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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 17 novembre 2011 à 15h00
Indemnisation des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

En 2002, celui de M. Yahiel reconnaissait « l'obsolescence » de la législation des accidents du travail et des maladies professionnelles et, dans ces conditions, considérait comme « inéluctable » le passage à la réparation intégrale « avec un périmètre large, au sens du droit commun ».

En 2004, le rapport Laroque, remis à François Fillon, alors ministre des affaires sociales, a proposé les éléments de méthode pour cette évolution et développé les trois scénarios de réforme que sont la modernisation du système actuel, sa mutation par la mise en oeuvre de la réparation de droit commun ou la réparation intégrale d'assurance sociale.

Plus récemment encore, le Médiateur de la République a demandé de reconsidérer le système de réparation forfaitaire des AT-MP afin de mettre un terme aux inégalités entre, d'une part, les différentes victimes du travail – celles de l'amiante, par exemple, vis-à-vis des autres - et, d'autre part, entre les victimes du travail et celles d'un dommage environnemental ou d'un accident de la circulation.

N'est-il pas injuste, en effet, qu'une victime soit indemnisée différemment pour des préjudices identiques selon qu'elle se trouve aux abords d'une usine ou à l'intérieur de celle-ci, sous la direction de son employeur ? N'est-ce pas choquant qu'une victime ne puisse demander à son employeur réparation de l'ensemble des préjudices subis, alors même qu'il a commis une faute inexcusable ? En dehors de toute faute inexcusable, ne doit-on pas parfaire l'indemnisation des victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles afin d'arrêter de les pénaliser financièrement durant leur arrêt de travail ?

Ces exigences de débat et de progrès en matière d'indemnisation des victimes du travail ont pris un relief tout particulier quand, en 2009, vous avez accepté sans broncher du gouvernement Fillon la décision scandaleuse fiscalisant les indemnités journalières. À ce moment, d'ailleurs, l'engagement avait été pris d'améliorer l'indemnisation des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles. Encore une promesse non tenue de ce quinquennat !

Difficile aussi d'ignorer la décision du Conseil constitutionnel du 18 juin 2010 qui, certes, reconnaît conforme à la Constitution le régime de sécurité sociale existant en matière d'AT-MP, mais tranche en faveur de la réparation intégrale des préjudices subis par la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ou ses ayants droit dès lors que la faute inexcusable de l'employeur est reconnue. Il est vrai que la réserve émise alors ne porte pas sur le caractère forfaitaire des indemnités. Toutefois, en privant de son caractère limitatif ou exclusif l'énumération de la liste des préjudices indemnisables dont la victime peut demander réparation à l'employeur devant les juridictions de la sécurité sociale, le Conseil nous invite à modifier la législation pour garantir l'indemnisation de l'ensemble des préjudices de droit commun en cas de faute inexcusable. Si volontaire quand il s'agit d'assurer la défense des droits des victimes, la majorité de droite semble ignorer le sort de celles du travail, en l'occurrence l'atteinte disproportionnée aux droits des victimes d'actes fautifs actée par le Conseil constitutionnel.

L'amélioration de leur sort semblait faire consensus sur l'ensemble de nos bancs. Mais, comme dans bien d'autres domaines, la majorité peine à passer de la parole aux actes. Le sujet est intéressant, nous dit-on du bout des lèvres, mais le texte n'en poserait pas moins un certain nombre de problèmes, à commencer par celui du respect des partenaires sociaux.

Beau prétexte venant de ceux-là mêmes qui, chaque fois qu'ils souhaitent modifier le code du travail, utilisent justement les propositions de loi pour contourner les partenaires sociaux ! Ont-ils été consultés sur la dernière simplification du droit ? Bien sûr que non ! Les conseils des différentes branches de la sécurité sociale donneront-ils leur avis sur les amendements du Gouvernement introduits dans le PLFSS pour 2012 en nouvelle lecture, en lieu et place d'une loi de financement rectificative ? Non, une fois encore.

Il y aurait aussi, selon vous, un problème de coût. La situation financière de notre pays nous imposerait aujourd'hui de hiérarchiser les urgences, dites-vous.

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