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Intervention de Jean-Luc Warsmann

Réunion du 20 mai 2008 à 21h30
Modernisation des institutions de la ve république — Discussion d'un projet de loi constitutionnelle

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Warsmann, président et, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, madame la garde des sceaux, ministre de la justice, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, nous allons vivre ensemble l'un des moments forts de la législature en débattant de ce projet de loi de révision de notre Constitution.

Je veux d'abord redire publiquement mon attachement aux institutions de la Ve République. Notre pays a la chance d'avoir une Constitution qui lui a permis de faire face aux nombreuses épreuves qu'il a rencontrées, de la guerre d'Algérie aux événements de mai 68.

Notre Constitution nous a permis de faire face à toutes les péripéties politiques, à la grande alternance de 1981, à toutes les autres alternances et cohabitations. Elle a permis à des personnalités aussi différentes que le général de Gaulle, Georges Pompidou, Valéry Giscard d'Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac ou Nicolas Sarkozy de donner le meilleur d'eux-mêmes à la tête de notre pays et, dans tous les cas, elle a garanti l'efficacité du Gouvernement. Elle a permis à la parole de la France d'être portée haut et d'être respectée dans le monde.

Dans toutes les situations, le suffrage universel a été respecté. Les Français ont porté à leur tête des majorités différentes selon les élections présidentielles ou législatives, mais leur vote a toujours été respecté. Pour être clair, je n'aurais pas été le rapporteur d'un texte qui aurait dénaturé nos institutions et, si je suis là aujourd'hui pour apporter tout mon soutien à cette révision, c'est parce que je crois que ces institutions doivent évoluer et s'adapter à notre temps.

Aujourd'hui est une étape de la longue démarche qui a débuté il y a plus d'un an. Lors des campagnes électorales pour les élections présidentielle et législatives, chacun des candidats a expliqué à nos concitoyens quels étaient ses choix. Cette démarche s'est poursuivie le 12 juillet 2007 avec l'intervention du Président de la République à Épinal, puis avec la constitution du comité de réflexion qui, sous l'autorité d'Édouard Balladur, rassemblait des personnalités de toutes origines, diverses par leur expérience. Je tiens à saluer le sérieux et la transparence du travail qui a été ainsi accompli. Le Gouvernement a ensuite mené une longue concertation, et je tiens à souligner également l'important travail mené par le président de notre assemblée, Bernard Accoyer, qui a constitué dès le début du processus un groupe pluraliste regroupant toutes les tendances et qui, réunion après réunion, a cherché à dégager de grandes lignes de consensus. Un an après, il est logique que nous, constituants, soyons saisis de ce texte.

La commission des lois a poursuivi ce travail de fond en auditionnant la garde des sceaux, le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, ainsi que le président du comité de réflexion, Édouard Balladur. Elle a ensuite procédé à plus d'une trentaine d'auditions, ouvertes à chacune et chacun d'entre vous, en présence de la presse. Pendant plus de dix heures, elle a ensuite débattu du texte et travaillé sur son contenu, en retenant de nombreux amendements venant de tous les bancs. Plus de quinze amendements ont été adoptés à l'unanimité.

Aujourd'hui, je suis là pour vous rendre compte de ce travail qui a visé à soutenir les axes principaux du projet et à renforcer les droits du Parlement – évolution attendue sur tous les bancs depuis des décennies – ainsi que ceux de nos concitoyens.

Très concrètement quels changements pouvons-nous attendre ?

Premier changement, selon moi fondamental pour notre pays, avec ce projet nous pourrons légiférer moins et mieux. Nous allons introduire dans la Constitution l'obligation d'études d'impact. Les gouvernements successifs devront ainsi, lorsqu'ils auront entamé un processus d'écriture d'un projet de loi, se demander si c'est bien utile, combien cela va coûter et s'il n'y a pas d'autres moyens d'atteindre les mêmes objectifs. Cela me semble indispensable si nous voulons fermer quelque peu le robinet de la production législative dans notre pays, et je suis persuadé que nos concitoyens, comme nos entreprises, attendent une telle évolution.

La deuxième amélioration concerne les délais. À l'unanimité, nous avons voté en commission des amendements fixant des délais minimaux de six semaines, ou trois semaines en cas d'urgence, afin que nous ayons le temps d'approfondir l'examen des projets qui nous sont soumis.

La troisième grande amélioration nous permettra d'éviter les redites, d'éviter que, dans l'hémicycle, on recommence les mêmes débats qu'en commission. La proposition du Gouvernement de faire discuter dans l'hémicycle le texte tel qu'il aura été voté par la commission est une très grande avancée.

Nous avons ajouté d'autres dispositions, notamment l'extension du droit d'amendement, qui permettra de desserrer le carcan imposé ces dernières années par le Conseil constitutionnel. Je veux également parler de l'amendement voté à l'unanimité, à l'initiative de nos collègues du Nouveau Centre, qui vise à introduire dans la Constitution le principe de non-rétroactivité. Un autre amendement, également adopté à l'unanimité, tend à obliger le Gouvernement à ratifier les ordonnances de manière expresse et non plus tacitement. Cela permettra d'améliorer la qualité du travail parlementaire.

Avec cette révision, le Parlement pourra-t-il mieux contrôler l'action du Gouvernement ? Oui, évidemment ! Pour la première fois, nous pourrons donner un avis sur les projets de nomination par le Président de la République des représentants de l'État dans les hautes autorités administratives indépendantes ou à la tête des grandes entreprises publiques. Sur tous les bancs, à un moment ou à un autre, nous avons eu l'impression que telle ou telle nomination était non pas due aux seules compétences du candidat, mais liée à tel ou tel rapprochement ou connivence de circonstance. Nous avons là l'occasion d'avoir des auditions et des débats clairs, et je remercie le Gouvernement d'accepter le principe d'un droit de veto permettant au Parlement de dénoncer d'éventuelles erreurs manifestes dans les désignations.

Avec cette révision, le Parlement pourra-t-il mieux contrôler l'action du Gouvernement ? Oui, et je voudrais citer en exemple l'énorme avancée, qu'aucun gouvernement n'avait proposée sous la Ve République, que constitue le fait que le Gouvernement s'engage à informer dans les trois jours le Parlement de toute intervention militaire et qu'un débat avec vote soit obligatoire pour une prolongation au-delà de six mois. C'est un amendement de M. Montebourg, qui a été adopté.

Comme il existe une déclaration de politique générale, qui permet au Gouvernement d'engager sa responsabilité devant nous, nous souhaitons qu'à l'avenir celui-ci puisse faire devant l'Assemblée une déclaration à caractère thématique – éducation nationale, défense ou autre. Retenant là aussi un amendement de l'opposition, la commission propose que cette déclaration puisse, à la demande du Gouvernement ou d'un groupe parlementaire, être suivie d'un débat et le cas échéant d'un vote. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cela permettrait au Parlement de se prononcer sans être obligé de légiférer.

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