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Bernard Gérard
Question N° 96897 au Ministère du Travail


Question soumise le 28 décembre 2010

M. Bernard Gérard appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les préoccupations des professionnels intervenant dans le domaine des eaux de sources, face à la modification envisagée en matière de classification des eaux embouteillées, telle qu'établie par le décret 89-369 du 6 juin 1989. Le texte classe lesdites eaux en trois groupes : Les eaux minérales naturelles, Les eaux de source, Les eaux rendues potables par traitements avec indication des traitements mis en oeuvre. Aujourd'hui, les eaux potables par traitements se retrouvent commercialisées dans divers systèmes de traitement de l'eau de distribution publique qui laissent parfois supposer que l'eau filtrée possède les caractéristiques d'une eau naturelle non traitée. Une récente circulaire adressée aux préfets et aux agences régionales de santé, rappelle les règles en matière de publicité pour les eaux du réseau public et les eaux conditionnées, en soulignant que sont interdites dans ce contexte, toute indication, dénomination, marque de fabrique ou de commerce, image ou autre signe figuratif ou non, susceptible de créer une confusion avec une eau minérale naturelle ou une eau de source. Or un projet de décret envisagerait d'autoriser également, à côté de l'appellation « eau rendue potable par traitements » le terme « eau de table ». Les professionnels estiment que cette nouvelle dénomination risquerait d'entraîner une confusion dans l'esprit du consommateur et serait ainsi susceptible de créer une grave distorsion commerciale par rapport à leurs produits. Aussi, il lui demande si cette nouvelle appellation est toujours d'actualité, au moment où il semblerait légitime de conforter plutôt que de fragiliser cette filière des eaux naturelles et des eaux de source qui contribue au prestige de notre gastronomie récemment classée au patrimoine mondial immatériel de l'humanité par l'UNESCO.

Réponse émise le 8 février 2011

Le code de la santé publique définit les règles administratives et sanitaires applicables aux eaux conditionnées. Celles-ci se répartissent en trois catégories différentes, les eaux minérales naturelles et les eaux de source qui sont régies par les dispositions de directives européennes, et les eaux rendues potables par traitements, régies par les articles R. 1321-91 à R. 1321-93 du code de la santé. Le marché des eaux rendues potables par traitements se répartit entre les fabricants et les distributeurs de bonbonnes de 18,9 litres mises à disposition du public par fontaines dans les entreprises et les établissements recevant du public (comme Château d'eau, Culligan, Anapurna, Nestlé Waters direct France regroupés dans l'Association française de l'industrie des fontaines à eau (AFIFAE) et le groupe ELIS), les conditionneurs et les établissements de restauration qui vendent à leur clientèle des eaux en carafe provenant des réseaux publics de distribution, ayant fait l'objet d'une filtration, afin notamment d'en éliminer le goût de chlore. Il ne s'agit pas des carafes d'eau du robinet mises gratuitement à disposition des consommateurs conformément à l'article 4 de l'arrêté n° 25-268 du 8 juin 1967. La directive du Conseil 75/106/CEE du 19 décembre 1974 modifiée concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au préconditionnement en volume de certains liquides en préemballages encadrait la définition des contenants pour les eaux conditionnées et fixait la gamme des bouteilles jusqu'à 800 centilitres uniquement. Les volumes plus importants, notamment ceux des bonbonnes de 18,9 litres, échappaient ainsi à la réglementation des eaux conditionnées bien qu'il s'agisse souvent de la même eau et que les mêmes normes sanitaires y étaient appliquées à l'exclusion de celles relatives à l'étiquetage. Pour cette catégorie particulière, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait autorisé les opérateurs de fontaines à bonbonne à utiliser la dénomination « eau de boisson » sur leurs étiquettes. La directive n° 2007/45/CE du 5 septembre 2007 fixant les règles relatives aux quantités nominales des produits en préemballages, qui a abrogé la directive du 19 décembre 1974 et prévoyant l'abandon de la gamme des volumes obligatoires pour les eaux conditionnées à compter du 11 avril 2009, a remis en cause cette tolérance d'appellation. Ainsi, en l'état actuel de la réglementation, les industriels de ce secteur n'ont pas d'autre choix que d'opter pour l'une des 3 dénominations prévues par le code de la santé publique : si la grande majorité des eaux mises en bonbonnes ont les caractéristiques d'une eau de source et vont donc s'orienter progressivement vers la dénomination « eau de source », certaines eaux entrent dans la catégorie « eaux rendues potables par traitements. La DGCCRF a fait part à la Direction générale de la santé (DGS) des difficultés posées par la dénomination « eau rendue potable par traitements » qu'elle avait antérieurement proposée, qui est parfaitement exacte d'un point de vue descriptif, mais qui est jugée dévalorisante par les industriels et les restaurateurs pour la commercialisation de ces eaux. Afin de résoudre le problème du manque d'attractivité de la catégorie « eau rendue potable par traitements », il a été proposé d'introduire une nouvelle dénomination moins négative « eau de table », charge à l'industriel ou au restaurateur de choisir entre les deux appellations « eau de table » ou « eau rendue potable par traitements ». L'appellation initiale d'« eau de boisson » n'apparaît pas pertinente car toutes les eaux conditionnées peuvent être considérées comme des eaux de boisson. Cette position proposée par la DGCCRF a été validée par la DGS, au motif qu'il n'y a pas d'enjeu sanitaire et que cette position a le mérite de respecter la hiérarchie de qualité avec les eaux minérales naturelles et les eaux de source conditionnées. C'est la raison pour laquelle les services du ministère de la santé, en collaboration avec la DGCCRF, ont rédigé un projet de décret en Conseil d'État modifiant les articles R. 1321-93 et suivants du code de la santé publique. Ce projet prévoit notamment que la mention « eau de table » soit complétée obligatoirement par l'indication de tous les traitements mis en oeuvre pour rendre l'eau potable, contrairement aux deux autres catégories d'eau conditionnées, pour lesquelles le nombre de traitements autorisés est très limité. Les professionnels de l'embonbonnage et de l'embouteillage ont été consultés sur ce projet de décret en août 2010. Les premiers étaient favorables alors que les seconds ont exprimé leur désaccord sur le projet de texte par crainte de perte importante de parts de marché, mais sans preuve qu'un tel projet en serait la cause principale. L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a été saisie en août 2010 sur ce projet de décret. Son avis est attendu pour février 2011. En ce qui concerne l'entrée, depuis les États-Unis, sur le marché européen, d'une eau traitée, cette eau américaine doit se conformer à la législation française et répondre aux dispositions de l'arrêté du 4 mai 2007 relatif à l'importation des eaux conditionnées (JORF du 19 mai 2007) en particulier aux dispositions de l'article 1er 11°, qui impose un projet d'étiquetage comportant les mentions requises par les textes en vigueur. L'autorisation délivrée pour cinq ans doit être présentée par l'importateur au service des douanes.

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