Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jacques Battistella

Réunion du 16 décembre 2008 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Jacques Battistella :

Je traiterai plus particulièrement du rôle des PME dans la défense.

Par définition, les grands groupes se situent dans le quantitatif tandis que les PME sont plutôt dans le qualitatif, car leur existence et leur pérennité sont indissociablement liées à l'avantage compétitif qu'elles peuvent offrir à leurs clients. Or, en dépit des efforts du nouveau délégué, le système de fonctionnement de la DGA ne donne pas la priorité au qualitatif. Dès lors qu'une idée intéressante lui est soumise, le code des marchés publics l'oblige à organiser une compétition dans laquelle il n'est pas possible de protéger totalement l'innovation. Le maître d'oeuvre a tout intérêt à se l'approprier, puisqu'elle lui offre un avantage compétitif. Toute PME qui commet ainsi l'imprudence d'apporter une idée risque de voir un maître d'oeuvre s'y intéresser également, chacun connaissant bien la difficulté de protéger la propriété intellectuelle.

En outre, il convient de souligner que, dans notre système d'achat où la compétition devrait être la règle, plus de 95 % des contrats du ministère de la défense sont passés de gré à gré. Les contrats passés avec les PME ne constituent ainsi qu'une variable d'ajustement destinée à gager que la DGA initie effectivement des compétitions. Or, les PME sont peu armées pour y faire face : une compétition leur coûte en moyenne 60 000 euros. De plus, depuis le début du processus jusqu'à l'attribution du contrat, il peut s'écouler entre 12 et 18 mois, ce qui est un temps particulièrement long pour une PME, sans même parler des délais de paiement. Pour toutes ces raisons, il semble opportun de se demander si des processus spécifiques ne leur seraient pas mieux adaptés.

Je souhaite également attirer l'attention du législateur sur les difficultés que soulèvent conjointement le code des marchés publics et le décret défense. Tout semble reposer sur deux hypothèses : d'une part, qu'un acheteur est au mieux un incapable et au pire un ripoux, d'autre part, que n'importe quel fournisseur de l'État est par définition un industriel malhonnête. Je ne dis pas qu'il n'existe pas d'industriel malhonnête ou de fonctionnaire incapable mais, dans leur immense majorité, les responsables sont honnêtes et capables. De plus, à la différence par exemple des collectivités locales, le ministère de la défense est une des rares institutions publiques qui dispose d'acheteurs professionnels. Ces derniers sont capables, motivés, honnêtes. Pourtant, ils se voient imposer exactement les mêmes contraintes que pour tout autre achat effectué par une puissance publique française. Il me semble particulièrement nécessaire que le Parlement se penche sur cette question car le secret défense ne s'avère pas applicable dans les faits, tout simplement parce que sa mise en oeuvre suppose que le fonctionnaire prenne un risque sans aucune contrepartie en termes de carrière, de rémunération ou même de compliments. Faute d'une prise de conscience, la meilleure des volontés ne parviendra pas à faciliter au quotidien l'accès des PME aux marchés publics. Celles-ci continueront en effet à être pénalisées par des délais excessifs et par la concurrence des grands groupes mais aussi d'instituts de recherche comme l'ONERA. Ainsi, nous constatons l'étouffement de la créativité et de la prise de risque des PME, qui pourtant ne se focalisent pas sur le chiffre mais s'efforcent d'apporter un avantage qualitatif important à nos forces armées.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion