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Arnaud Robinet
Question N° 99086 au Ministère du Travail


Question soumise le 1er février 2011

M. Arnaud Robinet alerte M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la prescription du médicament Roaccutane et de ses génériques à base d'isotrétinoine, dérivé de la vitamine A acide (également appelée acide tout-trans rétinoïque ou trétinoïne). L'affaire du Médiator nous amène à mener une réflexion sur notre système du médicament, mais au-delà sur sa bonne utilisation et ses effets indésirables. À cette occasion, il convient de s'inquiéter de l'isotrétinoïne, qui est fortement tératogène, c'est-à-dire à l'origine de malformations foetales, et responsable d'effets secondaires particulièrement gênants. Après administration orale d'isotrétinoïne, trois métabolites principaux ont été identifiés dans le plasma : la 4-oxo-isotrétinoïne, la trétinoïne (acide tout-trans rétinoïque) et la 4-oxotrétinoïne. Les études pharmacologiques ont montré que ces métabolites possédaient une activité biologique dans plusieurs tests in vitro. L'isotrétinoine, est indiquée dans le cas d'acnés sévères (telles que acné nodulaire, ou acné susceptible d'entraîner des cicatrices définitives) résistantes à des cures appropriées de traitement classique comportant des antibiotiques systémiques et un traitement topique. Or, parfois sous la pression des patients et pour des raisons psychologiques dues à l'acceptation de l'acné par des adolescents, cette molécule est prescrite de plus en plus dans des cas d'acné légère. Cette molécule et ses dérivés ne sont pas dénués d'effets secondaires ou indésirables graves. Hormis ces effets tératogènes, des troubles cutanés et des tissus sous- cutanés de nombreux troubles psychiatriques sont à noter. Des cas de dépression, dépression aggravée, d'anxiété, de tendance agressive, de changement d'humeur, de symptômes psychotiques et de cas d'idées suicidaires, de tentatives de suicide et de suicides ont été rapportés chez des patients traités par isotrétinoïne. Une attention particulière doit être portée aux patients présentant des antécédents de dépression et une surveillance des éventuels signes de dépression doit être effectuée chez tous les patients ayant eu recours à un traitement de cet ordre. L'interruption de l'isotrétinoïne peut cependant être insuffisante pour maîtriser les symptômes et un bilan psychiatrique ou psychologique complémentaire peut alors être nécessaire. Malheureusement de nombreux parents ignorent ces recommandations et ne lisent pas avec suffisamment d'attention les notices d"accompagnement, qui indiquent pourtant les risques évoqués précédemment. Déjà un certain de cas de suicides a été répertorié aux États-unis, ce qui a entraîné le retrait de la molécule du marché. Récemment, un cas s'est présenté dans notre proche région, à Laon. Il l'interroge quant aux mesures qui pourraient être étudiées rapidement afin de répondre à cette situation particulièrement préoccupante pour la santé des adolescents.

Réponse émise le 8 mars 2011

L'isotrétinoïne est indiquée dans le traitement des acnés sévères telles que l'acné nodulaire, l'acné conglobata, ou l'acné susceptible d'entraîner des cicatrices définitives résistantes à des cures appropriées de traitement classique comportant des antibiotiques systémiques et un traitement topique. La survenue de troubles psychiatriques sous isotrétinoïne par voie orale fait en France l'objet d'un suivi particulier de pharmacovigilance. Aussi, le Résumé des caractéristiques du produit (RCP) et la notice patient ont été modifiés à plusieurs reprises dès 1989 pour rajouter dans la liste des effets indésirables le risque de dépression, de tentatives de suicide et de suicide. L'AFSSAPS a adressé une lettre en 1998 aux prescripteurs. Le courrier leur recommandait une vigilance particulière vis-à-vis des patients présentant des antécédents psychiatriques et préconisait l'arrêt du traitement en cas de signes évocateurs de dépression. En 2008, la notification de nouveaux cas de suicide a conduit à la mise en place d'un groupe de travail multidisciplinaire, pour faire une analyse exhaustive de toutes les données disponibles sur le risque de conduite suicidaire avec isotrétinoïne, étudier la faisabilité et l'intérêt d'une étude épidémiologique, et envisager d'éventuelles recommandations pour les professionnels de santé sur la prévention et la prise en charge des effets indésirables psychiatriques de l'isotrétinoïne. Le groupe a conclu qu'il n'y avait pas lieu de conduire une étude épidémiologique supplémentaire en raison des nombreuses limites quelle que soit la méthodologie envisagée et du fait qu'elle avait peu de chance d'apporter des données supplémentaires par rapport à toutes celles déjà réalisées. Il confirme que le signal de pharmacovigilance ne repose que sur les données de notification signalées de dépressions/conduites suicidaires avec isotrétinoïne, et n'est étayé par aucune des études épidémiologiques publiées. Après une revue détaillée de la méthodologie des études populationnelles sélectionnées, il a été convenu qu'une seconde réunion serait organisée afin de rediscuter de l'intérêt de conduire une étude épidémiologique supplémentaire. Suite à ces réunions de travail, le groupe a convenu que : un outil simple, tel qu'une échelle de sévérité, pour aider le médecin dans sa démarche d'évaluation de l'état psychiatrique actuel du patient, devait être mis en place ; en parallèle, une lettre était adressée aux professionnels de santé pour les informer des données disponibles sur le lien entre l'isotrétinoïne per os et la survenue des troubles psychiatriques, leur rappeler les mises en garde et précaution d'emploi du RCP, les appeler à la prudence et à la surveillance des troubles psychiatriques chez les patients traités et de les inciter à adresser si besoin, les patients vers une consultation de psychiatrie. En 2009, l'AFSSAPS en association avec les sociétés savantes de dermatologie, a adressé un courrier aux dermatologues et aux pharmaciens d'officine pour les informer des données disponibles concernant isotrétinoïne per os et survenue des troubles psychiatriques, leur rappeler les mises en garde et précaution d'emploi du RCP, les appeler à la prudence et à la surveillance des troubles psychiatriques chez les patients traités et de les inciter à adresser si besoin, les patients vers une consultation de psychiatrie. La lettre annonçait par ailleurs le renforcement du programme de prévention des grossesses avec la mise en place du carnet-patiente en raison du caractère tératogène de l'isotrétinoïne qui est également suivi de près par l'AFSSAPS. Une étude d'acceptabilité de l'utilisation de l'Adolescent Depression Rating Scale (ADRS) comme outil d'aide au repérage des symptômes dépressifs dans le cadre de la prise en charge de l'acné sévère chez les adolescents avant et pendant le traitement par isotrétinoïne a été mise en place. L'ADRS est un auto-questionnaire simple et court (en dix items, réponses en vrai/faux), dont le calcul de score est aisé car immédiat. Cependant, la décision de prescrire ou non l'isotrétinoïne ne devant pas se baser sur le seul score obtenu, une conduite pratique à adopter face aux scores obtenus à cette échelle a été spécifiquement élaborée pour l'étude. Aussi avant de pouvoir recommander l'utilisation de cette échelle, il est important de déterminer si les modalités d'évaluation proposées sont transposables en situation réelle de prise en charge des adolescents acnéiques et si elles suscitent à la fois l'adhésion des patients et des dermatologues. Cette étude a débuté le 10 novembre 2010. D'une durée de huit mois, elle sera menée par 100 dermatologues qui suivront chacun, au maximum dix patients, de manière prospective et consécutive. Les résultats seront disponibles à la fin de l'année 2011. Par ailleurs, des rencontres régulières ont lieu avec l'Association des victimes du roaccutane et génériques (AVRG). Lors de ces rencontres, un bilan des vigilances et des propositions d'information et d'action sont échangés. Un nouveau point sur l'ensemble des données sera effectué d'ici l'été 2011 et donnera lieu à des échanges avec l'association ainsi que des propositions d'actions de la part de l'agence (information des dermatologues et/ou modifications des CPD). Les résultats de l'étude ADRS seront disponibles à la fin de l'année 2011 et permettront à l'Agence de revoir ou non les conditions de prescription et de délivrance de ces médicaments. Enfin, une fiche PGR public a été mise en ligne sur le site internes de l'AFSSAPS le 31 janvier 2011 en même temps que trois autres PGR (toxines botuliques, buprénorphine, arava).

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