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Bérengère Poletti
Question N° 97925 au Ministère de la Justice


Question soumise le 18 janvier 2011

Mme Bérengère Poletti attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur les experts judiciaires. En effet, dans le cadre d'une procédure, le juge a la possibilité de nommer un expert judiciaire ; ce professionnel habilité est chargé de donner aux juges un avis technique sur des faits afin d'apporter des éclaircissements sur une affaire. Bien que leurs avis ne s'imposent pas aux juges qui restent libres, force est de constater que leurs conclusions impactent les décisions rendues. Si l'une des parties n'est pas satisfaite des conclusions rendues, elle a toujours la possibilité de demander une contre expertise. Cependant, si l'expert nommé a commis une erreur manifeste d'appréciation dans ses conclusions, le justiciable peut-il intenter un recours contre ce professionnel ? Aussi, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer les recours que le justiciable peut intenter dans ce cas.

Réponse émise le 3 mai 2011

Les experts judiciaires sont désignés par un magistrat à l'occasion d'une instance devant une juridiction judiciaire, pour apporter leur concours à la justice sur une question technique qui requiert la compétence d'un spécialiste. Le statut des experts judiciaires, résultant de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 et du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004, ne constitue pas au sens strict un statut professionnel. En effet, l'expert judiciaire, qui exerce par ailleurs sa profession (médecin, architecte...), est un collaborateur occasionnel de la justice. Si l'expert a commis une erreur manifeste d'appréciation dans ses conclusions, le justiciable dispose du recours de droit commun en matière de responsabilité civile applicable à tout professionnel dont la faute serait à l'origine d'un dommage. En effet, la Cour de cassation, tout en considérant l'expert comme un collaborateur du service public de la justice, lui applique un régime de droit privé ne permettant d'engager que sa seule responsabilité et non pas celle de l'État (Cass. 1re civ., 18 février 1997, Baoudj c/ Rousille et André). Dans la mesure où les experts judiciaires n'ont aucun lien contractuel avec les parties, leur responsabilité ne peut dès lors être recherchée que sur le terrain délictuel ou quasi délictuel. Elle obéit aux règles de droit commun en la matière, à savoir que trois éléments sont exigés : un agissement fautif, un préjudice et une relation de cause à effet entre la faute et le dommage (Cass. 1er civ., 9 mars 1949, Bull. civ. I, ri 229 ; Cass. com., 5 février 1968, D. 1968, somm. 88). En outre, certains experts sont également membres d'une profession qui comporte un ordre (médecins, architectes, experts-comptables, géomètres-experts) ; aussi lorsqu'ils commettent une faute celle-ci, bien que ou parce que déjà sanctionnée civilement ou pénalement, peut aussi entraîner une sanction prononcée par les juridictions ordinales. Enfin, le 25 mai 2010, le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a chargé Mme Chantal Bussière, première présidente de la cour d'appel de Bordeaux et M. Stéphane Autin, procureur général près la cour d'appel de Pau de conduire une réflexion sur l'expertise. Ils ont remis leur rapport le 30 mars 2011 au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Ils formulent 38 préconisations visant à mieux répondre aux attentes des justiciables, en améliorant l'accès à la justice comme la qualité des décisions rendus dans des délais acceptables.

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