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Intervention de Christian Descheemaeker

Réunion du 7 février 2012 à 17h45
Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-france

Christian Descheemaeker, président de la septième chambre de la Cour des comptes :

Sur l'avenir de La Défense, je commencerai par une remarque individuelle : avant de créer 40 000 emplois, il faut savoir où les situer et comment transporter ceux qui les occuperont. Quand j'ai contrôlé l'Établissement public pour l'aménagement de La Défense (EPAD), j'ai entendu, au conseil d'administration, un échange qui m'a inquiété. Quelqu'un posait la question suivante : si, pour financer la rénovation des tours, on accorde le droit de les élever de 30%, comment fera-t-on dans trente ans, quand le problème de la rénovation se posera à nouveau ? Quelqu'un a répondu : « nos enfants règleront le problème ».

Des audits externes me semblent effectivement nécessaires pour éclairer la comptabilité des deux opérateurs et identifier des gains de productivité. Les comptes de la SNCF sont complexes, mais, si une fois en place des conventions, on évite de les modifier, on pourra procéder à des comparaisons d'une année sur l'autre, ce qui est essentiel.

Il m'est difficile de me prononcer sur le taux optimal des bonus et des malus. En revanche, il me semble indispensable d'alourdir les sanctions financières à l'encontre des opérateurs qui ne transmettraient pas les informations demandées. Évitons cependant de les décourager, car, même si, sur le papier, la concurrence existe, elle rencontre rapidement ses limites dans les faits.

Faut-il confier les lignes A et B à un exploitant différent ou prévoir une coordination, ce qui serait déjà un progrès ? Je constate que les années passent sans aucune amélioration. Est-il si difficile que deux personnes dont le métier consiste à faire rouler des trains sur des rails collaborent quand une rame a du retard ? En Belgique, on peut attribuer les difficultés de communication à un problème linguistique, mais on ne peut tout de même pas invoquer cet argument en Île-de-France !

J'aimerais pouvoir répondre aux questions de Mme Lepetit sur l'avenir du transport en Île-de-France, mais la Cour ne s'est pas engagée dans cette voie, sans doute par prudence. Le nombre des acteurs a tendance à augmenter. Qu'arrivera-t-il si des concurrents surgissent ? En province, où la RATP n'existe pas, un dialogue est établi entre l'autorité organisatrice et la SNCF. Même si les coûts sont élevés et que l'intervention du département complique parfois la situation – par exemple quand il faut prévoir une ligne d'autocar –, un équilibre a été trouvé. Ce n'est pas le cas en Île-de-France, peut-être parce que les acteurs sont dans des situations différentes : la SNCF et RFF constituent un couple, ce qui n'est pas le cas de la SNCF et de la RATP.

Monsieur Plagnol, la réflexion sur les taux d'utilisation, pertinente pour la consommation d'électricité ou, dans une moindre mesure, pour l'étalement des vacances, est difficile à transposer dans les transports. Comment éviter l'affluence des usagers le matin et le soir ? En dehors des familles qui se rendent dans la journée à EuroDisney – mais rentrent tout de même en fin d'après-midi –, la plupart des trajets s'effectuent à la même heure, entre le domicile et le travail. Aucun schéma ne propose d'abaisser le prix du billet aux heures creuses. Si les adeptes de la voiture n'hésitent pas à partir de chez eux de plus en plus tôt et à rentrer de plus en plus tard, les usagers des transports, qui se plaignent d'être compressés, ne modifient pas pour autant leurs horaires. Quant au rééquilibrage entre l'Est et l'Ouest, j'y suis favorable, considérant, à titre personnel, que la densification de La Défense n'offrira pas d'autre avantage que d'attirer éventuellement des avions meurtriers, mais d'autres prétendent qu'il existe une clientèle qui ne se déplace, de Londres à Singapour, que dans des centres d'affaires de ce type.

Monsieur Richard, vous avez parlé des clients, c'est-à-dire des usagers, qui ont aussi une responsabilité dans les dysfonctionnements. On annonce souvent que le RER est arrêté parce que des gens circulent sur les voies – sans doute est-ce une question d'éducation ! Les suicides, le vandalisme ou l'utilisation intempestive du signal d'alarme ne facilitent pas la tâche des opérateurs dont la responsabilité n'est pas en cause dans 44% des incidents. Si une grande majorité de voyageurs suscite notre admiration par son fatalisme, une faible minorité gêne tout le monde. Des solutions existent, comme les portes palières qu'on trouve sur les lignes 1 et 14, mais elles coûtent cher, et ne règlent pas tous les problèmes.

Monsieur le président, vous avez évoqué les liens entre le RER et les autres trains de la région parisienne, mais il est difficile de savoir où commence et où finit le Transilien. À quoi sert un label qui n'est pas clair ? On a voulu se débarrasser de l'expression « train de banlieue », qui était connotée de manière péjorative, mais on n'a pas rénové le matériel en lançant une nouvelle étiquette. Dès lors, il est logique que la perception des usagers n'ait pas évolué. Certes, on peut créer un autre label pour désigner les trains qui ne sont pas des RER, mais, à titre personnel, il convient de se méfier des labels qui ne sanctionnent pas une amélioration du fonctionnement.

J'ai répondu partiellement sur la gestion unifiée ou la coordination. Celle-ci, qui représenterait déjà une amélioration, se heurte cependant à des obstacles juridiques. La SNCF prétend ne pas pouvoir indiquer le nombre d'agents affectés au Transilien, puisqu'ils peuvent à tout moment intervenir sur autre liaison, mais je ne crois guère à cet argument. Il est probable que certains personnels sont affectés durablement sur les lignes transiliennes. On nous oppose aussi que les conducteurs de la RATP et les cheminots obéissent à des règles de fonctionnement très différentes. Cependant, je l'ai dit, la ligne de Sceaux a été exploitée par la SNCF avant de l'être par la RATP.

La Cour ne s'est pas prononcée sur la réunion éventuelle des opérateurs dans une même instance. On pourrait certes confier la gestion des infrastructures aux collectivités locales, mais il me semble délicat d'introduire un nouvel intervenant dans un schéma très complexe – sauf si l'on en supprime d'abord un autre. Il a déjà fallu de longues discussions pour régler la plupart des litiges découlant, par exemple, du financement de l'extrémité des lignes par le STIF.

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