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Intervention de Claude Leteurtre

Réunion du 28 février 2012 à 21h45
Mesures conservatoires en matière de procédures de sauvegarde de redressement ou de liquidation judiciaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude Leteurtre :

Nous sommes réunis – et votre présence en atteste, monsieur le garde des sceaux – afin d'adapter notre droit à une situation d'urgence. C'était effectivement nécessaire. Nous avons tous, en effet, été interpellés par les appels à l'aide des quelque 550 salariés de la raffinerie de Petit-Couronne à la suite de la mise en faillite de son propriétaire, le groupe Petroplus. Je souhaite, au nom des députés du groupe Nouveau Centre, me féliciter qu'un dispositif d'urgence puisse être examiné par notre assemblée afin de leur apporter un début de réponse.

La proposition de loi entend, en effet, combler une lacune du droit des procédures collectives qui éclate au grand jour aujourd'hui avec cette affaire de Petroplus. Il s'agit de permettre la mise en oeuvre de mesures conservatoires dans le cadre de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires.

Revenons un instant sur les faits : la raffinerie de Petit-Couronne a une longue histoire puisqu'elle a commencé ses activités en 1927 sous le nom de « Société maritime des pétroles ». Longtemps exploitée par Shell, elle est cédée au groupe Petroplus le 1er avril 2005. Le 27 décembre 2011, le groupe, dont la société d'investissement américaine Carlyle possède 57 % des parts, annonce qu'il ne peut plus acheter de pétrole brut à cause du gel par ses banques d'une ligne de crédit d'un milliard de dollars. Après de vaines tentatives de discussion avec ses financeurs, Petroplus annonce, le 20 janvier dernier, la mise en vente de sa raffinerie de Petit-Couronne en Seine-Maritime. Les raffineries suisse et belge de Petroplus sont également mises à l'arrêt. En quelques années à peine, le plus important raffineur indépendant au monde a fait les mauvais choix et dégage une perte de 400 millions d'euros sur les neuf premiers mois de l'année 2011. Fin janvier, la société fait face au gel de ses lignes de crédit auprès de treize banques et c'est la cessation de paiement. La société enregistre alors 2 milliards de pertes et l'on peut s'interroger sur la véracité de la démarche.

Cet état de fait conduit à l'ouverture d'un redressement judiciaire dans chacun des pays concernés. Un tel échec conduit surtout au désarroi plus de 550 familles.

Si différents candidats à la présidentielle se sont succédé sur le site pour aller à la rencontre des ouvriers, le Gouvernement a quant à lui réagi d'abord par l'intermédiaire du médiateur du crédit. Je profite de cet instant pour souligner le rôle déterminant que joue le médiateur dans bien des situations moins médiatisées que celle qui nous préoccupe aujourd'hui. Les actions mises en oeuvre par ce service fonctionnent, et il faut le soutenir. À l'avenir, il faudra renforcer encore sa force de frappe, notamment pour les PME-PMI.

Pour revenir à la proposition de loi, l'enjeu réel, c'est que l'arrêt de la raffinerie début janvier implique une dégradation rapide des installations. Bientôt, son redémarrage sera impossible.

Aussi, empêcher le détournement d'actifs est capital afin de mettre à profit ce que les syndicats sur place appellent leur trésor de guerre. En effet, en stock, la raffinerie conserve 200 millions d'euros de production, et tout laisse à penser que la société mère n'est pas sans être intéressée par la récupération de ces produits en stock.

Le droit actuel, bien que la société ait été mise en redressement judiciaire, est lacunaire. La proposition de loi propose d'étendre les dispositions prévues dans les liquidations judiciaires afin que le juge puisse saisir, à titre conservatoire, les actifs que la société mère du groupe Petroplus souhaite récupérer alors que la décision judiciaire ne l'a pas encore reconnue responsable dans la défaillance de son site de Petit-Couronne.

Le texte, s'il est adopté, permettra de sécuriser juridiquement la mise sous séquestre des stocks et des installations face à des sociétés mères peu scrupuleuses.

L'opération est certes complexe mais elle est juste, à la fois pour les salariés, qui peuvent avoir l'espoir de voir redémarrer leur raffinerie ou d'obtenir une indemnisation correcte, et pour l'outil industriel, qui, sinon, connaîtra au fil des semaines une dégradation rapide. L'arrêt correct d'une raffinerie nécessite plusieurs mois et plusieurs dizaines de millions d'euros.

Aux côtés des salariés dans cette épreuve, le Nouveau Centre, comme tous les députés, nous l'espérons, apportera son soutien à cette proposition de loi. Il faut donner une sécurité juridique à tous les salariés et mettre toutes les cartes de notre côté afin d'espérer voir redémarrer la dernière raffinerie indépendante du territoire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

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