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Séance en hémicycle du 21 octobre 2008 à 21h45

La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion commune du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 (nos 1128, 1155), après déclaration d'urgence, et du projet de loi de finances pour 2009 (nos 1127, 1198).

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Cet après-midi, l'Assemblée a continué d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale commune.

La parole est à M. Jean Launay.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Monsieur le président, madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, je l'ai dit hier dans le cadre du débat sur les prélèvements obligatoires, la fiscalité environnementale de notre pays est en retrait par rapport à celle des autres pays de l'Union européenne et la France pourrait avoir davantage recours à cet outil pour réussir sa mutation écologique.

Dès lors, deux questions se posent à nous aujourd'hui.

En premier lieu, le projet de loi de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement que nous avons examiné la semaine dernière fixe-t-il, dans ses objectifs globaux, des mesures de nature à accroître le poids de la fiscalité environnementale et les effets de celle-ci pour une évolution notoire de nos comportements ?

En second lieu, le présent projet de loi de finances pour 2009 comprend-il des axes volontaristes visant à orienter à la hausse la fiscalité écologique, dès lors que l'on considère qu'elle peut constituer un outil levier pour l'amélioration de notre environnement et l'atteinte des objectifs environnementaux tels que le bon état écologique de l'eau, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le recours accentué aux énergies renouvelables ?

S'agissant des effets du Grenelle dans la fiscalité environnementale, madame la ministre, monsieur le ministre, à l'occasion de la déclaration du Gouvernement sur le Grenelle de l'environnement, mon collègue Philippe Martin rappelait, le 3 octobre 2007, une double condition quant à la mise en oeuvre d'une « fiscalité verte » : d'une part, que sa recette soit entièrement et exclusivement dédiée au développement durable, au lieu de servir à maquiller un plan de rigueur ; d'autre part, qu'elle soit redistributive, autrement dit qu'elle ne pénalise ni les ménages modestes ni les territoires fragiles.

Au même titre que la question du pouvoir d'achat, la question environnementale est désormais l'une des préoccupations essentielles des Français.

La mise en oeuvre d'actions concertées de la communauté européenne ou internationale est possible : j'évoque là le plan climat-énergie de l'Union européenne pour lutter contre l'effet de serre. Mais l'action des pouvoirs publics à l'échelon national reste légitime et efficace, d'autant que les inégalités sociales recoupent les inégalités environnementales, ce qui justifie une évaluation des différents outils dont ils disposent pour protéger le cadre de vie des citoyens.

La fiscalité est l'un de ces outils de l'État, elle offre de nombreux avantages, même si la maîtrise des problèmes environnementaux passe souvent par une utilisation conjointe et souple de plusieurs instruments.

Les dérèglements climatiques ont sensibilisé nos concitoyens aux travaux du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, qui ont été repris par les médias.

Chacun, soucieux de l'avenir de ses enfants et des générations futures, s'interroge sur nos comportements collectifs et sur ses propres comportements.

Le développement durable suppose une modification des comportements, ce qui relève, à la fois, des sphères sociale et culturelle qui en constituent son troisième pilier.

Cependant, notre pays a largement privilégié l'usage de la réglementation ; sa fiscalité ne tient pas suffisamment compte de ses effets éventuels sur les écosystèmes.

L'examen du projet de loi de programme du Grenelle de l'environnement, dans notre hémicycle, la semaine dernière, aurait pu être l'occasion de mettre en oeuvre une fiscalité environnementale de nature à faire évoluer nos comportements de manière significative. Cela n'a pas été le cas, et je le regrette pour ma part, même si, collectivement, par notre vote positif de cet après-midi, nous avons voulu, d'une part, acter du bon travail parlementaire au cours de cette première lecture, et, d'autre part, vous dire que nous attendons fermement les mesures concrètes du texte Grenelle II.

J'en viens à la deuxième question, celle de la place et du poids de la fiscalité écologique dans le projet de loi de finances pour 2009.

Madame la ministre, monsieur le ministre, le maniement allègre du concept de développement durable dans l'exposé des motifs de votre projet de loi ne trompera personne sur le fond.

L'affichage de la mobilisation de « moyens importants » sur le plan budgétaire, à hauteur de 1,2 milliard d'euros sur la période 2009-2011, dont 0,5 milliard de crédits supplémentaires spécifiquement affectés aux priorités du Grenelle, c'est finalement peu.

La mise en place du prêt à taux zéro pour financer des travaux de rénovation thermique dans les logements, ce n'est rien de bien nouveau.

L'affichage du renforcement de l'engagement de l'État dans l'intervention de ses opérateurs que sont l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, et l'AFITF, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, prête à sourire quand on sait dans quel état de précarité vous avez mis l'opérateur premier cité et les choix multipliés du tout-routier que vous faites en permanence – abaissement du tarif de la taxe à l'essieu –, alliés au laisser-faire total quand la SNCF se désengage du fret ferroviaire, au prétexte, malheureusement réel, de ses mauvais résultats dans ce secteur.

Plus fort encore, invoquer la croissance et l'équité du système fiscal, évidemment mis à la sauce du développement durable dans le contexte de la crise financière, confine à la désinformation !

Je ne reviens pas sur ce qui a déjà été explicité par de nombreux collègues sur l'hypothèse de croissance de 1 % retenue pour 2009. Fidèles à la méthode Coué, vous persistez dans vos analyses fausses, dans une surévaluation systématique de vos prévisions de recettes, alors même que l'année 2008 en cours devrait vous inciter à plus de prudence et que la crise financière débouchera, inévitablement, sur une crise économique qui renforcera la précarité, les tensions sur le pouvoir d'achat et les difficultés sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Notre rapporteur général, Gilles Carrez, ne disait-il pas lui-même dans la séance de la commission des finances du 15 octobre dernier, consacrée à l'examen du projet de loi de finances pour 2009 : « On sait tous que les comptes 2010 seront encore plus difficiles qu'en 2009 » ?

Madame la ministre, monsieur le ministre, ne nous dites que nous nous réjouissons de cette situation, et ne laissez pas croire que nous nous réjouissons de ces revers et de ces échecs ! Ce n'est pas le cas. Et si nous dénonçons vos erreurs d'analyse, c'est bel et bien parce que nous pensons qu'elles pèseront négativement sur la marche de notre pays et sur la situation personnelle du plus grand nombre de nos concitoyens,

Votre péché originel fut le texte TEPA de juillet 2007 et le paquet fiscal de 15 milliards d'euros en année pleine qui vous a privés d'utiles marges de manoeuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Il a appauvri notre pays pour enrichir quelques-uns de vos amis. Il a porté le « travailler plus » à travers les heures supplémentaires, mais en même temps, il a structurellement relancé le chômage durable.

Mes chers collègues, après le texte Grenelle I, et dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009, je voudrais développer la thèse qui étaie la nécessité de mettre en place une vraie fiscalité environnementale.

Le passage au nouveau siècle et au nouveau millénaire marque une double crise.

La première est la crise énergétique, qui témoigne d'un excès structurel de la demande d'énergie sur l'offre d'énergie. La montée du prix du baril de pétrole passant, en peu d'années, d'environ 30 dollars à plus de 100 dollars – même s'il est un peu redescendu aujourd'hui –, en est la traduction la plus marquante, quelles que soient les variations dues aux comportements spéculatifs. Nous avons atteint – ou nous allons atteindre rapidement – un pic de production, au-delà duquel nos économies ne pourront plus fonctionner, comme elles le font depuis plus d'un siècle, sur la base de ressources énergétiques d'origine fossile, abondantes et bon marché.

La seconde est la crise climatique. Elle témoigne d'un excès de consommation des énergies d'origine fossile –pétrole, charbon, gaz – au regard de la capacité de la haute atmosphère à digérer cet excès de carbone qui lui est transmis. La concentration de CO2 dans l'atmosphère s'accroît et l'évolution de sa concentration est de plus en plus rapide ; la température s'est élevée de 0,3° C par décennie au cours du XXe siècle.

Préparer l'après-pétrole, lutter contre le changement climatique, voilà bien un enjeu structurel majeur pour notre XXIe siècle. Il s'agit donc de modifier en profondeur notre mode de développement et, avec lui, nos modes de production et de consommation.

Cette double crise nous pousse à trouver remède : nous devons apprendre à vivre, à produire, à consommer en étant plus sobre dans l'usage des énergies d'origine fossile. Cette sobriété permettra de mieux maîtriser l'excès de la demande sur l'offre ; elle permettra de respecter l'objectif international d'éviter que la température moyenne sur la Terre ne s'élève de plus de 2° C d'ici à 2050.

Pour atteindre cet objectif, il faut diviser par 2 la consommation mondiale d'énergie d'origine fossile ; pour les pays développés, principaux consommateurs historiques et principaux consommateurs par habitant, cette réduction doit être de 4. C'est ce que l'on appelle le facteur 4.

Il faut toujours rappeler que cette double crise touche d'abord, dans les pays en développement comme dans les pays développés, les couches les plus pauvres et les plus défavorisées de la population. Ce sont eux qui sont, dans leur pouvoir d'achat, les premiers touchés par cette hausse des prix de l'énergie ; ce sont eux qui sont, dans leur capacité à survivre, les premiers touchés par la crise climatique – réfugiés climatiques en raison de la montée des eaux, réduction des terres arables disponibles, raréfaction de la ressource en eau.

C'est pour cela que le traitement de l'urgence climatique et celui de l'urgence sociale vont de pair. Si rien n'est fait, c'est un risque de 5 à 10 % de perte moyenne du PIB mondial qui est probable au cours du siècle prochain, selon le rapport Stern. En sens inverse, le coût de stabilisation de la concentration du CO2dans l'atmosphère est sans doute de l'ordre de 1 % du PIB mondial ; et il s'agit là, en réalité, d'un coût de redéploiement d'une partie de notre richesse, en faveur de technologies plus propres, souvent fortement créatrices d'emplois et particulièrement favorables au développement de la recherche et de la connaissance.

Les pistes pour stabiliser la concentration du CO2dans l'atmosphère et pour réduire notre dépendance au carbone sont bien connues. Leur mise en oeuvre ne dépend que de décisions politiques. Le budget fait partie de ces décisions politiques.

Plus précisément, leur mise en oeuvre dépend de quatre décisions politiques.

Premièrement, il faut réduire la demande en biens et services qui rejettent beaucoup d'émissions. L'énergie qui pollue le moins, c'est celle que l'on ne consomme pas : des investissements massifs dans le secteur de l'habitat et dans celui des transports, une meilleure conception de nos politiques d'urbanisme et d'aménagement du territoire, une autre politique agricole conduiraient à des économies massives de consommation de produits carbonés.

Deuxième décision politique : accroître l'efficacité énergétique. Le XXe siècle a été celui du gaspillage. Le XXIe siècle devra être celui de l'efficacité. Le rendement global du système énergétique français, c'est-à-dire le rapport entre l'énergie disponible pour le consommateur final et l'énergie primaire produite, est de 35 % : les deux-tiers de l'énergie produite sont ainsi gaspillés et perdus, le plus souvent en chaleur.

Troisième décision politique : favoriser le développement des énergies renouvelables. Il s'agit, dès 2020, de produire au moins 20 % de notre énergie à partir de sources renouvelables. C'est un engagement « contraignant » qui a été pris en mars 2007 par le Conseil européen des chefs d'État et de gouvernement.

Quatrième décision politique : donner aux agents économiques, qu'il s'agisse des entreprises ou des ménages, les signaux adéquats, pour qu'ils modifient, dans la durée et en profondeur, leurs comportements économiques.

Une des difficultés de la lutte contre les pollutions d'origine humaine ou contre les émissions de gaz à effet de serre est que, dans la plupart des cas, le pollueur ou le gros émetteur de gaz à effet de serre ne paie ni le coût de la prévention ni celui de la réparation de la pollution ou du réchauffement qu'il provoque.

Il laisse cette charge à la société, pour laquelle le coût est d'ailleurs le plus souvent masqué etou différé. C'est particulièrement le cas en matière d'émission de gaz à effet de serre : les effets sur le changement climatique sont à la fois lointains dans le temps et diffus dans leurs conséquences. On ne peut, a posteriori, sanctionner l'origine de l'émission. Par ailleurs, le coût collectif de la réparation est, dans bien des cas, plus élevé que la charge initiale, si celle-ci avait été supportée directement par l'émetteur : les dégâts du changement climatique sont incommensurablement plus élevés que le coût de l'évitement des émissions de gaz à effet de serre.

J'évoque à nouveau le rapport Stern, du nom de cet économiste britannique, qui avait été l'auteur, en 2006, d'un rapport non contesté sur le coût du changement climatique. Il évalue à 5 à 10 % du PIB mondial l'impact négatif d'un réchauffement moyen de l'ordre de 2 °C, et estime que le coût de la prévention serait limité à 1 % du PIB annuel. Et encore, le coût de cette prévention favoriserait à la fois la création de centaines de milliers d'emplois nouveaux – dans l'isolation thermique des bâtiments, par exemple – et le développement marqué de l'effort de recherche vers une meilleure efficacité énergétique et sur les énergies renouvelables.

Plus précoce sera notre action dans ce domaine, moins douloureuse elle sera ; plus tardive sera notre action, plus brutale en sera la conséquence pour tous.

Faisons ensemble de la préparation de l'après-pétrole et de la lutte contre le changement climatique une chance pour un nouveau mode de développement, et non un drame qu'il faudrait subir.

Faisons ensemble de la fiscalité écologique un instrument puissant et utile, manions-la de façon appropriée. C'est le signe qu'avec quelques collègues du groupe, nous vous invitons à donner dans le projet de loi de finances pour 2009. Après l'article 9, nous proposerons un amendement instituant la taxe carbone.

Car la fiscalité écologique a pour objectif « d'internaliser » les coûts environnementaux d'un produit ou d'un service, c'est-à-dire d'établir un prix pour ledit produit ou service, qui intègre la charge, présente ou différée, de la pollution ou de l'émission nocive, jusque-là, supportée par la collectivité. La fiscalité écologique conduit ainsi à faire supporter à l'émetteur à la fois le coût de la prévention et celui de la réparation. La fiscalité écologique est l'expression du principe pollueur-payeur. Elle a une double vertu : en augmentant le prix de la pollution, elle décourage l'émetteur de poursuivre ses activités polluantes ; par ailleurs, elle encourage la mise en oeuvre de techniques ou de procédés alternatifs et moins polluants, en en réduisant le prix relatif.

C'est ainsi que la taxe carbone, en fixant une tendance lourde au prix des produits carbonés, favorise la recherche pour améliorer notre efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables. La taxe carbone serait un puissant signal adressé à tous.

Cette double vertu de la fiscalité écologique et de la taxe carbone en particulier fonctionne dans les deux sens. Elle peut pénaliser les usages néfastes à l'environnement ; mais elle peut aussi, par des baisses appropriées, favoriser l'usage de produits plus vertueux – baisse de la TVA sur le recyclage des déchets, sur les produits propres, sur les énergies renouvelables, sur les travaux d'isolation thermique.

Ainsi, la fiscalité écologique, c'est non pas plus d'impôt, mais un impôt perçu différemment. Je regrette que, cet après-midi, lors de la réunion de la commission des finances, M. le rapporteur général ait balayé cet amendement avec le faible argument d'une charge nouvelle pour les entreprises. Si cet impôt était perçu différemment, les pollutions et la consommation de ressources non renouvelables seraient taxées alors que la consommation de produits propres serait favorisée.

Enfin, parce que le renchérissement du prix du pétrole ne pèse pas sur tous de la même façon – riches ou modestes, ruraux ou urbains disposant de transports collectifs –, la fiscalité écologique doit être progressive et accompagnée de mesures ciblées au plan social.

C'est pourquoi, pour répondre à cette double crise – crise énergétique, crise climatique – et pour traiter cette double urgence – urgence sociale et urgence climatique –, il convient désormais de passer à l'acte.

Mes chers collègues, madame la ministre, monsieur le ministre, parler d'écologie, de l'état de notre environnement n'est pas réservé aux riches. Mon plaidoyer pour la mise en oeuvre d'une fiscalité environnementale forte et volontariste repose sur la conviction, de plus en plus partagée, j'en suis convaincu, du lien fort entre l'urgence sociale et l'urgence écologique.

Parce que le renchérissement du prix du pétrole et son cortège de conséquences financières ne pèsent pas sur tous de la même façon, la fiscalité environnementale doit être progressive et accompagnée de mesures ciblées au plan social.

La taxe carbone, que nous vous proposons de mettre en application dès ce projet de loi de finances pour 2009, sera progressive ; outre qu'elle abondera à hauteur de un milliard d'euros un budget général difficile, nous proposons aussi que 50 % du produit de cette taxe soit affecté à un fonds d'accompagnement à la mutation énergétique, tourné à la fois vers le logement social et le développement des transports collectifs.

Voilà un sujet de fond, un sujet d'aujourd'hui, et non pas de demain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, si la conviction absolue de détenir la vérité révélée et l'inflexibilité idéologique étaient la marque de l'excellence en politique, je n'aurais sans doute pas tari d'éloges à l'égard de ce gouvernement et du budget qu'il nous présente pour l'année 2009.

Hélas ! je veux encore penser qu'il reste éminemment préférable pour notre pays et pour son avenir de croire au réalisme et au sens des responsabilités, surtout en ces temps de tourmente financière mondiale qui ont achevé de miner une confiance que les Français nous mégotent et singulièrement ne vous accordent plus guère depuis déjà plus d'un an.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Il nous est donné d'examiner un projet de loi de finances dont les prévisions de maigre croissance ne tiennent plus – vous l'avez enfin admis hier, madame la ministre, –, dont les anticipations de déficit devront être réévaluées et dont l'endettement apparaît plus que jamais hors de contrôle.

Nous pourrions, tous, sur nos bancs – et peut-être même au-delà, car nous savons que de nombreux collègues de la majorité dissimulent de moins en moins leur malaise –, vous accabler pour tous les mauvais choix économiques accumulés depuis mai 2007, à commencer par ce paquet fiscal que les Français traînent comme un boulet.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Mais il n'est presque plus l'heure. Car, bien que sous-jacente depuis au moins deux ans, la crise que vous avez voulu, un temps, ignorer – et même nier contre les évidences ! – est aujourd'hui profonde et mondiale. Et elle appelle des réponses tout aussi profondes et mondiales, car le capitalisme vient de nous démontrer que son avatar et son spectre ultrafinanciarisé et transnational, celui qui a prospéré sans contrôle, sans moral et sans limite, ces dernières années, est tout aussi exubérant dans ses phases de formidable expansion qu'il ne l'est dans ses phases de reflux.

Nous avons cru que ces réponses profondes et mondiales sortiraient des multiples réunions internationales de ces dernières semaines, au sein desquelles le Président de la République a joué un rôle que je qualifie de majeur et qu'il convient de saluer. Mais force est de reconnaître que, face à la crise financière et, surtout, face à la récession qui est déjà là, votre réponse – comme celle des États-Unis et des autres pays de l'Union européenne – a été, certes massive, mais exclusivement bancaire. Or, la situation dans laquelle nous nous trouvons n'appelle pas uniquement une réponse bancaire. Nous disons : « Les banques d'accord, mais les citoyens d'abord ! »

Vous n'hésitez pas, madame la ministre, sans abandonner votre grille idéologique et sans faire la moindre concession à l'opposition, à réclamer l'unité nationale autour d'une politique contestable et injuste qui frappe les Français dans leur vie quotidienne et au portefeuille.

Pourtant, sans même parler de façon grandiloquente d'unité nationale, s'il est un moment où l'opposition peut précisément faire des propositions qui vont dans le sens de l'intérêt général, c'est bien dans le cadre de ce débat sur le projet de loi de finances. Mais encore faut-il qu'elle soit entendue – et c'est trop rare dans cet hémicycle, convenons-en. Pour autant, en dépit de votre surdité persistante, je vais tenter humblement, comme le reste du groupe socialiste, radical et citoyen, d'éclairer et peut-être de baliser le chemin de ce gouvernement, qui en a bien besoin. D'abord pour traiter la crise, mais, ensuite et surtout, pour que nous sortions au plus vite de l'ornière de la récession.

La crise est internationale, chacun en convient. Pourtant, même si elles ont été coordonnées, les réponses des États ont été principalement nationales. Nous avons donc pu mesurer, durant ces terribles semaines, combien une gouvernance économique européenne et, plus largement mondiale, nous faisait défaut.

D'abord, parce que notre Banque centrale européenne a, une fois de plus, démontré combien ses statuts étaient inadaptés aux exigences d'une économie tournée vers la croissance et l'emploi. Sa préoccupation exclusive et quasi obsessionnelle de contrôle de l'inflation, qui devait rester en deçà de 2 %, est d'autant plus inadéquate que le calcul même de l'indicateur d'inflation doit être révisé, pour mieux rendre compte de la part de plus en plus prépondérante de certains biens et services dans le budget des ménages et inclure le prix des actifs financiers, immobiliers, fonciers, que sais-je encore. Les statuts de la BCE doivent donc être réécrits pour correspondre à l'ambition de croissance, de soutien de l'emploi et de développement des pays de l'Union européenne. La politique doit reprendre la main. Il faut faire de l'économie politique.

Au niveau mondial, je fais cette proposition, que je crois audacieuse, de fusionner le G8 et le G5 des pays émergents, mieux encore le G20 avec le Conseil de sécurité des Nations unies, pour que la gouvernance politique de l'économie mondiale se voie ainsi consacrée. De même, les institutions économiques internationales, comme le FMl et la Banque mondiale, devraient être placées sous la tutelle de l'Assemblée générale des Nations unies. Ce FMI, qui, durant des années, pour de si nombreux pays du Sud qui ont connu des crises économiques majeures, préconisait des remèdes ultralibéraux, diamétralement opposés à ceux que le monde occidental a adoptés pour juguler sa propre crise, en appelant les puissances publiques à la rescousse.

L'élection dans deux semaines d'un nouveau président américain peut justement créer les conditions d'une remise à plat complète de la gouvernance économique mondiale. Et la France doit saisir cette occasion pour être une force de proposition audacieuse.

La crise nous a également montré combien les ratios prudentiels des banques et des sociétés d'assurance ont été défaillants, tout comme les précédentes normes avaient montré des failles sévères lors des grandes faillites d'Enron ou de WorldCom, au début des années 2000. Il faut donc revoir la notion de juste valeur, les normes IFRS, en remettant Bâle II et Solvency II sur le métier. Ces nouvelles normes nous ont conduits à abandonner des pans essentiels de souveraineté économique à l'IASB, basé, comme vous le savez, à Londres.

Sans ces profondes réformes des mécanismes de régulation de l'économie mondiale, les politiques nationales ou européennes que nous menons ne nous mettront jamais à l'abri de crises systémiques pareilles à celle que nous sommes en train de traverser.

Mais, si les politiques nationales sont elles-mêmes de mauvaises politiques, non seulement nous allons droit dans le mur, mais nous y allons en klaxonnant. Et c'est, hélas, ce qui nous menace si vous persistez dans vos choix budgétaires.

La récession économique est en effet bien là. Si vous la contestez encore en d'étranges circonlocutions, les Français, eux, la vivent, tous les jours. Le pouvoir d'achat baisse partout et par divers mécanismes, avec la non- indexation de la PPE ; avec le refus de conditionner les allégements de charges à des accords salariaux ou encore avec la frénésie fiscale qui vous a quasiment conduit à créer un impôt par mois depuis l'élection du chef de l'État.

La production baisse, l'investissement privé baisse et, plus grave encore, l'investissement public baisse, et singulièrement celui assuré par les collectivités locales, que vous martyrisez toujours davantage. Or, ces collectivités représentent plus des trois quarts de l'investissement public en France.

Sur les collectivités locales, justement, le Gouvernement poursuit son offensive de réduction de la sphère publique et du service public. Avec des dotations en baisse et désindexées, on passe d'une logique contractuelle, assise sur des réalités économiques – inflation, PIB –, à une logique de contribution des collectivités locales à l'effort de guerre contre la dépense publique et pour la résorption des déficits. Les conséquences sur le niveau des investissements publics, et donc sur la croissance, seront considérables à terme.

L'emploi baisse également. Vous annoncez un nouveau volet de contrat aidé, mais les crédits en faveur de ces mêmes contrats subissent une glaciation budgétaire – près de 1,8 milliard d'euros d'ici à 2011. Enfin, le solde commercial s'effondre.

Bref, tous les moteurs internes de notre économie sont éteints. Les perspectives sont d'autant plus inquiétantes que vous êtes, patiemment, en train de démembrer les moyens d'intervention de l'État, aveuglés que vous êtes par une foi particulièrement incompréhensible dans le tout-marché.

Une foi qui vous conduit à vouloir privatiser La Poste, alors que rien ne le justifie et que tout, au contraire, plaide pour un maintien de ce service public fort, au rôle essentiel dans l'aménagement solidaire et durable de notre territoire.

Une foi qui vous conduit à supprimer par dizaines de milliers les postes de fonctionnaires.

Une foi qui a progressivement tué toute idée de politique industrielle dans ce pays depuis 2002.

Une même foi qui vous faisait, à l'UMP, il y a à peine plus d'un an, défendre le développement en France des prêts hypothécaires à risque, qui ont justement déclenché la crise dite des subprimes aux États-Unis.

Oui, madame la ministre, c'est vous qui avez baissé la garde de la France. C'est vous qui menez une politique à la fois récessive et curieusement laxiste. Une politique qui, aujourd'hui, menace clairement d'aggraver la crise en enlevant à l'État les moyens d'intervenir.

Pour tout dire, en lisant votre projet de budget, il est impossible d'y déceler que la France est en récession. En effet, vous avez construit ce budget tandis que vous persistiez à nier les risques de récession et vous avez refusé de revoir votre copie.

Le groupe socialiste vous a présenté un ensemble de propositions précises et réalistes pour modifier le projet de loi de finances, propositions que nous reprendrons tout au long de ce débat. Il conviendrait de reprendre des hypothèses plus crédibles pour bâtir ce budget dès maintenant et ne pas attendre novembre ou décembre ; de rompre avec le « tout-libéral » qui a conduit à la crise, sans pour autant sombrer dans l'étatisme ; de présenter un budget de soutien à l'activité par une relance keynésienne ciblée – ce n'est pas un gros mot –, peu importatrice de biens et donnant la priorité notamment au logement, au renouvellement urbain ; d'engager une politique sociale plus protectrice pour les citoyens victimes de la crise ; de lancer une grande initiative européenne, coordonnée, un emprunt européen pour aider l'investissement ; d'établir de nouvelles règles de régulation, nationale, européenne et mondiale.

Je ne conclurai pas sans vous dire quelques mots des outre-mers, ces territoires où plus, qu'ailleurs dans l'Hexagone, les désengagements de l'État sont vécus plus durement. Votre budget devait ainsi traduire vos engagements financiers pour le Grenelle de l'environnement. Hélas ! pour les outre-mers, représentant 90 % de la biodiversité française, la croissance verte attendra.

L'article 39 du Grenelle prévoit la mise en oeuvre du « plan séisme » aux Antilles et d'une politique globale de prévention des risques naturels majeurs outre-mer d'ici à 2015. Un Premier ministre – M. de Villepin – avait déjà adopté un plan et le chiffre de 370 millions d'euros avait été retenu. Or votre projet de budget pour l'outre-mer ne prévoit que 2,4 millions. Je rappelle que nous avons connu deux séismes très importants et que la Martinique n'a été sauvée que parce que l'épicentre était situé à cent soixante-douze kilomètres de profondeur. L'île de Terre-de-Bas a, elle, été détruite en 2004 par un séisme de 6,3 sur l'échelle de Richter.

Pour le cyclone Omar, les personnels de Météo France, qui étaient en grève – l'État licenciant 400 personnes – ont dû reprendre du service. L'État refuse de financer des houlographes et des marégraphes que la Guadeloupe et la Martinique sont obligées de prendre à leur charge.

En ce qui concerne la gestion des déchets, 300 millions d'euros sont nécessaires pour la valorisation biologique des déchets, pour acquérir un incinérateur et pour la collecte sélective. Sur ces 300 millions, l'État n'engage que 8 millions. S'agissant de la gestion des eaux usées et leur traitement, sur 300 millions, l'État ne verse rien.

Les exemples de cet acabit sont nombreux pour nos territoires, surtout à l'examen de la deuxième partie et des articles non rattachés de ce projet de loi de finances. Ceux-ci démontrent que ce plan de rigueur qui ne veut pas dire son nom touchera de plein fouet les départements d'outre-mer. Entre le plafonnement des niches fiscales – que nous comprenons – prévu à l'article 43 et la réforme des exonérations de charge outre-mer prévue à l'article 65, ce sont tous les dispositifs incitatifs aux investissements dans les outre-mers qui vont disparaître avec le risque, clamé par tous les socioprofessionnels ultramarins, d'esquinter nos économies.

Madame la ministre, il est urgent et impératif de se ressaisir…

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

…et d'abandonner les dogmes d'un autre temps qui, jusqu ici, n'ont fait que nous rendre plus vulnérables aux affres de l'environnement économique international. Nous vous proposons de nous atteler ensemble à remettre à plat ce budget inadapté aux défis auxquels nous devons faire face. Nous vous proposons de sortir de l'incantatoire en matière d'union nationale pour qu'un vrai travail parlementaire bipartisan commence à réparer la crise que la cupidité et l'incompétence crasses de certains financiers, d'une part, et vos mauvais choix économiques, d'autre part, nous ont infligée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2009 intervient dans un contexte financier extrêmement grave et une conjoncture mondiale exceptionnellement difficile. La crise financière menace désormais l'économie réelle. Dans ces circonstances, il était important d'agir et de réagir rapidement.

Ce projet de loi subit la crise, mais il doit aussi en atténuer les impacts sur l'économie. C'est tout l'enjeu du débat qui nous rassemble. Ensemble, nous pouvons et nous devons démontrer que la politique a encore un sens.

Cette crise marque, en effet, le véritable retour du politique. L'accord historique du sommet de l'Élysée du l2 octobre dernier est le fruit d'un véritable volontarisme politique. Ce sommet a prouvé que l'Europe politique pouvait exister et qu'elle était capable d'apporter une réponse rapide et concrète aux problèmes que nous rencontrons, pour autant qu'elle ait un chef à sa mesure.

Le politique était également de retour à New York, le week-end dernier, et nous pouvons nous réjouir que le chef de l'État ait réussi à convaincre son homologue américain d'organiser des sommets internationaux sous l'égide de l'ONU afin de poursuivre les réflexions sur la refondation de notre économie au plan mondial.

Enfin, le politique était de retour, ce matin à Strasbourg, lorsque le chef de l'État a, devant le Parlement européen, appelé de ses voeux la création d'un Gouvernement économique de la zone euro afin de pouvoir disposer d'interlocuteurs identifiés.

L'idée d'instaurer un pilotage politique de la zone euro – une gouvernance économique – face à la Banque centrale européenne va dans le sens d'une évolution indispensable des rapports entre l'économie et le politique et permettra de ne pas retomber dans les erreurs et les errements du passé.

Le signe important envoyé, la semaine dernière, par les principales banques centrales de la planète, lorsqu'elles ont diminué d'un demi-point leurs taux d'intérêt de manière coordonnée a déjà produit des effets positifs sur l'économie. Cela doit pouvoir se reproduire et la question du niveau des taux d'intérêt ne doit plus être taboue. Face à la crise, les dogmes doivent tomber !

Ce retour du politique, nous le devons assurément au président Sarkozy, qui, fidèle à sa méthode, a su démontrer, une nouvelle fois, sa capacité de mobilisation et sa maîtrise des situations de crise.

Face à ce constat, le réalisme, le courage et la sincérité s'imposaient dans l'élaboration du budget pour 2009 ; vous y avez répondu, madame la ministre, monsieur le ministre. Le principe de la stabilisation des dépenses de l'État figure de manière claire et explicite dans ce projet de loi de finances. En effet, la hausse des dépenses de l'État, fixée à 2 % correspond strictement à la prévision d'inflation retenue dans ce texte alors même que les charges de la dette et les prélèvements sur recettes au profit de l'Union européenne augmentent. À cet égard, cette stabilisation des dépenses doit beaucoup à la révision générale des politiques publiques qui permettra d'accomplir un effort sans précédent que je veux saluer ici, et de dégager des économies et des gains de productivité substantiels pour l'État.

Sur le fond, il me semble évident que la crise internationale conforte l'idée que l'adoption de réformes structurelles doit, plus que jamais, se poursuivre et s'amplifier. Dans ce contexte difficile, le Gouvernement aurait pu décider d'ajourner les réformes nécessaires à notre pays, d'occulter la question du financement des réformes importantes que nous avons votées ou de renoncer à changer un système qui a échoué. Tel n'a pas été le choix du Président de la République, du Premier ministre et des ministres de l'économie et du budget, et je tiens à saluer cette action et ce courage.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Ce budget consacre la revalorisation du travail et les engagements pris en matière écologique. Par ailleurs, les dispositions contenues dans le projet de loi pluriannuel soutiennent la compétitivité de l'économie française, notamment par la suppression de l'impôt forfaitaire annuelle en trois ans. Cette disposition complétant celles adoptées dans la loi TEPA et dans la loi de modernisation de l'économie va dans le sens d'une meilleure équité fiscale et d'une moralisation de l'économie trop longtemps différée.

Vous l'aurez compris, je suis favorable à ce projet de loi de finances, qui tient compte de la conjoncture et ne renonce pas à l'ambition de redresser notre pays. C'est pourquoi je le voterai sans hésiter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Monsieur le ministre, mon propos portera essentiellement sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, puisque vous êtes aussi le ministre en charge des comptes sociaux. Au regard des chiffres annoncés, le retour à l'équilibre des comptes sociaux, promis pour 2007, par le plan Douste-Blazy et Bertrand, et, pour 2011, par l'actuel gouvernement, n'est plus à l'ordre du jour pour cette législature. En 2009, toutes les branches seront déficitaires, à l'exception de celle des accidents du travail, d'ailleurs tout juste en équilibre. Nous nous retrouvons donc dans la situation laissée par Édouard Balladur et Alain Juppé, avec l'explosion des déficits sociaux et la reprise du chômage.

Avec 9 milliards de déficit prévus pour 2008, et vraisemblablement au moins autant en 2009, …

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

…vous avez renoncé à atteindre l'objectif d'équilibre, équilibre que la gauche avait – il faut le rappeler – rétabli en 1999, 2000 et 2001.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Nous dépasserons, l'an prochain, le cap des 100 milliards de dette sociale cumulée, dont plus de 80 milliards imputables aux gestions de vos gouvernements successifs, depuis 2002.

La reprise par la caisse d'amortissement de la dette sociale – la CADES – de 27 milliards d'euros de dettes accumulées signifie que le remboursement définitif de cette dette est reporté à plus tard. Il s'agit d'une fuite en avant qui compromet l'avenir de la protection sociale solidaire et marque une vraie désinvolture vis-à-vis des futures générations correspondant à une sorte d'impôt sur les naissances pesant sur chaque nouveau-né qui aura à payer nos dettes de fonctionnement actuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Les perspectives énoncées par le pouvoir pour l'année 2009 sont en outre, hasardeuses. Le retournement désormais probable du marché du travail et la stagnation de l'emploi risquent, en effet, de réduire les recettes de la sécurité sociale, assises essentiellement sur l'emploi salarié. La faible augmentation de la masse salariale globale et du PIB annuel n'est pas réellement prise en compte dans les hypothèses économiques et sociales affichées. La sous-estimation du déficit, déjà pointée par un récent rapport de la Cour des comptes, se confirme. Au regard de telles annonces, nous ne pouvons qu'être inquiets pour l'année à venir, d'autant que, selon les premières études de l'INSEE, la masse salariale sera, en 2009, très inférieure à 3,5 %, se situant, dans le meilleur des cas, autour de 1 %. Nous allons voter un budget de la sécurité sociale en total déséquilibre. Si ce n'est pas du bricolage, cela y ressemble beaucoup !

Alors que les inégalités d'accès aux soins se creusent, que les franchises médicales contredisent toute politique de prévention et de santé publique, vous prenez des mesures sans aucun impact sur l'équilibre des comptes sociaux. Et ce n'est pas le projet de loi Hôpital, patients, santé et territoire qui aura le moindre effet sur la maîtrise médicale des dépenses de santé.

Dans le domaine des retraites, la situation est tout aussi inquiétante et signe le lourd échec de la réforme Fillon de 2003. Les comptes de l'assurance vieillesse sont passés de l'équilibre en 2003 à cinq milliards de déficit cette année. Le pouvoir d'achat des personnes retraitées diminuera en moyenne de plus d'un point par an, ce qui contredit tous les engagements pris lors de la campagne présidentielle.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Plus d'un million de retraités sont aujourd'hui en situation de pauvreté. Le taux d'activité des seniors stagne à 38 % depuis cinq ans, alors que le taux de remplacement des pensions diminue régulièrement pour les salariés qui parviennent progressivement à l'âge de la retraite en raison notamment de la généralisation des carrières professionnelles chaotiques, voire intermittentes, ainsi que des effets négatifs du décret Balladur de 1993 sur le nombre d'années de référence – les vingt-cinq meilleures années au lieu des dix dernières – qui réduisent lourdement le niveau des pensions. La volonté actuelle d'allonger la durée des cotisations est selon nous un contresens au moment où l'éviction du marché du travail des plus de cinquante-cinq ans reste importante, où les salariés les plus anciens sont les premières victimes de la recrudescence des plans sociaux.

Quant à l'augmentation des cotisations vieillesse de l'ordre de 0,3 %, elle évite au pouvoir de solliciter les revenus financiers. L'effort en direction des conjoints survivants, en dépit des annonces récentes, n'interviendra en réalité qu'en 2010 et pour un nombre très limité d'entre eux. Par ailleurs, la hausse du minimum vieillesse annoncé pour le 1er avril 2009 et fixée à 6,9 % ne permettra pas de tenir les engagements présidentiels sur la nécessité d'une progression à hauteur de 25 % en termes de pouvoir d'achat pour le minimum vieillesse.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

En dépit des annonces réitérées de votre gouvernement sur le retour à l'équilibre, les déficits persistent à un très haut niveau. Avec un ONDAM pluriannuel de 3,3 %, cela relève de la méthode Coué !

En raison d'une inflation fixée à 2 % minimum, cet affichage pourrait se traduire par une austérité salariale renforcée, en particulier dans le secteur hospitalier. La taxation des complémentaires santé paraît elle aussi très préoccupante ; elle s'inscrit, en outre, dans le développement d'une logique assurantielle qui tourne le dos à l'esprit de la sécurité sociale et réduit progressivement celle-ci à un rôle mineur. La présentation au Parlement du projet de loi Hôpital, patients, santé et territoire, censé restructuré notre système de santé, traduit l'incohérence de la politique gouvernementale.

Nous aurions naturellement préféré que ce texte puisse être voté avant le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Vous organisez le système après en avoir prévu le financement : il y a là, je le répète, une incohérence. Nous aurons l'occasion de vous le redire au cours du long débat qui s'ouvre, sur le financement de l'État. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Commençons par le plus agréable : je vous félicite, madame la ministre, monsieur le ministre, et à travers vous le Président de la République, pour l'extraordinaire manière dont vous avez géré la crise financière. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Eh oui : la vérité mérite d'être rappelée de temps en temps ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Dans un monde où la finance, l'économie, la communication sont mondialisées, les autorités politiques le sont rarement. Or, à cet égard, le Président de la République a parfaitement assumé sa mission, en mobilisant les Européens, ce qui n'était guère facile, et en imposant aux Américains – disons ce qui est – le sommet mondial qui aura lieu en novembre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Cela étant, s'il faut accroître la régulation et l'organisation en matière financière, nous ne devons pas succomber à la tentation – d'ores et déjà abondamment évoquée – de revenir au tout État. Car nous mesurons ce que l'étatisme a coûté à notre pays depuis plusieurs décennies.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Lorsque la situation se sera améliorée, je crains fort que les États-Unis, pourtant responsables, dans une large mesure, de nos difficultés actuelles, ne se réveillent et ne rebondissent plus vite que nous…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

… car ils sont affranchis des pesanteurs que nous continuons de subir, malgré les efforts accomplis par le Gouvernement.

Voilà pourquoi il faut poursuivre les réformes, et même en accélérer le rythme. L'occasion que représente cette crise doit nous inciter à aller encore plus vite et encore plus fort en la matière.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

De ce point de vue, je salue l'excellente pratique que constitue la révision générale des politiques publiques. Parlementaire depuis de longues années, j'attendais depuis bien longtemps que l'on décider de l'initier, afin de remettre de l'ordre dans nos finances publiques, en vue de mieux servir le citoyen en imposant moins le contribuable.

La RGPP fonctionnant bien, elle doit être poursuivie et amplifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Mais il n'est pas souhaitable que l'État s'adresse exclusivement à lui-même. Des efforts importants ont été demandés à ses administrations ; il va falloir aller plus loin. J'ai conscience qu'en disant cela, je ne provoquerai guère de sourires sur un certain nombre de bancs. Mais il est deux domaines dans lesquels nous devrons inéluctablement envisager une révision générale des politiques publiques. Tout d'abord, le domaine de la protection sociale, où nous pouvons faire beaucoup mieux et moins cher ; ensuite – je m'apprête sans doute à dire des choses affreuses –, celui des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

S'agissant de ces dernières, nous nous plaignons souvent de l'État. Mais des efforts peuvent être consentis pour en simplifier l'organisation générale. Cette simplification est à l'étude ; j'espère que nous pourrons formuler des propositions efficaces avant la fin de l'année.

D'autre part, il est également possible de mieux dépenser, ce qui revient à dépenser moins.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Dans tous les domaines, madame la ministre, monsieur le ministre, nous pouvons donc poursuivre la réforme et l'amplifier ; telle est la volonté dont témoigne ce budget.

J'en terminerai par une petite réflexion sur la critique qui vous a été adressée depuis le début de la discussion : ce budget, dit-on, ne serait pas adapté à la situation actuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Or comment l'adapter à une situation dont M. Cahuzac, que j'ai écouté avec attention, nous a démontré pendant une grande partie de son intervention qu'elle était insaisissable ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je vais devoir recommencer : vous ne m'avez pas compris !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Comment auriez-vous pu, si vous l'aviez souhaité, refaire un budget en vous fondant sur une situation économique et financière insaisissable ?

Pour ma part, je préfère de loin la réponse du ministre du budget et des comptes publics, tout à l'heure, lors des questions au Gouvernement : le budget doit être adaptable à l'évolution de la situation au cours des semaines à venir. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

M. Mancel ne raconte que des carabistouilles !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Telles sont, mes chers collègues, les quelques réflexions dont je souhaitais vous faire part. Je vous remercie de m'avoir écouté et, peut-être, entendu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, « une dette n'est rien si elle ne vous prive de rien », disait l'écrivain québécois André Duval au début du siècle dernier. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Écoutez pour une fois, s'il vous plaît ! Or, aujourd'hui, notre dette menace manifestement de nous priver des marges de manoeuvre nécessaires pour agir et défendre une ambition politique pour notre pays.

Le budget pour 2009 s'inscrit donc dans une programmation pluri-annuelle dont l'objectif reste le retour à l'équilibre de nos finances publiques. Mais, s'il demeure une priorité du gouvernement de François Fillon, cet effort de redressement n'exclut pas la défense d'autres priorités, bien au contraire. Et je vous remercie, madame la ministre, monsieur le ministre, du travail rien moins que facile que vous avez accompli dans un contexte économique mondial particulièrement troublé.

En ces temps de tensions, nous, parlementaires, devons plus que jamais veiller au bon usage de l'argent public, mais également créer les conditions de l'espérance !

C'est à cette espérance d'une société plus juste, plus efficace, plus innovante et plus entreprenante que vous avez souhaité consacrer une part croissante des crédits budgétaires.

Ce budget est donc doublement volontariste, malgré un contexte économique mondial particulièrement difficile qui pèse et continuera de peser sur notre croissance. Il l'est tout d'abord en matière d'enseignement, de recherche et d'emploi. Investir dans l'avenir de notre société restera une priorité en 2009.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

En ma qualité de rapporteure pour avis du budget de l'un des programmes de cette mission, je suis particulièrement sensible à la progression – de plus de 2 milliards – des crédits attribués au ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Mais, parce que l'argent n'est pas tout, je me réjouis que cet effort important s'accompagne d'une évaluation des politiques publiques. Celle-ci nous permet dès à présent de mieux orienter la recherche vers les PME, grâce au crédit d'impôt, et nous donnera la possibilité de favoriser la réussite de chacun en licence, grâce à la création des observatoires de la performance dans toutes les filières.

Ce budget est également volontariste en ce qu'il tend à bâtir une société équilibrée dans le domaine de l'innovation sociale – que connaît bien M. Roy…

Je pense d'abord au défi du RSA, qui nous permettra de lutter contre l'indignité d'une pauvreté qui affecte notre cohésion sociale. Je pense aussi au développement de la formation et de l'emploi des travailleurs handicapés, qui constitue l'un des cinq objectifs des ministères de l'emploi et de la solidarité, et une réponse volontariste à la double peine que subissent nos concitoyens en situation de handicap.

Toujours au titre de la formation des publics fragilisés, 340 millions de crédits sont alloués aux contrats destinés aux jeunes éloignés du marché du travail. Au cours des trois années à venir, chacun d'entre nous devra se mobiliser pour les contrats d'autonomie, dont 45 000 restent à créer.

Enfin, les travaux en commission ont manifesté notre volonté de mieux accompagner un capitalisme fondé sur la création de richesse et non sur la spéculation, notamment par une proposition d'amendement tendant à encadrer les parachutes dorés. Je me réjouis également que le plafonnement des niches fiscales fasse l'unanimité. Notre assemblée fait son travail en se saisissant de ces questions, et je sais qu'elle débattra d'autres sujets importants. Car, au-delà des discours démagogiques, toute proposition propre à accroître la justice sociale et l'efficacité fiscale mérite de faire l'objet d'un débat éclairé.

Mes chers collègues, selon le cardinal de Retz, « l'on est plus souvent dupé par la défiance que par la confiance ». Agissons donc ensemble pour cultiver cette confiance et porter cette grande espérance d'une action qui modernise et valorise notre modèle social, d'une France qui va de l'avant malgré la tempête, d'une nation qui protège autant qu'elle encourage et qui croit en son avenir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mesdames, messieurs, je serai bref et m'efforcerai de ne pas répéter ce qui a déjà été dit.

Je crois vous l'avoir déjà dit, madame la ministre, et je l'ai dit à nouveau devant la commission des finances : nous souffrons de ne pouvoir mettre en oeuvre un plan de relance susceptible de redresser le pays. Vous en souffrez autant que nous, j'en suis persuadé ; mais vous en êtes empêchés par les décisions fiscales que vous avez prises au cours de ces dernières années.

Le rapporteur général lui-même, pourtant issu de la majorité, l'a souligné : 23 milliards supplémentaires de niches fiscales depuis 2002, ce n'est pas sérieux ! Selon mes calculs, 150 milliards, qui auraient permis de réduire l'endettement et de financer un plan de relance, ont été soustraits ces dernières années aux caisses de l'État. Dieu sait combien nous en aurions besoin aujourd'hui !

Nous venons de voter à une très large majorité le texte mettant en oeuvre le Grenelle de l'environnement. J'avais suggéré à M. Borloo, qui a accepté de le faire, de réfléchir aux retombées industrielles du Grenelle. Or le budget du ministère de l'environnement augmente à peine : de 9 à 9,04 milliards, soit à peine l'épaisseur d'un trait ! Il existe pourtant dans le pays d'immenses attentes qu'il ne serait nullement inflationniste de satisfaire.

Imaginez seulement, madame la ministre, un grand plan sur les tramways et sur les TGV. Imaginons que l'État, parce qu'il aurait été capable de trouver 40 milliards, renonce à demander 4 milliards aux collectivités territoriales – Midi-Pyrénées, Aquitaine, Poitou-Charentes, Centre. Imaginons qu'il renonce à leur faire les poches et à les étrangler par ce budget.

L'industrie du TGV est tout entière concentrée en France, y compris la fabrication du tissu des sièges, l'électronique, les freins ou les caisses. Imaginez les effets que pourrait avoir une telle action, pour le Grenelle comme pour la relance industrielle !

Quant à la recherche et à l'environnement, l'augmentation que vient d'évoquer ma collègue ne dépasse pas 3,2 %. Or le rapport sur la société de l'innovation que le Premier ministre vient de commander démontre que la France décroche, faute d'investissements dans la recherche et l'innovation, faute de moyens financiers et de priorités.

J'en reviens à mon éternelle antienne : ne faudrait-il pas savoir enfin qui, de l'État et des collectivités locales, fait quoi ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Plutôt qu'une commission Balladur sur la réforme des collectivités locales, ne faudrait-il pas charger une commission – présidée par M. Balladur ou par un autre – de réfléchir aux causes et à l'issue de cette crise financière ?

Pour ma part, je suis prêt, au niveau de responsabilité qui est le mien, à déterminer les responsabilités respectives des régions, des départements et des communes. S'agissant des PME, madame la ministre, monsieur le ministre, il y a à faire ! Alors que mes homologues italiens, espagnols ou allemands ont été invités tous les quinze jours, voire toutes les semaines, par les chefs de Gouvernement ou les ministres des finances de leurs pays respectifs à se réunir pour examiner des plans d'urgence destinés aux PME, je m'étonne que le Gouvernement n'ait pas invité une seule fois les régions – je m'excuse de prendre cette casquette ici – pour évoquer ce que nous entendons chaque jour : dans bien des domaines, les plans d'investissement des PME sont arrêtés.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Des mesures simples pourraient être prises, qui relève du fonctionnement normal d'un pays démocratique moderne.

Enfin – et il n'y pas de contestation possible sur ce point – tous les économistes soulignent que pour relancer l'économie et rétablir la confiance, il ne suffit pas de garantir les prêts interbancaires : il faut aussi ouvrir de grands chantiers, et les États-Unis le feront peut-être avant nous. Je vous parlais de la LGV, de la recherche. Certains projets sont prêts, lançons-les, cofinançons-les s'il le faut !

Apportons en tout cas des réponses structurelles à cette crise structurelle pour en sortir le plus vite possible. J'ai toutefois la crainte – et les interventions précédentes la confirment – que nous n'en tirions pas les leçons nécessaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Tron

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, il y a deux écueils qu'il convient d'éviter dans ce débat. Le premier serait de critiquer le budget comme si la crise financière n'avait pas de répercussions sur notre situation économique et que le Gouvernement n'était pas contraint de la prendre en compte. Le second serait de se persuader que la crise gommerait toutes les difficultés que connaît notre pays et nous dispenserait de nous pencher sur les spécificités de notre situation budgétaire. Je vais tenter, à ma façon, de me tenir à distance de l'un et l'autre de ces écueils, en restant dans une position intermédiaire.

En premier lieu, après Jean-François Mancel qui l'a si bien exprimé, je voudrais dire combien nous avons été solidaires de l'action que vous avez menée avec le Président de la République pour faire en sorte que la France prenne des initiatives pour résoudre la crise, tant au niveau européen qu'au niveau mondial. Le plan français brille par sa cohérence : les initiatives de notre pays ont été appréciées et la présidence française de l'Union européenne en ressort grandie.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Tron

Ce projet de budget me semble répondre à de multiples exigences, ce dont on ne peut que se réjouir. Pour ma part, j'en discerne quatre.

Premièrement, la lisibilité est renforcée par la pluriannualité. Inutile d'insister sur la projection des finances publiques sur trois ans : tout le monde a bien compris en quoi consistait l'innovation de ce budget. Je soulignerai plutôt l'apport de différentes mesures nouvelles, pleines de bon sens. Monsieur le ministre, la fixation d'un socle pour la politique salariale dans la fonction publique, avec une augmentation prévue le 1er juillet de chaque année et des mesures de rattrapage prises en fonction de la garantie individuelle de pouvoir d'achat, me paraît bien évidemment aller dans le bon sens. On sort ainsi d'un cycle de discussion au sein de la fonction publique qui n'avait ni queue ni tête pour se projeter dans l'avenir avec la pluriannualité. C'est un excellent principe et je vous félicite de l'avoir ainsi respecté.

Deuxièmement, la transparence est garantie par la volonté de budgéter à leur coût réel des dépenses contraintes, que l'on tentait constamment de diminuer. Il s'agit de l'aide médicale d'État et des opérations extérieures, à hauteur de 1 milliard d'euros. Personne, je dis bien personne, ne pourra reprocher à nos budgets de manquer de transparence et de sincérité. À cet égard, Gilles Carrez a eu raison de souligner dans son intervention que nous nous étions toujours situés en deçà des prévisions de recettes fiscales que nous inscrivions dans le budget.

Troisièmement, la prudence vous a guidés. Vous avez eu raison, madame la ministre, de considérer que nos hypothèses sont plus « vulnérables », pour reprendre vos mots, qu'elles ne le sont d'ordinaire. Je ne peux que vous féliciter de vous fonder sur des prévisions modérées de croissance et de recettes fiscales. Nous ne pourrons être accusés d'avoir fait preuve d'un optimisme excessif en temps de crise. Je vous félicite également pour les mesures destinées à aider les entreprises à traverser la difficile situation qu'elles vivent actuellement : vous avez donné des instructions aux trésoriers-payeurs généraux et aux URSSAF pour alléger, voire « oublier », les pénalités de retard. De la même façon, je me réjouis que les salariés en difficulté bénéficient d'un assouplissement des durées maximales des contrats d'accompagnement dans l'emploi et des contrats initiative emploi.

Quatrièmement, vous affirmez très clairement une volonté politique. Ainsi pour encourager les économies d'énergie, vous instaurez un prêt à taux zéro pour les travaux de rénovation dans les logements et vous adaptez la règle de la déductibilité des intérêts d'emprunt pour les logements répondant à la norme « bâtiment basse consommation ». Je me réjouis que vous poursuiviez vos réformes malgré la crise.

Nous avons tous éviter le premier écueil, à savoir considérer que la crise financière n'avait aucune répercussion sur la situation économique et budgétaire. Cela étant, il ne faut pas se leurrer sur la situation budgétaire de notre pays. Les déficits n'ont jamais été aussi élevés et nous transférons la charge qu'ils représentent à nos enfants et à nos petits-enfants, comme vous le souligniez très justement, madame la ministre. Aujourd'hui, disons-le clairement, le déficit de l'État n'a quasiment jamais été aussi élevé et la dette publique s'accroît.

Dans ces conditions, les incantations ne servent à rien. Il faut avoir une vision claire de ce qu'il convient de faire. Je livrerai ici quelques réflexions, en qualité de co-président de la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances, en soulignant que cette instance a l'avantage de nous faire travailler en bonne intelligence. En d'autres termes, il ne suffit pas qu'une chose soit dite d'un côté de l'hémicycle pour qu'on dise l'inverse de l'autre. S'il ne s'agissait que de cela, n'importe lequel d'entre nous pourrait le faire. Il faut savoir s'abstraire des contingences purement politiques.

Une piste fondamentale consiste à éviter les mauvaises orientations qui sont des solutions de facilité. Je ne reprendrai pas les propos d'Alain Rousset – il est président de région et moi pas, même si je suis maire et président d'une communauté d'agglomération – mais je voudrais vous alerter sur les précautions qu'il convient de prendre à l'égard des collectivités territoriales, qu'il s'agisse de la réforme de la DSU, du fonds de compensation de la TVA ou de la nécessité de leur appliquer une réflexion globale et non des mesures ponctuelles. Je tiens à préciser que rien ne doit être fait pour les pénaliser. Rappelons le chiffre cité hier par le rapporteur général : l'investissement des collectivités territoriales représente 75 % de l'investissement public civil de la nation. Prenons garde à ne pas prendre de mesures qui aboutiraient à pénaliser celui-ci au moment où la crise sévit.

Par ailleurs, trois grandes orientations doivent permettre de remettre de l'ordre dans les finances publiques afin d'aller plus loin.

La première consiste à renforcer le contrôle des dépenses publiques. Madame la ministre, monsieur le ministre, je vous le dis très clairement, je considère que le contrôle que nous exerçons sur les administrations, même si la mise en place de la RGPP a changé les choses, est totalement insuffisant. Je puis vous assurer – et je pourrais prendre à témoin n'importe lequel des rapporteurs ou des membres de la commission des finances ou de la MEC – que nous constatons tous les jours qu'au sein de l'État, des hauts fonctionnaires s'abstraient souverainement des consignes que vous leur donnez et continuent de penser que la dépense publique peut être illimitée. Je fais en particulier allusion aux opérateurs. À cet égard, je me réjouis que l'article 64 du projet de loi de finances pour 2008 les soumette aujourd'hui à un plafond d'emplois temps plein. Cependant, j'ai en tête de multiples exemples de dépassement.

Ces trois dernières années, nos collègues de l'opposition n'ont cessé de répéter qu'ils étaient scandalisés par la diminution des effectifs dans la fonction publique mais je me permets de leur dire, en ma qualité de rapporteur du budget de la fonction publique, que s'ils avaient examiné attentivement les chiffres, ils auraient constaté que nous avions voté à due concurrence l'augmentation des effectifs chez les opérateurs. Après trois ou quatre années de recul, nous pouvons dire, sans prendre le risque de nous tromper, que des transferts massifs ont été opérés et que certaines personnes se sont totalement soustraites aux règles. Il faut donc exercer un contrôle beaucoup plus sévère sur les opérateurs. Michel Bouvard l'a dit à plusieurs reprises très justement, je le répète ici.

La deuxième orientation consiste à renforcer l'autorité de la décision politique. Monsieur le ministre, je ne peux que me réjouir des mesures, dues à votre action, qui nous ont enfin permis de reprendre le contrôle sur la gestion immobilière de l'État. Néanmoins, je reste extrêmement prudent car je continue à constater dans les ministères des comportements incompatibles avec la rigueur que vous prônez. Certains d'entre eux élaborent des projets très dispendieux qui ne peuvent rentrer dans le cadre de cette maîtrise. J'y insiste, il faut aller beaucoup plus loin dans ce domaine, mes chers collègues. Pour un patrimoine d'une valeur de 80 milliards d'euros, l'État doit consacrer 2 milliards d'euros aux dépenses d'entretien.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Tron

Enfin, troisième orientation, l'évaluation, qu'il importe de renforcer. Ainsi, il faudrait avoir la capacité d'estimer le coût de lois comme celle relative à la mobilité dans la fonction publique.

Monsieur le ministre, madame la ministre, mes chers collègues, nous allons sans doute dans la bonne direction mais il faut aller plus vite et plus loin. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le choc de la crise financière a été violent et brutal. Personne n'imaginait l'ampleur de la crise, le dernier prix Nobel d'économie confessait ne l'avoir pas même vu venir. Et je tiens ici à saluer la réactivité du Gouvernement mais aussi son sens des responsabilités.

S'agissant du projet de loi de finances, je voudrais revenir sur un sujet qui me tient à coeur : la norme comptable internationale et plus précisément les provisions pour dépréciation d'actifs.

La volonté de transparence qui consiste à vouloir faire de la valeur un reflet du marché nourrit une spirale négative et conduit à alimenter la baisse des actifs. Le diagnostic de l'instant est désastreux et l'effet de contagion est important car le système comptable est un facteur d'accélération de crise. Il importe donc de revenir à une norme comptable plus classique mais plus stable. Les actifs doivent être évalués au prix d'achat et non au prix du marché.

Les paradis fiscaux m'ont toujours heurté et je n'ai jamais compris que les États s'accommodent de leur existence. J'ai pu vérifier dans une vie professionnelle antérieure leur attractivité. Le dernier scandale du Liechtenstein nous a montré encore une fois l'immoralité de ces pratiques. Faut-il rappeler la situation de Monaco, des îles anglo-normandes, d'Andorre et d'autres encore ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Je connais ces sujets comme vous, cher collègue.

Lors des auditions menées dans le cadre de l'affaire Tapie, les sociétés citées étaient pudiquement désignées sous le terme d'« offshore », le tout énoncé paisiblement comme si cela était normal. Il faut aujourd'hui combattre avec détermination ce qui semblait être accepté par beaucoup comme un mal nécessaire.

Il est choquant que les organismes bancaires organisent une évasion fiscale à partir de sociétés offshore.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Je sais que la France a la volonté de combattre ces situations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Je salue l'initiative du Gouvernement car l'économie doit s'accompagner de règles et de transparence.

Concernant le budget, je veux en souligner la cohérence face à la crise financière qui, indépendamment de la volonté du Gouvernement, crée des incertitudes. Je rappelle à cet égard que la loi TEPA a en fait anticipé un soutien à l'activité économique. En injectant du pouvoir d'achat dans l'économie…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

…elle a permis à notre pays de mieux étaler et de supporter les difficultés financières.

Je prendrai deux exemples : le prêt à taux zéro a permis l'accession à la propriété à de nombreux ménages aux revenus modestes, et la déduction des intérêts des emprunts pour l'acquisition de la résidence principale a également favorisé l'accession à la propriété de nombreuses familles.

Ce projet de budget continue sur cette voie, de manière ciblée et volontariste. Il maintient notamment l'effort sur le logement dans le cadre du volet fiscal du Grenelle de l'environnement.

Ainsi, l'instauration d'un prêt à taux zéro permettra de financer des travaux de rénovation destinés à améliorer la performance énergétique des logements anciens tandis que le prêt à taux zéro pour l'accession et le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunts devraient être majorés pour les logements neufs répondant à la norme « bâtiment basse consommation ». Par ailleurs, il sera mis en place une écoconditionnalité au bénéfice des dispositifs fiscaux en faveur des investissements locatifs.

Ce projet de budget traduit donc une continuité et une cohérence : pas de rigueur, car un plan de rigueur casserait la dépense publique et donc la consommation, mais un soutien ciblé, accompagné d'une maîtrise de la dépense avec le plafonnement des niches fiscales.

Enfin, s'il faut maîtriser la dépense, l'équité impliquerait que l'on soit plus volontariste dans l'élargissement de la base de certaines recettes fiscales, je veux parler des stock-options. Introduire plus d'équité dans les rémunérations, c'est d'abord ne plus réserver les stock-optionsà quelques-unes dans l'entreprise et en faire profiter tous les salariés, mais c'est ensuite parvenir à une véritable taxation desstock-options car elles sont assimilables à une forme de revenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Bravo ! Il faut penser également aux niches sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Madame, monsieur les ministres, ce projet de budget fait la synthèse entre la nécessité d'une maîtrise de la dépense publique et la nécessité d'une action de soutien ciblée. Je le qualifierai de courageux, réaliste et cohérent, cohérent entre les actions précédentes et cohérent dans la crise entre la maîtrise de la dépense publique et le soutien économique ciblé. J'apporte donc mon total soutien à ce projet de loi de finances pour 2009. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, cette rentrée parlementaire a placé au coeur de ses préoccupations les questions énergétiques et environnementales et le vote solennel du Grenelle de l'environnement il y a quelques heures en est l'illustration. Le projet de budget pour 2009 s'inscrit dans la continuité de ce mouvement : il se fait l'écho des problématiques respectueuses du développement durable, tout en s'inscrivant dans la volonté de maîtrise des dépenses et de réduction des déficits publiques.

Il est un secteur pourtant que nous sommes invités à étudier qui mérite une autre approche que celle proposée par le projet de loi, il s'agit du secteur des biocarburants. La diminution de la défiscalisation présentée met en péril ce secteur alors que les investissements ne sont pas encore rentabilisés, ni même terminés en fonction des agréments accordés par les gouvernements précédents. L'économie française peut-elle se permettre de fermer aujourd'hui des usines ouvertes hier ?

Je rappelle rapidement les avantages du secteur des biocarburants.

C'est avant tout un secteur qui offre à la France une certaine indépendance énergétique, indispensable dans le contexte actuel du renchérissement du coût de l'énergie. Il est par ailleurs créateur de richesse en France, dans des régions désindustrialisées et rurales. Les biocarburants ne doivent pas nous faire peur. Nous devons prendre conscience que c'est une formidable chance de résister aux pressions qui s'exercent de plus en plus sur le pétrole parce que c'est une énergie renouvelable et directement disponible.

D'un point de vue environnemental, les biocarburants représentent un moyen de lutter contre le changement climatique et la pollution de l'air. En septembre 2008, l'ADEME concluait, dans son « Regard sur le Grenelle », qu'il convenait de ne pas remettre en cause les investissements déjà réalisés ou engagés.

Je souhaite à cet égard apporter mon soutien aux amendements déposés par M. de Courson sur les articles 5 et 9.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Il me semble en effet que la baisse de la défiscalisation jusqu'à son arrêt en 2012 est inadaptée puisque nous ne maîtrisons pas sur une si longue période la volatilité des cours du pétrole et des matières premières agricoles.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

De plus, les agréments ont été donnés par rapport à la défiscalisation et ils se poursuivent jusqu'en 2015. Sans défiscalisation, l'agrément se vide de son sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

L'éthanol extra-européen, c'est-à-dire brésilien, ou le diester américain deviennent alors véritablement beaucoup plus intéressants.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Il est nécessaire de poursuivre le soutien gouvernemental à cette filière pour améliorer encore son utilisation.

Ce soutien revient à maintenir, jusqu'à la fin des investissements, des mesures fiscales particulièrement incitatives, avec la réduction partielle de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, mais également à favoriser le développement de l'utilisation des biocarburants. Pour cela, il me semble indispensable de revoir le seuil de malus imposé au véhicule flex-fuel.

Comme l'a rappelé le Président de la République au Mondial de l'automobile, il s'agit d'affirmer les vertus écologiques de ce secteur d'avenir et de promouvoir le superéthanol pour ses qualités environnementales. Je soutiens donc les mesures visant à ne pas assujettir à la TGAP les véhicules fonctionnant au superéthanol E85 si leur émission de CO2 est inférieure à 250 grammes au kilomètre, car ce seuil ne laisse alors au-dessus de lui que les gros véhicules type 4x4.

Pour finir, je souhaite insister sur la nécessité d'être et de rester aux côtés des agriculteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Nous devons soutenir leurs projets qui s'inscrivent dans notre politique de développement durable et ne pas abandonner notre soutien et nos engagements. On ne peut pas jouer avec leurs investissements, avec leur argent, ils ont élaboré des business plans, qui demain deviendront caducs. Certains perdent confiance en l'État car ils voient dans le PLF 2009 un désengagement des pouvoirs publics sur un sujet fort. Seront-ils prêts à se lancer demain dans de nouveaux grands projets comme la chimie verte ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La discussion générale commune est close.

La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs, la discussion générale a été longue et évidemment très intéressante. Il m'est impossible de revenir sur tous les points qui ont été abordés, je m'arrêterai sur ceux qui ont particulièrement attiré mon attention, sachant que Mme Lagarde répondra sur d'autres. J'espère qu'ainsi, nous serons complets.

Vous avez été plusieurs, notamment Jérôme Chartier et Philippe Vigier, à souligner les apports de la loi de programmation des finances publiques. Nous fondons beaucoup d'espoirs sur ce nouvel instrument pour mieux réguler. Au-delà même des circonstances, parfois exceptionnelles, il faut en effet prévoir à long terme, en se fondant sur un socle de dépenses et de recettes, et surtout en prenant en compte l'ensemble de la dépense publique, et pas seulement la dépense de l'État.

Cette vision pluriannuelle, nous devrons la partager tout au long des années à venir et nous devrons surtout intégrer la préparation des futurs budgets dans cette vision. Il me paraît très important que le Parlement partage cette idée et que nous puissions, tant vis-à-vis des ministères que dans nos discussions à l'Assemblée et au Sénat, nous appuyer dans les années qui viennent sur les projections pluriannuelles.

Je voudrais indiquer à Philippe Vigier que cette vision s'appuie également sur le travail qui a été réalisé, à droite comme à gauche, mais particulièrement par le groupe Nouveau Centre, sur ce qui a été appelé à un moment donné la « règle d'or ». Ce travail nous a permis d'une certaine façon d'intégrer des règles de gouvernance au projet de loi de programmation pluriannuelle.

Sur les dépenses, vous avez été nombreux à souligner l'effort consenti cette année. Certes, certains trouvent cet effort positif, tandis que d'autres le considèrent comme négatif. D'un côté, nous couperions trop dans les dépenses alors que, en temps de crise, il faut relancer la machine ; de l'autre, nous dépenserions encore trop et la dépense publique serait encore trop élevée.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je retiens pour ma part que le travail qui a été mené sur la dépense publique dans ce budget a été très novateur et très approfondi. Je comprends qu'on puisse penser autrement, mais je crois que, pour la majorité, la dépense publique atteint aujourd'hui, en France, un niveau très élevé. L'idée d'une relance par la dépense publique peut donc éventuellement se concevoir dans des pays qui ont un niveau de dépenses publiques beaucoup plus faible, mais pas chez nous. On peut donner un coup de pouce à tel ou tel secteur, mais écrire en lettres d'or sur le fronton du Parlement que la relance doit passée par la dépense publique serait un peu décalé par rapport à ce qu'est la France aujourd'hui. Nous dépensons déjà beaucoup plus que les autres pays.

Charles de Courson a souligné l'effort de maîtrise de la dépense et de transparence. Il a même dit que nous mettions fin à ce qu'il appelait les « farces et attrapes budgétaires ». Je m'en réjouis et l'en remercie, parce que ces deux combats, sur la dépense d'une part, sur la transparence, la vérité, la sincérité du budget d'autre part, ont été menés en commun. Ce point a été évoqué par plusieurs intervenants, certains reprochant à ce budget son manque de sincérité, d'autres le qualifiant de sincère – je préfère évidemment cette seconde appréciation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous préférez les louanges à la juste critique !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

En tout cas, nous l'avons élaboré sincèrement.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

C'est un budget mensonge ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous avons travaillé sincèrement, en réadaptant un certain nombre de dépenses, en réglant des problèmes qui étaient pendants. J'ai été heureux d'entendre que beaucoup l'avaient remarqué.

Jérôme Chartier a mis en évidence le fait que nous préservions les dépenses d'avenir, comme Valéry Rosso-Debord, qui a évoqué les dépenses sociales et de solidarité qui tiennent à coeur à notre majorité.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Celles-ci ne sont pas touchées par ce budget. Un député a dit tout à l'heure que ce budget coupait trop dans les dépenses. Très sincèrement, on ne peut pas dire cela s'agissant des dépenses sociales. On ne peut pas dire que ce budget ne finance pas le revenu de solidarité active et d'autres transferts sociaux, très profondément ancrés dans notre pacte républicain. Nous assumons nos responsabilités, même si, évidemment, les choses peuvent changer, et heureusement.

Comme Bernard Carayon l'a noté, c'est bien la fin de la logique du toujours plus. Rajouter toujours des moyens ne peut être la seule réponse. Ce n'est adapté ni à la situation du pays, ni surtout à son avenir.

Plusieurs d'entre vous, Éric Ciotti, Yves Deniaud, Pierre Morel-A-L'Huissier, Jean-François Mancel, ont cité la RGPP. Je suis en train de préparer un rapport d'étape sur la RGPP que je présenterai mi-novembre. Le comité se réunit, et il le fera à nouveau à partir de janvier sur la base d'une impulsion nouvelle.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous allons continuer ce travail, même si parfois, sur certains modes de fonctionnement, il faut améliorer les choses. Je serais ainsi, à titre personnel, favorable à une plus grande ouverture du Parlement sur la démarche de RGPP. J'invite d'ailleurs les rapporteurs spéciaux à auditionner les groupes d'audit de la RGPP. Un travail très intéressant peut être réalisé en la matière.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Hervé Mariton et Jean Launay se sont particulièrement interrogés sur le financement du Grenelle. Le Grenelle représente un effort global de plus de 5 milliards d'euros, entre 2009 et 2011, à la fois en crédits budgétaires, en effort fiscal, en dépenses chez les opérateurs si chers à Georges Tron.

Ce financement est donc compatible avec la trajectoire de finances publiques que nous avons mise en oeuvre.

Je tiens également à indiquer à Pascale Gruny, qui a été très convaincante, que la question n'est pas de savoir s'il faut continuer ou non les biocarburants, car cela est bien sûr indispensable. Cependant il convient en même temps d'adapter l'aide fiscale, comme l'ont fait d'autres pays. Il faut bien évidemment faire aussi en sorte que les investissements soient amortis, que la deuxième génération de biocarburants puisse voir le jour et, en même temps reconnaître que l'aide fiscale de l'État est aujourd'hui démesurée, sans pour autant remettre en cause la filière.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Michel Bouvard a bien voulu saluer l'effort de rigueur et de transparence qui marque ce budget. Je pense notamment aux sous-budgétisations qui sont chroniques depuis de nombreuses années et que nous essayons de régler au fur et à mesure, même dans des circonstances très difficiles. Je pense aussi aux dépenses fiscales.

Marie-Anne Montchamp, dans un discours très construit, a reparlé de la dépense sociale qui est préservée dans notre budget, mais devra évidemment être réajustée lorsque nous en aurons besoin. Il est incroyable, monsieur Terrasse, de vous entendre dire que nous ne faisons rien pour maîtriser les comptes sociaux ! Nous dépasserons l'ONDAM 2008 d'environ 800 millions d'euros, contre 3 milliards l'année dernière ! Et ce travail sur l'équilibre des finances sociales se fait essentiellement sur…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…les dépenses, pas sur les recettes.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Vous avez bénéficié à l'époque d'une croissance formidable…

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Grâce à qui ! Nous sommes allés la chercher avec les dents !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…et quand on a 3 à 4 % de croissance, il n'est pas difficile de parvenir à l'équilibre des finances sociales en deux ans. Pardonnez-moi de vous le rappeler, mais vous n'aviez pas fait grand-chose en matière de restructuration de la dépense sociale.

Monsieur Lurel, comment pouvez-vous afffirmer que la solidarité nationale ne s'exerce pas suffisamment outre-mer quand le budget de l'outre-mer progresse de plus de 9 % ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Il le dit parce qu'il sait de quoi il parle !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je comprends que vous défendiez avec beaucoup de passion des collectivités qui vous sont chères, mais comment pouvez-vous tenir de tels propos quand la solidarité nationale vis-à-vis de l'outre-mer ne manque jamais de s'exercer ? Vous ne pouvez mettre en cause le travail que réalise cette majorité avec l'outre-mer.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur Tron, en ce qui concerne la fonction publique, nous avons profondément changé les choses et nous devrons continuer à travailler avec tous les syndicats de fonctionnaires.

S'agissant des recettes elles-mêmes, il y a, bien sûr, un risque, chacun l'a puissamment indiqué, certains pour le regretter, d'autres pour souligner que nous ne pouvions pas faire autrement. En tout cas, nous jouons cartes sur table. Nous disons clairement que les recettes sont liées à l'incertitude ambiante et chronique due à la crise que nous connaissons depuis quelques mois et que nous les adapterons le moment venu si nécessaire.

Charles de Courson a avancé un chiffre sur les recettes lié notamment au fait que le secteur financier représenterait 25 % de l'impôt sur les sociétés. Je tiens donc à lui répondre que, dans le secteur financier, il n'y a pas que les banques : y figure, certes, la Banque de France, dont les dividendes sont importants, mais on y trouve aussi les assurances. Il faut donc relativiser l'impact qu'il a traduit très brutalement dans les chiffres. En outre, dans les moins 5 milliards de recettes fiscales que j'ai annoncés pour 2008, nous avons déjà intégré en partie une diminution de l'impôt sur les sociétés. Si les recettes sont inférieures, nous ne ferons ni coupes claires, ni coupes sombres, ni hausses d'impôts.

Nous apportons une réponse adaptée à la crise que nous traversons, je l'ai indiqué dans mon discours liminaire et je l'ai répété en début d'après-midi en réponse à une question d'actualité. Cela ne signifie évidemment nullement que nous renoncerions, de quelque manière que ce soit, à l'objectif de retour à l'équilibre des finances publiques. Nous n'abandonnons pas le pacte de stabilité et de croissance, monsieur Bapt. Il contient d'ailleurs lui-même les circonstances exceptionnelles qui permettent de qualifier les critères de Maastricht, mais vous le savez très bien.

Monsieur Cahuzac, vous parlez d'équilibre des comptes. Je ne vais pas faire de l'archéologie budgétaire mais, entre 1997 et 2002, nous avons connu une période de très forte croissance.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

En tout cas, il a perdu les élections !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

D'autres les ont perdues en 1997, après une dissolution hasardeuse !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous, en général, on les gagne !

En tout cas, il est nettement plus facile d'atteindre l'équilibre dans une période de forte croissance. Or, entre 1997 et 2002, le déficit structurel de la France s'est aggravé de 1,1 point de PIB selon les chiffres de l'OCDE.

Oui, le budget est probablement le texte le plus important. C'est le plus récurrent, celui qui fixe nos dépenses. Je ne peux le sous-estimer ou le mésestimer. Il constitue un texte fondamental qui oriente la politique tout en étant le fruit de celle qu'il incarne, qu'il traduit en termes financiers. Il n'est donc un recueil de « simples autorisations » ; c'est une fixation des dépenses.

Puisque vous avez cité des exemple étrangers, permettez-moi de vous dire qu'en Allemagne, on accorde moins d'importance aux recettes qu'aux dépenses : on vote les dépenses, les recettes et le déficit découlant des hypothèses de croissance.

M. Mariton a souligné la nécessité de continuer les réformes pour pouvoir mieux profiter de la reprise quand elle se produira. C'est la clef de ce budget, et surtout de la politique économique, budgétaire et monétaire que nous menons. Le cap que nous fixons est bien la réduction de 0,5 point de PIB du solde structurel. Donc, plaçons-nous au-dessus de la conjoncture. Il est bien inscrit pour 2009 et 2010, comme cela sera le cas en 2008, une réduction structurelle de 0,5 point de déficit public, et plus si nous parvenons à profiter de la croissance qui reviendra à un moment où à un autre.

Beaucoup d'entre-vous ont cité les collectivités locales. Jean-François Mancel a souhaité une réorganisation, une redéfinition forte de notre organisation territoriale. Alain Rousset a, quant à lui, évoqué le rôle de la recherche et son lien avec les conseils régionaux. La recherche est une priorité de l'État : 1,8 milliard d'euros de plus chaque année sur l'enseignement supérieur et la recherche. Nous continuerons cet effort en 2009 et tant mieux si cela peut être fait en cohérence avec les conseils régionaux qui ont également une politique active dans ce domaine, mais on ne peut accuser l'État de faiblesse en la matière.

Mme Karamanli, MM. Vigier et Giraud notamment, ont parlé du FCTVA qui est l'expression de l'investissement des collectivités locales.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous respecterons nos engagements. En 2009, l'État reversera 660 millions d'euros au FCTVA parce que les collectivités locales ont probablement plus investi il y a deux ans. Maintenant, l'ensemble des transferts étant limité à 2 %, le reste des concours évoluera un peu moins. Le FCTVA est important, car il privilégie l'investissement.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Claude Bartolone s'est beaucoup exprimé sur les transferts de compétences. Ces derniers relèvent de la loi, voire de la Constitution. Nous y reviendrons.

S'agissant de la DSU, j'ai entendu M. Pupponi. Nous partageons son idée et nous essaierons de convaincre Michèle Alliot-Marie ; le temps du débat devrait nous permettre de le faire. Ainsi, tout le monde aura raison d'une certaine façon. Les collectivités qui touchaient la DSU continueront à la toucher et le surplus permettra de rendre encore plus juste cette importante dotation à laquelle nous tenons tous.

Enfin, vous êtes nombreux à avoir parlé des paradis fiscaux – Jean-Yves Cousin, Jean-Claude Sandrier, Gérard Bapt –, mais avec des notions parfois un peu différentes. Aujourd'hui, j'ai réuni une conférence, qui a été très utile, avec dix-sept pays de l'OCDE, dont onze représentés au niveau ministériel, pour relancer la prise en charge politique de la lutte contre les paradis fiscaux. A partir du moment où le capitalisme est appelé à être moralisé, la lutte contre les paradis fiscaux doit bien sûr être amplifiée. C'est ce que nous ferons. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, la discussion générale d'un projet de loi de finances est toujours l'occasion de débats riches et utiles, productifs. Ils l'ont été cette année à n'en pas douter. Je vais essayer de répondre aux nombreux points que vous avez évoqués. Je les aborderai sous trois angles : les questions relatives à la prévision, celles relatives à la fiscalité et des précisions sur le plan de financement de l'économie que nous avons mis en oeuvre, en particulier sur les conditions de la rémunération de la garantie de l'État.

S'agissant de la prévision, nous avons parlé de l'hypothèse de croissance pour 2009.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Nous avons évoqué une croissance de 1 %. Si vous aviez été là vous auriez entendu ! J'ai indiqué que nous serions amenés à revoir cette hypothèse après la révision par la Commission européenne et lorsque nous aurons reçu le chiffre T3 de l'INSEE, soit le 14 novembre.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Non, 1 % c'est positif !

J'ai été sensible, monsieur le député Chartier, au soutien que vous avez apporté à cette hypothèse de croissance de 1 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ça, vous pouviez être tranquille ! Vous pouvez faire n'importe quoi, il vous soutiendra tout le temps ! C'est une vraie béquille !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Néanmoins, compte tenu des désordres économiques qui affectent les marchés internationaux et de l'intensité des chocs subis par nos économies, nous serons probablement amenés à réviser, à la mi-novembre, le chiffre de la croissance pour l'année 2009. Le choix de la transparence et de la vérité nous amène donc à envisager ce changement d'hypothèse. Cela devrait apporter une réponse aux craintes légitimes de M. Aly.

Comme vous l'avez rappelé fort utilement, monsieur Deniaud, personne, à l'exception de deux économistes, n'avait prévu ce qui est arrivé sur les marchés financiers en septembre dernier, après le premier choc d'août 2007. Face à cette réalité aussi simple que sombre, je dois dire que les interventions de l'opposition m'ont un peu déçue.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

J'ai en effet entendu beaucoup de critiques, mais peu de propositions.

Monsieur Cahuzac, vous avez consacré une grande partie de votre intervention aux incertitudes inhérentes à toute prévision. C'est un commentaire général qui aurait pu être celui de n'importe quel observateur des prévisionnistes.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Je l'ai écouté très attentivement, monsieur Roy, soyez rassuré !

Laissez-moi-vous indiquer, monsieur Cahuzac, qu'en matière de turbulences financières, il y a un avant et un après 15 septembre 2008. Avant le 15 septembre, nous avions un spread interbancaire européen d'environ 50 points de base. Quelques jours seulement après le 15 septembre, ces 50 points de base sont passés à 200. Lorsque les économies et leurs financements sont soumis à des chocs de cette nature, il n'est pas étonnant que les prévisions en soient affectées.

Vous avez commenté avec un peu d'ironie les prévisions que nous avions faites sur la parité eurodollar et sur le prix du baril de pétrole. Je suis au regret de devoir souligner que votre discours va au rebours de toute la recherche économique et de toute la pratique des organisations internationales qui, en général, lorsqu'elles sont amenées à faire une prévision sur ce type d'élément, retiennent tout simplement les derniers chiffres connus. Lorsque nous avons fait nos calculs, aux mois de juillet et d'août derniers – en 2007, cela avait été fait à la même époque, c'est-à-dire avant la première onde de choc financière –, l'hypothèse de 100 dollars le baril paraissait légitime compte tenu des pratiques applicables en matière de prévision. Vous pourriez dire aujourd'hui que c'était particulièrement pessimiste puisque le baril est actuellement aux alentours de 70 dollars.

Dans le cadre de la discussion sur le projet de loi de programmation des finances publiques, M. le président de la commission des finances, et M. Cahuzac à nouveau, ont considéré que la prévision de croissance de 2,5 % du PIB en 2010 était douteuse. Elle résulte, au contraire, d'un calcul comptable et d'un raisonnement économique très simples. Ils correspondent à un scénario économique caractérisé par trois éléments : un redressement très lent de l'activité pendant l'année 2009 nous amenant à faire une prévision pessimiste qui sera probablement révisée à la baisse le 14 novembre ; la montée en charge des effets des réformes de structure que nous avons déjà mises en place et dont nous espérons qu'elles produiront leurs effets dès l'année 2009, mais encore plus à partir de 2010 – ce sont les réformes auxquelles M. Chartier faisait référence ; un effet technique habituel d'accélération de l'activité après deux années déprimées, 2008 et 2009.

Il est fréquent, dans ce genre de situation, que l'année de rebond – j'y reviendrai dans un instant – permette à l'économie française de réaliser son potentiel de croissance.

Les autres interventions portant sur la politique économique ont concerné le pilotage des taux de prélèvements obligatoires, en lien avec la discussion sur le rapport du même nom.

Plusieurs orateurs ont souligné à juste titre le poids des prélèvements obligatoires sur le facteur travail, certains souhaitant réserver les allégements de charges sociales aux PME. Une telle mesure a sa place dans la réforme des allégements généraux de cotisations sociales, qui semble recueillir l'assentiment de la Cour des comptes. Toutefois je n'y suis pas particulièrement favorable à titre personnel, tout simplement parce que le poids du facteur travail ne dépend pas de la taille de l'entreprise, et que ce type de mesure créerait d'importants effets d'aubaine qui ne paraissent pas souhaitables.

Concernant les allégements de charges applicables jusqu'à 1,6 SMIC, vous avez été nombreux, outre M. Vigier, à suggérer de réduire cette assiette à 1,5 SMIC. Cependant cette mesure, qui serait efficace en termes de volume, ne paraît pas souhaitable dans une période où l'emploi est menacé.

M. Chartier a fait une autre proposition constructive en proposant de basculer les prélèvements obligatoires du facteur travail vers la CSG. D'une manière générale, le diagnostic que j'ai publié en juillet sur notre fiscalité a montré que l'imposition des facteurs de production était plus élevée chez nous que chez nos partenaires. Dans ces conditions, il me paraît préférable de faire une pause dans ce domaine.

J'ai ensuite écouté des tirs de barrage, des instructions à charge et des réquisitoires sur la politique fiscale du Gouvernement. Pour autant je ne rougis pas des mesures qui ont été votées avec courage par l'Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous ne risquez pas de rougir : vous restez toujours bleu horizon !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Je pense notamment au crédit impôt recherche, que vous avez triplé et simplifié, et qui place la France au premier rang en ce qui concerne l'incitation à la recherche et au développement. Les entreprises l'ont d'ailleurs plébiscité. Chacun, dans cet hémicycle, reconnaîtra qu'une telle mesure était nécessaire pour les encourager à investir dans l'économie de demain.

S'il est une autre mesure dont, ne vous en déplaise, je n'ai pas à rougir, c'est celle qui porte sur les heures supplémentaires. Je la crois emblématique de notre volonté de remettre la valeur travail au coeur de l'économie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous avez pourtant été démentie par M. Séguin !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Certains ont prétendu que la baisse des cotisations sociales n'avait pas eu beaucoup d'effet et qu'elle n'avait été que le corollaire de la diminution de l'emploi intérimaire et du recours aux contrats à durée déterminée. Je m'inscris en faut contre cette affirmation. Au cours du premier trimestre de 2008, on a en effet observé une augmentation conjointe des heures supplémentaires, de l'intérim et des CDD. L'hypothèse selon laquelle on observerait entre eux un système de vases communicants est donc archaïque. Il est vrai qu'elle avait inspiré la loi calamiteuse des 35 heures. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cette loi « calamiteuse » a tout de même créé des emplois !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

À entendre Mme Billard, comme d'ailleurs M. Launay, on a l'impression que toute décision de politique fiscale est nécessairement mauvaise. Si l'on pratique des hausses ciblées, ils y voient un poids dommageable pour l'économie. Cela étant il est vrai que, en matière de hausse d'impôt, nous n'avons pas de leçons à recevoir de l'opposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

Ce n'est pas sale l'impôt ! C'est de l'argent propre !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Si l'on décide, en revanche, de baisser les impôts, ils y voient un rétrécissement de la marge de manoeuvre budgétaire. Et, si l'on stabilise le taux de prélèvements obligatoire, ils critiquent un transfert de charges massif. Bref, aucune politique fiscale n'a grâce à leurs yeux. Je regrette seulement qu'ils ne proposent aucune mesure en dehors de la fiscalité écologique.

Pourtant, monsieur Launay, vous avez eu raison de souligner que l'un de nos objectifs était de modifier les comportements, en les orientant davantage vers le respect de l'environnement. J'ai été particulièrement sensible à la manière dont vous avez présenté vos réflexions sur ce point, et j'espère qu'il donnera lieu, entre nous, à des échanges riches. Comme vous, nous souhaitons infléchir les comportements de manière progressive.

M. Cahuzac a déclaré que l'exonération des droits de mutation était une manière fâcheuse de favoriser la rente. En fait, il ne s'agit souvent que d'exonérer de taxation des revenus qui ont déjà été taxés une première fois à l'IRPP et une deuxième fois au titre de l'ISF. La rente n'est pas là, mais dans certains dispositifs que nous avons eu le courage de remettre en cause dans la loi de modernisation de l'économie. Nombre de privilèges, de forteresses et de rentes s'étaient en effet constituées au fil du temps, auxquels nous nous sommes attaqués avec courage, pour permettre la concurrence et libérer un peu les forces entrepreneuriales au sein de notre pays.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Vous seriez sûrement sensible à ce qu'elles représentent, monsieur Brard, si vous songiez qu'elles concourent aussi à créer de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Brard, vous aurez tout loisir de parler à votre tour !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pas assez, c'est justement le problème ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Je vous remercie, monsieur de Courson, d'avoir souligné les nombreux points de convergence entre les choix du Gouvernement et vos propositions. Vous êtes défavorable à une diminution du taux de prélèvements obligatoires tant que les finances publiques ne seront pas durablement assainies. C'est au niveau de 43,2 % du PIB que nous le stabiliserons entre 2009 et 2012.

L'éloge appuyé que M. Myard a fait de la politique de maîtrise de la dépense adoptée par le Gouvernement nous a confortés dans nos choix.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

M. Carayon a salué notre volonté de maintenir les prélèvements obligatoires à leur niveau et de maîtriser les dépenses et le déficit, ce qui nous permettra de recouvrer un peu de marge de manoeuvre politique. Nous le remercions de cet encouragement, ainsi que de ses commentaires sur la nouvelle globalisation.

Monsieur Giraud, vous avez suggéré que, pour soutenir le pouvoir d'achat, il faudrait que le chèque transport soit applicable en milieu urbain, et pas seulement en milieu rural.Mais ce chèque carburant, dont je vous rappelle qu'il est associé au chèque transport en commun pour former le chèque transport (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) ne sera applicable qu'en milieu rural pour des raisons très simples : en milieu urbain, les transports sont, par définition, disponibles. Puisque, comme l'a souligné M. Launay, il faut encourager le respect de l'environnement, nous ne souhaitons pas inciter à l'utilisation d'un véhicule personnel dans un tel cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

La commission des affaires sociales a scellé son sort !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Je terminerai cette partie de mon propos consacrée aux prévisions et à la politique économique en saluant l'excellente intervention de M. Mariton, relative au rebond futur de l'économie française.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

M. Mariton a parlé à juste titre de « réussir le rebond », manifestant le même souci que M. Tron. Tous deux ont traduit l'ambition de la France de répondre vite et bien, dès lors que la croissance permettra de mettre en oeuvre les réformes.

Il est clair que notre économie doit être plus flexible, sans laisser personne sur le côté, mais en répondant au désir d'entreprise et de création d'activité inhérent à notre pays, à son ambition et à ses talents. C'est dans ce cadre que doivent être compris le crédit impôt recherche, l'augmentation de la concurrence dans la distribution, la transposition de la directive Services, la réforme de la formation professionnelle et celle du service public de l'emploi, ou encore un certain nombre de mesures en faveur des plus jeunes ou des seniors qui souhaitent se rapprocher du marché de l'emploi.

J'en viens à quelques remarques concernant la fiscalité.

M. Aly a exprimé son désaccord à l'égard du paquet fiscal. Que n'ai-je entendu sur ce dispositif, qui coûterait, a-t-on dit, 17 milliards d'euros et ne profiterait qu'à très peu de nos concitoyens ? Je rappelle qu'il n'a jamais été question d'une telle somme et que, dans le PLF pour 2009, la somme inscrite est de 9,5 milliards. De plus, cette loi bénéficiera à la grande majorité des Français, notamment à ceux qui travaillent.(Murmures.)

Je ne commenterai pas plus avant la mesure concernant les heures supplémentaires. Elle profite à six millions de salariés et connaît un franc succès, puisque son utilisation a augmenté de 40 % en un an.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Il n'y a qu'à comparer les chiffres des premiers trimestres de 2008 et de 2007.

Sur tous les bancs de l'hémicycle, des députés – Mme Karamanli, M. Perruchot, M. Brard et M. Launay – ont appelé à une modernisation de la fiscalité. Ils se sont inquiétés de la réforme de la taxe professionnelle, encore à venir, ou plus généralement de la fiscalité locale. Il est vrai que celle-ci a besoin d'être rationalisée ou simplifiée…

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

et que les bases locatives sur lesquelles s'appuient certains éléments de fiscalité appellent à être renouvelés.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Les valeurs locatives, qui datent parfois de plus de quarante ans, doivent être mises en adéquation avec la valeur réelle des biens sur lesquels la fiscalité est assise.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Nous y travaillons, avec M. Woerth et Mme Alliot-Marie.

La taxe professionnelle pose elle aussi problème, parce qu'elle nuit à la compétitivité des entreprises.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Elle fait partie de ces impôts que personne ne nous envie. Déjà partiellement démantelée par M. Strauss-Kahn, elle ne s'appliquera pas, selon le souhait du Président de la République, aux nouveaux investissements. Néanmoins sa réforme n'ira pas sans une réflexion plus large sur l'architecture de la fiscalité locale et des niveaux d'administration locale, qui sera menée en concertation avec les élus locaux, pour lesquels cette taxe représente une ressource.

M. Vigier, ainsi que d'autres députés, a plaidé pour l'encadrement des niches fiscales. Compte tenu de l'importance du sujet pour les finances publiques, nous avons décidé, M. Woerth et moi-même d'en assurer un meilleur suivi et d'engager une évaluation de leur efficacité au cas par cas, qu'il s'agisse des niches proposées ou des niches existantes. Cette évaluation a été menée avec les ministres concernés. Nous resterons vigilants à l'égard de la créativité fiscale visant à constituer de nouvelles niches. Par ailleurs, cette évaluation vient en complément de notre proposition de plafonner celles qui ne le sont pas encore. S'y ajoutera la discussion sur le plafonnement global des niches, que nous aborderons au cours de nos débats.

M. Bouvard a regretté l'absence d'évaluation précise de certaines dépenses fiscales créées par la loi de modernisation de l'économie, mais, plusieurs de ces dispositions n'entrant en vigueur qu'au 1er janvier, nous y procéderons en temps utile.

Un des sujets favoris de l'opposition est le bouclier fiscal.(« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Je savais que le mot allait vous réveiller ! Il ne s'agit pas, bien évidemment, d'un cadeau fait aux plus riches. (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Mais si ! C'est incroyable ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Cependant, il profite aussi à des ménages qui disposent d'un revenu et d'un patrimoine importants, et dont nous nous réjouissons tous qu'ils restent et qu'ils soient imposés en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Et les traîtres qui partent, vous les défendez ? Koblenz !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Certains, qui paient encore beaucoup d'impôt depuis l'instauration du bouclier, acquittent en moyenne 200 000 euros d'impôts par an, que nous sommes heureux de recouvrer. Cela étant le bouclier fiscal est un droit : en Allemagne, il figure même dans les principes de base de la Constitution. Le principe est simple : nul ne peut se voir prélever plus de 50 % de ses revenus par l'État.

Par ailleurs, 74 % des bénéficiaires de cette mesure sont des ménages qui perçoivent moins de 1 000 euros par mois. Il faut avoir ce chiffre en tête chaque fois qu'on la critique, en la considérant par le petit bout de la lorgnette, qui semble être le seul viseur de certains.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Encore un mot, en réponse à M. Giacobbi, sur les structures que nous avons mises en place pour assurer le financement de l'économie.

La rémunération qui sera versée à l'État comme prix de la garantie qu'il assure pour emprunter sur le marché et constituer des titres super-subordonnés dans le cadre soit de prises de participation au sein des établissements bancaires soit du refinancement, sera de 400 points de base, ce qui représente un taux approximatif d'environ 8 %. Pour simplifier, disons que ces 400 points viennent s'ajouter au taux directeur de 4 % et que, appliqués à 10,5 milliards d'euros, ils représentent 400 millions d'euros, qui entreront dans les caisses de l'État via le paiement de trésorerie qui s'effectuera par la SPPE au budget de l'État. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

Et la TVA à 5,5% sur la restauration ! Dès qu'il n'y a plus d'élections on n'en parle plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'ai reçu de M. Jean-Claude Sandrier et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du règlement sur le projet de loi de programmation des finances publiques 2009-2012.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Madame Lagarde, vous êtes une ministre contracyclique. La semaine dernière, à cette tribune, vous annonciez que les bourses reprenaient confiance, au moment même où une dépêche de l'AFP en provenance de New York nous annonçait justement qu'elles rechutaient. Aujourd'hui, vous annoncez la création de la prime transport. Ce serait une bonne nouvelle… si la commission des affaires sociales n'avait pas supprimé l'article qui la crée ! De plus, ce sont des militants de choc de l'UMP qui vous ont trahie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

"Le dispositif proposé ne se justifie pas ou plus, en particulier parce qu'il vaut mieux privilégier le salaire direct et que les prix du pétrole ont baissé", peut-on lire dans l'amendement du président UMP de la commission, Pierre Méhaignerie, et du rapporteur du budget de la sécurité sociale, Yves Bur. Voyez, madame la ministre : on n'est jamais trahi que par les siens.

A la fin de votre propos, vous avez mentionné ceux qui, dépourvus de la moindre fibre patriotique, n'hésitent pas à abandonner leur pays pour mettre leurs trois francs six sous – puissance mille ! – à l'abri. Que vous vous humiliez devant ces gens me choque profondément. Certes, vous n'êtes pas la première. L'un de vos prédécesseurs, M. Breton, avait fait appel à un expert, Alain Prost, domicilié fiscalement en Suisse, pour lui faire des propositions. C'est choquant, et un gouvernement digne de ce nom devrait mener un combat vigoureux contre ce manque de patriotisme.

Vous vous indignez lorsqu'on siffle La Marseillaise au Stade de France ! Mais que ces gens trahissent la France ne vous indigne pas du tout.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je n'ai pas de mot assez fort pour stigmatiser vos propos à ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

J'en viens à la programmation pluriannuelle des finances publiques. C'est un objectif très ambitieux en temps normal, un exercice extrêmement périlleux dans le contexte international actuel, et même d'une grande témérité au regard de l'objectif constitutionnel de l'équilibre des comptes des administrations. M. Woerth a beaucoup d'humour lorsqu'il parle même de « vision » pluriannuelle. La seule vision qu'on peut avoir, c'est en se retournant, car, à moins que vous n'ayez une boule de cristal extrêmement fiable, je ne sais pas ce que vous pouvez voir avec certitude pour les trois années à venir.

Selon l'exposé des motifs de votre projet, cette programmation est à la fois « prudente » et « ambitieuse, car elle prévoit de ramener le besoin de financement des comptes publics en 2012 à une situation proche de l'équilibre – soit un niveau qui n'a pas été atteint depuis 1980 – en associant tous les acteurs de la dépense publique au redressement des comptes. » Vous vous fixez donc comme objectif de réaliser ce qui ne l'a jamais été depuis vingt-huit ans, et cela dans les pires conditions économiques et financières que nous ayons connues depuis quatre-vingts ans ! Quant à la mention doucereuse de l'association de « tous les acteurs de la dépense publique », cela veut dire que les finances des collectivités territoriales et des organismes de protection sociale vont passer à l'essoreuse selon des modalités qui sont d'ailleurs précisées dans le rapport joint au projet par le Gouvernement.

Ni la loi de programmation ni ce rapport ne font mention de la crise financière et économique actuelle, ce qui est logique puisque, d'après une dépêche AFP du 15 octobre, M. Fillon a expliqué : « Au sens le plus profond pour moi, il ne s'agit pas d'une récession .» Proposez donc cette citation comme sujet au bac, on verra ce que les lycéens trouveront à dire sur ce sujet !

Le rapport joint par le Gouvernement au projet décrit ainsi la situation dans le chapitre Les hypothèses macro-économiques retenues, la situation et les perspectives à court terme (2008-2009) : « Depuis un an, l'environnement international est effectivement moins porteur » – c'est une litote – « pour la France et ses partenaires européens. » Disons-le clairement : il a été moins porteur pour la France surtout. Pourquoi cette différence, alors que, de 1997 à 2002, le contexte porteur pour tous était plus porteur pour la France ? C'est que les politiques nationale jouent bien leur rôle. Et on ne peut nier que la crise internationale a une dimension nationale spécifique, laquelle résulte directement, madame Lagarde, de la politique que vous menez avec acharnement et conviction. Je respecte toujours la conviction, mais cet acharnement confine à une sorte de sadisme envers nos compatriotes qui n'est pas de très bon aloi.

Toujours dans ce rapport, dans le paragraphe intitulé : Les perspectives à moyen terme (2010-2012), on lit : « Le scénario économique retenu [...] retient une hypothèse de croissance de 2,5 % par an à partir de 2010. Le rebond de croissance dès 2010 repose sur l'hypothèse conventionnelle d'un retour de l'environnement international sur un sentier de croissance moyen, » – mieux vaut parler de sentier que d'autoroute, en effet – « et un rattrapage partiel des retards de croissance accumulés en 2008 et 2009. [..] Dans ce scénario, les réformes structurelles sur le marché du travail contribueraient à ramener l'économie vers le plein emploi à cet horizon ».

On croit rêver ! Quelle considération portez-vous donc au Parlement pour nous servir de pareilles calembredaines ? Votre gouvernement persiste dans le déni de la gravité de la crise, déni qui confine à l'inconscience, et cela malgré les exhortations du Président de la République à Toulon le 25 septembre : « On ne rétablira pas la confiance en mentant, on rétablira la confiance en disant la vérité. La vérité, les Français la veulent, et je suis persuadé qu'ils sont prêts à l'entendre. » Vous qui le citez sans cesse, pourquoi ne déférez-vous pas aux réquisitions du Président de la République ? Cette vérité nous la voulons, nous voulons que l'on en débatte sérieusement…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… avec de nouvelles hypothèses, ce qui nécessite de retourner en commission, et nous voulons proposer des solutions conformes à l'intérêt national.

Nos voisins allemands, nettement plus réalistes, ont révisé les prévisions de croissance à la baisse ; le ministre des finances, Peter Steinbrück mise, pour 2009 sur une croissance de 0,2 %. Les instituts de conjoncture allemands ont produit un scénario pessimiste, mais malheureusement probable, dans lequel, en 2009, le PIB reculerait de 0,8 % et la consommation des ménages de 0,5 %. Sans doute la récession, comme le nuage de Tchernobyl en 1986, va-t-elle s'arrêter aux frontières de la France ! Il est vrai que vous avez longtemps prétendu que la crise resterait cantonnée à la sphère financière sans se propager à l'économie réelle. Ainsi le 10 février dernier, au G7 au Japon, vous affirmiez : « Nous ne prévoyons pas de récession dans le cas de l'Europe ».

Cela étant, pour discerner les développements et l'ampleur de la crise, il faut d'abord analyser ses causes, dans lesquelles, comme l'a récemment souligné Michel Camdessus, les gouvernements occidentaux ont une responsabilité majeure. Cependant là où M. Camdessus fait fausse route, c'est quand il dit : « Nous sortons d'une perversion du système capitaliste et libéral [...] le système de marché est le meilleur, à une seule condition que l'on a oubliée avec arrogance : les entrepreneurs doivent se comporter correctement, avec le souci de leur prochain, en modérant leurs pulsions de possession et d'accaparement. ». Curieux langage judéo-christiano-psychanalitico-je ne sais quoi, qui n'a rien à voir avec une analyse sérieuse de la situation économique. Dans la série des appels à la vertu, vous avez appelé à moraliser le capitalisme. Comment moraliser ce qui, par essence, est immoral ?

Pourtant la situation que nous vivons aujourd'hui n'est pas nouvelle. Qui a dit, selon vous : « Ainsi, le XXIe siècle marque un tournant où l'ancien capitalisme fait place au nouveau. La domination du capital financier se substitue à la domination du capital en général. » Je vois que des collègues, sur les bancs de droite, s'interrogent.

Un député du groupe UMP. On s'en fout !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Qu'un ignorant s'en fiche, cela ne me surprend pas, et que vous ne trouviez pas l'auteur de cette citation ne m'étonne pas plus, car je ne me suis jamais fait d'illusion sur l'étendue de votre culture. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je ne généralise pas car ce serait injuste : je répondais simplement à celui qui m'a interrompu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je ne provoque pas ; je répondais à l'interrupteur !

En réalité, j'ai un peu modifié la citation. Elle commençait par « L'histoire du XXe siècle… ». C'est que le capitalisme traverse des phases différentes, mais avec les mêmes fondements. L'auteur, vous l'avez maintenant reconnu, c'est Vladimir Ilitch Lénine, dans un texte de 1916.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pour ma part, je lis tout, chère collègue. Et vous ne pouvez pas comprendre la situation actuelle, justement car vous ne lisez pas tout.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je ne parle pas de vous, monsieur Mariton – je sais que votre culture est quasi encyclopédique – mais de Mme Hostalier…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Brard, un minimum de courtoisie envers vos collègues, s'il vous plaît !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce n'était pas méchant, monsieur le président. C'est un échange !

Vous êtes gênés d'être mis devant vos responsabilités, vous êtes dépourvus de toute capacité d'analyse de la situation et des causes profondes de la crise, à savoir ce que certains appelaient la suraccumulation du capital qui s'est manifestée dans la bulle financière et a entraîné, nécessairement, la destruction partielle de cette bulle pour que le capital retrouve un taux de profit acceptable, bref le b-a-ba de l'économie politique, à condition d'avoir quelque référence. Si j'en crois M. Mariton, Mme Hostalier est trop modeste à ce propos.(Sourires.)

La crise résulte d'une exigence impossible à satisfaire. : celle des détenteurs de capitaux qui veulent tous obtenir une rentabilité alignée sur les rendements à deux chiffres des actifs financiers de certains segments, comme celui des crédits hypothécaires à hauts risques, les subprimes américains dont le Président de la République française faisait la promotion il y a à peine plus d'un an. Mais comme le souligne, M. Michel Husson, statisticien et économiste : « La loi de la valeur intervient périodiquement pour rappeler que le volume des richesses produites est borné par l'extraction de la plus-value, bref qu'on ne peut pas distribuer plus de richesses qu'on en produit. Les actifs financiers ne sont au fond que des droits de tirage sur la plus-value. » Cette analyse est incontestable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pourtant ceux qui nous gouvernent, et que vous soutenez, madame Hostalier, sont incapables de faire cette analyse, car leurs positions ne relèvent pas du champ de la rationalité, de l'analyse et de la réflexion, mais de la croyance, de la foi aveugle et de l'adoration du Veau d'or. Là se situe la différence fondamentale entre eux et nous. Alors que certains ont accumulé des fortunes considérables, nous côtoyons tous dans nos circonscriptions des familles qui ne s'en sortent plus parce que le coût de la vie a augmenté et que les revenus ont stagné du fait d'une injuste répartition des richesses. On peut parler d'un phénomène de masse de salariés pauvres ; il ne s'agit pas d'une hallucination : ceux qui travaillent sont de moins en moins bien rémunérés pour leurs efforts.

Madame Lagarde, j'ai noté que vous avez affirmé avoir fait le choix de la transparence et de la vérité. Est-ce que cela n'allait pas sans dire ? Le fait que vous éprouviez le besoin de nous rappeler ce choix crée une suspicion autour de cette sincérité sans cesse proclamée.

L'autre jour, nous avons appris qu'un membre du Gouvernement avait décroché son téléphone durant une séance de questions pour s'enquérir de l'imposition de M. Forgeard. Madame Lagarde, puisque M. Hirsch a pu s'informer de l'état de la fortune de l'un des responsables de l'extension du chômage en France, de l'un de ceux qui en ont largement profité, vous pourriez peut-être téléphoner, vous aussi ? Puisque vous prétendez faire payer les riches, je voudrais savoir ce qu'il en est pour MM. Gérard Mulliez, Bernard Arnault, Mme Liliane Bettancourt, MM. Romain Zaleski, Robert Louis-Dreyfus, Bertrand Puech, François Pinault, Serge Dassault, les familles Duval et Aubert, MM. Alain Wertheimer, Jacques Servier, Robert Halley, Emmanuel Besnier, Philippe et Jacques Bourriez, Pierre Castel, Vincent Bolloré – n'est-ce pas celui qui a un yacht ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais je les cite dans l'ordre. Parmi les riches, il y a des pauvres – relativement pauvres, bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Rassurez-vous, je ne vais pas vous énumérer la liste des cinq cents plus grandes fortunes françaises. Cependant, madame Lagarde, votre discours sera convaincant le jour où vous nous démontrerez que vous faites payer ces gens-là qui sont responsables de l'appauvrissement de millions de familles et confisquent les richesses en privant les travailleurs des justes fruits de leurs efforts ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Que mes propos écorchent vos oreilles délicates, mes chers collègues, je le conçois et je m'en réjouis même. Le jour où vous serez d'accord avec moi, je me demanderai quelle sottise j'ai bien pu dire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pas du tout ! Je ne vise pas l'union nationale avec ceux qui défendent les privilégiés. Je défends les plus modestes, ceux qui croient à la République, ceux qui pensent que la formule qui figure au fronton de nos monuments peut devenir un jour une réalité. Hélas, depuis 2002, cette perspective s'éloigne chaque jour un peu plus !

Madame la ministre, pour que des bulles spéculatives puissent se développer, il faut aussi que la réglementation le permette. Or, dans la période récente, elle a été assouplie par le vent mauvais de déréglementation frénétique que vous avez fait souffler et auquel la Commission européenne a apporté plus que sa part. L'existence de quelques dizaines de paradis fiscaux et bancaires constitue une autre pièce du puzzle et un scandale permanent, comme l'exemple du Lichtenstein, au coeur de l'Union européenne, l'a récemment montré. Ces États bénéficient d'une libre circulation des capitaux, sans aucune contrepartie en marchandises ou en services. Il est nécessaire, comme l'avait proposé M. Tobin, de taxer les transferts spéculatifs. Contrairement à ce que disait Michel Bouvard, il faut profiter de la crise pour instituer cette taxe et éviter de retomber dans l'ornière.

Les paradis fiscaux et les parachutes dorés sont devenus la dernière tarte à la crème du Président de la République. À Toulon, il s'était engagé à ce qu'une loi sur les parachutes dorés soit votée avant la fin de l'année 2008, mais il s'agissait d'impressionner le bon peuple. Évidemment, depuis son discours, Nicolas Sarkozy à renoncer à faire voter un texte.

Quant aux paradis fiscaux, savez-vous seulement, madame la ministre, qu'aux Bahamas, les infrastructures routières sont cofinancées par l'Union européenne ? Un État qui « truande » bénéficie donc des subsides de l'Union européenne, et vous laissez faire ! C'est bien aux actes que l'on juge de la sincérité des convictions affichées. Cela étant nul besoin d'aller jusqu'au Bahamas pour trouver un paradis fiscal : Guernesey, Jersey, l'Île de Man…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Ils ont fait beaucoup de progrès !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Souvenez-vous du courage du général de Gaulle avec Monaco ; inspirez-vous donc de cet exemple historique pour éradiquer ce paradis fiscal.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Bien sûr : le général de Gaulle est une excellente référence, mais ses épigones lui sont infidèles, vous le savez, monsieur Schneider, vous qui êtes député de cette Alsace où la rigueur est une vertu. Enseignez donc celle-ci aux membres du Gouvernement : ils vous donneront du fil à retordre !(Sourires.)

Madame la ministre, vous avez laissé proliférer une série d'innovations financières de plus en plus sophistiquées, de plus en plus opaques et aventureuses. Il faut citer tous les produits dérivés qui permettent des opérations complexes d'achat et de vente à terme, et l'effet de levier qui démultiplie les fonds dont disposent les opérateurs. En outre, les banques ont trouvé le moyen de se débarrasser de leurs créances et actifs douteux.

Dans le même élan d'appât du gain, les banques ont organisé, dans leurs salles, des marchés, des équipes de spécialistes de la spéculation récompensés par des primes exorbitantes. Ce genre de pratiques avait fait perdre 5 milliards d'euros à la Société Générale et, puisque vous n'aviez tiré aucune leçon de cette expérience, elle vient encore de coûter 600 millions à la Caisse d'épargne. Malgré cela, vous continuer à ne rien faire, vous contentant de désigner à la vindicte générale les dirigeants faillis bien obligés de démissionner. M. Milhaud, dans sa bonté sans limite, renonce même à ses indemnités comme s'il n'avait pas gagné assez d'argent jusque-là et, surtout, comme s'il n'en avait pas assez fait perdre aux Caisses d'épargne. Votre responsabilité est pourtant directement engagée dans cette affaire.

Le capitalisme financier n'est pas séparé du capitalisme entrepreneurial.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je veux formuler des propositions qui justifient le renvoi en commission du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

Le Gouvernement n'est pas capable d'analyser les raisons profondes de la crise et tente d'en cacher les effets les plus visibles qui lui sont politiquement nuisibles. Madame la ministre, vous voulez donner le sentiment que la majorité est réactive, mais même l'activisme du Président de la République ne fait pas illusion. Qu'il aille rencontrer son ami Georges Bush, avec l'efficacité que l'on imagine à quelques mois de la fin du mandat de ce dernier, ne trompe personne.

À partir de nos propositions, nous pourrons confronter utilement nos points de vue. Nous considérons ainsi qu'il faut constituer un pôle financier public avec la Caisse des dépôts, la Banque postale, la CNP, Oséo et les Caisses d'épargne, qui seraient alors réorientées vers des missions non spéculatives et conformes à l'intérêt général. Ce pôle financier public aura pour mission de garantir l'accès à des crédits à faible taux pour permettre aux entreprises de développer la recherche, l'emploi et l'investissement productif. Ses composantes devront être inaliénables.

Nous proposons le rachat des actions des établissements financiers en difficulté au cours de la bourse, ces actions devenant inaliénables seront intégrées au pôle financier public. La garantie de la totalité des dépôts bancaires devra être assurée jusqu'à 100 000 euros, elle sera de 75 % jusqu'à 200 000 euros de dépôt, et de 50 % jusqu'à 400 000 euros.

Nous proposons aussi l'imputation du coût des suppressions d'emplois décidées pour les entreprises cotées, prioritairement sur les dividendes, à l'exclusion de toute aide publique – je pense à Renault et à Laurent Wauquiez dont les déclarations contrastent avec l'action totalement inexistante du Gouvernement – ; nous proposons encore la redéfinition, au sein de l'Agence des participations de l'État, d'une politique pour l'actionnariat d'État, assortie d'une interdiction de cession, dont le fonctionnement transparent sera placé sous le contrôle du Parlement, avec un débat annuel suivi d'un vote.

Les projets de privatisation ou d'ouverture du capital de La Poste, de la SNCF, d'EDF etcetera seront abandonnés. Les avantages exorbitants constitués par les éléments de rémunération dont nous avons maintes fois parlé, comme les parachutes dorés, seront supprimés

Seront lancés, d'une part, un programme de construction de 200 000 logements sociaux, très sociaux, en accession sociale à la propriété, chaque année pendant cinq ans, financés à un taux de 2 % avec des prêts sur quarante ans ; d'autre part, un programme de financement et de réalisation des projets d'infrastructures de transports, déjà prêts mais non financés.

Des prêts à 2 %, plafonnés à 50 000 euros, seront octroyés pour les travaux d'entretien d'aménagement et de transformation des logements d'habitation, accessibles à tous les foyers ayant un revenu réel inférieur à 50 000 euros annuels,

Un prélèvement exceptionnel sur les grandes fortunes, qui vous sont si chères, madame la ministre, mais qui coûtent tant au pays, sera institué au-delà de trois fois le plancher de l'ISF pour financer ce plan de relance de l'activité et de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Surtout si vous m'interrompez !

Une conférence nationale sera convoquée pour mettre en place les mesures que je viens d'évoquer, et les marchés financiers seront fermés jusqu'à la conclusion des travaux de cette conférence.

Une conférence du pouvoir d'achat sera organisée qui devra traiter de l'augmentation du SMIC à 1 500 euros sur deux ans, avec une première étape à 1 300 euros dès aujourd'hui. Elle examinera les minima sociaux et les pensions pour leur faire retrouver leur pouvoir d'achat et le garantir. La conférence examinera également la fiscalité sur la consommation et sur les revenus,

La dette de tous les foyers surendettés de bonne foi sera annulée, la dépense étant en partie financée par un prélèvement exceptionnel sur les profits des établissements de crédit à la consommation.

L'action ne peut se limiter au seul échelon national. Au niveau européen, le politique doit reprendre l'initiative et assumer ses responsabilités. Ainsi, il faut mettre fin à l'indépendance de la Banque centrale européenne pour l'obliger à mener des politiques conformes à l'intérêt des peuples. Elle ne fait aujourd'hui qu'appliquer un credo monétariste qui ne satisfait que les besoins de rentabilité du capital, pour le plus grand bien des actionnaires.

Madame la ministre, vous ne pouvez pas contester que j'ai présenté des propositions. Qu'elles suscitent votre adhésion spontanée, je n'ose l'espérer. Aussi, pour que nous ayons le temps de vous convaincre, faut-il renvoyer le texte en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Dans les explications de vote sur la motion de renvoi en commission, la parole est à M. Patrick Roy, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Madame la ministre, monsieur le ministre, nous venons d'entendre une excellente motion de renvoi en commission, défendue par un député dans une forme olympique, qui a non seulement émis des critiques, mais aussi présenté des propositions.

Ce budget, que vous qualifiez de « budget vérité », est essentiellement un budget mensonger. Depuis dix-huit mois, ou bien vous vous trompez, ou bien vous nous mentez, puisque chacune de vos déclarations a été contredite, quelques jours ou quelques semaines plus tard, par les événements.

À cause de la crise financière actuelle, qui entraînera une crise économique puis, malheureusement, sociale, les Français, qui, incontestablement, souffrent déjà beaucoup, souffriront encore plus. Or cette crise, soit vous ne l'aviez pas prévue, soit vous l'aviez vue venir et, dans ce cas, vous nous avez menti, en nous disant que tout allait bien, que la récession ne toucherait pas la France, que nous nous préparions un avenir radieux !

Puis, quand l'évidence s'est imposée, vous avez tenu, dans cet hémicycle, un discours à l'opposé de tout ce que vous aviez dit depuis dix-huit mois, jouant ainsi – M. Brard et moi l'avons dénoncé – les pompiers pyromanes. C'est vous qui avez allumé le feu, et la crise sera encore plus grave en France à cause de votre politique néfaste.

Par ailleurs, puisque, dans les faits, vous continuez à protéger les parachutes dorés, les stock-options et les paradis fiscaux, je m'interroge : soit le Président Sarkozy nous ment depuis quelques jours ; soit la majorité, qui émet des votes contraires à ses recommandations, ne l'écoute pas ; soit le Président et sa majorité jouent ensemble un double jeu, et c'est ce que je suis enclin à penser. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Madame la ministre, quand je vous entends dire, de votre voix angélique, que le bouclier fiscal, qui profite aux plus grands privilégiés de ce pays, bénéficie aux Français les plus faibles, les bras m'en tombent !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Roy, veuillez vous acheminer vers votre conclusion, s'il vous plaît.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Enfin (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), un seul argument suffirait à justifier le renvoi en commission : la prime transport, que je vous ai entendue défendre avec conviction,…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

…a été supprimée, cet après-midi, en commission, par votre majorité, à l'initiative de M. Méhaignerie. Double langage, double jeu : décidément, le texte doit être renvoyé en commission ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion commune du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 et du projet de loi de finances pour 2009.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 22 octobre 2008, à zéro heure vingt.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma