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Intervention de Michel Barnier

Réunion du 26 mars 2009 à 15h00
Bilan de santé de la politique agricole commune — Questions

Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche :

Je remercie Michel Raison et Christian Patria d'avoir rappelé, au début de leur intervention, la nécessité d'un rééquilibrage. Mes services y ont travaillé puisque nous en avions la possibilité.

Je rappelle que les 514 millions d'euros évoqués par Michel Raison correspondent à la somme que nous n'avons pas prélevée sur les 11 % restants des aides découplées des grandes cultures. J'ai mis en discussion la possibilité pour la profession d'utiliser cette somme pour que des exploitations céréalières exercent leur solidarité au profit des exploitations des zones intermédiaires, qu'elles soient mixtes ou de taille réduite. Nous verrons à quelles conclusions aboutira cette concertation. Nous prendrons nos responsabilités. Utiliserons-nous totalement ou en partie ces 11 % ? Trouverons-nous un autre moyen de soutien pour les zones intermédiaires ? Toutes les voies seront explorées sans a priori idéologique. Ainsi, l'idée d'une rotation pour les zones intermédiaires n'est pas exclue. Nous avons besoin de quelques semaines pour travailler sur ces questions et nous en parlerons ensemble.

Le Président de la République et le Premier ministre m'ont demandé d'exploiter toutes les possibilités pour définir un plan d'accompagnement substantiel, sérieux, afin que l'ensemble des exploitations des zones intermédiaires passent le cap de 2010 sans difficultés excessives.

Vous avez raison, monsieur Raison : des disparités demeurent quel que soit le ministre en place. Donnez-moi au moins acte de m'être efforcé, à l'aide des outils dont je disposais, de les avoir réduites en partie même si, hélas, elles subsisteront. Il suffit de considérer le niveau moyen des revenus entre les différentes filières de l'agriculture.

Je l'ai déjà dit : je suis le ministre des agricultures françaises. Or, au sein de ces agricultures, nombre d'hommes et de femmes – n'oublions pas les femmes chefs d'exploitation ni les conjointes d'agriculteurs – vivent en travaillant durement avec très peu d'argent. Je garde ainsi en mémoire des rencontres émouvantes avec des agriculteurs qui doivent faire vivre leur famille avec 4 000 euros par an – aides européennes comprises !

Quand vous êtes ministre, vous avez un devoir de justice et d'équité. J'ai tâché de remplir ce devoir fort d'une conviction, monsieur Patria : si nous ne donnons pas à cette politique agricole la mission de parvenir à davantage d'équité et de justice, nous avons beaucoup à craindre de l'échéance de 2013. Nous devons donc donner à cette politique une double légitimité : à l'intérieur du monde agricole, afin que la moitié des paysans cessent de considérer – pas forcément à tort aujourd'hui – que la politique agricole commune n'est pas équitable, mais aussi dans le reste de la société, où il faut chercher à renforcer le soutien à cette politique qui répond aux exigences de sécurité et de qualité alimentaires, et d'équilibre de l'emploi dans les territoires.

Je souhaite qu'après 2013 cette politique continue de soutenir l'ensemble des exploitants de manière différenciée, y compris les producteurs de grandes cultures. Je rappelle que, sur les 8 milliards d'euros d'aides directes du premier pilier, 5 milliards sont globalement attribués aux producteurs de grandes cultures.

J'ai par ailleurs été interrogé sur le fait de savoir comment j'étais parvenu à chiffrer la baisse des aides à quelque 10 euros par tonne. Nous avons décidé d'un prélèvement de 65 à 85 euros par hectare hors modulation. Si l'on prend un rendement moyen de 6 à 7 tonnes par hectare, on aboutit bien à 10 ou 12 euros par tonne, ce calcul demeurant certes global et approximatif.

Ensuite, et toujours pour répondre à Mme Vasseur, je précise que le régime d'intervention est destiné à offrir un filet de sécurité pour les années où le marché continuerait de trop se détériorer. La Commission proposait à l'origine de tout détricoter. Nous sommes parvenus, totalement pour les produits laitiers et globalement pour les céréales, à préserver ce système d'intervention.

Dans le bilan de santé de la PAC, nous avons obtenu une amélioration sensible de la proposition de la Commission. Ainsi, madame Vasseur, le blé tendre bénéficiera d'un contingent annuel à prix fixe de 3 millions de tonnes, soit la moyenne des dix dernières années, ce qui reste raisonnable et permettra de dégager des quantités excédentaires sur le marché communautaire et de tirer l'ensemble des prix à la hausse, y compris sur le marché français. Au-delà, la Commission pourra se porter acquéreur de quantités supplémentaires par adjudication. Son utilisation actuelle dans le secteur du lait montre que la commission sait aussi se montrer réactive et pragmatique et ne pas tirer les prix à la baisse, comme on pouvait le craindre.

Enfin, le compromis final du bilan de santé de la PAC prévoit également la possibilité d'intervenir par adjudication sur les autres céréales. Le taux est de zéro mais la possibilité n'est pas supprimée : on peut donc toujours l'activer pour le maïs et pour l'orge.

Voilà quels moyens de régulation nous avons maintenus. Je persiste à penser que l'agriculture a besoin d'outils de maîtrise de la production et d'outils de régulation.

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