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Intervention de Corinne Erhel

Réunion du 1er avril 2008 à 21h30
Organismes génétiquement modifiés — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCorinne Erhel :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, chers collègues, le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui est bref – quatorze articles – mais il est capital puisqu'il s'agit d'un enjeu de société.

La question des OGM n'est pas une simple question technique réservée aux seuls scientifiques ou aux seuls initiés. C'est avant tout une question politique, à laquelle il convient d'apporter une réponse politique. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Parler des OGM, c'est dire la place que l'on veut pour la France dans le monde, l'agriculture que l'on souhaite, le rapport à la science que l'on désire ; bref, c'est dire la société que nous voulons.

Une loi est certes nécessaire pour encadrer les OGM, elle ne doit pas pour autant promouvoir leur production commerciale. C'est pourtant bien ce que sous-tend le texte en sortant du cadre de la recherche.

Étant donné le temps qui m'est imparti, je m'arrêterai sur deux points de désaccord.

Le premier concerne la rédaction issue du Sénat. On passe de la volonté de consommer et de produire sans OGM à la liberté de consommer et de produire avec ou sans OGM. Le « avec » et le « sans » sont dorénavant sur un pied d'égalité, et c'est bien ce qui pose problème. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Le texte prévoit ainsi la coexistence des cultures OGM avec l'agriculture conventionnelle, avec la production biologique ou encore avec l'agriculture bénéficiant d'un signe d'authentification de qualité sous forme d'un label ou d'une appellation d'origine. Nous devons pourtant, dans une logique économique et politique, continuer à préserver et à développer les productions à haute valeur ajoutée, qui sont pour le consommateur synonymes de « sans OGM ». Le consommateur n'achète que s'il a confiance dans un produit et, pour lui, qualité alimentaire ne rime pas avec manipulation technologique. Que l'on soit d'accord ou pas, il s'agit d'une réalité économique que nous devons prendre en compte.

Quelque 70 % des Français sont hostiles aux OGM. Alors, certains sur ces bancs nous expliquent que nos compatriotes « ne savent pas », qu'ils « ne sont pas compétents », qu'ils « ne sont pas scientifiques ». De tels jugements ne sont pas forcément pertinents d'autant que, pour moi, tout ce qui touche au vivant correspond à un choix de vie, et requiert de ce fait une approche sociétale.

Avec ce texte, vous faites courir de grands risques à tous les producteurs qui se sont engagés dans des filières reconnues en France et à l'étranger. Un respect total du choix des filières est indispensable et ce projet de loi, tel qu'il nous est présenté aujourd'hui, ne garantit en rien aux agriculteurs qu'ils pourront continuer à produire en se conformant à leur cahier des charges et à leur système d'exploitation. Il ne suffit pas de les indemniser. En l'état, le texte risque de mettre à bas des filières entières à haute valeur ajoutée, qu'il a fallu des années pour mettre en place. À ce propos, je suis l'auteur, avec plusieurs de mes collègues, d'une proposition de loi interdisant la présence ou le recours aux OGM dans les productions sous signes de qualité, ainsi que dans leurs aires géographiques de production. Elle remonte à octobre dernier.

Il ne tient qu'à nous que la France et l'Europe prennent une orientation différente dans la compétition mondiale. C'est une question politique à laquelle il faut apporter une réponse politique, et en aucun cas un sujet strictement technique.

Venons-en maintenant au second point de désaccord. L'article 2 crée un organe d'expertise, destiné à éclairer le Gouvernement en matière d'OGM. Initialement, il devait s'appeler la « Haute autorité sur les OGM » ; il est devenu le « Haut conseil des biotechnologies ». « Conseil » et « autorité » ont des significations différentes et la nouvelle dénomination est beaucoup moins lisible et identifiable pour le grand public. J'ai bien senti, en écoutant son introduction, que Mme la secrétaire d'État penchait aussi pour l'appellation initiale !

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