M. François Loncle attire l'attention du M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État sur l'avenir de l'hôtel de la Marine à Paris. En effet, l'utilisation future du splendide hôtel de la Marine, situé à Paris, place de la Concorde, soulève à juste titre un vif émoi parmi les défenseurs du patrimoine. Construit entre 1757 et 1774, cet édifice prestigieux, dont la façade est ornée d'un majestueux péristyle, revêt une signification particulière dans l'histoire et les arts de notre pays, au point de faire figure d'emblème national. En effet, il a été à plusieurs reprises au coeur de la Révolution française : dès le 13 juillet 1989, des émeutiers se sont emparés d'armes qui y étaient entreposées ; les ordres d'exécution de Louis XVI et Marie-Antoinette y furent signés. Par la suite, le bal du couronnement de Napoléon Ier et de l'impératrice Joséphine y a eu lieu et la loi abolissant l'esclavage y a été ratifiée en 1848. Réalisé par Gabriel et Soufflot, cet hôtel est aussi l'un des joyaux architecturaux du XVIIIe siècle. La façade, les frontons, les reliefs, les décors intérieurs, en particulier le célèbre « salon des amiraux » et la galerie dorée, témoignent, à la fois, d'une grande magnificence et d'une importante évolution esthétique. Selon l'architecte en chef des monuments historiques, qui y dénombre 700 objets mobiliers de valeur inestimable, l'hôtel de la Marine constitue un « rare conservatoire des matériaux anciens et de l'évolution des techniques architecturales du second oeuvre et des arts décoratifs ». La restauration de la colonnade et de certains salons s'est achevée l'année dernière. Depuis sa construction, ce monument historique est propriété de l'État. Il abrite notamment, depuis plus de deux siècles, l'état-major de la marine. Toutefois, dans le cadre du plan de regroupement de tous les services militaires et civils de la défense nationale sur un seul site dans le sud-ouest de Paris, il est prévu que la marine quitte ses locaux historiques. C'est pourquoi il est envisagé de louer à des investisseurs privés les 20 000 m² de cet immeuble. Ainsi, France Domaines, service de la direction générale des finances publiques, a lancé le 27 novembre 2010 un appel d'offres pour l'attribution de cet édifice de 553 pièces, assorti d'un bail emphytéotique de 60 à 80 ans. Il souhaite qu'il lui expose les raisons pour lesquelles l'État ose privatiser un site historique et artistique d'une valeur exceptionnelle. Il lui demande d'expliquer pourquoi le délai de l'appel d'offres semble particulièrement bref pour un projet de cette ampleur, puisqu'il est limité à six semaines, alors que la durée habituelle est, dans ce genre d'affaires, de trois mois. Il voudrait également savoir pourquoi le bail de location est fixé pour une aussi longue durée. Il aimerait comprendre comment l'hôtel de la Marine peut être livré aux appétits affairistes de certains promoteurs qui ne reculent devant aucune captation patrimoniale, au mépris de l'expertise de l'architecte en chef des monuments historiques qui estime que la transformation commerciale de cet édifice (salle des ventes, boutiques, « appartements de mécènes », suites luxueuses, galeries d'exposition d'art contemporain), telle que le prévoit un projet déposé à France Domaines, est totalement incompatible avec sa préservation. Il lui demande de lui certifier que l'État ne procédera pas à la braderie de l'un de ses biens culturels les plus précieux et aura le souci de préserver la beauté et l'intégrité d'un haut lieu du patrimoine français.
Conformément aux orientations de la politique immobilière de l'État, le Gouvernement a décidé que l'hôtel de la Marine serait valorisé, dans le cadre d'un appel à projets, au moyen d'un bail emphytéotique administratif, tel que prévu par l'article L. 2341-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P), afin de permettre qu'un investisseur puisse réaliser les très gros travaux qu'exige cet immeuble, sous le contrôle de l'État, et que, après une période d'exploitation par cet investisseur, il revienne, remis à niveau, dans le patrimoine de l'État à l'issue de ce bail. Pour permettre aux candidats de concourir à cet appel à projets dans des conditions satisfaisantes, le Premier ministre a réexaminé le calendrier prévisionnel de la procédure de désignation de l'opérateur et a ainsi reporté au 1er juin 2011 la date limite de remise des offres, initialement fixée au 17 janvier 2011. Par ailleurs, l'État a estimé que, afin de rendre attractif un tel montage, la durée d'exploitation devait être comprise entre soixante et quatre-vingts ans, cette pérennité devant notamment permettre aux opérateurs de s'assurer des financements et de rentabiliser leurs investissements. À la suite des critiques et de la polémique née de l'emploi de cet immeuble, le Président de la République a demandé à une commission indépendante, présidée par l'ancien Président de la République Valéry Giscard d'Estaing, de donner son avis sur la procédure et les conditions de valorisation de cet immeuble. La présence de personnalités qualifiées permettra ainsi d'assurer la neutralité, l'indépendance et la compétence, qualités indispensables pour apprécier le sérieux et la qualité des offres déposées, et assurer ainsi la compatibilité du projet retenu avec la protection et la préservation de l'hôtel de la Marine. Enfin, aucun projet d'aucun candidat n'a été déposé ou présenté à France Domaine.
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