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Intervention de Jean de Ponton d'Amécourt

Réunion du 10 juin 2009 à 11h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Jean de Ponton d'Amécourt :

Monsieur Gonnot, vous avez interprété mes propos de manière subjective et je ne souscris pas à votre présentation des choses.

Il n'existe pas de « bons » talibans ou de talibans « modérés » : les talibans sont par définition des extrémistes islamiques. Toutefois, les Pachtounes constituent 40 % de la population afghane, soit quelque 12 millions de personnes. Ils sont implantés essentiellement dans le sud du pays, 24 millions de Pachtounes résidant de l'autre côté de la frontière, au Pakistan.

On ne peut espérer stabiliser durablement la situation en Afghanistan sans tenir compte du fait que les Pachtounes sont l'ethnie majoritaire et qu'ils ont toujours gouverné le pays. D'ailleurs, le président Karzaï et une grande partie de ses ministres sont pachtounes. Or, si tous les Pachtounes ne sont pas des talibans, tous les talibans, à de rares exceptions près, sont pachtounes. D'ailleurs, la zone d'insurrection est située sur le territoire pachtoune.

Parmi ceux qui se sont engagés dans les rangs des talibans, certains sont disposés à accepter les institutions dans leur fonctionnement actuel, statut des femmes inclus. La résolution définitive du conflit passera nécessairement par une « paix des braves », sur le modèle algérien, qui permettra d'inclure cette mouvance prête à accepter les institutions. Quant aux autres, il faut continuer à les combattre, de façon à être en position de force pour les élections. C'est pourquoi l'évolution de la situation militaire en 2009 et 2010 sera si importante.

Je ne pense donc pas que ma position soit naïve ; tout au plus ai-je dû la résumer. Quoi qu'il en soit, il s'agit d'un sujet complexe, sur lequel nous n'avons aucune maîtrise : la réconciliation nationale est une affaire entre Afghans.

Par ailleurs, d'autres intérêts sont en jeu, à commencer par ceux des États voisins : l'Iran, le Pakistan, le Tadjikistan, l'Ouzbékistan, le Turkménistan. Rassurez-vous, ils n'éprouvent aucune tendresse pour les talibans. Par conséquent, le processus de réconciliation nationale sera soigneusement surveillé et contrôlé par la communauté internationale. Aboutira-t-il ? Je l'ignore, mais les élections constituent assurément une opportunité.

Monsieur Dhuicq, les Russes disposent d'une expérience tragique de la guerre en Afghanistan. Vers la fin du conflit, ils ont adapté leur dispositif avec efficacité, et une grande partie de la théorie de la contre-insurrection développée par les Américains découle directement de l'étude de la stratégie russe. La Russie a bien évidemment intérêt à la stabilisation de l'Afghanistan.

À la suite de l'élection de Barack Obama et des nouvelles relations bilatérales établies par l'administration démocrate, les Russes ont de toute évidence la volonté de participer davantage à l'action de la communauté internationale en Afghanistan – ce qui s'est d'ailleurs traduit par la récente visite du ministre russe des affaires étrangères, M. Sergueï Lavrov.

Cela étant, leurs moyens demeurent limités et leurs relations avec l'Alliance, et en particulier avec les Américains, sont complexes. Je ne sais pas encore très bien comment cette volonté nouvelle se concrétisera. Un accord prévoyant des consultations politico-stratégiques a d'ores et déjà été signé entre les Afghans et les Russes. Enfin, ces derniers ont participé à la conférence de La Celle Saint-Cloud : il leur paraît en effet important de participer à une solution régionale du conflit.

En tout état de cause, ils n'ont aucune envie que les talibans ou l'insurrection islamique prennent le pouvoir en Afghanistan !

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