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Alain Rousset
Question N° 98204 au Ministère de la Défense


Question soumise le 25 janvier 2011

M. Alain Rousset attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la défense et des anciens combattants, sur le désarroi du monde combattant, face à l'absence de réponses concrètes du Gouvernement aux difficultés qu'il rencontre. Le budget pour 2011 est, en ce sens, l'illustration de ce qui est considéré comme un « mépris » à l'égard de ces hommes qui ont pourtant servi notre pays avec courage et loyauté. Si les parlementaires socialistes ont obtenu, lors des débats à l'Assemblée nationale, la revalorisation de 2 points de la retraite du combattant, le niveau de cette retraite n'en demeure pas moins bien en-deçà des promesses du Président de la République qui souhaitait la porter, d'ici à 2012, à 48 points. De manière plus générale, il s'agit là d'un budget de renoncement qui conduit à une véritable déception au sein du monde combattant. S'ajoute à l'adoption de ce texte l'indignation suscitée par le décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010, proposé par le Gouvernement « portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du nord ». Censé répondre à la décision n° 328282 du Conseil d'État enjoignant le Gouvernement de prendre toute mesure administrative permettant d'accorder le bénéfice de la campagne double aux fonctionnaires anciens combattants de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie, ce décret conduit finalement à exclure du bénéfice de la campagne double, la grande majorité des anciens combattants qui devrait pourtant y a avoir droit. En effet, ce dispositif qui crée d'importantes inégalités entre anciens combattants exclut, d'une part, ceux qui ont bénéficié de la carte du combattant en prenant en compte la durée d'exposition aux risques et non plus les actions de feu et de combat et, d'autre part, tous ceux qui ont liquidé leur droit à pension avant le 19 octobre 1999. Il souhaite donc mettre en garde le Gouvernement sur la montée de cette exaspération à laquelle vient s'ajouter les promesses qu'il n'a pas tenues. À titre d'exemple, si le secrétaire d'État aux anciens combattants s'était engagé à accorder la carte du combattant aux militaires engagés dans la guerre d'Algérie avant le 2 juillet 1962 et justifiant de quatre mois de présence en Algérie, il n'a pour l'heure pas mis en application cette engagement, ce qui a conduit le groupe socialiste de l'Assemblée nationale à déposer une proposition de loi en ce sens. Aussi, l'arrivée d'un nouveau ministre est toujours l'occasion de dresser un état des lieux en vue de remédier aux carences constatées. Au regard de la situation ci-dessus exposée, il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour répondre aux attentes des anciens combattants qui souffrent autant de la faiblesse des revenus dont ils disposent pour vivre que du manque de reconnaissance de la Nation à leur égard.

Réponse émise le 19 avril 2011

Malgré un contexte économique contraint, marqué, notamment, par l'absolue nécessité de rétablir les finances publiques de l'État, les crédits du budget consacré au monde combattant en 2011 sont conformes à la nouvelle programmation budgétaire triennale 2011-2013 et s'inscrivent dans le cadre de la poursuite de l'effort de rationalisation des services de l'État. Ce budget répond aux deux missions fondamentales de l'administration des anciens combattants que sont le témoignage de la solidarité nationale à ceux qui ont servi leur patrie par les armes et la perpétuation du souvenir de ceux qui lui ont sacrifié leur vie. Ce budget est ambitieux car il prévoit les moyens nécessaires à la poursuite de l'effort de modernisation du service rendu au monde combattant par l'achèvement de la réforme des structures entreprise les années passées et la mise en place de procédures simplifiées avec un accès facilité à un interlocuteur désormais unique, l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC), tout en menant ces évolutions à droit constant pour les ressortissants. Ce budget est également un budget responsable qui ne peut s'exonérer totalement de l'effort collectif pour redresser les finances de l'État et satisfaire toutes les demandes d'amélioration des prestations mais veut les consolider, préparer l'avenir et se donner les moyens de remplir le devoir de mémoire dû à ceux qui ont servi la France. Ainsi, le budget pour 2011 préserve intégralement les droits et avantages légitimes des anciens combattants et victimes de guerre. S'agissant de la retraite du combattant, le Président de la République et le Gouvernement se sont fixés comme objectif de la revaloriser sensiblement d'ici à 2012. Cette prestation, restée fixée depuis 1978 à 33 points d'indice de pension militaire d'invalidité, a donc évolué, d'une part, en fonction des augmentations de la valeur de ce point et d'autre part, à partir de 2006, de la revalorisation de cet indice. Ainsi la retraite du combattant a augmenté de 36 % depuis 2006 pour atteindre 43 points d'indice à compter du 1er juillet 2010, soit un montant annuel de 593,83 euros. L'article 149 de la loi de finances pour 2011 a porté cette prestation à 44 points à compter du 1er juillet 2011. Pour ce qui est de la campagne double, les bénéfices de campagne constituent une bonification d'ancienneté prévue par le code des pensions civiles et militaires de retraite. Ce sont des avantages particuliers accordés aux militaires, et sous certaines conditions aux fonctionnaires civils. L'attribution de la campagne double signifie que chaque jour de service effectué par le militaire est compté pour trois jours dans le calcul de sa pension. La loi du 18 octobre 1999 a substitué à l'expression « aux opérations effectuées en Afrique du Nord », l'expression « à la guerre d'Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc », qualifiant le conflit en Algérie de « guerre ». Elle a ainsi créé une situation juridique nouvelle. Il en a découlé que les personnes exposées à des situations de combat au cours de la guerre d'Algérie étaient susceptibles de bénéficier de la campagne double. Cela a été confirmé par le Conseil d'État dans sa décision du 17 mars 2010. Le décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010 portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du Nord accorde ce droit aux militaires d'active et aux appelés pour toute journée durant laquelle ils ont pris part à une action de feu ou de combat ou ont subi le feu et s'applique aux fonctionnaires et assimilés dont les pensions de retraite ont été liquidées à compter du 19 octobre 1999, date d'entrée en vigueur de la loi. Ces pensions sont révisées à compter de la demande des intéressés déposée postérieurement à la date d'entrée en vigueur du décret du 29 juillet 2010, auprès des services de l'administration qui a procédé à la liquidation de la pension de retraite. Elles n'ouvrent droit à aucun intérêt de retard. Cette mesure ne peut s'appliquer aux pensions liquidées antérieurement au 19 octobre 1999, puisque ce n'est qu'à compter de cette date qu'a été reconnu officiellement l'état de guerre en Algérie, qui seul permet l'attribution de la campagne double. Le Gouvernement a décidé que le décret du 29 juillet 2010 serait applicable à compter du 19 octobre 1999, ce qui donne toute son effectivité à la loi du 18 octobre 1999 dans le respect du principe de non-rétroactivité des lois. Il ne peut réglementairement aller plus loin. Concernant les actions de feu ou de combat, le Conseil d'État, dans son avis du 30 novembre 2006, a estimé que la campagne double ne devait pas être accordée à raison du stationnement de l'intéressé en Afrique du Nord, mais devait l'être au titre des « situations de combat » que le militaire a subies ou auxquelles il a pris part. Aussi a-t-il considéré qu'il revenait aux ministres respectivement chargés des anciens combattants et du budget de « définir les circonstances de temps et de lieu » des situations de combat ouvrant droit au bénéfice de la bonification de campagne double. Or il n'existe pas de définition juridique de la situation de combat. En revanche, pour les anciens combattants qui ne peuvent se prévaloir des 90 jours réglementaires de présence en unité combattante, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre prévoit, notamment en son article R. 224, que la carte du combattant est délivrée pour la participation « à des actions de feu ou de combat ». Ainsi, le Gouvernement a décidé que la campagne double serait accordée pour chaque journée « durant laquelle les combattants ont pris part à une action de feu ou de combat ou ont subi le feu ». Pour toute journée durant laquelle l'intéressé a été exposé à une situation de feu ou de combat, il bénéficie de deux jours de bonification. Le Gouvernement a opté pour une solution objective, un critère reconnu, clair et opérant. La seule référence à une situation de combat, sans autre précision, aurait été difficile à établir, alors que la notion d'exposition à des actions de feu ou de combat a déjà reçu une définition éprouvée et les archives en portent trace. Par le choix de ce critère, le Gouvernement a souhaité rendre effectif plus rapidement le droit acquis à la campagne double. Enfin, le décret du 29 juillet 2010 ne remet pas en cause la situation des blessés de guerre puisqu'ils bénéficient déjà de la double campagne en application des dispositions de l'article R. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite qui n'a pas été modifié. Concernant l'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants de la guerre d'Algérie, aux termes des articles L. 253 bis et R. 224-D du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, ont vocation à la qualité de combattant les militaires et les civils de nationalité française ayant participé à la guerre d'Algérie entre le 31 octobre 1954 et le 2 juillet 1962, date d'indépendance de l'Algérie et ayant servi pendant 90 jours en unité combattante ou pris part à neuf actions de feu ou de combat collectives, ou à cinq actions de feu ou de combat individuelles. Sont toutefois exonérés de ces conditions les militaires qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en unité combattante, ainsi que ceux qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre. En outre, les dispositions de l'article 123 de la loi de finances pour 2004 permettent, depuis le 1er juillet 2004, de reconnaître la qualité de combattant aux militaires dès lors qu'ils totalisent quatre mois de présence sur les territoires concernés, sans obligation d'avoir appartenu à une unité combattante. Les associations d'anciens combattants et de nombreux parlementaires ont demandé à plusieurs reprises que la carte du combattant puisse être attribuée aux militaires présents en Algérie au 2 juillet 1962 et ne justifiant pas de quatre mois de service sur ce territoire avant cette date. La carte du combattant pourrait ainsi être attribuée aux anciens combattants justifiant de quatre mois de présence en Algérie, à la condition expresse que leur séjour ait commencé antérieurement au 2 juillet 1962. Il n'a cependant pas été possible d'inscrire au budget pour 2011 les crédits nécessaires, en raison des conséquences induites par cette mesure sur la retraite du combattant et la rente mutualiste du combattant. En effet, le surcoût est estimé à 4,6 Meuros par an. Le ministre de la défense et des anciens combattants est favorable à cette extension du droit à la carte du combattant dès que le Gouvernement retrouvera des marges de manoeuvre suffisantes pour en assurer le financement.

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