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Intervention de Marie-Josée Roig

Réunion du 14 décembre 2010 à 21h30
Projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Josée Roig :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le triste tableau dépeint jour après jour par la presse écrite comme par les images télévisées montre des délinquants de plus en plus jeunes, de plus en plus violents, désormais structurés en bandes organisées.

Face à ce phénomène, et sous l'impulsion du Président de la République, qui en a fait une priorité, le Gouvernement a décidé d'adapter notre législation à ces nouvelles formes de délinquance. Tel est le sens du projet de loi défendu par M. le ministre de l'intérieur.

Notre rapporteur a parfaitement rappelé les différentes mesures contenues dans ce texte. Outre l'augmentation des moyens financiers consacrés à la lutte contre la criminalité, nombre d'entre elles sont particulièrement utiles.

En ce qui me concerne, je concentrerai mon intervention sur la nécessaire complémentarité, qu'il faut encore accroître, entre les acteurs locaux et l'État en matière de lutte contre la délinquance.

Les collectivités locales, en particulier les maires, se trouvent de plus en plus désarmés face à une violence de plus en plus brutale. Ainsi, à Avignon, il y a un mois, un jeune couple s'est fait sauvagement agresser par trois marginaux en plein centre ville, sans aucun mobile. Un tel acte de violence gratuit est malheureusement devenu ordinaire dans nos villes depuis quelque temps. Et, il y a une semaine, une personne sortie fumer une cigarette à dix heures du matin a été retrouvée sans vie dans un parking de la ville, la tête écrasée contre des pierres. Chaque jour apporte désormais son lot de violences, de trafics, de brutalités.

Pourtant, les collectivités locales, en particulier les mairies, investissent massivement dans ce domaine – grâce à votre concours, monsieur le ministre de l'intérieur, notamment en ce qui concerne la vidéoprotection. Ainsi à Avignon, qui dispose aujourd'hui de quarante et une caméras, nous avons programmé l'installation de quatre-vingt-dix caméras supplémentaires. Cet investissement est nécessaire, mais il n'est pas suffisant.

Et pourtant, les polices municipales, notamment la nôtre, font l'objet d'une attention particulière et constituent une charge de plus en plus lourde pour les mairies. Et pourtant, les outils de prévention existent : les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance se réunissent régulièrement, mobilisant acteurs sociaux, représentants de l'État, polices nationale et municipale. Mais, malgré tous ces efforts, nous ne parvenons pas à enrayer durablement le phénomène.

Nous avons besoin du soutien massif de l'État – et je sais que cela rejoint votre volonté, monsieur le ministre. Ainsi, il me paraît indispensable de sanctuariser le budget lié à la rémunération, la formation, et à l'équipement des forces de police et de gendarmerie.

Je comprends bien la nécessité de rationaliser la politique salariale de l'État en diminuant, quand cela est possible, le nombre de fonctionnaires. J'ai parfaitement conscience des contraintes budgétaires qui pèsent sur nos finances publiques et qui se traduiront, en 2011, par un nécessaire budget de rigueur. Pour le vivre quotidiennement en tant que maire, à l'échelon local, je sais qu'il n'est pas facile de boucler un budget en période de crise.

Cependant, je considère que, dans l'exercice de la première des missions qui lui incombe, celle de garantir la sécurité et la tranquillité de chacun, l'État ne peut pas, ne doit pas se désengager. C'est du reste, monsieur le ministre, votre volonté ; c'est le sens de votre action ; c'est la raison d'être du texte que nous examinons.

La sécurité suppose en premier lieu des effectifs physiquement présents sur le terrain et en nombre suffisant. À Avignon, chaque année, durant le festival, nous bénéficions du renfort d'une compagnie républicaine de sécurité. Cette augmentation des effectifs nous a permis, cette saison encore, de ne déplorer aucun acte de violence majeure durant cette période où la ville fait plus que doubler sa capacité d'accueil. Cela montre que la présence physique de la police nationale dans les rues est la première réponse à apporter aux phénomènes de violence.

Bien sûr, nos polices municipales contribuent, dans le cadre de leurs missions, et malgré un statut et des pouvoirs limités, à assurer la tranquillité de nos concitoyens. Mais il arrive un moment où l'étendue de leurs pouvoirs ne leur permet plus d'intervenir. Je ne veux pas d'une police municipale dont le métier se réduirait à arpenter nos rues en disant bonjour et à tourner les talons en cas de problème sur la voie publique.

Or, monsieur le ministre, c'est en quelque sorte à cette difficulté que nous sommes aujourd'hui confrontés, faute d'attribuer un véritable cadre d'emploi efficace à des polices municipales désarmées. Sur cette question, votre texte apporte une première réponse intéressante en octroyant la qualification d'agent de police judiciaire aux directeurs de police municipale. Ce premier pas va dans la bonne direction, mais je me demande s'il ne conviendrait pas d'étendre cette disposition aux chefs de service dans la mesure où le directeur de la police municipale participe à la conception et à l'élaboration des stratégies territoriales de sécurité et assure la direction fonctionnelle et opérationnelle de ses services. S'il devait assumer seul cette compétence, il risquerait de se trouver complètement débordé face à ces nouvelles attributions.

Je pense qu'à l'issue de l'adoption de cette loi, il conviendra très rapidement de réformer et de clarifier le rôle des polices municipales. Aujourd'hui, l'empilement des textes et la contradiction entre certaines règles font qu'il devient difficile de s'y retrouver.

En conclusion, monsieur le ministre, je voudrais, bien entendu, vous faire part du soutien total que j'apporte à l'action que vous menez. Mais je veux aussi me faire le porte-parole de mes administrés, plus particulièrement des plus fragiles d'entre eux qui vivent dans une angoisse quasi permanente. Je terminerai mon propos en vous citant un dernier exemple de cette angoisse. Dans le courant de l'été, nous avons appris qu'à Avignon, une mère de famille avait embauché un vigile privé pour assurer la sécurité de sa maman âgée et vulnérable à certaines heures de la journée. Ce fait divers est un véritable signal d'alarme que nous devons prendre en considération. Je ne veux pas d'une police privée : la sécurité est l'affaire de tous et doit être à la portée de tous.

Demain, grâce à votre projet de loi, nous disposerons de nouveaux moyens pour tenter d'endiguer ce phénomène. Il y a urgence à agir, je sais pouvoir compter sur votre détermination et sur votre efficacité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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