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Intervention de Marie-Luce Penchard

Réunion du 9 juin 2011 à 15h00
Simplifier le vote par procuration — Discussion d'une proposition de loi

Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, le groupe socialiste soumet à votre examen une proposition de loi visant à simplifier le vote par procuration.

Elle a fait l'objet d'un rejet de la commission des lois, tant en ce qui concerne son dispositif que les différents amendements qui avaient été déposés.

Dans la droite ligne de l'avis exprimé par votre commission des lois, le Gouvernement considère que cette proposition de loi n'est pas opportune : d'une part, elle intervient trop tard pour pouvoir être applicable lors des échéances électorales majeures de 2012, d'autre part, sa mise en oeuvre précipitée risquerait d'être source de dysfonctionnements.

Elle doit donc s'inscrire dans une réflexion à plus long terme afin qu'on en mesure mieux les conséquences. En tout cas, elle n'est pas opportune à moins d'un an de la fin de la présente législature et des échéances électorales de 2012.

En préalable, il me semble utile de rappeler que le vote par procuration est un sujet sensible, car le droit pour l'électeur de « déléguer » son droit de vote à un autre électeur constitue une dérogation au principe constitutionnel du secret du vote énoncé à l'article 3 de la Constitution : « Le suffrage () est toujours universel, égal et secret ». Toute réforme dans ce domaine doit donc être soupesée avec la plus grande attention.

De plus, les échéances électorales de 2012 entraîneront probablement l'établissement d'un très grand nombre de procurations. À l'occasion des dernières élections législatives, 1 170 625 électeurs ont donné procuration à un électeur de leur commune pour voter à leur place pour l'un des deux tours. Pour l'élection présidentielle de 2007, élection qui connaît traditionnellement le plus fort taux de participation, le nombre de procurations établies a atteint 2 432 037 sur 37 342 004 votants, soit 6,5 % des électeurs ayant participé au scrutin.

La possibilité pour l'électeur de recourir au vote par procuration est donc un facteur important de la participation électorale.

Le transfert de l'établissement des procurations aux commissions en charge de la révision des listes électorales est une option possible mais sa mise en oeuvre risquerait d'être source de confusion et de complexité à dix mois du premier tour de l'élection présidentielle. En effet, les services des communes devraient être en mesure, dans un délai très bref et pour un nombre important de dossiers, de recevoir en mairie les demandes de procuration et de préparer leur instruction par les commissions. Les commissions de révision des listes électorales, quant à elles, devraient assumer une nouvelle mission dont elles ne sont pas familières, puisqu'elles seraient chargées de valider les demandes de procuration déposées par les électeurs. Enfin, nos concitoyens qui peuvent donner procuration pour un an et ont donc d'ores et déjà la possibilité d'établir des procurations pour la prochaine élection présidentielle, pourraient être perturbés par le changement d'interlocuteurs.

Pour toutes ces raisons, il ne semble pas opportun de mener, à ce stade de la législature, une réforme par nature sensible, dont la mise en oeuvre risquerait de nuire à la participation électorale en 2012.

Cela étant, la modernisation de l'établissement des procurations électorales reste une préoccupation du Gouvernement, qui a engagé une réflexion de fond sur le sujet.

L'allégement des formalités requises pour voter par procuration ayant réduit le rôle des officiers de police judiciaire à la seule vérification de l'identité de l'électeur souhaitant donner procuration, le Gouvernement était favorable, dans le cadre de la deuxième lecture de la LOPPSI 2, au transfert de la responsabilité d'établir les procurations aux commissions en charge de la révision des listes électorales, avec le soutien des services des mairies. Cela permettrait en effet de recentrer les forces de sécurité sur leur coeur de métier.

Or l'amendement a été rejeté, le 29 septembre 2010, par votre commission des lois, qui s'est montrée inquiète des risques de fraude que cela pouvait entraîner et circonspecte sur le montant des économies susceptibles d'être réalisées.

Le Gouvernement reste attaché au principe d'une réforme permettant d'alléger la tâche des forces de l'ordre en la matière. Une mission conjointe de l'Inspection générale de l'administration, de l'Inspection générale de la police nationale et de l'Inspection générale de la gendarmerie nationale a donc été programmée pour le second semestre 2011. Cette réforme de fond ne pourra être menée à son terme d'ici aux prochaines échéances électorales.

Pour résumer, la proposition de loi du groupe socialiste n'est pas opportune, tant par son contenu que par le moment où elle vient en discussion. En outre, un tel projet appellerait une concertation approfondie avec l'Association des maires de France – AMF –, ce que le calendrier actuel ne permet pas.

Le ministère de l'intérieur étudie néanmoins tous les allégements possibles du processus administratif d'établissement des procurations qui permettraient à la fois d'alléger la tâche des officiers de police judiciaire et de faciliter le recours à cette modalité d'exercice du droit de vote.

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