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Intervention de Gaël Yanno

Réunion du 20 juillet 2009 à 16h00
Évolution institutionnelle de la nouvelle-calédonie et de mayotte — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaël Yanno :

…ainsi que l'unanimité du comité des signataires, en décembre 2008. Il est regrettable qu'une analyse strictement juridique ait remis en cause cette unanimité politique. En effet, les articles 1er et 3 du projet de loi tels qu'ils nous sont présentés ne traduisent pas le consensus obtenu entre les partenaires de l'accord.

Qui peut reprocher à certains Calédoniens de s'interroger sur les conditions d'exercice de ces compétences – notamment en matière de droit civil, d'état civil et de droit commercial – par une collectivité de 250 000 habitants ? Le transfert à la Nouvelle-Calédonie, il y a plus de trente ans, d'une compétence normative aussi complexe que le droit des assurances a démontré son échec. En effet, ce droit est resté figé au jour du transfert, créant ainsi une grande insécurité juridique pour les Calédoniens. Et que dire des difficultés rencontrées par la Polynésie française dans l'exercice des compétences en matière de droit civil et de droit commercial, qui lui ont été plus récemment transférées ?

Je laisse aux membres du Congrès de la Nouvelle-Calédonie le soin de réfléchir à ces exemples lorsqu'ils auront à se prononcer à la majorité qualifiée sur le calendrier et les modalités du transfert de ces compétences. Au reste, à ceux qui prétendent que ce calendrier est figé, je rappelle la première phrase du deuxième paragraphe de l'article 3 de l'accord de Nouméa, qui porte sur le transfert de compétences : « Le Congrès, à la majorité qualifiée des trois cinquièmes, pourra demander à modifier l'échéancier prévu des transferts de compétences. »

S'agissant des autres transferts de compétences, deux retiennent tout particulièrement l'attention des élus calédoniens : ceux concernant l'enseignement secondaire public et les enseignements primaire et secondaire privés. Dans ces deux domaines, outre d'éventuelles divergences entre les deux partenaires de l'accord de Nouméa sur la finalité de ces transferts, se pose le problème de la compensation financière de l'État.

En effet, durant la phase de préparation et de négociation de l'accord de Nouméa, il a toujours été affirmé par l'État – et c'est ainsi que l'ont compris les Calédoniens – que les transferts de compétences seraient accompagnés d'une compensation financière, évitant ainsi à la Nouvelle-Calédonie d'avoir à supporter le coût de ces compétences nouvellement transférées, souvent particulièrement élevé. Cela est clairement précisé dans l'accord de Nouméa : « La Nouvelle-Calédonie bénéficiera pendant toute la durée de mise en oeuvre de la nouvelle organisation de l'aide de l'État, en termes d'assistance technique et de formation, et des financements nécessaires pour l'exercice des compétences transférées et pour le développement économique et social ».

Cette préoccupation des élus calédoniens est d'autant plus forte que le coût des deux enseignements, public et privé, aujourd'hui à la charge de l'État, s'élève à 385 millions d'euros, soit l'équivalent du budget de la Nouvelle-Calédonie net des dotations qu'elle doit reverser aux communes et aux trois provinces. Ce seul transfert de l'enseignement conduirait donc la Nouvelle-Calédonie à voir doubler son budget net. Le nombre des agents exerçant aujourd'hui cette compétence, au nombre de 4 450, viendrait multiplier par cinq les effectifs de la Nouvelle-Calédonie. Les précautions que nous demandons en matière de compensation financière ne relèvent donc pas d'une surenchère, mais bien d'une volonté de voir l'accord de Nouméa, si souvent cité, être appliqué.

Nos craintes sont d'autant plus fondées que nous avons en tête l'exemple de deux compétences transférées par l'État : l'une, la construction des collèges, aux provinces, en 1989 ; l'autre, le contrôle pédagogique de l'enseignement primaire, à la Nouvelle-Calédonie en 2000. Or, pour ces deux compétences, la compensation financière de l'État représente aujourd'hui moins de 60 % du coût total supporté par les collectivités calédoniennes.

Nous avons toutefois noté l'avancée majeure accordée par le Gouvernement, qui a accepté que les personnels des enseignements secondaire public, primaire et secondaire privés fassent l'objet d'une mise à disposition globale et gratuite sans limitation de durée, l'initiative de mettre un terme à cette mise à disposition revenant au Congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Les amendements adoptés par la commission des lois – que je remercie pour sa sagesse –, et qui ont donc été repris dans le texte qui nous est soumis aujourd'hui, intègrent une grande partie de nos préoccupations. C'est la raison pour laquelle nous y tenons particulièrement. Je vous demande, mes chers collègues, de bien en comprendre le sens et les motifs. Leur adoption facilitera d'autant le vote par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie à la majorité qualifiée des trois cinquièmes, qui devrait intervenir, au plus tard, en novembre de cette année.

L'examen de ce projet de loi organique marque une nouvelle étape dans la mise en oeuvre de l'accord de Nouméa. Le Gouvernement de la République, le Parlement, ainsi que les élus calédoniens, au travers des différentes institutions locales, doivent veiller à ce que cet accord réponde aux attentes des Calédoniens, notamment à ceux qui, majoritairement, souhaitent que la Nouvelle-Calédonie demeure au sein de la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

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