M. Claude Bartolone interpelle à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le délai anormalement long de traitement des litiges devant les conseils de prud'hommes. Le Syndicat des avocats de France s'inquiète notamment des dysfonctionnements constatés à Bobigny, où trente-deux mois sont nécessaires à la tenue des audiences présidées par le juge départiteur, alors que l'article L. 1454-2 du code du travail prévoit, en pareille hypothèse, un délai d'un mois. De même, à Nanterre, les salariés ne peuvent espérer obtenir gain de cause devant le conseil de prud'hommes qu'à l'issue d'une procédure de deux ans. À Nanterre toujours, au mépris du délai légal d'un mois, plus d'une année d'attente est imposée au salarié sollicitant la requalification de son contrat de travail à durée déterminée. Devant les conseils de prud'hommes de Longjumeau et Melun, le délai de renvoi des affaires devant le bureau de jugement dépasse, désormais, treize mois. À Meaux, il est constaté un délai de près de dix mois entre l'audience de plaidoirie et le prononcé du jugement. L'extrême lenteur de la procédure est également dénoncée devant les conseils de prud'hommes de Creil, Paris et Pau. Ce dysfonctionnement de la justice civile impacte, aujourd'hui, certaines chambres sociales de cours d'appel. Il est banal que la durée de la procédure devant la cour d'appel de Paris dépasse vingt-et-un mois. À Versailles, compte tenu de l'encombrement de la juridiction d'appel, un salarié est parfois contraint d'attendre sept mois pour connaître le délibéré dans son affaire. Face à cette situation alarmante, le Syndicat des avocats de France rappelle que le droit pour tout justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable est un droit fondamental, reconnu par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et la loi française. L'exigence de célérité est d'autant plus essentielle devant les juridictions du travail que celles-ci statuent sur des litiges dont le jugement impacte la vie quotidienne des salariés. Il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour que le droit républicain d'obtenir une décision de justice dans un délai raisonnable soit effectivement garanti devant l'ensemble des conseils de prud'hommes.
Après un fort afflux d'affaires en 2009 (228 901), le nombre d'affaires dont les conseils de prud'hommes ont été saisis baisse sensiblement en 2010, avec 217 128 dossiers dont 172 044 au fond (- 2,6 %) et 45 084 référés (- 13,7 %). Par ailleurs, les conseils de prud'hommes ont enregistré en 2010 une forte augmentation (+ 6,9 %) du nombre d'affaires terminées, lesquelles sont passées de 192 411 en 2009 à 205 626 en 2010. La durée moyenne des affaires terminées en 2010 s'est établie à 11,1 mois. Elle inclut celle des affaires au fond (13,7 mois) et celles des référés (2 mois). Elle est en hausse par rapport à 2009. Il convient d'ajouter que 25 % des affaires terminées en 2010 l'ont été en moins de 2,5 mois, 50 % en moins de 9 mois et 25 % en plus de 15,8 mois. L'âge moyen du stock n'a que très faiblement augmenté en 2010, s'établissant à 11,7 mois. Cette durée moyenne reste en deçà du niveau des cinq dernières années. En ce qui concerne les conseils de prud'hommes de Nanterre et de Bobigny, s'il est établi que la durée moyenne des affaires terminées en 2010 y est plus importante que la moyenne nationale, avec respectivement 21,4 mois et 22,9 mois, il reste que l'âge moyen de leur stock d'affaires prud'homales s'est réduit puisqu'il est passé à Nanterre de 18,3 mois en 2009 à 13,6 mois en 2010, et à Bobigny de 19,5 mois en 2009 à 19 mois en 2010, malgré un volume annuel d'affaires nouvelles conséquent (environ 5 300 pour Nanterre et 6 000 pour Bobigny). Pour les conseils de prud'hommes de Melun, Creil, Paris et Pau, la durée moyenne des affaires terminées en 2010 s'est réduite par rapport à 2009, passant respectivement de 13,2 mois à 12,2 mois à Melun, de 13,1 mois à 12,3 mois à Creil, de 14,7 à 13,4 mois à Paris, et enfin de 15,8 mois à 14 mois à Pau, le nombre d'affaires terminées en 2010 (hors référé) ayant quant à lui notablement augmenté. Enfin, au conseil de prud'hommes de Longjumeau, la durée moyenne des affaires terminées en 2010, qui reste supérieure à la moyenne nationale, fait actuellement l'objet d'une attention particulière de la chancellerie qui s'attache à mettre en oeuvre les moyens matériels et humains nécessaires afin de la réduire. À cet égard, il faut noter que cette durée moyenne des affaires terminées n'est pas uniquement liée aux moyens mis à disposition des greffes des conseils de prud'hommes concernés ; les délais de jugements sont parfois allongés par la pratique des renvois successifs souhaités par les parties et/ou leurs avocats, tout comme par le recours fréquent au juge départiteur dans ce type de contentieux aux enjeux économiques importants. Ainsi, en 2010, le taux de départition est de 28,9 % à Bobigny, de 21 % à Nanterre, de 19,8 % à Melun, de 18,2 % à Creil, de 33,5 % à Paris, et enfin de 27,2 % à Pau. Si la procédure de départage garantit l'équilibre des intérêts des demandeurs et des défendeurs, le renvoi en départage induit automatiquement un allongement sensible de la durée de l'instance. Au-delà de ces données statistiques, pour accélérer les délais de traitement d'une instance introduite devant la cour d'appel, la partie qui justifie que ses droits sont en péril peut, en application de l'article 948 du code de procédure civile, même si une date d'audience a déjà été fixée, demander au premier président de la cour d'appel de retenir l'affaire, par priorité, à une prochaine audience. En tout état de cause, le garde des sceaux conserve le souci permanent de garantir aux conseils de prud'hommes les meilleures conditions de travail, tant en termes de moyens humains en prévoyant notamment le prochain recrutement exceptionnel de greffiers des services judiciaires, que matériels. Aussi, afin de garantir la qualité de la justice prud'homale, des réflexions ont récemment été menées avec le ministère du travail, de l'emploi et de la santé afin d'améliorer le fonctionnement des conseils de prud'hommes. D'ores et déjà, des échanges réguliers avec les organisations syndicales et patronales lors des assemblées plénières du conseil supérieur de la prud'homie ont conduit la direction des services judiciaires à piloter des groupes de travail destinés à faire émerger des solutions aux difficultés liées à l'indemnisation des conseillers prud'hommes et à optimiser les moyens matériels et financiers mis à la disposition des conseillers prud'hommes au sein de ces juridictions. Par ailleurs, le projet de loi relatif à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles adopté en dernière lecture par l'Assemblée nationale le 16 novembre 2011 prévoit la possibilité de spécialiser les juges départiteurs. Cette spécialisation devrait améliorer la qualité de la justice prud'homale et réduire le délai de traitement dans un contentieux technique toujours plus complexe.
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