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Intervention de Jeanny Marc

Réunion du 4 novembre 2011 à 10h00
Projet de loi de finances pour 2012 — Travail et emploi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJeanny Marc :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, 65 000 demandeurs d'emploi, dont 50 % sont des chômeurs de longue durée ; un taux de chômage de 24,1 %, alors que la moyenne nationale est de 9,1 % ; 60 % des jeunes de seize à vingt-cinq ans au chômage : voilà les chiffres plus que catastrophiques révélés par les dernières enquêtes de l'INSEE sur l'emploi en Guadeloupe.

Madame la ministre, le marché du travail dans les DOM, et plus singulièrement en Guadeloupe, ne peut plus se satisfaire de la simple analyse tendant à justifier la persistance d'un chômage endémique par des circonstances conjoncturelles. En effet, c'est surtout au regard de contraintes structurelles du marché de l'emploi local qu'il convient désormais d'appréhender les politiques publiques en matière d'emploi pour l'outre-mer.

Les facteurs à l'origine de la persistance de cet important phénomène de chômage n'ont pu échapper au ministre du travail lors de son dernier passage en Guadeloupe. Je veux parler de la rigidité structurelle du marché du travail ; de l'illettrisme ; de l'échec scolaire important ; de l'offre de formation professionnelle inadaptée et insuffisante ; des offres d'emploi dans le secteur marchand qui sont en diminution constante, alors que dans le même temps le secteur non marchand ne peut plus compenser les carences du marché de l'emploi ; du pilotage complexe des politiques de l'emploi et de la formation.

Si j'analyse les derniers chiffres portés à ma connaissance, les inscriptions au chômage pour le dernier semestre sont dues essentiellement aux licenciements pour motifs économiques. Plus inquiétant encore en raison des moyens humains insuffisants du service public de l'emploi en Guadeloupe, les demandeurs d'emploi sont convoqués plus d'un mois après leur inscription à Pôle emploi, ce qui peut les priver durant plusieurs mois du versement de leurs allocations. D'ailleurs, 64 % des demandeurs d'emploi n'en perçoivent aucune.

Par ailleurs, en plus de la mise en oeuvre à marche forcée de la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC, le service public de l'emploi régional doit aussi faire face au tour de vis sur les subventions aux contrats d'accompagnement dans l'emploi : les subventions de l'État passent de 95 % à 70 % du salaire, la durée du contrat est réduite à six mois et l'amplitude hebdomadaire à vingt-deux heures pour ces publics qui sont aussi les plus éloignés de l'emploi.

Derrière ce constat, nous avons pu observer au niveau local que des possibilités d'insertion professionnelle durables existent, notamment dans les métiers de l'artisanat, de la culture, de l'environnement, du tourisme, des services aux particuliers ou encore pour les ouvriers qualifiés des secteurs primaire et secondaire. Nous avons également pu constater que les contrats aidés et les formations en alternance permettent une meilleure insertion dans l'emploi.

En ce qui concerne les contrats aidés, mes collègues du groupe SRC et moi-même sollicitons une augmentation de 5 millions d'euros des crédits de l'action 2 « Amélioration des dispositifs en faveur de l'emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail » du programme 102 « Accès et retour à l'emploi », pour maintenir en volume les crédits de 2011 dévolus au financement de ces contrats outre-mer.

Pour ce qui est de la formation en alternance, et plus particulièrement en Guadeloupe, les importants retards accumulés par les services de l'État en matière de mise en oeuvre et de versement des mesures incitatives qui y sont dédiées ont définitivement découragé les employeurs d'avoir recours à ces contrats.

Pour remédier aux problèmes que je viens d'évoquer, je vous avais déjà proposé, lors du débat sur la formation et l'emploi des jeunes, une expérimentation ; je vous demande aujourd'hui une réponse sur ce point. Afin de pallier les difficultés d'ordre matériel – je pense notamment au logement et aux transports – des jeunes en situation de précarité, il pourrait être proposé de verser le RSA jeunes par la voie d'une convention avec l'entreprise accueillante, et cela pour la seule première année, aux publics ayant choisi de s'insérer par le biais de la formation en alternance.

Malgré l'année qui leur a été réservée et en dépit des récentes annonces du Gouvernement sur l'état d'avancement des 137 mesures du conseil interministériel sur l'outre-mer, les outre-mer ont surtout besoin aujourd'hui d'une nouvelle logique partenariale avec l'État permettant de remédier immédiatement à leurs retards structurels et aux urgences conjoncturelles auxquelles ils doivent faire face, notamment en matière d'emploi et de croissance économique.

La crise économique et financière ne peut servir de justification à votre politique pour l'emploi outre-mer, qui exclut chaque fois un peu plus les populations les plus éloignées de l'emploi. Le budget de la mission « Travail et emploi » pour 2012 renforcera l'exclusion des personnes les plus fragiles, au lieu de les protéger.

Madame la ministre, quels sont vos engagements pour procéder à une réforme structurelle du marché de l'emploi outre-mer ? Quelles sont les mesures d'urgence que vous comptez prendre pour assouplir les conditions d'entrée sur le marché de l'emploi de nos jeunes ultramarins ? Enfin, allez-vous prendre en compte la grande détresse des personnels de Pôle emploi en Guadeloupe en examinant les demandes de moyens humains et budgétaires dont ils ont souhaité faire part à Xavier Bertrand lors de son récent passage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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