique routinière et structurelle jusqu'à 0,9 %. Le seuil d'étiquetage ne peut pas être transformé en seuil d'intervention réglementaire sur la coexistence.

Selon la directive 200118, les États membres sont mandatés explicitement pour mettre en place des mesures visant à éviter la contamination génétique et donc à garantir la pérennité de l'agriculture non OGM en Europe. Pour cela, ils disposent d'un mandat très large leur permettant de transposer la directive dans le sens « d'une loi de protection » garantissant le droit et la liberté de produire et consommer sans OGM. Le cadre européen sur les OGM est en effet formellement basé sur le principe de la liberté de choix des consommateurs et des producteurs.

Que signifient les termes « sans OGM » ? François Grosdidier a fait allusion à la législation allemande, qui fixe un seuil très rigoureux. Je vais être plus précis encore. L'article 36 a de la loi allemande stipule que les agriculteurs non OGM qui ne peuvent obtenir ou maintenir un label donné comme le label de l'agriculture biologique du fait de la contamination génétique peuvent engager une action en responsabilité civile pour le préjudice économique subi à partir de 0,1 %. Si cela est possible en Allemagne, cela devrait l'être également en France. Je vous pose la question, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur : ne pourrait-on pas reprendre les bonnes pratiques de nos partenaires européens, d'autant que l'Allemagne est un grand pays agricole, comme la France ?

Puisqu'aucun seuil concluant à l'absence d'OGM n'est spécifié dans la loi, je voudrais savoir si le Gouvernement compte prendre des dispositions réglementaires, arrêtés ou décrets. Est-ce du ressort du ministre de l'agriculture ou de Mme la secrétaire d'État ? Je ne le sais pas. Mais j'aimerais connaître votre opinion en tant que gouvernement responsable de la mise en oeuvre de cette loi sur la différenciation à la fois intellectuelle et politique entre le seuil d'étiquetage de 0,9 % et le seuil de détection, d'une part, le seuil de détection au moment de la contamination d'autre part. À partir de quel seuil un agriculteur bio pourra-il porter plainte si une analyse de laboratoire détecte que ses produits sont contaminés, comme on l'a vu par exemple dans les Deux-Sèvres ?

En Autriche, certaines régions ont adopté dans la loi un seuil de 0 % techniquement détectable. En Styrie, le seuil a été fixé à moins de 0,1 %. Or la Commission européenne ne s'est jamais opposée à ces lois nationales de protection.

Bref, essayons d'éviter de confondre le seuil de 0,9 % d'étiquetage avec le seuil de détection et, par ailleurs, fixons le seuil, de 0,1 % à 0,8 %, à partir duquel un agriculteur qui s'estime contaminé pourra porter plainte contre un pollueur qui cultive des OGM à côté de chez lui.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Avec cette loi, il ne pourra pas porter plainte !

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Nous avons eu sur ce point un très large débat en commission. L'Union européenne ne reconnaît aujourd'hui qu'un seul seuil : 0,9 %. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Laissez-moi finir ma phrase.

C'est le seuil d'étiquetage, qui fait obligation d'avertir le consommateur d'une présence d'OGM afin qu'il puisse choisir d'acheter ou d'utiliser un produit ou non. Ensuite, il y a eu tout un débat, dont vous retrouverez les éléments dans le rapport, sur ce qui se passe en dessous de ce seuil de 0,9 % pour pouvoir mettre en avant le produit en montrant que des efforts particuliers ont été faits.

Nous avons préparé cette évolution au niveau national d'abord, à travers les amendements qui ont été adoptés hier soir et qui permettent notamment aux signes officiels de qualité : appellations d'origine, produits bio, d'évoluer et de protéger la démarche qu'ils auront choisie d'adopter.

Une seconde étape interviendra ensuite au niveau européen. Il s'agira de se mettre d'accord sur une réglementation de valorisation des produits qui aille en deçà du seuil actuellement reconnu de 0,9 %.

Monsieur Grosdidier, la situation en Allemagne est-elle comparable à la nôtre ? J'ai déjeuné à midi avec le ministre de l'agriculture du Bade-Wurtemberg et des représentants d'associations allemandes de consommateurs. Nous avons bien évidemment évoqué cette question. L'Allemagne n'est pas comparable à la France, tout simplement parce que si elle a bien pris des dispositions en matière d'étiquetage pour valoriser les produits aux yeux des consommateurs, elle a quand même assorti cet étiquetage d'un certain nombre d'exceptions dont je ne suis pas sûr qu'elles seraient acceptées par les consommateurs français.

C'est la raison pour laquelle je pense qu'il faut attendre les conclusions du Conseil national de la consommation sur le 0,1 %, ou sur les conditions techniques de production – comment un animal aura-t-il été nourri, des exceptions doivent-elles être créées ? M. Le Déaut nous parlait des enzymes, des vitamines qui aujourd'hui sont produits à partir du génie génétique. Doit-on tolèrer ce type d'exceptions ou se diriger vers une version très pointue et très puriste d'une interdiction de recours aux OGM ?

Je note une deuxième différence avec l'Allemagne. En 2008, on continuera de cultiver du Mon 810 en Allemagne alors qu'en France, nous avons imposé une page blanche, nous repartons de zéro. Si un jour un problème de coexistence de cultures se pose, si nous avons un risque de dissémination, nous pourrons prendre des décisions après une période d'observation des produits accompagnée peut-être d'essais, en tout cas au regard des progrès scientifiques de la recherche fondamentale, et surtout après examen du Haut conseil des biotechnologies. Cet examen ne portera pas seulement sur l'aspect strictement scientifique, il englobera également un point de vue économique, un point de vue éthique, un point de vue social. Sur ce plan, la France est, je crois, largement en avance par rapport à d'autres pays.

Aujourd'hui, ces amendements sont prématurés par rapport à ce que nous sommes concrètement en mesure d'apporter comme éclairage aux consommateurs, sans être finalement démentis par les faits, par les pratiques. Nous avons du temps devant nous, il faut utiliser ce temps pour faire toute la clarté.

Donc avis défavorable aux deux amendements.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

L'avis du Gouvernement est également défavorable. Nous avons déjà eu ce débat hier. Nous distinguons l'étiquetage de la détection, de la traçabilité, et nous avons pris l'engagement de saisir le Conseil national de la consommation, c'est déjà fait, et le Haut conseil des biotechnologies, nous le ferons dès qu'il sera installé, sur le sujet précis de la détection et de la traçabilité.

Je rappelle que la Commission européenne elle-même ne s'est pas prononcée sur le seuil de détection. J'espère que les travaux du Haut conseil des biotechnologies permettront de faire avancer ce dossier au niveau européen.

Aujourd'hui, je crois vraiment que ce que vous demandez est prématuré. Nous distinguons clairement les deux sujets et nous suivons la procédure prévue : il n'y a pas, je pense, de meilleure façon de procéder.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Je suis désolé de vous le dire, monsieur le ministre, mais nous ne sommes pas d'accord ! M. le rapporteur se livre à une sorte d'escamotage, car il confond l'OGM outil et l'OGM produit. Il nous dit que les choses sont différentes en Allemagne, mais ce pays, grand producteur agricole en Europe, a imposé des seuils de détection pour la contamination largement inférieurs à ceux que vous proposez et qui ne sont que des seuils d'étiquetage résultant d'un compromis entre les forces politiques qui siègent au Parlement européen. Un seuil d'étiquetage, ce n'est pas un seuil de détection pour la contamination. Vous opérez une confusion en procédant à cet amalgame. Nous ne pouvons accepter que des agriculteurs biologiques ou conventionnels soient considérés comme effectuant des cultures non-OGM avec un seuil qui serait seulement en dessous de 0,9 %, car nous savons qu'il y a dans ce cas contamination par les OGM, que de telles cultures ne sont plus biologiques – elles peuvent d'ailleurs perdre leur label. En nous expliquant que l'on applique un seuil d'étiquetage qui n'a rien à voir avec un seuil de contamination, ou vous essayez de détourner la loi, ou c'est une nouvelle preuve de l'insincérité de ce gouvernement et de la majorité qui le soutient.

Les amendements proposés par M. Grosdidier et par nous-mêmes, députés de l'opposition, sont constructifs. Ils visent à protéger beaucoup plus efficacement les cultures conventionnelles biologiques d'appellation d'origine contrôlée et permettent d'appliquer le principe de subsidiarité autorisé par l'Union européenne. Et ne nous dites pas, monsieur le rapporteur, que la directive européenne fixe elle-même des seuils ! Justement, elle ne le fait pas pour permettre aux pays de l'Union européenne d'appliquer le principe de subsidiarité, donc d'être en conformité avec la directive 200118 selon laquelle chaque État de l'Union a la possibilité d'appliquer certaines règles lui semblant convenir à la situation régionale, règles qui permettent d'éviter la contamination et de fixer des seuils de détection de celle-ci. Ce que nous proposons est donc juste et s'inscrit dans l'esprit du Grenelle de l'environnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Le débat, pour être long, n'en est pas moins intéressant. Je note plus qu'une nuance entre le rapporteur et Mme Kosciusko-Morizet, d'un côté, et M. Borloo de l'autre. Les premiers nous ont dit hier que ce que nous proposons n'est pas possible à cause de la réglementation européenne. Quant à M. Borloo, il vient de nous dire qu'il faut laisser travailler les commissions franco-françaises et que nous verrons après. Cela apporte de l'eau à notre moulin et conforte notre idée selon laquelle ce n'est pas à Bruxelles que cela bloque, c'est chez nous.

S'agissant de la réglementation de Bruxelles, comme vient de le dire Noël Mamère, il est clair que les taux évoqués sont des plafonds, pas des seuils. On peut descendre en dessous. Les Allemands l'ont fait d'ailleurs – M. Herth, qui les rencontre souvent, a péché par omission. Ils ont mis en place plusieurs seuils, dont le seuil d'étiquetage à 0,1 %, ainsi que l'obligation d'étiquetage des OGM et des produits obtenus à partir de tels organismes, encore appelés produits dérivés – cela va dans le sens de ce que nous avons dit hier. Ils ont aussi prévu une autre obligation. Vous le savez, en Allemagne, la distance entre cultures conventionnelles et OGM doit être de 150 mètres au moins. Pour les cultures bio, elle doit être de 300 mètres. Elle peut être réduite s'il y a accord avec les agriculteurs voisins, mais ceux-ci doivent le signaler sur leurs produits car on sait bien qu'il y a un risque de dissémination. Alors, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, trouvez d'autres arguments à nous opposer d'ici à la fin de la soirée, sinon nous serons obligés d'y revenir constamment !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'amendement n° 281 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'amendement n° 135 deuxième rectification.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de trois amendements, nos 178 rectifié , 461 rectifié et 15 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing, pour soutenir l'amendement n° 178 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Cet amendement vise à interdire, dans une zone bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée, la culture de variétés d'organismes génétiquement modifiés qui entreraient dans la fabrication du produit bénéficiant de ladite appellation. C'est un sujet qui concerne à la fois le débat sur la charte des appellations d'origine contrôlée et le rôle que joue l'INAO pour de telles appellations. Néanmoins, il m'a semblé important d'avoir un éclairage sur les conséquences de ces dispositions appliquées aux zones d'appellation d'origine contrôlée.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir l'amendement n° 461 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Cet amendement se situe dans le prolongement de ceux que nous avons déjà soutenus et qui avaient pour objet d'interdire la présence d'OGM dans le processus de production ou de fabrication de produits faisant l'objet d'une AOC. Il vise à interdire la présence d'OGM dans l'aire géographique de production d'une AOC. Il poursuit un triple objectif : pérenniser ces filières qui créent de la valeur ajoutée, préserver la confiance du consommateur et, pour cela, assurer la traçabilité du produit. C'est un amendement important et j'espère que vous lui réserverez un sort positif.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l'amendement n° 15 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'amendement n° 15 rectifié est retiré.

Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements restant en discussion ?

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Nous rejoignons la discussion que nous avons eue hier soir et qui a amené la majorité à adopter un amendement permettant de satisfaire les attentes s'agissant des productions sous signe officiel de qualité. Cela ne vise pas seulement les appellations d'origine ; sont aussi concernées les démarches sous label rouge et celles qui bénéficient d'un label « agriculture biologique ». Toutes ces productions doivent respecter un cahier des charges au moyen duquel les agriculteurs se fixent des objectifs qualitatifs, notamment en matière de non-recours aux organismes génétiquement modifiés. Dès lors qu'ils auront fait ce choix, l'organisme de gestion ou l'Institut national de l'origine et de la qualité des produits saisira l'autorité administrative, ce qui permettra, comme le suggérait M. Gaubert, de formuler des prescriptions particulières pour garantir ce libre choix des producteurs et leur permettre d'assurer la continuité de la qualité, de la typicité, de l'authenticité de leurs produits. Ces amendements sont donc satisfaits par celui qui a été adopté la nuit dernière. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Par ailleurs, je tiens aussi à souligner qu'aucune interdiction réglementaire n'est de la compétence nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

L'autorisation ou l'interdiction d'un organisme génétiquement modifié est, jusqu'à nouvel ordre, une compétence exclusive de l'Union européenne. Nous avons choisi la solution à la fois de la sagesse et de l'efficacité avec l'amendement qui a été retenu hier soir. Je vous suggère donc, monsieur Giscard d'Estaing et madame Erhel, de retirer vos amendements. Je me réjouis que M. Piron ait été par avance convaincu par mes arguments en retirant le sien de façon anticipée, ce dont je le remercie !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Même avis que la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Je retire mon amendement (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche),…

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

…car je suis sensible aux arguments du rapporteur. Sa réponse me satisfait.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Je souhaite reprendre l'excellent amendement de M. Giscard d'Estaing. Le problème qui se pose est le suivant. Sur un territoire en AOC, un cahier des charges est défini et les producteurs établissent des prescriptions qui, dans le cas de fromages, sont validées par le Comité national des produits laitiers. Par exemple, pour l'AOC Saint-Nectaire, le cahier des charges prévoit que les vaches ne peuvent recevoir de complément d'alimentation à base d'OGM. Prochainement s'y ajoutera l'interdiction de cultures transgéniques sur toute la surface d'une exploitation produisant du lait destiné à être transformé en Saint-Nectaire AOC. Cette interdiction s'entend pour toutes les espèces végétales susceptibles d'être données en alimentation aux animaux de l'exploitation et toute culture d'espèce susceptible de les contaminer.

Le problème, c'est que cette prescription ne vaut que pour les producteurs d'AOC Saint-Nectaire et pas pour leurs voisins, qui produisent pourtant dans la même commune ou le même canton. Avec les phénomènes de dissémination, inutile de dire que cela remet en cause le cahier des charges de l'AOC ! C'est en contradiction avec l'amendement n° 252 que nous avons adopté mercredi dernier. L'excellent amendement de M. Giscard d'Estaing permet d'apporter une réponse. Dans ce cadre-là, les AOC pourront continuer à se développer, sinon leur cahier des charges ne sera pas applicable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Je suis déçu que M. Giscard d'Estaing, qui avait une bonne idée, ait retiré son amendement une fois encore. Sur le fond, M. Chassaigne et Mme Erhel ont parfaitement résumé la situation. A l'heure actuelle, aucun cahier des charges pour une production bénéficiant d'une AOC, d'une IGP ou d'un label ne permet l'utilisation d'OGM. Si l'on ne défend pas cette clause, tout le bénéfice de la labellisation sera remis en cause.

M. le rapporteur nous objecte que ces deux amendements sont satisfaits par celui que nous avons adopté hier, proposant que les organismes de gestion puissent saisir l'autorité administrative pour l'inviter à prendre certaines prescriptions.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Tout le monde sait bien que ce n'est pas le cas. Le manque de précision du texte en dit long sur ses intentions. D'ailleurs, une telle démarche ne sera pas possible. Si nous voulons vraiment défendre les productions de qualité et de label, dont le cahier des charges, aujourd'hui même, ne prévoit pas l'utilisation de productions OGM, il faut le dire clairement !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Et que la commission ne nous oppose pas, quand cela l'arrange, que la directive européenne l'emporterait sur nos décisions ! C'est à nous d'indiquer ce que nous voulons pour notre pays. Si l'on prétend que ce n'est pas possible à l'intérieur d'une zone définie, nous risquons de voir contester, en deuxième lecture, l'amendement n° 252 , dont le deuxième alinéa dispose qu'on ne peut mettre en culture des productions OGM sans respecter les productions sans OGM.

L'amendement n° 178 rectifié , dont je regrette que M. Giscard d'Estaing l'ait retiré, se borne à faire respecter les productions sans OGM.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Nous ne demandons rien d'autre. En outre, cette décision serait conforme à l'article 1er que nous avons voté. Je répète que c'est à nous de prendre une telle décision. L'amendement mérite d'être voté. Il serait de bon aloi que nous le fassions tous ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'amendement n° 178 rectifié , repris par M. Chassaigne.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'amendement n° 461 rectifié .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'article 3, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 411 portant article additionnel après l'article 3.

La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

L'amendement n° 411 tend à préciser les conditions dans lesquelles peuvent être menées des expérimentations en plein champ, auxquelles nous sommes favorables pourvu que des mesures strictes de transparence, de parcimonie et de précaution soient respectées. Or aucune précision n'a été apportée dans le texte à ce sujet.

Nous proposons que des expérimentations en plein champ ne soient autorisées que lorsque l'expérimentation sous serre s'avère insuffisante pour obtenir des données pertinentes. En outre, certaines vérifications doivent être effectuées, notamment en matière de santé publique et d'environnement. C'est dans ce cadre strict que la commission des quatre sages, en 2002, et la mission d'information de l'Assemblée nationale, en 2004, se sont prononcées en faveur de l'expérimentation en plein champ. Ainsi, Bernard Chevassus-au-Louis, président du Museum national d'histoire naturelle, a indiqué que certaines personnes, dont l'honnêteté intellectuelle ne fait pas de doute, font preuve d'une certaine incompréhension, ayant un peu de mal à admettre qu'au XXIe siècle, il soit encore nécessaire, pour savoir si une plante présente un intérêt agronomique, de la planter en plein champ et d'observer son comportement. Reconnaissant que les expérimentations sont indispensables, nous avons subordonné notre accord à cette triple condition.

Deuxièmement, monsieur le ministre, vous avez évoqué devant le Haut conseil des biotechnologies des conditions d'expertise publique, collective et contradictoire. Il faudrait qu'elles soient respectées.

Troisièmement, il est évident que l'expérimentation ne peut être admise que si l'on prend un certain nombre de mesures de rigueur. La première est la castration, dans un certain nombre de cas. La seconde est la présence d'un porte-greffe, notamment pour la vigne. Ainsi, une expérimentation est menée à Colmar sur le virus du court-noué, avec un porte-greffe, sans qu'aucune association de défense de l'environnement ait rien trouvé à redire, parce que les conditions en avaient été fixées au préalable. La troisième mesure de rigueur est la destruction des plantes avant pollinisation. Autant de conditions qui s'imposent, en complément du décalage des cultures.

Enfin, les expérimentations devront être contrôlées par la recherche publique. (« C'est très important ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Nous l'avons dit clairement. Par cet amendement, nous entendons en effet indiquer que, dans le domaine des OGM et de la biologie végétale, nous soutenons la recherche publique et les chercheurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Certains d'entre eux, face aux événements et faute d'une loi fondatrice sur les biotechnologies, ont mal compris notre position. Face à cet amendement raisonnable, dont je regrette qu'il n'ait pas été adopté par la commission, vous vous honoreriez, monsieur le ministre, en le soutenant pour bien fixer le cadre de l'expérimentation en plein champ. Je crois en effet qu'il va dans le sens du progrès et de l'intérêt de la France. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

La commission n'a pas retenu cet amendement. Nous en avons discuté ensemble, monsieur Le Déaut, et j'ai tenu à visiter moi-même l'INRA de Colmar, que vous venez de citer, afin de m'assurer des conditions dans lesquelles est menée l'expérimentation en plein champ. La situation est quasiment celle du confinement,…

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

…puisque le groupe réuni autour des chercheurs a souhaité rester dans ce cadre.

Mais décider que l'expérimentation d'OGM en plein champ ne peut avoir lieu que si le confiné s'avère insuffisant revient en réalité à imposer que les recherches se déroulent systématiquement en plein champ. C'est du moins ce qu'induit l'attendu 25 de la directive européenne, qui dispose qu'il « convient de n'envisager la mise sur le marché d'aucun OGM, en tant que produit ou élément de produits, et n'en faire l'objet d'une dissémination volontaire sans qu'il ait au préalable été soumis, au stade de la recherche et du développement, à des essais sur le terrain satisfaisants ». Autant dire que, pour que le Haut conseil des biotechnologies puisse valablement statuer, il faudra aussi prendre le risque – encadré par certaines précautions – de faire des essais sur les différents terroirs, pour vérifier ce qu'il en est exactement du comportement d'un organisme génétiquement modifié. C'est à cette condition que le Gouvernement pourra valablement statuer : il pourra, de façon transparente et sans parti pris, dire oui ou non à un OGM, et prendre éventuellement des mesures restrictives afin de protéger comme nous le souhaitons les appellations d'origine et les signes de qualité, en particulier le bio.

Au fond, du débat qui nous oppose depuis une heure, il ressort que ce qui gêne l'opposition est que la majorité ait pris hier soir les dispositions qu'elle aurait voulu lui imposer. Mais voilà : la décision est déjà votée, et le dispositif sera efficace, j'en suis certain. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Il me semblait que nous étions parvenus à un consensus sur un point au moins : la recherche, et son budget, sa méthodologie, sa transparence, puisque le conseil supérieur l'avait réorienté sur ces sujets. Je pensais que l'accord était clair sur ce point.

J'ai observé d'ailleurs que, dans un article du Figaro Magazine d'un peu plus de trois mois, des anti-OGM célèbres indiquaient que les expérimentations en plein champ ne posent pas en elles-mêmes de difficultés particulières.

Nous avions pris la précaution que le Haut conseil des biotechnologies, prévu à cette fin par le Grenelle de l'environnement, soit pluriel et donne une autorisation au cas par cas. Veut-on le supprimer ? Très franchement, il vaudrait mieux le laisser travailler dans les conditions prévues. On peut difficilement imaginer un dispositif mieux encadré, plus raisonnable, plus précautionneux et plus soucieux, en même temps, de soutenir la recherche. Pourquoi envoyer un signal de défiance à ce secteur ? Vous savez d'ailleurs où nous en sommes : malheureusement, il n'y a que deux expérimentations en plein champ, en ce moment, en France. Encore sont-elles entourées de précautions infinies…

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Autant l'avouer tout de suite à mes collègues socialistes : je ne suis pas favorable à leur amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Il y a à cela trois raisons principales. Mais je commence par rappeler que nous ne sommes pas hostiles à la recherche…

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

…en milieu confiné. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Allons ! Nous l'avons toujours dit ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Si ! Nous l'avons indiqué dès la motion de procédure, mais peut-être ne nous avez-vous pas écoutés. Oui, nous sommes pour la recherche sans limitation en milieu confiné. Mais il faut bien comprendre que le plein champ n'est pas un laboratoire.

La première raison de notre opposition à l'amendement est que, lorsqu'une expérimentation a été réalisée sur un sol à une époque et dans un écosystème donnés, il n'est pas certain qu'elle puisse être refaite avec le même transgène ou le même OGM l'année suivante en produisant le même résultat. Il suffit de déplacer l'expérience d'un kilomètre, voire de cent mètres, pour que le résultat varie. Autant dire que le mot « expérimentation », qui fait référence à la méthode expérimentale chère à la science, monsieur Le Déaut, ne correspond à rien en matière d'écologie végétale. Cela n'existe pas. On peut tout au plus parler de tests…

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

…ou encore d'essais, mais on ne peut rien extrapoler de leurs résultats, parce qu'un écosystème varie d'une année à l'autre et à cent mètres près. Et que dire, quand la distance entre deux écosystèmes s'élève à cent ou mille kilomètres ? Les expérimentations en plein champ n'ont donc aucune signification scientifique.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

En revanche, ce qu'on expérimente dans un laboratoire, quand tous les facteurs sont constants, est reproductible d'un espace à un autre,…

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

…ou d'un laboratoire européen à un autre.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Certains collègues ne semblent pas savoir ce qu'est une expérimentation scientifique… (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Rationnellement, si l'on veut mener une expérimentation scientifique à des fins de recherche, il faut des conditions expérimentales rigoureuses. Or celles-ci ne peuvent pas être réunies dans un champ : c'est un terrain où les expériences ne sont pas reproductibles. Comprenez-vous ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Pour qui vous prenez-vous ? Vous êtes un guignol !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

J'en viens au second argument qui m'invite à rejeter l'amendement. Si le premier paragraphe porte sur des expérimentations relatives à des OGM alimentaires, le second mentionne des OGM médicamenteux, à l'égard desquels je suis beaucoup plus sceptique.

Déjà, quand il s'agit d'OGM alimentaires, les risques sont mal connus et les recherches doivent être poursuivies. Mais l'idée de faire pousser des OGM médicamenteux en plein champ me fait vraiment peur, puisque des animaux, des insectes et d'autres variétés végétales risquent d'être en contact avec ces OGM. Le danger est considérable. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Arrêtons tout de suite ! Cet amendement fait peser sur chacun de nous de très grands dangers. Va pour les OGM alimentaires pratiquement confinés que l'on trouve en Alsace. Mais, mes chers collègues, vous vous rendez compte de ce que représentent des OGM médicamenteux ? Ne jouez pas aux apprentis sorciers et, je vous en prie, retirez votre amendement. Le jeu est trop dangereux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'amendement n° 411 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Mon intervention sera brève car j'espère que M. le ministre sera favorable aux amendements que nous avons déposés.

L'article 4 a été inspiré par l'un de nos collègues sénateurs dont je tairai le nom, à la fois par courtoisie et pour ne pas l'humilier. Par idéologie et aveuglement, ou surtout parce qu'il appartient aux ultras des OGM, il a inventé, sans consulter le code pénal, le délit de fauchage.

J'ai moi-même été condamné pour fauchage, je peux donc en parler. À l'époque, je n'avais pas demandé la mise en oeuvre de l'immunité parlementaire dont j'aurais pu bénéficier…

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

J'aurais pu la faire jouer, monsieur le président de la commission des affaires économiques, et de nombreuses actions bien pires que celles-là en ont bénéficié !

Je pense donc avoir le droit de dire à nos collègues du Sénat qu'ils auraient dû regarder de plus près le code pénal. Aujourd'hui quand les faucheurs volontaires sont condamnés par les tribunaux, c'est pour destruction en réunion ; ils sont donc passibles, selon le code, d'une peine d'emprisonnement de cinq ans et de 75 000 euros d'amende. Le délit de fauchage, inventé par le sénateur dont je continuerai à taire le nom, fait encourir à son auteur deux ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende. Et dans son emportement, notre collègue a même fait passer l'amende à 150 000 euros dans certains cas !

En réalité, je pense que beaucoup de faucheurs volontaires seraient d'accord pour la création d'un délit de fauchage si cela ne posait pas un problème juridique, problème qu'un sénateur socialiste qui ne brille pourtant pas par ses prises de position – nous les condamnons souvent – a bien mis en évidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Ce qu'il y a de bien avec M. Mamère, c'est qu'il est bon camarade !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Je tairai aussi son nom par courtoisie. Ce bon juriste, parce qu'il est un spécialiste des coups tordus, a bien reconnu celui, pourtant manqué, de son collègue de droite. Deux délits et deux statuts juridiques différents seraient créés pour ceux qui fauchent des OGM, plus sévèrement punis, et ceux qui détruisent des cultures conventionnelles.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, si vous êtes bien dans l'esprit du Grenelle de l'environnement, vous devriez accepter la suppression pure et simple de l'article 4 et en rester au droit commun qui s'applique à ceux qui pratiquent la désobéissance civile.

Pour faire écho à ce qu'avait proposé la semaine dernière notre collègue Delphine Batho, je profite de cette occasion pour évoquer à nouveau l'idée d'une amnistie. La réponse du ministre d'État ne fermait pas la discussion à ce sujet. Je veux rappeler à l'Assemblée nationale, aux représentants du peuple, que plusieurs tribunaux ont refusé de se prononcer sur le cas de faucheurs volontaires, au nom du doute et de la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement. Je pense que nous devrions étudier avec beaucoup d'intérêt la décision des juges dans l'affaire de l'Erika, qui soulève la question du préjudice écologique et de l'état de nécessité. Il ne s'agit pas de laver toutes les fautes qui auraient pu être commises mais de constater que nous sommes dans une situation où le doute domine.

Nous avons été convoqués à Versailles en Congrès pour introduire dans la Constitution la Charte de l'environnement, qui affirme que tous les Français ont le droit de vivre dans un environnement sain. Comme certains juristes, et non des moindres, nous pouvons donc considérer qu'aujourd'hui, constitutionnellement, notre environnement est une propriété collective et que ceux qui prennent le risque de lui porter atteinte s'en prennent à notre propriété, la violent et commettent éventuellement des infractions, des délits ou des crimes écologiques – notions qu'il serait utile que le législateur définisse.

Avant l'examen des amendements, je voulais donc faire appel au bon sens et à la raison de M. le ministre d'État, qui dans une autre vie a été avocat et devrait comprendre – je veux le dire sans provocation – qu'il s'agit d'un article débile !

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

Cette fois encore, j'aurais voté avec enthousiasme le projet du Gouvernement alors que je ne peux pas voter le texte sénatorial.

Le texte initial du Gouvernement sanctionnait le non-respect des conditions techniques. Dans le texte sénatorial que la commission des affaires économiques a adopté, la sanction ne porte plus que sur le non-respect des règles de distance. Dès lors, dépourvues de sanctions, les autres conditions prévues par le texte deviennent virtuelles quand il faudrait imposer le respect de l'ensemble des conditions techniques en prévoyant des sanctions.

Par ailleurs, le texte sénatorial crée le délit de fauchage. Je crois que je suis le dernier membre de cette assemblée que l'on puisse soupçonner de laxisme à l'égard des délinquants.

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

Je me souviens d'avoir fait hurler sur ces bancs lorsque, après les événements de novembre 2005, j'avais refusé l'idée que l'on puisse exonérer des délinquants de leur responsabilité, même en invoquant leur condition ou leur origine sociale. Je suis maire d'une ville qui compte 70 % de logement sociaux et qui a incarné la zone de non-droit par excellence. J'y ai rétabli le droit.

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

On a brûlé mes voitures, on m'a agressé à domicile, on m'a menacé sous toutes les formes, moi, mais aussi ma femme et mes enfants ; et pourtant, jamais je n'ai cédé, jamais je n'ai dit à aucun de mes concitoyens qu'il était excusable en raison de quelque motif social que ce soit.

J'ai pu le faire parce que je suis toujours resté ferme et juste et que j'ai lutté contre toutes les discriminations, y compris de façon très audacieuse en matière d'emploi ou d'exercice du culte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Où est donc le chêne, nous avons déjà saint Louis ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

Comme l'Alsacien qu'est Antoine Herth, le Lorrain que je suis crois que les règles sont faites pour être respectées. J'ai toujours condamné le fauchage d'OGM ; selon moi, il doit être sévèrement sanctionné.

En démocratie il faut s'exprimer en respectant les règles, et la loi. J'ai toujours condamné toute agression des permanences de parlementaires comme expression d'un mécontentement. Dans mon département, les permanences n'ont pas été saccagées par la FNSEA, mais par la CGT,…

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

…et je condamne ces actions de la même manière. Mais il ne me viendrait pas à l'idée de proposer de sanctionner plus sévèrement une agression de permanence par la CGT qu'une agression par la FNSEA – ou l'inverse.

Je sais, comme juriste, que le code pénal permet aujourd'hui de réprimer très lourdement toute atteinte volontaire aux biens d'autrui et que ce dispositif est largement suffisant pour sanctionner les actes de fauchage. Il y a eu des problèmes d'application, me disent certains de mes collègues, et c'est vrai. Pour ce qui concerne les positions du parquet, quelque délit que vous considériez, vous n'y changerez rien : c'est ailleurs que se traite cette question. Le problème de l'état de nécessité a été soulevé mais, si nous légiférons conformément aux principes dont nous nous revendiquons dans l'article 1er du projet de loi, l'état de nécessité ne pourra plus jouer. Et en tout état de cause, ce n'est pas la création d'un délit spécial qui permettra de régler ce problème.

Le délit créé par l'article 4 n'est pas tout à fait un délit d'opinion puisque le délit de fauchage existe et qu'il est déjà sanctionné par le code pénal. Il s'agit bien cependant d'une circonstance aggravante en rapport avec l'opinion des auteurs puisque le fauchage de champs OGM sera beaucoup plus lourdement condamné que le fauchage de champs sans plantation OGM.

Mes chers collègues, si vous voulez transformer les faucheurs en martyrs, créez ce délit spécial ; mais si vous voulez les traiter en délinquants, alors appliquez-leur le droit commun.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'amendement n° 46 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 136 et 282 .

La parole est à M. François Grosdidier, s'il souhaite compléter son argumentation au sujet de l'amendement n° 136 .

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

Il s'agit de faire respecter l'ensemble des conditions techniques, et pas seulement celles relatives aux distances.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 282 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Cet amendement est identique à celui défendu par M. Grosdidier. Il n'y a aucune raison de se focaliser sur la seule question des distances.

Je veux apporter des éléments d'information et des arguments nouveaux en donnant des exemples très précis. Ainsi pour les pollens de maïs et d'autres plantes, nous savons que le critère des distances n'est pas efficace. En 2006, nous avons mesuré l'ampleur de la contamination à partir d'un champ OGM.

Je signale que des milliers d'hectares ont déjà été cultivés avec des OGM en France et que, s'il y avait une réelle volonté de mener des recherches sur la diffusion des OGM, il serait facile de commencer par étudier ces cas. Pourtant, personne ne s'y intéresse alors qu'il s'agit d'un véritable terrain d'expérimentation.

L'étude menée en 2006 dans le Lot-et-Garonne autour des parcelles d'un cultivateur favorable aux OGM, M. Claude Ménara, a prouvé que, dans un rayon de trois cents mètres, les plantes ne sont pas exemptes de contamination. Cette étude de pollution a été réalisée par une association que connaît peut-être mon collègue Noël Mamère. Le même Claude Ménara vient d'être assigné en référé par un couple d'apiculteurs et plusieurs syndicats agricoles pour dissémination dans l'environnement de pollen de maïs OGM. La contamination se produit au voisinage des parcelles plantées d'OGM mais aussi, et sans que la question de la distance soit en cause, par le biais des semences, du transport des récoltes ou du nettoyage des machines.

Pour conclure, je voudrais vous citer les propos que la Commission européenne à tenus à Genève, où elle s'était rendue le 28 janvier 2005 à l'invitation de l'Organisation mondiale du commerce. La Commission, qui est parfaitement avertie des difficultés liées à la coexistence entre cultures OGM et cultures biologiques et de la question des distances, précisait ainsi : « Connaissant les pratiques agricoles, leur mise en oeuvre – il s'agit des stratégies de limitation des risques comme celles liées aux distances – serait faible et difficile à appliquer ; elle imposerait aux agriculteurs une charge considérable et pourrait augmenter leur exposition à des produits chimiques moins inoffensifs, avec toutes les conséquences pour la santé humaine et l'environnement, sans finalement éliminer le risque. »

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

La commission a émis un avis défavorable. En effet, la mention spécifique des conditions relatives aux distances figurait déjà dans le texte initial du Gouvernement et la supprimer nuirait beaucoup à la lisibilité du dispositif.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Monsieur le rapporteur, je comprends que vous soyez un peu fatigué à la fin de ce débat, mais très franchement vous ne pouvez pas vous contenter d'une telle explication ! Pardonnez-moi de vous le dire avec véhémence mais le sujet est trop sérieux pour que vous puissiez nous répondre ainsi.

Je me permets tout d'abord de vous faire remarquer que l'amendement n° 46 que nous venons d'adopter n'est pas rédactionnel du tout. Préciser que le manquement à « une ou plusieurs » conditions techniques sera sanctionné signifie que vous reconnaissez que d'autres aspects que celui des distances doivent être pris en compte.

En revanche, l'explication que vous nous donnez pour justifier votre refus de supprimer la référence aux distances – qui est ainsi la seule condition technique dont le non-respect peut être sanctionné – n'est pas acceptable.

Tout d'abord, je ne suis pas un spécialiste en la matière mais, dans la mesure où celui qui sème a obtenu un agrément sur une parcelle donnée, il me semble que vous imposez l'obligation de respecter des distances à celui qui subit la proximité de cultures OGM. Or je ne vois pas pourquoi on sanctionnerait celui qui ne veut pas être contaminé, plutôt que celui qui génère la dissémination.

Ensuite, imaginons qu'après avoir expertisé sa demande, le Haut conseil accorde à un agriculteur un agrément pour produire un type de plante OGM. Mais l'idée saugrenue lui vient de planter autre chose que ce pour quoi il a obtenu son agrément. Il se trouve qu'il n'a rien à craindre. En effet, aux termes de l'article 4, dès lors que les distances sont respectées, il ne court aucun risque d'être sanctionné, même s'il n'a pas respecté l'agrément qui lui a été donné.

Si nos collègues souhaitent que l'on supprime la référence aux distances, ce n'est pas parce qu'ils la jugent sans importance – comme vous venez de le dire –, mais parce qu'il jugent déraisonnable que la sanction ne porte que sur ce point. Je souhaiterais donc que vous me répondiez, monsieur le rapporteur : quelle est la sanction que j'encours si je plante autre chose que ce pour quoi j'ai un agrément ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 136 et 282 . (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. François Brottes, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Monsieur le président, je vous demande, au nom de mon groupe, une suspension de séance, car la question que je viens de poser ne peut rester sans réponse. Et nous ne céderons pas tant que nous n'obtiendrons pas d'éclaircissements sur ce point.

Rappel au règlement

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quinze, est reprise à dix-neuf heures vingt-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est reprise.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Herth

Monsieur Brottes, il me semble que nous nous sommes mal compris. D'une part, l'obligation de respecter une distance entre les cultures s'impose au producteur d'organismes génétiquement modifiés, et non à son voisin qui n'en produit pas. D'autre part, pour que le délit existe légalement, il convient d'inscrire dans la loi le fait constitutif de ce délit, en l'occurrence le non-respect de la distance.

Par ailleurs, une réglementation plus générale interviendra une fois que le Haut conseil des biotechnologies aura statué mais, aujourd'hui, nous ne sommes pas en mesure d'inscrire ces dispositions dans la loi. Elles interviendront donc ensuite par voie réglementaire. Mais la justice ne pourrait pas sanctionner d'éventuels délits sur le fondement d'un texte réglementaire. C'est pourquoi nous avons souhaité maintenir la mention des distances.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 283 , 296 et 448 .

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 283 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Le Sénat a adopté un amendement qui instaure un délit de fauchage et aggrave les peines encourues par les faucheurs. Cet amendement du rapporteur du Sénat – dont, par pudeur, je ne citerai pas le nom – a été adopté au terme d'un débat passionné. Bien entendu, nous estimons que la création de ce nouveau délit est inutile, d'abord parce qu'au moins quatre articles du code de pénal répriment déjà la destruction du bien d'autrui. Il s'agit des articles 322-1, 322-2, 322-3, qui sanctionne le délit commis en réunion, et 322-7, qui réprime la complicité. Voilà le droit commun.

Par ailleurs, dans l'état de nécessité actuel, nous n'avons plus aucun moyen à notre disposition pour que la démocratie soit respectée et demeure une réalité. Ainsi, c'est l'impuissance politique et l'usage inversé de la loi qui nous font entrer en résistance pour refuser la fatalité irréversible des OGM.

« Renoncer à la désobéissance civique, c'est mettre la conscience en prison », disait Gandhi. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir l'amendement n°296 .

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Dans un État de droit, l'échelle des sanctions que prévoit la loi reflète toujours une hiérarchie des valeurs. Aussi nous interrogeons-nous sur le sens des cinquième et sixième alinéas de l'article 4, qui laissent entendre que les cultures OGM sont placées au-dessus d'autres cultures ou d'autres biens, puisque leur destruction doit être sanctionnée de façon particulière.

Par ailleurs, ceux qui ont commis des actes de fauchage volontaire ne sont pas des héros, mais des citoyens qui ont contesté un vide juridique par des actes militants, politiques. S'agissant des actes passés, nous avions déposé un amendement afin d'éteindre les poursuites judiciaires en cours. Il a été refusé, mais nous avons pris acte de la réponse du rapporteur et de M. le ministre d'État, qui nous ont indiqué que ce sujet pourrait faire l'objet, plus tard, d'un examen global.

Nous légiférons à présent au sujet des actes de fauchage qui pourraient être commis à l'avenir. Or le mode d'action des anti-OGM est en train d'évoluer : de plus en plus souvent, le fauchage est remplacé par un pique-nique avec débat, par la cueillette de quelques échantillons d'OGM déposés ensuite devant les préfectures, ou par une grève de la faim. Le législateur va-t-il appliquer la même sanction à ces différentes formes d'action ? Cela paraît difficilement concevable.

Mais, je voudrais revenir de façon très solennelle aux sanctions prévues par les alinéas 5 et 6 de l'article 4, qu'il convient de mettre en regard des dispositions existantes du code pénal. De façon absurde, l'article 4 semble établir une symétrie entre le non-respect des conditions techniques relatives aux distances entre les cultures et la destruction d'une parcelle d'OGM, qui seront punis exactement de la même manière.

En ce qui concerne la destruction de cultures commerciales d'OGM, alors que l'article 322-1 du code pénal dispose actuellement que la destruction ou la dégradation de biens appartenant à autrui est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende, vous prévoyez que le délit de fauchage sera puni par une amende de 75 000 euros. Détruire une parcelle d'OGM sera donc sanctionné par une amende supérieure à celle encourue par l'auteur de l'incendie volontaire d'un véhicule, ce qui ne paraît pas normal, car cela revient à considérer que le préjudice subi par l'un de nos concitoyens dont le véhicule a été incendié est moins grave que le préjudice qu'entraîne la destruction d'une parcelle d'OGM.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Le groupe socialiste a dit qu'il n'approuvait pas les destructions de parcelles d'OGM de recherche publique – destructions pour lesquelles l'article 322-2 du code pénal prévoit actuellement une peine de trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. Avec l'alinéa 6 de l'article 4, l'amende est portée à 150 000 euros, ce qui signifie que la destruction d'une parcelle d'essais OGM de Monsanto, par exemple, sera punie plus sévèrement que la destruction d'un immeuble classé, d'une découverte archéologique, d'un terrain contenant des vestiges historiques, ou d'un objet conservé dans un musée. De la même façon, l'amende applicable à la destruction d'une parcelle d'essais OGM sera plus élevée que celle sanctionnant la destruction ou la dégradation d'un bien quelconque, commise en raison de l'appartenance vraie ou supposée de la personne propriétaire à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Nous estimons que les dispositions prévues par l'article 4 tendent à instaurer une échelle des valeurs pour le moins curieuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Je vous rappelle que je ne suis pas intervenue sur l'article 4, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Le temps de parole ne se compense pas de cette manière. Je vous prie de bien vouloir conclure.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Je conclurai en évoquant l'article 322-3 du code pénal, qui prévoit cinq ans d'emprisonnement pour les destructions commises en réunion. Avec les alinéas 5 et 6, nous introduisons un nouveau délit dans le code rural. Dès lors, dans le cas d'un fauchage futur, que feront les parquets ? Devront-ils appliquer les sanctions prévues par le code rural, ou celles prévues par le code pénal ?

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

La vérité, c'est que les industriels des semences et leurs relais dans le monde agricole ne supportent pas les dispositions relatives à la transparence des parcelles figurant dans ce projet de loi. Ils ont donc exigé un os à ronger, qui leur a été accordé sous la forme des alinéas 5 et 6. Ces dispositions très malvenues et très mal rédigés posent un vrai problème de cohérence avec les dispositions existantes du code pénal. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Sur le vote des amendements nos 283 , 296 et 448 , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 448 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Plutôt que de rester dans les champs d'OGM, de par ma culture politique, je suis tenté d'élargir le débat à l'ensemble du champ social, car nous ne devons pas rester empêtrés dans le juridisme et le légalisme. Le 14 juillet 1789, quand nos ancêtres ont pris la Bastille, ils ne se sont pas demandé si c'était légal ! Face à une société qui devient autiste doit s'imposer une notion plus forte que celle de légalité : le plus important, c'est ce qui est juste et légitime !

Les alinéas 5 et 6 de l'article 4 correspondent à des amendements idéologiques et vengeurs adoptés par le Sénat. La loi prévoit déjà des sanctions applicables aux faucheurs, auxquelles les juges ont la possibilité de recourir. Mais nos collègues du Sénat ont voulu casser la jurisprudence en vigueur, par exemple celle établie par le tribunal correctionnel d'Orléans dans son arrêt du 9 décembre 2005, ou encore celle du tribunal correctionnel de Versailles. En écartant cette jurisprudence, les sénateurs ont anéanti du même coup les progrès accomplis par le débat dans la société, y compris au sein de notre assemblée. Ils ont l'illusion de pouvoir bloquer, au moyen de textes répressifs, les évolutions sociales qui se font jour – un procédé qui n'est pas sans rappeler celui des encycliques papales !

Outre que cela n'est pas réaliste, ce n'est pas non plus légitime, car il existe déjà des textes applicables. Les dispositions introduites par le Sénat permettront de sanctionner d'une amende de 150 000 euros les personnes ayant fauché un champ d'OGM, alors que la destruction de l'un des Champs de blé de Van Gogh dans un musée ne serait punie que par une amende de 45 000 euros ! Comment ne pas voir dans ces dispositions une démarche idéologique et vengeresse ?

Quand les salariés d'une usine séquestrent un patron voyou qui déménage les machines pendant la nuit, ce n'est sûrement pas légal, mais comment leur donner tort ? Le code pénal indique que « la destruction, la dégradation ou la détérioration d'un bien appartenant à autrui est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende ». Quand la Société Générale perd 5 milliards d'euros – qui, certes, n'ont pas été détruits, mais se sont volatilisés – demande-t-on au président de cette société de payer 45 000 ou 150 000 euros d'amende ? Non, pas un centime ! En revanche, on s'acharne sur des gens qui, nonobstant les méthodes employées, ont permis de poser le problème et de faire évoluer la réflexion sur les OGM dans la société, ce qui nous a amenés à adopter, il y a deux jours, ce fameux amendement à l'article 1er qui fait progresser – certes, pas autant que nous l'aurions souhaité – la législation, ce dont nos collègues du Sénat ne veulent pas entendre parler. Comme le dirait le sénateur Le Grand et comme l'a confirmé notre collègue François Grosdidier, tous ne sont pas dans un rapport d'objectivité avec ce débat, mais plutôt dans un rapport d'influence.

Voilà pourquoi, monsieur le président, nous pensons que le fait pour les faucheurs – comme pour les responsables syndicaux dans les entreprises – d'agir en dehors de la loi permet parfois de faire progresser la législation afin que celle-ci prenne en compte les nouveaux problèmes qui émergent dans la société. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour donner l'avis de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

La commission est défavorable à ces amendements. Je voudrais rappeler par quel cheminement nous en sommes arrivés à la rédaction actuelle. Le texte issu des travaux du Sénat pouvait donner l'impression qu'il y avait d'un côté les gentils faucheurs, de l'autre les manigances de la majorité voulant leur imposer des sanctions particulières. C'est précisément pour cela que nous avons revu l'architecture du texte. Le chapitre II traitait de la responsabilité et le III de la transparence. Cette approche n'était pas satisfaisante, car si l'un est bien la conséquence de l'autre, ils étaient à l'envers.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est comme la dialectique de Hegel, que Marx a remise sur ses pieds !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous devriez peut-être vous en inspirer, cela vous serait utile !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Conformément à l'esprit du Grenelle de l'environnement, il s'agissait, avec le chapitre III, d'aller dans le sens de la transparence sur les parcelles d'OGM, c'est-à-dire de faire en sorte que leur emplacement soit indiqué sur Internet, afin que chacun puisse savoir où elles se trouvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Cette transparence, la majorité aurait pu la refuser (« Ah bon ? » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) – certains, au sein de la majorité, auraient d'ailleurs préféré formuler différemment sa mise en oeuvre. La majorité a finalement décidé de soutenir le ministre et d'être fidèle aux engagements du Grenelle de l'environnement…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

…en organisant la transparence souhaitée. C'est ce que nous avons fait il y a quelques heures en votant les dispositions correspondantes. Dès lors, il paraît naturel de prévoir des sanctions en contrepartie.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

N'importe quoi ! La transparence, c'est la règle ! C'est un principe, et il n'y a pas de « contrepartie » à un principe.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Lorsque j'étais rapporteur de la loi de 2006, les organisations et associations que j'ai reçues m'ont avoué, dans la confidence du bureau, souhaiter la transparence pour pouvoir venir faucher plus facilement. On peut toujours rêver et, comme vous, imaginer toutes sortes de constructions, mais si nous voulons vraiment la transparence – et nous la voulons tout autant que vous –, il faut en contrepartie la sanction de l'acte illégal consistant à faucher.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Il n'y a pas de contrepartie, c'est ridicule !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Ne perdez pas de vue que l'article 4 ne vise pas uniquement les faucheurs, puisqu'il instaure la responsabilité pénale de l'agriculteur, puni exactement de la même manière – deux ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende – s'il cultive une parcelle OGM sans respecter les conditions de distance.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Mais elle existait déjà, la responsabilité des faucheurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Bref, il faut replacer les alinéas 5 et 6 dans le contexte général de l'article 4.

Madame Batho, vous avez parlé de pique-nique et de cueillette, termes très bucoliques, pour évoquer le fauchage. J'ai, moi, un mauvais souvenir du fauchage dont, en 2004, ont été victimes les parcelles de l'INRA, où était en cours une recherche sur des plantes médicamenteuses contre la mucoviscidose. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) J'ai été sincèrement outré que des faucheurs volontaires aient compromis une recherche d'un tel intérêt.

Je peux comprendre que vous entriez en résistance, mais ce que nous souhaitons, nous, c'est un texte équilibré, qui n'a aucune vocation à aggraver quoi que ce soit. Il s'agit, avec la transparence que vous revendiquez, de sanctionner de manière tout à fait normale ceux qui pourraient être tentés de procéder à des fauchages illégaux.

Voilà pourquoi nous avons voulu inverser l'ordre du texte et pourquoi je vous demande de voter contre ces amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

J'ai été particulièrement choqué par les propos que vient de tenir Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

N'opposons pas le légal au légitime : pas vous, pas ici ! Car procéder ainsi, c'est s'attaquer aux fondements mêmes de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Chacun, en effet, au nom de ce qu'il juge légitime selon ses propres critères, va vouloir s'affranchir de la norme légale pour « imposer sa loi », et nous ne serons plus en République ! À titre d'exemple, c'est ainsi qu'ont agi, lors du débat sur l'avortement qui a agité notre société il y a quelques années, certaines personnes qui, malgré le vote de la loi, ont voulu s'y opposer au nom d'une légitimité qu'ils estimaient supérieure à la norme légale et ont organisé des commandos punitifs dans les maternités pour agresser médecins et patientes. Voilà à quoi mèneront les positions que vous défendez !

Il y a une loi, et cette loi est la même pour tous. Elle est votée par l'Assemblée, l'Assemblée la modifiera si besoin. Si l'on part, au contraire, du principe que chacun n'agit qu'en fonction de ce qu'il juge légitime et peut s'affranchir de la loi, c'est la République qui régresse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Rapporteur pour avis du budget pour la gendarmerie, sous la précédente législature, j'ai visité dans le Puy-de-Dôme – département cher à nos collègues André Chassaigne et Louis Giscard d'Estaing – le groupement départemental de gendarmerie. Il lui en a coûté en 2006, pour la surveillance de parcelles OGM par des gendarmes mobiles, la somme de 600 000 euros. Ne croyez-vous pas, mes chers collègues, que l'argent public pourrait être mieux utilisé qu'à surveiller des parcelles déclarées légalement et servant à mener des expériences en plein champ ? Nous marchons véritablement sur la tête !

Il est donc important, comme l'a dit fort justement le président de la commission, que ce texte nous permette de conjuguer la transparence, à laquelle nous sommes tous attachés, à la responsabilité, qui est tout aussi essentielle. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je vais donner la parole à un orateur par groupe, puis nous passerons au vote.

La parole est à M. Noël Mamère, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Le rapporteur a oublié de nous dire que ce délit qui a été inventé par le Sénat et qui crée une discrimination n'est pas passé par le filtre du Conseil d'État. Et je suis certain que, lorsque nous soumettrons au Conseil constitutionnel ce projet de loi, plusieurs de ses dispositions seront remises en cause, en particulier les alinéas 5 et 6 de l'article 4, expression de la folie idéologique de quelques ultras qui voudraient faire des faucheurs volontaires des délinquants d'un type particulier.

Mme Batho l'a expliqué de manière très précise, un juriste sérieux ne peut introduire de discriminations dans la sanction des infractions, délits et crimes, et cette invention d'un délit de fauchage n'est qu'un effet d'affichage, à l'instar de nombreuses lois qui ont été votées jusqu'à maintenant.

Monsieur le rapporteur, il y a une sorte d'incongruité juridique et morale à venir nous expliquer que la contrepartie de la transparence – qui est un principe et un progrès – devrait être le renforcement des sanctions pour les faucheurs volontaires. Je vous rappelle que les fauchages ont eu lieu avant l'application de la directive européenne 200118 dont nous discutons ici, à une époque où le droit était imprécis sur le sujet et que, contrairement à ce que vous affirmez, il s'agissait d'expérimentations et de cultures en champ ouvert qui n'étaient pas déclarées et s'effectuaient dans l'opacité. Ces fauchages, enfin, ont eu lieu avant la réunion du Congrès à Versailles qui a introduit la Charte de l'environnement, c'est-à-dire le principe de précaution, dans le bloc de constitutionnalité.

Je l'ai dit : les délinquants ne sont pas du côté que l'on croit. Les vrais délinquants écologiques, ceux qui auraient dû être condamnés, ce ne sont pas les faucheurs mais ceux qui ont pris le risque de porter atteinte à ce qui est notre patrimoine commun, l'environnement ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vous vous apitoyez sur l'argent qui a été dépensé et les gendarmes qu'il a fallu envoyer pour protéger les cultures, mais c'est bien qu'il y avait un problème ! Et pouvez-vous me dire ce qu'a coûté hier, en effectifs policiers, la défense de la flamme de la honte ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Prendre le risque de cultiver des OGM en rendant nécessaire la présence d'un gendarme devant chaque pied de maïs, c'est ça qui pose un problème démocratique ! C'est la raison pour laquelle nous avons demandé un scrutin public. M. le ministre d'État et sa majorité d'ultras qui refusent de retirer les alinéas 5 et 6, alors qu'il s'agit d'une incongruité juridique et d'un affichage idéologique propres à attiser les divisions, les conflits et à la violence, sont les véritables provocateurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Germinal Peiro, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Le groupe socialiste, radical et citoyen votera ces amendements de suppression des alinéas 5 et 6 de l'article 4.

Avant cela, permettez-moi de vous renvoyer à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui ne peut que nous mettre d'accord. Il y est précisé à l'article 8 que « la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires ». Les peines introduites par ces alinéas sont-elles strictement et évidemment nécessaires ? La réponse est non, et je suppose que le Conseil constitutionnel en jugera ainsi. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pourquoi ne le sont-elles pas ? Parce le code pénal sanctionne déjà la destruction du bien d'autrui.

Évoquons également la question de la gradation des peines, parfaitement développée par Delphine Batho. Qui osera quitter cet hémicycle en ayant voté un texte duquel résulteront des peines plus importantes pour la destruction d'un champ d'OGM que pour celle d'un champ d'agriculture biologique ou conventionnelle ? Qui peut vouloir défendre une telle idée ? Que dira-t-on demain, dans notre pays, si l'on instaure une peine plus grave pour la destruction des OGM que pour celle des produits de l'agriculture biologique ou conventionnelle. Cela ne tient pas debout !

Plusieurs collègues ont enfin parlé de délit d'opinion. Certains pays répriment sévèrement ce genre de délits et il n'est pas besoin de remonter aux heures les plus sombres de notre histoire pour trouver dans notre propre pays une époque où le délit d'opinion était caractérisé et très durement sanctionné. Or je n'arrive pas à imaginer, mes chers collègues, qu'aucun d'entre nous, qui sommes tous des républicains et des démocrates, veuille le réintroduire dans notre droit. Comme l'a dit Jean-Pierre Brard, la société n'a pas à se venger. Elle doit analyser, comprendre et anticiper les mouvements sociaux, voire les rectifier.

Les sénateurs n'ont, selon moi, pas souhaité un texte équilibré. En conservant les alinéas 5 et 6, nous voterons un texte orienté, un texte pro-OGM, et je ne peux croire que c'est ce que veut la majorité de cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Christian Jacob, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

M. Mamère a qualifié de « débile » la position de la majorité et du Gouvernement, tandis que Mme Batho parlait à propos de ces alinéas d'un « os à ronger », puis de « cueillette » ou d'actes « militants » à propos des fauchages. Mais de quoi parle-t-on exactement ? De gens qui détruisent des centres de recherche en plein champ !

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Et que font vos copains de la FNSEA quand il saccagent le bureau d'un ministre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Cela n'a rien à voir avec des champs de betteraves ou de blé ordinaire. Nous parlons de destruction de centres de recherche ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Nous sommes face à des individus qui pénètrent dans une propriété privée et la saccagent, en exerçant des pressions physiques et morales insupportables sur ses propriétaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Monsieur Mamère, lorsque vous demandez la suppression des alinéas 5 et 6, vous manquez de courage : ayez l'honnêteté d'avouer que c'est votre propre amnistie que vous voulez obtenir par cette suppression : vous êtes indigne, monsieur Mamère, indigne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Vives protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Je demanderai la parole pour un fait personnel, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

J'en prends note.

Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur les amendements identiques nos 283 , 296 et 448 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 170

Nombre de suffrages exprimés 169

Majorité absolue 85

Pour l'adoption 65

Contre 104

Les amendements nos 283 , 296 et 448 ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Noël Mamère, pour un fait personnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Je ne peux pas accepter les propos outrageants que vient de proférer M. Jacob à mon endroit. J'ai déjà expliqué que je n'ai pas demandé l'application de l'immunité parlementaire, qui aurait pu me protéger, et que je ne demanderais jamais l'amnistie en tant que législateur.

Vous, la majorité, ne venez pas prétendre que les alinéas 5 et 6, en instituant un délit particulier : le délit de fauchage d'OGM, ne constituent pas une provocation !

Vous, la majorité, en refusant de voter leur suppression, venez de révéler votre vrai visage. Oui, M. Le Grand, votre collègue du Sénat, avait bien raison : vous agissez sous influence !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)

Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma