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Intervention de Jean-Michel Rastel

Réunion du 21 septembre 2011 à 15h00
Commission d'enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux

Jean-Michel Rastel, directeur général des cabinets TECHFI et FITECH, ancien conseil de la ville de Saint-étienne :

J'ai occupé un emploi fonctionnel à la ville de Mantes-la-Jolie, dont je suis retraité. J'y étais secrétaire général adjoint chargé des finances. C'est durant cette période que j'ai acquis mon expérience et que je me suis aperçu que les banques savaient tirer d'importants bénéfices des produits qu'elles proposaient. En 1989, j'ai mis au point un produit innovant en matière de gestion de trésorerie. En 1988, la ville procédait à des ouvertures de crédits pour gérer la trésorerie. Considérant que c'était une dépense supplémentaire, j'ai passé un contrat avec le CIC pour gérer la trésorerie directement sur l'emprunt afin de diminuer les intérêts de l'emprunt sans payer ceux de l'ouverture de crédit. Pour la ville de Mantes-la-Jolie, cela représentait une économie d'un million de francs.

J'ai ensuite souhaité quitter la fonction publique pour présenter ce produit à mes collègues. Il a été mis au point et validé par la Société générale. C'est Christian Poirier, que j'ai rencontré en 1990, qui, dans un article paru dans la Gazette des communes en 1991, a fait valider l'ouverture de crédit à long terme (OCLT). Puis le produit a été copié par Dexia sous la forme du crédit à long terme renouvelable (CLTR). C'est ce qui m'a amené à conseiller les collectivités et à créer ma propre société.

J'avais pour objectif une obligation de résultats, ce qui m'a amené à travailler avec peu de collectivités, d'autant que je devais rester en permanence à l'écoute des marchés, qui ne cessent d'évoluer. J'ai travaillé notamment pour la ville de Meaux durant un mandat avec Jean-Claude Louchet, à la satisfaction de Jean-François Copé, ce qui m'a amené à conseiller la ville de Saint-Étienne.

En étudiant la dette de la ville, j'ai considéré qu'il y avait des marges de manoeuvre. Tout d'abord, cette dette n'était pas compactée, ce qui rendait sa gestion très difficile. Il fallait donc revoir sa structure. La ville était également engagée dans quelques swaps perdants, pour lesquels je n'ai rien pu faire. Les produits qui étaient à l'époque proposés par les banques permettaient de faire des économies d'intérêts. La ville est ainsi passée d'un taux de 5,5 % à un taux légèrement supérieur à 2 %.

Avant de proposer une opération, j'essayais de l'analyser pour savoir comment elle pourrait jouer sur l'économie réelle. J'ai opté pour plusieurs swaps, dont j'ai proposé à la ville de sortir dès que l'économie évoluait – sur le dollar, sur le TecDis, sur l'euro-yen, sur le Libor suisse.

J'ai travaillé avec la ville de novembre 2001 à décembre 2005. Au cours de cette période, elle a réalisé des économies d'intérêts pour un montant d'environ 13 millions d'euros. Mais certaines opérations étaient en cours et, en 2006, alors que je n'étais plus en charge de sa gestion, la ville est sortie d'opérations qui lui avaient permis de percevoir des soultes. Sur l'euro-yen et le franc suisse, la ville a perçu environ 7 millions d'euros liés à la sortie d'opérations que j'avais moi-même engagées. J'ai laissé la ville avec 110 millions de CMS (constant maturity swaps) – ou swaps de courbe. Mais avant de procéder à ces swaps, j'ai recherché la présence d'une inversion de courbe dans les autres monnaies. Il y en avait eu sur le yen et la livre, mais de très courte durée. L'inversion de courbe est une chose qui peut arriver, et d'ailleurs nous l'avons connue immédiatement après avoir fait les opérations de swaps. Un taux long ne peut rester éternellement en dessous d'un taux court. Les opérations de pente étaient des opérations logiques, un taux court coûtant généralement moins cher qu'un taux long. Lorsque la courbe a commencé à s'aplanir, puis à s'inverser, nous savions pertinemment qu'elle se retournerait, mais nous ne savions pas à quel moment cela se produirait.

Une collectivité qui se trouve dans cette situation doit conserver son sang-froid et ne pas sortir des opérations en cours, même si, durant la période au cours de laquelle une opération est négative, il lui faut la financer. Or nous savons que les collectivités utilisent leur budget jusqu'à sa limite. En 2006, Saint-Étienne disposait d'une soulte positive de 7 millions d'euros. La ville aurait très bien pu conserver toutes ces opérations sans que cela lui pose le moindre problème.

À partir de janvier 2006, la direction financière a changé d'optique et les banques lui ont proposé des contre-swaps, dont les snow balls et d'autres produits que je ne connaissais pas. C'est à partir de là que la situation s'est dégradée.

À la fin 2008, tous les CMS étaient à 0 % et, en 2009, la ville aurait pu percevoir 5 millions par an. Il ne fallait donc pas bouger. À la communauté d'agglomération de Saint-Étienne, avec laquelle je travaillais, nous n'avons pas bougé. J'ai proposé de prendre des CMS, qui sont restés à 0 %. Mais la direction financière a choisi de prendre une autre voie.

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