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Intervention de Rama Yade

Réunion du 21 octobre 2009 à 11h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Rama Yade, secrétaire d'état chargée des sports :

À plusieurs reprises ces dernières semaines, notamment le 6 octobre dernier, lors d'un colloque à la Sorbonne, j'ai eu l'occasion d'indiquer le triple défi auquel est, selon moi, confronté le modèle sportif français : mutation interne, exemplarité et compétitivité.

Premier défi : la mutation interne. Notre modèle repose sur un équilibre, garant de l'intérêt général, entre l'État, les collectivités territoriales, le secteur privé et le mouvement sportif au travers des fédérations. Ce modèle est au service de quelques grands objectifs politiques : favoriser l'accès le plus large à la pratique sportive, notamment aux plus modestes et aux plus exclus de nos concitoyens, ainsi qu'aux personnes handicapées ; favoriser le sport féminin ; rechercher un équilibre entre les territoires, ruraux et urbains, notamment en matière d'équipements sportifs ; garantir l'unité du sport par un équilibre entre sport professionnel et sport amateur.

Dans un contexte où les moyens budgétaires ne sont pas inépuisables et en conséquence de plus en plus précieux, il faut moderniser l'administration pour permettre à l'Etat de mieux assurer ses missions. Ces dernières années, le ministère des sports s'est résolument engagé dans la révision générale des politiques publiques, ce qui lui a permis de contribuer, de façon importante à la petite échelle qui est la sienne, à l'effort de maîtrise des déficits publics.

Les mesures préparées depuis quelques années, qu'elles concernent les effectifs, l'administration territoriale ou les établissements comme les CREPS, entrent aujourd'hui en pleine application et exigent un gros effort d'explication. Seule une vision dynamique de l'évolution du ministère et un objectif mobilisateur permettront de trouver le soutien nécessaire à la réussite de ces réformes.

Il faut réaffirmer la place du sport dans notre société et la pertinence des grands objectifs politiques que j'ai cités en introduction. Cela implique également de répartir de façon cohérente les tâches entre le niveau central et les niveaux déconcentrés, et de concentrer les moyens sur les principales priorités.

Le CNDS, avec un budget de 200 millions d'euros et les 40 000 associations qu'il subventionne, constitue à cet égard un outil remarquable. Alors que certains dénoncent un désengagement de l'Etat dans le sport pour tous, rappelons seulement qu'il a financé en 2008 plus de 870 équipements sportifs sur l'ensemble du territoire, dont 530 petits équipements de proximité – contre un total de seulement 336 en 2002. Je remercie à cet égard l'Assemblée nationale d'avoir suivi ma proposition en adoptant, dans le cadre du projet de loi sur la régulation des jeux d'argent et de hasard en ligne, un prélèvement au profit du CNDS sur les sommes misées à l'occasion des paris sportifs, dont le taux atteindra progressivement 1,8 %.

Avec ces moyens renforcés, nous continuerons à investir massivement dans les quartiers populaires. Près de 35 millions d'euros y auront été consacrés en 2009. Cet effort, souhaité par le Président de la République, sera encore accru l'année prochaine.

Je n'oublie pas non plus les zones rurales. Il existe aujourd'hui une réelle inquiétude quant à la pérennité de l'offre sportive dans beaucoup de territoires. C'est pourquoi le CNDS prendra mieux en compte les spécificités démographiques et sociales de ces zones au moment de l'attribution des subventions. De la même façon, je soutiendrai un plan de rénovation en faveur des équipements sportifs d'outre-mer. Sur ces deux sujets, le travail est considérable et je compte m'appuyer sur les parlementaires, qui connaissent le mieux ces questions et sont les mieux à même de dresser un état de lieux précis.

Mon ambition est aussi de faire du ministère des sports un acteur public exemplaire et innovant. Exemplaire, il l'est, et le sera encore davantage, dans sa politique en faveur de la pratique du sport par les personnes handicapées, qui exige un réel engagement. Innovant, il le sera en accompagnant le développement de nouvelles pratiques sportives - les « sports urbains » notamment – que l'État ignore encore alors même qu'ils rencontrent un succès grandissant et attirent toujours plus de jeunes. Il existe pourtant des solutions. C'est d'ailleurs pourquoi j'organiserai prochainement des Etats généraux des sports urbains.

Les collectivités territoriales jouent un rôle essentiel en matière de sport. A cet égard, aucune ne doit se désengager de ce domaine à l'occasion des futures réformes. J'ai écrit dès juillet au ministre de l'intérieur, pour demander que les régions et les départements puissent continuer à financer le sport, et obtenu une réponse positive. J'espère que la représentation nationale m'aidera également sur ce point.

Deuxième défi : celui de l'exemplarité.

Être exemplaire, cela signifie notamment lutter contre la violence, les dérives du « sport business» et promouvoir le développement durable. Pour lutter contre la violence dans le sport, suite notamment à divers incidents survenus lors de matchs de championnat de football, j'ai pris trois mesures à effet immédiat. Tout d'abord, la création d'une cellule nationale de prévention et de lutte contre la violence, directement rattachée au directeur des sports. Ensuite, le renforcement des actions de prévention et de promotion du respect sur le terrain. Enfin, la tenue d'ici à la fin de l'année du premier congrès national des associations de supporters.

S'il y a bien un sujet sur lequel nous devons être exemplaires, c'est celui du recrutement de mineurs étrangers dans les clubs sportifs. Il ne faut pas accepter cette « traite des mineurs », qui relève d'un véritable esclavage sportif. Les mineurs ne sont pas des marchandises et le traitement réservé à ces jeunes gamins fragiles est intolérable. Il serait à notre honneur d'encadrer ces recrutements. L'organisation du Mondial de football l'an prochain en Afrique du Sud peut nous donner l'occasion d'avancer efficacement.

Nous devons également lutter contre les dérives du sport business : l'argent est important pour le sport, qu'il s'agisse de le sponsoriser ou d'apporter un complément de revenu aux athlètes, mais il faut se garder de l'argent fou, de l'endettement excessif et de l'absence totale de règles. C'est dans cet esprit que je me suis rapprochée de Michel Platini, président de l'UEFA, de façon à prévenir toute dérive en matière de football européen car continuer ainsi serait faire courir à cette discipline et aux clubs un grave risque systémique.

Il nous faut aussi promouvoir un développement durable du sport : cela exige une prise de conscience, qui doit être relayée par les fédérations. Je leur demanderai un rapport sur leurs actions en matière environnementale. Ces réflexions pourraient nourrir des Assises vertes du sport, que j'organiserai au premier trimestre 2010.

Troisième défi : celui de la compétitivité du sport français et du modèle sportif français. Il s'agit d'assurer le rayonnement international de notre pays. Nous souhaitons être retenus pour l'organisation du championnat d'Europe de football 2016. D'où l'engagement de l'État à hauteur de 150 millions d'euros, accordés par le Président de la République et le Premier ministre, pour rénover, agrandir ou construire les stades qui accueilleront la compétition. Nos concurrents sont de poids sérieux : il nous faut les prendre au sérieux et nous tenir prêts.

Mais nous ne souhaitons pas nous concentrer exclusivement sur le football : il y a d'autres sports que nous voulons soutenir comme le handball, le basket, le volley, l'escrime, le judo, le badminton et le hockey. Il nous faut donc de grandes salles, dont nous manquons cruellement. Le Palais omnisports de Paris-Bercy n'est que la 21ème salle d'Europe et le Palais des sports de Pau la 155ème! C'est pourquoi j'ai souhaité installer une commission « Grandes salles », qui sera présidée par Daniel Costantini et formulera des recommandations. Nous sommes aussi candidats à l'organisation des Jeux Olympiques d'hiver en 2018 à Annecy, dont nous plaiderons partout la candidature. Enfin, il nous faut être plus présents, plus actifs et plus offensifs dans les instances internationales du sport. Il nous faut engager une réflexion commune avec le CNOSF. Nous avons tous tiré les leçons de l'échec de la candidature de Paris à l'organisation des Jeux olympiques de 2012.

Le rayonnement de notre pays passe aussi par l'amélioration de nos résultats dans les grandes compétitions sportives internationales. J'ai confié à Raphaël Ibanez, une mission sur la compétitivité des sports collectifs français qui s'intéressera aux conditions de préparation des sportifs, aux infrastructures et à la logistique. Je n'oublie pas les principales préconisations du rapport Besson, qui pourront être intégrées dans un prochain texte sur la compétitivité du sport.

Un de nos atouts majeurs, c'est l'INSEP, outil incomparable, dédié à l'excellence sportive et au sport de haut niveau. De par son histoire, sa culture, ses structures et ses ressources humaines, il a vocation à être le fer de lance d'une politique du sport de haut niveau, rénovée et ambitieuse. L'État lui a donné les moyens financiers nécessaires, abondant même son budget à la hauteur nécessaire pour qu'il puisse concurrencer ses homologues étrangers.

Je voudrais également évoquer rapidement le projet des « parcours de l'excellence sportive », dont l'objectif est de favoriser l'émergence des nouveaux talents, de replacer la performance au centre du dispositif et de passer d'une politique de moyens à une stratégie de performance et d'objectifs.

Enfin, les sportifs de haut niveau souhaitent que nous prêtions une plus grande attention à leur couverture sociale. Nous allons évaluer le coût d'un tel dispositif afin de voir s'il est possible de faire quelque chose et à quelle hauteur.

Je pourrais aborder bien d'autres sujets, mais je n'oublie pas que l'objectif aujourd'hui est d'abord que nous puissions dialoguer.

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