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Intervention de Éric Ciotti

Réunion du 21 juin 2011 à 22h00
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, « La justice est rendue au nom du peuple français, désormais elle sera rendue aussi par le peuple français ». C'est ainsi que le chef de l'État, Nicolas Sarkozy, annonçait le 3 février dernier, la réforme essentielle dont nous abordons aujourd'hui l'examen.

Cette réforme s'inscrit au plus profond de notre histoire juridique. Les jurys populaires ont été introduits dans notre procédure pénale au lendemain de la Révolution française, en 1791. D'inspiration anglo-saxonne, la volonté des constituants était d'en finir avec les dérives du système judiciaire de l'Ancien régime.

Au fil des siècles, les jurys populaires, émanation du peuple, ont également permis des évolutions jurisprudentielles et législatives essentielles. L'histoire a démontré qu'en prononçant parfois des acquittements retentissants, ils ont contribué à la mise en oeuvre de réformes rendues nécessaires par l'évolution de la société comme pour la correctionnalisation de l'avortement en 1923. Le juriste et historien Bernard Schnapper affirmait : « Le peuple fait les lois par ses députés et rend la justice par ses jurés. »

Le projet de loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et sur le jugement des mineurs constitue une étape nouvelle et majeure, qui matérialise la volonté du Gouvernement d'établir une justice plus proche du citoyen, plus réactive, afin de mieux prendre en compte les attentes légitimes des Français à l'égard de leur justice. En février dernier, une enquête d'opinion indiquait que, pour 72 % de nos concitoyens, la justice fonctionnait mal. En mai 2008, ils n'étaient que 41 % à nourrir ce même sentiment. Parallèlement, selon un sondage datant du mois de novembre dernier, 68 % des Français étaient favorables à l'instauration de jurés populaires. En accomplissant la mission que m'a confiée le Président de la République sur l'exécution des peines, j'ai pu mesurer, au cours de nombreuses auditions, que ce qui nourrit le sentiment de dysfonctionnement et, parfois, de défiance à l'égard de notre système judiciaire est dû à la fois à un manque de transparence, mais aussi au besoin légitime d'une plus grande célérité dans le prononcé des décisions et, bien évidemment, dans la mise en oeuvre effective des sanctions prononcées.

Ce projet de loi répond à ces différents objectifs. Tout d'abord, il vise à permettre à nos concitoyens de mieux s'approprier leur justice et, ainsi, de rétablir le lien de confiance, indispensable. Ensuite, il engage une réforme majeure de la justice pénale des mineurs, en conciliant efficacité de la répression et primauté du suivi éducatif.

Il s'agit d'un texte qui accroît la confiance dans la justice pénale. Une confiance accrue par l'introduction de jurés en matière correctionnelle, d'abord.

L'association des citoyens au jugement des délits les plus graves et au suivi de l'application des peines conduira les auteurs présumés à être confrontés au regard de leurs concitoyens, émanation de la société, dont ils ont enfreint les règles.

Une confiance accrue par l'introduction de jurés dans le domaine de l'application des peines, ensuite.

Parallèlement, le projet de loi prévoit en effet la participation de citoyens assesseurs au suivi de l'application des peines : ils siégeront, ainsi, aux côtés des magistrats du tribunal d'application des peines et des chambres d'application des peines pour toutes les décisions relatives à l'aménagement de la peine prononcée.

Je souscris pleinement, monsieur le garde des sceaux, à ce dispositif qui permet de renforcer la cohérence de notre système pénal en garantissant une certaine continuité de notre chaîne pénale, puisque, comme vous l'avez rappelé, 80 % des dossiers soumis à ces juridictions concernent des personnes condamnées par une cour d'assises. Il est donc naturel que ces citoyens puissent participer à la décision qui conduira à aménager un verdict pris initialement par une juridiction composée de jurés.

Une confiance accrue par la lutte contre la correctionnalisation, enfin.

Dès le début du 19e siècle, les magistrats avaient pris l'habitude de correctionnaliser les crimes les moins graves en disqualifiant les faits ou en oubliant une circonstance aggravante. Selon les praticiens, cette technique retirerait 70 % des affaires aux cours d'assises, soit près de 6 000 affaires par an.

Pratique induite par l'encombrement des cours d'assises, cette méthode, quels qu'en soient les objectifs, est inacceptable à un double titre.

Premièrement, elle engendre une rupture d'égalité entre personnes poursuivies. En effet, en fonction du ressort territorial de la cour d'assises qui sera amenée à statuer, le criminel a plus ou moins de chances d'être jugé par un tribunal correctionnel et, donc, d'encourir une peine moins importante.

Deuxièmement, elle conduit la victime à disqualifier le préjudice qu'elle a subi, et cela, pour être certaine que son agresseur présumé sera plus rapidement sanctionné.

Ce dispositif doit être combattu. Aussi je salue ici votre volonté, monsieur le garde des sceaux, de réduire sensiblement le recours à ce mécanisme, notamment en permettant, avec la réduction du nombre de jurés, la réunion d'un tiers de cours d'assises en plus.

Ensuite, le projet de loi aborde la question de la justice pénale des mineurs.

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