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Intervention de Virginie Martin

Réunion du 27 septembre 2011 à 16h00
Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Virginie Martin, chercheuse en sciences politiques et sociales :

Je suis parfaitement d'accord avec vous : la méthodologie garantit la scientificité d'une démarche. Mais si je vous apparais uniquement en tant que personne engagée, j'en suis désolée car mon travail de chercheuse et d'universitaire consiste à dépasser ce cadre-là. Cela dit, j'aurais très bien pu vous expliquer que j'étais parfaitement neutre. Je fais cela très bien… Mais m'adressant à des personnalités politiques, qui vont sur le terrain, il me paraissait normal de dire que la philosophie des sciences entraîne une philosophie politique. J'aurais parlé différemment dans une autre assemblée. Quelle que soit la posture de départ, la méthodologie, comme le disait Durkheim, nous sépare de l'affectif qui pourrait nous lier au sujet d'étude.

La thèse de Judith Butler nous place effectivement dans une contradiction en nous amenant à refuser les quotas et toute intervention politique en faveur de l'égalité. C'est très problématique. C'est pourquoi je pense que nous, chercheurs, nous pouvons étudier l'épistémologie dans toutes les directions, mais à condition de respecter le principe de réalité. C'est une schizophrénie que j'assume parfaitement. Je ne pourrais me contenter de travailler sur le nombre de femmes, à l'Assemblée ou ailleurs. Le débat, même ésotérique et éthéré, nourrit le terrain, qui lui-même nourrit le débat.

J'ai commencé à travailler sur les questions de l'égalité femmes-hommes de manière ultra-empirique et très réaliste. Je n'étais pas du tout dans une bulle à cette époque-là… J'ai travaillé avec Mariette Sineau et Janine Mossuz Lavau sur le vote des femmes avant de considérer que le métier de chercheur consistait à aller plus loin. Mon premier poste au Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF) consistait à compter les électeurs et à étudier leurs motivations. La bulle est utile, car elle permet de théoriser les données.

Je tenais à vous montrer jusqu'où vont les études menées sur cette question, car elles seront un jour menées en France. Aux États-Unis, les cours de gender studies sont généralisés.

Vous dites que lorsque vous votez une loi, il faut que nos concitoyens soient prêts à l'accepter. Il y a quinze ans, j'aurais été d'accord avec vous, mais après vingt ans de réflexion je pense au contraire que si nous voulons que les choses changent, il faut prendre des mesures radicales. Si nous voulons que dans une génération il y ait beaucoup de femmes médecins et que les femmes occupent les postes de Premier ministre ou de Président de la République, nous devons être très coercitifs.

Une étude récente a posé la question de l'opportunité qu'une femme devienne Présidente de la République : 15 % de l'électorat a répondu définitivement non, refusant de confier l'autorité suprême à une femme.

Aux États-Unis, malgré le racisme américain, Barack Obama a gagné contre Hillary Clinton. C'est pourquoi je pense qu'il faut imposer des modèles à la société. Je vais vous raconter cette anecdote de la petite fille qui regarde la télévision avec ses parents. Voyant Jacques Chirac, alors Président de la République, ses parents lui demandent si elle aimerait occuper ce poste. Savez-vous ce qu'elle leur répond ? C'est impossible, c'est interdit pour les filles !

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