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Intervention de Martin Hirsch

Réunion du 17 janvier 2008 à 15h00
Grenelle de l'insertion — Déclaration du gouvernement et débat sur cette déclaration

Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté :

Le RSA, c'est déjà une simplification puisqu'il consiste à remplacer un certain nombre de minima sociaux, d'aides et de prestations par un mécanisme unique.

Le contrat unique d'insertion, c'est aussi une simplification par rapport au maquis des contrats.

Le bouclier sanitaire, s'il est accepté, c'est potentiellement une simplification considérable par rapport aux différents mécanismes de l'assurance maladie.

La connexion entre un service public de l'emploi rénové et l'insertion professionnelle, c'est également une simplification, avec la suppression de critères d'accès en fonction des statuts.

Simplifier impose de donner de la souplesse et de faire confiance. C'est, me semble-t-il, la première question de principe que l'on doit se poser : peut-on mettre en place des prestations moins normées réglementairement, en améliorant l'équité et sans laisser filer les dépenses ?

Le deuxième principe, c'est de garantir que les revenus du travail soient supérieurs à ceux de la solidarité. C'est le but de la création du revenu de solidarité active, qui a trois objectifs : supprimer les effets de seuil pour les allocataires de minima sociaux qui retrouvent du travail ; lutter contre la pauvreté au travail ; rendre lisible et prévisible un système qui ne l'est plus. Il est expérimenté, sous une forme incomplète, dans des départements volontaires. À terme, il a l'ambition de se substituer à de nombreux dispositifs, en garantissant que toute augmentation du revenu du travail se traduise par un accroissement des ressources du ménage. Il est aussi destiné, bien évidemment, à soutenir le pouvoir d'achat des travailleurs à bas salaire, et ce de façon plus lisible que la prime pour l'emploi.

Pour que le RSA soit juste, il faut qu'il soit complet. Nous le concevons comme un système qui donne, à travail égal et à composition familiale équivalente, les mêmes revenus à tous, que l'on soit passé par les minima sociaux ou que l'on soit simplement un travailleur aux revenus modestes.

Il faut insister sur ce point. J'entends parfois exprimer la crainte qu'avec le revenu de solidarité active, une personne qui ne serait pas passée par les minima sociaux, qui serait à mi-temps, ou qui serait même au SMIC avec des charges de famille, aurait des revenus inférieurs à ceux d'une personne qui sortirait du RMI pour occuper un emploi du même type. Cette crainte n'est pas fondée.

J'entends aussi parfois dire que le RSA va pousser dans le sens du temps partiel. Or, quand on analyse le barème du revenu de solidarité active sur lequel nous travaillons et qu'on le compare au barème actuel fixé par la loi pour le retour à l'emploi, on constate que le gain de revenu, quand on passe d'un mi-temps à un trois-quarts de temps ou d'un trois-quarts de temps à un plein temps, serait supérieur avec le barème du RSA.

Faire en sorte que les revenus du travail soient supérieurs à ceux de la solidarité, par le biais du RSA, cela impose de revoir un certain nombre de mécanismes, et notamment celui des aides au logement, sujet que connaît bien M. Pinte. Il convient d'éviter les effets de trappe.

Il faudra également se pencher sur les effets de seuil liés à la couverture maladie universelle. C'est la raison pour laquelle nous avons proposé le bouclier sanitaire. Dès lors que le reste à charge est fonction du revenu, il n'y a plus d'effort pesant sur ceux qui sont juste au-dessus du seuil d'exonération de la participation de l'assuré. Cet effet de seuil devrait disparaître, pour laisser place à un continuum.

Il faudra également que les aides connexes, celles des collectivités locales ou celles de l'État, puissent être revues afin d'éviter les effets de seuil.

Le troisième principe, c'est une conception plus souple, plus large et plus réaliste de la notion d'employabilité. Bien évidemment, tout le monde n'a pas les mêmes besoins. Mais certains évoquent, au sujet de personnes qui seraient, à un instant t, dans l'incapacité d'être immédiatement recrutées par une entreprise dans le cadre d'un contrat de travail classique, la notion de « handicap social » ou de « COTOREP sociale ». Ils sous-entendent qu'il vaut mieux prendre acte d'une difficulté à travailler, plutôt que de s'acharner vers une insertion impossible. Permettez-moi de pointer les risques d'une telle approche, même adoptée avec les meilleures intentions du monde, et ses possibles dérives.

Certes, on peut reconnaître que certaines personnes ont des besoins qui relèvent d'abord de l'accompagnement social. Mais les classer comme « inemployables », et prévoir à ce titre un système qui leur serait spécifiquement destiné, ce serait faire une croix sur elles. Je pense à certaines associations, dont l'une m'est particulièrement chère, qui font travailler dans les métiers de la récupération des personnes cataloguées comme « inemployables » par le reste de la société alors qu'elles vivent dignement de leur travail. Il serait dramatique de les renvoyer à une notion d'« inemployabilité ».

Cela veut dire qu'il faut élargir la définition de ce qu'on appelle l'employabilité. Il me semble que quelqu'un qui travaille dans une entreprise d'insertion, c'est quelqu'un qui est employé…

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