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Intervention de Jean-Philippe Maurer

Réunion du 8 novembre 2011 à 16h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Philippe Maurer, rapporteur pour avis :

Le rapport que Bernard Lesterlin et moi-même allons vous présenter poursuit un double objectif : d'une part, conformément à l'article 145-7 de notre Règlement, il vise à dresser un bilan de l'application réglementaire de la loi du 10 mars 2010 relative au service civique ; il tente, d'autre part, d'apprécier, après un an et demi de fonctionnement, la mise en oeuvre sur le terrain d'un dispositif qui a recueilli une approbation quasi-unanime au Parlement.

Sur ce second aspect, je souhaite préciser que les auditions et tables rondes qui ont été organisées du 31 mars au 6 juillet 2011 avec différents acteurs du service civique ont été conduites par Claude Greff et Bernard Lesterlin, rapporteurs initialement désignés par notre Commission. Comme vous le savez, je remplace Claude Greff qui a été nommée secrétaire d'État à la famille en juin dernier, et je tiens à souligner que je m'associe pleinement aux observations et aux conclusions qui ont été tirées de ces entretiens.

Texte d'origine parlementaire, la loi du 10 mars 2010 vise à encourager l'engagement citoyen des jeunes en instituant un service civique qui réunit les différentes formes de volontariat existantes sous un statut homogène, plus lisible et plus simple. Principalement destiné aux jeunes de 16 à 25 ans, sous la forme d'un « engagement de service civique », le dispositif comporte un second volet, le « volontariat de service civique », qui s'adresse aux plus de 25 ans et sans limite d'âge. La loi crée par ailleurs une « Agence du service civique », structure de pilotage destinée à accompagner la montée en puissance du service civique, le dispositif devant en effet mobiliser 10 % d'une classe d'âge, soit environ 75 000 jeunes, à échéance 2014, selon l'objectif confirmé récemment par le Gouvernement.

Conformément à l'article 23 de la loi du 10 mars 2010 qui prévoyait une mise en oeuvre réglementaire au plus tard le 1er juillet 2010, la plupart des mesures d'application ont été prises rapidement, permettant le démarrage effectif du dispositif et l'accueil, dès le mois de juin 2010, des premiers volontaires.

Sur les dix-huit mesures appelant une application réglementaire, qui étaient prévues par l'article 8 de la loi, seize ont reçu une application à travers le décret n° 2010-485 du 12 mai 2010.

Les deux derniers textes sont parus plus tardivement, en mai et en octobre 2011 : il s'agit d'arrêtés concernant, d'une part, la couverture complémentaire des personnes effectuant un service civique en outre-mer et fixant, d'autre part, le niveau de l'indemnité supplémentaire due aux volontaires effectuant leur service civique à l'étranger.

Par ailleurs, deux décrets en Conseil d'État non prévus par la loi ont été pris, l'un, en septembre 2010, sur la protection sociale de la personne volontaire, et l'autre, en décembre 2010, sur les modalités d'application du service civique dans les outre-mers. D'autres textes réglementaires ou assimilables, arrêtés ministériels pris en application des décrets, instructions, décrets de nomination, etc. ont été également publiés.

Il reste donc à paraître un décret non prévu par la loi, autorisant l'Agence du service civique à verser aux organismes d'accueil des subventions relatives à la formation civique et citoyenne.

S'agissant des mesures non réglementaires, la loi prévoyait la signature par l'État de deux conventions concernant la mise en oeuvre du service civique dans les collectivités d'outre-mer – ce qui n'a pas encore été fait – ainsi que le dépôt de deux rapports du Gouvernement au Parlement. L'un, qui concernait la création d'un congé de service civique, devait être déposé avant le 30 juin 2010, et ne l'a pas été ; l'autre, prévu à l'article 22, concerne la mise en oeuvre du service civique et sa contribution à la cohésion nationale, et doit être remis avant le 31 décembre 2011.

Au-delà de cette approche purement juridique, nous avons souhaité aborder dans notre rapport l'aspect qualitatif de l'application de la loi. En effet, le texte, qui résulte d'un compromis entre le Gouvernement et le Parlement, a laissé pendants certains points essentiels du dispositif qui n'ont pas été précisés par le décret d'application du 12 mai 2010. Il semblait de ce fait intéressant d'examiner la manière dont le service civique s'implantait sur le territoire dans ce cadre très souple, qui laissait une large place aux initiatives des principaux acteurs, associations et collectivités, sous le pilotage de l'Agence du service civique.

Si la nouvelle forme d'engagement citoyen suscite indiscutablement l'intérêt des jeunes, comme en témoignent les 12 022 contrats signés au 3 novembre 2011 depuis l'entrée en vigueur de la loi – chiffre qui tient compte des 2 571 ruptures –, les auditions ont révélé plusieurs difficultés ou dérives dans sa mise en oeuvre.

Qu'ils concernent la mixité sociale, le contrôle des missions, la formation des jeunes et des tuteurs, la valorisation du service civique, la procédure d'agrément, la gouvernance du dispositif ou encore sa dimension internationale, les problèmes devront être traités rapidement compte tenu des enjeux et des espoirs qu'a suscités le service civique, et de sa montée en charge, plus lente qu'attendu lors du vote de la loi, mais néanmoins réelle.

S'agissant tout d'abord de la mixité sociale, qui constitue un objectif essentiel du service civique, il s'avère qu'à l'issue de la première année de mise en oeuvre, le dispositif intéressait une population plutôt diplômée, féminine, urbaine et métropolitaine.

Si la surreprésentation des candidatures féminines – 57 % des volontaires engagés en service civique sont des jeunes filles –, est conforme à la tendance observée dans toutes les formes d'engagement citoyen, la sous-représentation des jeunes de niveau infra-baccalauréat dans les effectifs du service civique tient notamment au fait que les structures d'accueil proposent des missions relativement qualifiées qui répondent à leurs besoins plutôt qu'aux attentes de jeunes sans qualification dont l'encadrement nécessite un investissement plus lourd et donc plus coûteux. Ainsi, alors que les jeunes de niveau infra-bac représentent 36 % de l'ensemble des jeunes, ils ne constituaient que 23 % des jeunes engagés en service civique.

Certaines structures d'accueil tentent néanmoins de corriger la tendance, par exemple en ne mettant en place que des missions par équipes assurant un brassage social. Pour sa part, l'Agence du service civique a décidé de donner en 2011 la priorité à l'accueil de jeunes sans qualification, issus des quartiers sensibles ou handicapés, afin que la représentation de ces publics dans le service civique corresponde à leur proportion dans la population.

S'agissant de l'implantation du dispositif dans les territoires, le manque de moyens des petites communes rurales – en personnels et en compétences – entrave sa progression, de même que les problèmes liés à mobilité, les frais de transport constituant clairement un frein à la présence de jeunes en service civique en dehors des agglomérations. Plusieurs solutions sont donc envisagées, comme le portage par une collectivité intermédiaire à l'instar de ce qui se pratique dans le cadre de la coopération décentralisée, ou l'offre de facilités de transport aux jeunes engagés, que proposent certaines régions dans le cadre de leurs politiques de la jeunesse.

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