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Intervention de Arnaud Montebourg

Réunion du 20 mai 2008 à 21h30
Modernisation des institutions de la ve république — Question préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Montebourg :

…qui se permet de le dire à titre personnel : le Parlement n'est qu'un théâtre où chacun apprend par coeur son rôle facile de godillot ou d'opposant. Il n'y a plus que des victoires par la force des uns sur les autres, précisément parce que le Parlement enchaîné n'est plus que la chambre d'enregistrement des volontés d'un pouvoir exécutif surpuissant et qui ne répond pas de ses actes.

Lorsque la population ne se sent plus représentée, se trouve dans l'incapacité de faire entendre sa voix, parce qu'elle sait intuitivement que l'organisation politique de son pays ne le lui permet pas, c'est la démocratie elle-même qui est en danger. Encore intuitivement, chacun a compris la dangerosité d'un système qui donne tout le pouvoir à un homme seul. Voilà pourquoi nous discutons de façon constructive de ce projet de loi.

Ce que nous appelons « l'omniprésidence », « l'hyperprésidence » dont, chers collègues de la majorité, vous souffrez autant que nous, c'est cette forme de délégation totale et sans limite accordée à un homme seul dont le caractère providentiel reste – et restera encore longtemps – à démontrer. C'est le problème irrésolu de ce pays ; c'est aussi le problème majeur de ce texte qui concerne l'aptitude ou l'inaptitude d'un président au profil si particulier à auto-limiter, avec ses amis ici présents, ses propres pouvoirs.

Pierre Mendès France avait eu la prescience, dès 1962, dans ce livre si beau et si juste intitulé La République moderne, de caractériser les dangers pour la démocratie de la personnalisation du pouvoir. Il écrivait : « Choisir un homme sur la seule base de son talent, de ses mérites, de son prestige ou de son habileté électorale, c'est une abdication de la part du peuple, une renonciation à commander et à contrôler lui-même, c'est une régression par rapport à une évolution que toute l'histoire nous a appris à considérer comme un progrès. Adopter une politique et faire confiance à un homme plutôt qu'à un autre pour l'appliquer, parce que c'est lui qui a été estimé le plus apte et le plus digne, c'est aussi se réserver le droit de juger sur ses actes. C'est, très exactement, se comporter en citoyen, cela n'a rien à voir avec le fait de se démettre entre ses mains, pour lui laisser le soin de résoudre à sa manière tous les problèmes. »

Les combats de la gauche française qui nous ont conduits ici, dans ce débat, s'inscrivent dans cet esprit mendésiste.

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