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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 17 janvier 2008 à 15h00
Grenelle de l'insertion — Déclaration du gouvernement et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

…que vous aviez lancé le Grenelle de l'insertion pour briser les idées reçues. C'est là une ambition sans rapport ni avec la nature des phénomènes d'exclusion ni avec leur ampleur. Par ailleurs, contrairement à Mme Parisot, je ne pense pas que les difficultés des personnes en situation d'exclusion proviennent d'un manque de confiance en elles ! L'essentiel est ailleurs, et vous le savez fort bien. Les causes sont profondes et structurelles ; elles appellent des mesures volontaristes et une autre répartition des richesses. Voilà ce que l'on est en droit d'attendre du Grenelle de l'insertion.

Localement, les acteurs sociaux attendent aussi la levée de blocages juridiques qui entravent leurs actions. Prenons l'exemple des régies de quartiers, qui participent depuis maintenant vingt ans à la politique de la ville et contribuent de manière décisive à améliorer le cadre de vie des quartiers populaires. À Gennevilliers, la régie de quartier du Luth emploie vingt-cinq personnes, dont dix-sept salariés – pratiquement tous Gennevillois – en parcours d'insertion. La réussite de ce parcours s'appuie sur un suivi individualisé, des actions de formation, l'apprentissage d'un savoir-être et d'un savoir-faire, de cours d'alphabétisation si nécessaire… Bref, un travail en profondeur qui s'étale sur deux ans et qui peut être brutalement remis en cause par des problèmes de logement ou de santé. Si l'objectif est vraiment la lutte contre l'exclusion, tous ces éléments ne doivent pas être négligés. On est loin de la psychologie de comptoir de la patronne du Medef !

Or voilà maintenant trois ans que les régies de quartiers, via leur comité national de liaison, réclament de pouvoir faire partie du dispositif social et fiscal des activités de services à la personne mis en place par la loi de juillet 2005. Tous les acteurs sociaux, y compris l'UNCCAS, insistent dans ce sens. Il vous appartient de les satisfaire et de lever cet obstacle à leur action.

Trop nombreux sont sans doute, dans les rangs de la majorité et sur les bancs du Gouvernement, ceux qui, à l'instar de Mme Parisot, versent dans le psychologisme, dans le « vertuisme », de façon à masquer l'importance des responsabilités collectives et la nécessité d'une politique volontariste et efficace. Trop nombreux sont ceux pour qui la priorité est d'organiser le basculement d'un État « assurantiel » qui protège les gens du risque du chômage à un État qui les pousse à reprendre n'importe quel emploi, au mépris de leur dignité et au risque de faire prospérer l'emploi sous-qualifié. Pour le dire autrement, trop nombreux sont les partisans d'une approche idéologique et moralisatrice de l'exclusion.

Dans ce contexte, monsieur le haut-commissaire, si nous ne remettons pas en cause votre bonne foi, nous ne nous faisons guère d'illusion sur l'issue de votre entreprise ni sur votre perméabilité aux thèses de ceux qui veulent enterrer le modèle social français. Nous redoutons que ce Grenelle ne participe en fait du patient et dangereux travail de démolition des politiques sociales. Nous aurions sans doute accueilli avec plus d'enthousiasme une loi de programmation soutenue par une véritable relance de la lutte contre l'exclusion. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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