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Intervention de Valérie Boyer

Réunion du 14 décembre 2010 à 21h30
Projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Boyer :

Monsieur le ministre, il y a trois semaines, je prenais la parole dans cet hémicycle pour vous poser une question, suite au drame s'étant produit à Marseille dans le treizième arrondissement, dans la cité « Le Clos » à la Rose, au coeur de ma circonscription. J'ai dénoncé ce nouveau règlement de compte à l'arme de guerre qui a coûté la vie à un jeune garçon de seize ans et blessé grièvement un enfant de onze ans, tout cela sur fond de trafic de drogue.

Cette manifestation de violence dans nos quartiers est parfaitement inacceptable, surtout lorsqu'elle touche des mineurs. Il s'agit de la deuxième victime mineure dans le treizième arrondissement de Marseille, et il y a eu depuis le début de l'année douze décès et seize blessés sur fond de règlement de compte dans notre ville.

Le Gouvernement a immédiatement réagi et votre venue à Marseille dès le dimanche après-midi, monsieur le ministre, a permis de tirer toutes les conséquences de cette escalade de la violence dans nos quartiers. Vous avez pris les décisions urgentes qui s'imposaient afin que la cité phocéenne ne se transforme pas en zone de non-droit, livrée aux mains des trafiquants de drogue, et je vous en remercie.

Comme nous le demandons depuis plusieurs années, la police nationale a besoin d'être confortée pour assurer correctement sa mission régalienne, à Marseille et ailleurs, car Marseille n'est malheureusement pas la seule ville concernée par ces violences.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, je vous ai demandé que, dans votre ville et sur l'ensemble du territoire, la police et la gendarmerie disposent de moyens pérennes pour travailler efficacement et arrêter cette violence.

Les réponses, nous pourrons les avoir avec le vote de ce projet de loi qui s'adapte aux nouvelles formes de délinquance. Je me félicite des mesures qui vont être prises, comme, par exemple, des moyens financiers supplémentaires – 2,5 milliards d'euros sur la période 2009-2013 –, l'utilisation des technologies dans la lutte contre la criminalité organisée et la délinquance, le développement de la vidéoprotection, la lutte contre la cybercriminalité, l'intelligence économique, la lutte contre la violence routière, l'extension des pouvoirs de la police d'agglomération. Toutes ces mesures vont dans le bon sens. Elles suscitent énormément d'espoir et d'attentes dans notre population.

Mais la sécurité est l'affaire de tous, et je souhaite dire un mot très bref, mais que je considère très important, sur l'implication d'autres acteurs dans ce domaine. Je veux notamment parler de tout ce que nous faisons dans le cadre de la politique de la ville et de tout le travail réalisé dans l'ombre par les travailleurs sociaux, travail qui compte énormément pour prévenir toute cette violence.

Le deuxième sujet que je souhaite aborder concerne l'utilisation des nouvelles technologies. J'évoquerai, comme vient de le faire brillamment ma collègue Catherine Vautrin, le recueil de l'image numérisée du visage par les photographes professionnels.

Comme cela vient d'être excellemment rappelé, le Sénat avait introduit un article 12 A précisant que les photographies d'identité nécessaires à l'établissement de l'ensemble des titres d'identité sont réalisées par un photographe et non par une mairie.

Lors des travaux que j'ai pu conduire dans le domaine de la santé, notamment sur les troubles du comportement alimentaire, j'ai été au contact des professionnels de la photographie qui m'ont sensibilisée à de nombreux problèmes, parmi lesquels celui du recueil de la photographie d'identité. Le recueil de la photo d'identité est fondamental pour assurer la survie des photographes, la pérennisation de leur travail, alors que leur profession est aujourd'hui extrêmement menacée.

L'article 104 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2008 a introduit la faculté pour les mairies équipées d'une station pour l'établissement de passeports biométriques de renoncer au recueil de l'image numérisée du visage afin de soutenir le maintien d'une économie photographique en France et de sauver ainsi les emplois de 9 000 professionnels de la photographie. C'est donc un sujet éminemment important à la fois pour la profession et pour l'animation de nos rues et de nos villages. C'est la raison pour laquelle nous l'examinons dans le cadre de la LOPPSI 2.

En effet, la prise de vue de photographies d'identité en mairie, instituée par le code général des collectivités territoriales et les dispositions du décret du 30 décembre 2005 relatif aux passeports, a eu pour effet de créer les conditions d'une concurrence que Mme Vautrin vient de qualifier de déloyale à l'encontre des professionnels, qu'ils soient photographes commerçants ou industriels, comme l'un des fleurons de notre industrie, la société Photomaton, dernière entreprise française de la photographie, dont le marché de l'identité représente 80 % du chiffre d'affaires. La création d'un monopole de fait de l'État sur le secteur de la photo d'identité est avérée. La mesure de son impact économique et social montre que les 9 000 emplois, ceux des photographes artisans-commerçants comme ceux des salariés, sont menacés dans les mêmes proportions. Déjà plus de 300 magasins ont fermé et les industriels ont commencé à licencier.

Les usagers ont subi directement ou indirectement cet état de fait en raison de l'incapacité de certaines collectivités à gérer l'afflux de demandes ou à photographier des publics particuliers tels que les enfants, les personnes âgées, les handicapés, les personnes qui portent différents couvre-chefs pour divers motifs.

La photo d'identité ne peut être considérée comme une activité régalienne, et un tel monopole se justifie encore moins en l'absence de carence du secteur privé. Les professionnels de la photographie, qu'ils soient commerçants, fabricants ou exploitants de cabines automatiques de photographie d'identité, savent répondre aux besoins du marché. Ils ont investi plusieurs millions, sans soutien, pour répondre aux nouvelles normes en matière de photographies d'identité, et n'ont reçu aucune réparation de l'État. Je rappelle qu'ils peuvent devenir des professionnels agréés pour la prise de vue de photographies d'identité ou demeurer des professionnels classiques pour effectuer la même activité.

Sur les 2 000 maires de communes équipées de stations biométriques, 1 000 ont d'ores et déjà renoncé au recueil de l'image en mairie, notamment pour soutenir l'activité des professionnels de la photo. Je souhaite que les 1 000 autres maires concernés renoncent à prendre des photos car, comme l'a dit le sénateur Michel Houel, qui a soutenu un amendement à ce sujet : « Les maires n'ont pas vocation à être des photographes ».

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