M. Jean Gaubert attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les conséquences de l'affaire du Médiator. Des centaines de victimes souffriront jusqu'à la fin de leurs jours des séquelles de ce médicament toxique que l'on a trop longtemps impunément prescrit dans notre pays. En effet, cette affaire du Médiator pour laquelle les rebondissements se suivent jour après jour, met en évidence la nécessité d'améliorer notre système de pharmacovigilance et de mieux prévenir le risque d'effets indésirables résultant de l'utilisation de médicaments dont l'utilité thérapeutique elle-même doit être revisitée. En plus, cette question ne concernant pas uniquement la France, mais l'ensemble des pays européens, les règles sanitaires concernant un sujet commun devraient être appréciées de la même manière par ces pays. Le temps serait à l'action pour qu'un drame pareil ne puisse pas encore une fois se renouveler. Il lui demande donc de lui faire savoir ses intentions à ce sujet.
Tout médicament doit faire l'objet, conformément aux dispositions de l'article L. 5121-8 du code de la santé publique, avant sa commercialisation, d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) délivrée soit par la Commission européenne pour les médicaments soumis à une procédure d'autorisation centralisée, soit par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) au terme d'une procédure nationale, d'une procédure de reconnaissance mutuelle ou d'une procédure décentralisée, faisant intervenir d'autres États membres de l'Union ainsi que les instances communautaires. Au niveau national, cette autorisation de mise sur le marché est délivrée après évaluation du produit selon une procédure spécifique définie aux articles L. 5121-8 et suivants et R. 5121-21 et suivants du code de la santé publique. À cet égard, il peut être précisé que les exigences en termes d'efficacité, de qualité et de sécurité, telles que posées par la directive 2001/83/CE du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, sont strictement identiques, quelque soit la procédure utilisée. Cette procédure implique notamment l'obligation, pour le laboratoire pharmaceutique demandeur, de réaliser des expertises analytiques, pharmacologiques, toxicologiques et cliniques destinées à vérifier entre autres l'innocuité du produit, ses effets thérapeutiques, ses éventuelles contre-indications, et les effets secondaires liés à la prise du médicament dans ses conditions normales d'utilisation. Dans ce contexte, l'évaluation d'une spécialité pharmaceutique se base sur l'appréciation d'un rapport bénéfice/risque établi à un moment donné (moment de l'évaluation) compte tenu des connaissances scientifiques disponibles tant sur le produit concerné que sur sa substance active ou encore sur la pathologie pour laquelle son indication est revendiquée. Aussi, dans la mesure où cette balance entre les bénéfices et les risques est favorable, l'AMM du produit peut être délivrée. Sur ce point, il importe de souligner que ce rapport bénéfice/risque n'est pas figé et est réévalué lorsque de nouvelles données tant sur les bénéfices que sur de nouveaux risques sont disponibles. En effet, s'agissant plus particulièrement de l'existence de risques d'effets indésirables liés à l'utilisation du produit, il peut être précisé que l'ensemble des risques de survenue d'effets indésirables, qui sont identifiés au cours des essais cliniques conduits dans le cadre de la demande d'AMM, sont mentionnés dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP) de la spécialité concernée et figurent dans la notice d'information destinée au patient. Pour autant, les essais cliniques conduits et fournis à l'appui du dossier de demande d'AMM ne permettent pas toujours d'identifier et, a fortiori, de mesurer parfaitement les risques d'une spécialité en conditions réelles d'emploi. C'est pourquoi un processus de suivi des effets indésirables des médicaments est mis en oeuvre au niveau européen ainsi qu'au niveau national, dans le cadre du système national de pharmacovigilance, destiné à surveiller et à prévenir les risques d'effets indésirables, potentiels ou avérés, des médicaments dans le cadre de leur commercialisation. La pharmacovigilance comporte ainsi le signalement des effets indésirables et le recueil des informations les concernant, l'enregistrement, l'évaluation, l'exploitation de ces informations aux fins de prévention, la réalisation d'études ou de travaux concernant leur sécurité d'emploi (enquêtes nationale, suivi national et européen etc.), ainsi que la mise en place d'actions telles que les modifications des informations destinées aux professionnels de santé et aux patients, la suspension et le retrait de l'autorisation de mise sur le marché (AMM). Plus précisément, au niveau européen, la pharmacovigilance s'inscrit dans un large processus d'harmonisation. En effet, la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain définit les règles harmonisées concernant l'autorisation, la supervision et la pharmacovigilance applicables aux médicaments à usage humain dans l'Union. La pharmacovigilance européenne repose ainsi sur un réseau de systèmes nationaux, - dont les États membres sont responsables -, coordonné par le comité des médicaments à usage humain (CHMP), le groupe « de travail européen de pharmacovigilance (PhVWP) et le groupe de coordination pour les procédures de reconnaissance mutuelle et décentralisées (CMD). Dans ce système, les États membres ont pour rôle : 1° de recueillir, enregistrer et évaluer les données de pharmacovigilance ; 2° de transmettre les effets indésirables à l'agence européenne du médicament (EMA) ainsi qu'aux laboratoires, et de les informer des mesures prises sur le territoire ; 3° de promouvoir et encourager le signalement des effets indésirables par les professionnels de santé et désormais directement par les patients ; 4° de participer et collaborer aux travaux du CHMP et du PhVWP et enfin de veiller à l'application des décisions de la Commission européenne. Pour ce faire, une base de données européenne commune de pharmacovigilance a été mise en place, sous le nom d'EudraVigilance. Cette base a pour but de permettre la transmission électronique des cas de pharmacovigilance, de centraliser dans un point de la communauté ces données ainsi que d'améliorer la communication et faciliter la collaboration entre les autorités compétentes. Ce système d'échange d'informations permet ainsi d'alerter et de prendre toute mesure utile, de manière harmonisée, dont le champ d'application s'étend à l'ensemble des États membres. Pour autant, au vu de l'expérience acquise et après l'évaluation par la Commission européenne du système de pharmacovigilance de l'Union européenne, des mesures destinées à renforcer le système communautaire de pharmacovigilance ont été posées par la Directive 2010/84/UE du Parlement européen et du conseil du 15 décembre 2010 modifiant, en ce qui concerne la pharmacovigilance, la directive 2001/83/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, qui entrera en vigueur en juillet 2012. Ainsi, un nouveau comité pour l'évaluation des risques en matière de pharmacovigilance est créé au sein de l'EMA afin notamment d'assurer dans l'ensemble de l'Union des réponses harmonisées aux préoccupations concernant la sécurité des médicaments. Un renforcement des systèmes de pharmacovigilance dans les entreprises est aussi mis en place. Ce dernier s'illustre notamment par l'instauration d'une surveillance supplémentaire pour les médicaments contenant de nouvelles substances actives et les médicaments biologiques, par l'instauration d'une surveillance permanente de la sécurité de ses médicaments, assorti d'une obligation d'informer les autorités de toute modification de nature à influer sur l'AMM et de veiller à ce que les informations relatives aux médicaments soient tenues à jour, ou encore, par l'obligation de mettre en place un système de pharmacovigilance garantissant le suivi et la surveillance d'un ou plusieurs médicaments, enregistrés dans un dossier permanent du système de pharmacovigilance qui devra être constamment disponible à des fins de vérification par les autorités compétentes. Par ailleurs, à la demande de l'autorité compétente, des études de sécurité et d'efficacité postautorisation pourront être demandées au titulaire de l'AMM. La simplification de la notification des effets indésirables, qui se caractérise d'une part par l'utilisation de la base de données Eudravigilance, désormais unique point de réception des notifications, et d'autre part par la possibilité offerte aux patients de déclarer directement les effets indésirables, est également posée. Par ailleurs, des mesures relatives au renforcement de la transparence et de la communication sont instaurées. La rationalisation du processus décisionnel de l'Union sur les questions de sécurité des médicaments et notamment la mise en place d'une procédure d'arbitrage d'urgence spécifique aux cas de pharmacovigilance peut également être soulignée. Enfin, au niveau national, outre l'enquête judiciaire ouverte sur le dossier Médiator, plusieurs missions (deux missions parlementaires, deux missions de l'inspection générale des affaires sanitaires et sociales (IGAS)) destinées à établir des propositions de réformes du système sanitaire des produits de santé et plus particulièrement d'amélioration de son système de pharmacovigilance, sont actuellement en cours. De même, des propositions sur l'évaluation, le suivi, l'utilisation et la promotion des produits de santé, afin de garantir une sécurité optimale aux patients seront également élaborées par les différents groupes de travail constituant les « Assises du Médicament ». L'enjeu principal de rénovation du dispositif sanitaire réside essentiellement dans la réforme des processus d'évaluation et de décisions, dont quatre pistes de réforme méritent d'être soulignées. Il s'agit tout d'abord de l'élargissement du pluralisme des processus d'évaluation et de réévaluation afin d'apporter un regard plus transversal sur le rapport bénéfice/risque et ainsi aider les décideurs à jauger le risque acceptable au regard d'un certain niveau de bénéfice. Il faut ensuite renforcer la transparence de ces processus d'évaluation au-delà des initiatives prises depuis cinq ans par l'AFSSAPS, notamment en explicitant davantage les positions dissidentes quand elles s'expriment et en implantant en France la pratique des auditions publiques. Il est ensuite crucial de franchir une nouvelle étape dans le renforcement de l'effectivité du système de déclaration et de gestion des liens d'intérêts des experts qui est une crédibilité des processus d'évaluation. Enfin, et bien entendu, il faut renouveler et compléter les outils et les méthodes de la pharmacovigilance. Aussi, la mise en oeuvre de la réforme législative du système de sécurité sanitaire ne pourra-t-elle intervenir qu'une fois que ces missions auront rendu leurs rapports et que les travaux issus des « Assises du Médicament » auront été rendus publics (prévu en mai 2011).
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