M. Jérôme Bignon alerte M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation, sur certaines pratiques abusives du régime de l'auto-entrepreneur non initialement prévues par le législateur. Le régime de l'auto-entrepreneur, par les facilités administratives de création et de déclaration du chiffre d'affaires réalisé, a suscité l'engouement que l'on connaît auprès d'un grand nombre de créateurs d'entreprise. Cependant des employeurs peu scrupuleux, pour faire face à une baisse d'activité, demanderaient à certains de leurs employés de démissionner et de s'inscrire en tant qu'auto-entrepreneur, puis les feraient travailler en tant que sous-traitant. Dans ce cas, l'employeur fait donc pression sur le salarié pour qu'il démissionne. Ce cas de figure s'avère économiquement et moralement désastreux pour l'ancien salarié devenu auto-entrepreneur. Ce dernier peut en effet se retrouver sans travail et sans revenu du jour au lendemain, si son ancien employeur n'a plus assez de travail à lui fournir. Pire, il est devenu entrepreneur alors qu'il n'en a jamais eu l'envie et qu'il n'a peut-être pas les qualités nécessaires. Ces situations pourraient être évitées en interdisant, pendant un délai de six mois, à un ancien salarié devenu auto-entrepreneur, d'offrir ses services à son dernier employeur connu. Il lui demande par conséquent si de telles pratiques ont été à ce jour recensées et si le Gouvernement envisage de prendre des mesures afin de limiter ces pratiques abusives.
Le régime de l'auto-entrepreneur reflète le désir profond d'entreprendre qui anime maintenant les Français. Ainsi, rien qu'en 2009, pour la première année de sa mise en oeuvre, ce régime a suscité la création d'un très grand nombre d'entreprises : 322 000. Près de 300 000 sont de pures créations et, sans la mise en place du régime, la plupart - 90 % d'entre elles - n'auraient pas vu le jour. Par conséquent, l'effet de substitution est limité. Le succès du régime ne s'est pas démenti en 2010 : l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) a dénombré 350 000 créations d'auto-entreprises, lesquelles ont réalisé plus de 3 Mdeuros de chiffre d'affaires. Le régime de l'auto-entrepreneur ne génère aucune concurrence déloyale en termes d'exigence de qualification ou d'assurance obligatoire. Les règles de qualification sont identiques, sans aucune dispense, pour les auto-entrepreneurs et pour les autres artisans. Depuis 1996, certains artisans sont soumis à une obligation de qualification professionnelle : le plus généralement, trois ans d'expérience professionnelle ou un certificat d'aptitude professionnelle dans le domaine d'activité où ils veulent créer leur entreprise sont requis. Cette règle s'applique de plein droit aux auto-entrepreneurs. Avant le 1er avril 2010, l'obligation de qualification faisait l'objet de contrôles inopinés dans la vie de l'entreprise. Le Gouvernement a remédié à cette insuffisance par un décret publié le 12 mars 2010, applicable depuis le 1er avril 2010. Désormais, tous les artisans et les auto-entrepreneurs souhaitant créer leur activité doivent, au préalable, attester de leur qualification. Au regard des règles d'exercice de son activité, l'auto-entrepreneur est une entreprise comme une autre et doit donc les respecter pleinement : il est soumis à la réglementation applicable à tous les professionnels du secteur, en termes de formation et de qualification professionnelle préalable, d'application des normes techniques, d'hygiène et de sécurité, de déclaration et d'emploi des salariés, de responsabilité ou encore de facturation à la clientèle. Cette égalité du niveau d'exigence s'applique également aux obligations en matière d'assurance. Le Gouvernement n'a pas connaissance d'une recrudescence de situations dans lesquelles un défaut d'assurance serait à l'origine d'un défaut de protection du consommateur. Toutefois, dans le souci constant d'améliorer la transparence et l'information de ces derniers, le Gouvernement examine l'opportunité de renforcer les exigences d'information sur les obligations assurantielles des professionnels du bâtiment. Les auto-entrepreneurs ont le droit de ne pas débuter immédiatement leur activité et, pendant une période donnée, de ne pas exercer d'activité : ce régime instaure en effet un « permis d'entreprendre », que chacun peut activer selon sa volonté, notamment en cas d'activité complémentaire ou saisonnière. C'est cette souplesse qui fait justement le succès de ce régime. La loi a réduit de trente-six à vingt-quatre mois la période de maintien dans le régime sans chiffre d'affaires. Dès lors que le régime de l'auto-entrepreneur n'engendre pas de concurrence déloyale, il n'est pas justifié de limiter ce régime dans le temps. C'est évident pour les activités complémentaires, qui peuvent durablement être exercées sans dépasser les plafonds de chiffre d'affaires applicables au régime. C'est également le cas pour les entrepreneurs à temps plein, qui ne souhaitent pas tous faire croître leur activité et peuvent légitimement vouloir bénéficier durablement d'un cadre comptable, administratif, fiscal et social simplifié. Limiter la durée d'application du régime de l'auto-entrepreneur reviendrait à adresser un signal négatif à toutes les personnes qui se sont engagées dans cette voie de l'entrepreneuriat, avec les risques que cela implique. Le régime de la micro-entreprise, dont s'inspire nettement le régime de l'auto-entrepreneur, n'est pas limité dans le temps, pour les mêmes raisons.
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