M. Jean Grellier alerte M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État sur le choix validé par la commission mixte paritaire du 13 décembre dernier qui entérine la ponction sur les organismes d'habitat social pour pallier le désengagement de l'État. Cette ponction se traduira concrètement par une baisse mécanique du nombre de logements sociaux construits et par une détérioration du parc existant : de nombreux travaux d'entretien et de réparation ne pouvant plus être financés. Ce prélèvement vise clairement à compenser la baisse du budget de l'État en faveur de la construction de logements sociaux, qui passera ainsi de 630 à 60 millions d'euros entre 2010 et 2013. Par ailleurs, les dispositions ainsi validées ne prennent malheureusement pas en compte la qualité et les vertus sociales de bonne gestion, souvent marquées par un souci de rigueur budgétaire et d'efficience professionnelle. Ainsi, les organismes qui montrent une détermination soutenue à mettre en place des outils performants de rationalisation de fonctionnement ou encore d'accompagnement à destination des familles, se voient doublement pénalisés. L'autofinancement dégagé, n'est en rien de nature capitalistique et spéculative : il a une visée claire, permettre dans les meilleurs conditions possibles l'entretien nécessaire et la réhabilitation du parc immobilier. A titre d'exemple, Habitat Nord Deux Sèvres a prévu la rénovation thermique de plus de 800 logements et s'engage dans des opérations de renouvellement urbain hors ANRU. Il ressort qu'un prélèvement de 400 000 euros sur les réserves de cet organisme génère au minimum 3 millions d'euros d'investissement en moins. Ce prélèvement met à mal toutes les stratégies de développement et d'intervention prévues par les organismes. Comme souvent désormais, le principe général du droit de sécurité juridique est bafoué au bénéfice de mesures conjoncturelles qui méconnaissent les exigences de l'intérêt général qui ne saurait se concevoir que dans la concertation et le long terme. Aussi, il lui demande comment il entend corriger les effets néfastes dune telle mesure qui contrevient gravement aux impératifs du Grenelle de l'environnement, à l'intérêt légitime des locataires, à l'exigence de bonne gestion des organismes, et à l'activité économique de nos territoires.
Avant d'exposer le détail lié au système de péréquation des ressources des organismes HLM que le Gouvernement souhaite mettre en place, il est utile de revenir sur quelques chiffres essentiels. Le financement de la politique du logement est une priorité du Gouvernement de François Fillon. En 2009, l'ensemble des aides directes et indirectes dont bénéficie le secteur, et dont l'État représente la majorité, a atteint 37,4 MdEUR. Dans ce total, le secteur HLM bénéficie de près de 4 MdEUR par an : 700 MEUR par an au titre de l'exonération d'impôt sur les sociétés, 850 MEUR au titre de la TVA à taux réduit, 800 MEUR par an au titre de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties et 400 MEUR par an au titre de l'exonération de contribution sur les revenus locatifs. Il bénéficie aussi de l'exonération des droits de mutation à titre onéreux, qui constituent un véritable soutien à l'acquisition-amélioration de logements et de prêts bonifiés de la Caisse des dépôts et consignations représentant une aide de 1,2 MdEUR par an. Parallèlement, les loyers perçus par les organismes HLM (près de 17 MdEUR par an) sont couverts à hauteur de près d'un tiers par des aides à la personne financées par la collectivité. Or, la situation financière du secteur HLM est globalement bonne, tant en termes de fonds propres que de rentabilité économique : une partie du parc, la plus ancienne, est maintenant amortie, et génère des excédents dont une fraction est mise en réserve. Le cumul de la trésorerie des HLM est proche de 10 MdEUR, elles dégagent environ 2 MdEUR d'autofinancement chaque année, soit environ 12,5 % des loyers perçus. L'État souhaite qu'une partie de cette richesse produite et accumulée par les HLM soit redistribuée en leur sein pour bénéficier en priorité au financement de la construction de nouveaux logements sociaux en zone tendue et à la rénovation urbaine. Le projet initial du Gouvernement consistait à supprimer une dépense fiscale en assujettissant les organismes de logement social à la contribution sur les revenus locatifs (CRL). Le produit attendu atteignait 340 MEUR, fléchés vers l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU) et les aides à la pierre via un fonds spécifique géré par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Lors de l'examen du projet de loi de finances 2011, adopté le 15 décembre 2010, le Gouvernement et les parlementaires ont conçu un équilibre différent pour améliorer le dispositif. Le montant de la péréquation s'élèvera à 245 MEUR par an de 2011 à 2013, soit près de 100 MEUR de moins que dans le projet initial. L'assujettissement des organismes à la CRL sera écarté au profit d'un renforcement de deux contributions existantes, assises respectivement sur la richesse accumulée et la richesse produite par les organismes HLM : la taxe dite « dodus dormants », en vigueur depuis 2010, sera désormais assise sur le potentiel financier par logement. Un mécanisme de plafonnement de la contribution sera mis en place au bénéfice des organismes bâtisseurs. Les paramètres seront définis pour que le produit annuel atteigne 175 MEUR ; la cotisation additionnelle des organismes à la CGLLS assise sur leur autofinancement sera majorée, dans la limite de 70 MEUR par an en 2011, 2012 et 2013. Bien que le niveau de ressources mutualisées soit inférieur au projet initial, les besoins en aides à la pierre identifiés pour les trois prochaines années seront couverts et la « bosse » de l'ANRU financée, grâce au fléchage vers l'ANRU d'une part de l'augmentation de la taxe sur les bureaux affectée à la Société du Grand Paris, fixée à 95 MEUR par an de 2011 à 2013. Le dispositif est conçu pour ne décourager ni la constitution de groupes, ni la vente de logements HLM, ni la production de logements sociaux, qui répondent à des priorités du Gouvernement. Pour que ce mécanisme mobilise les ressources des organismes et non celles des locataires, le Parlement a limité pour trois ans la hausse des loyers HLM à l'indice de référence des loyers, sauf cas particulier apprécié localement. La loi de finances pour 2011 reporte enfin du 31 décembre 2010 au 30 juin 2011 la date limite de signature des conventions d'utilité sociale (CUS). Ce délai supplémentaire permettra d'identifier et de mesurer les effets de la péréquation sur les objectifs des organismes. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 28 décembre 2010, a validé l'ensemble du dispositif, tant dans ses principes que dans ses modalités. L'engagement du monde HLM dans l'effort de production de logements est indispensable à l'État dans la conduite de sa politique du logement social. En 2009 et 2010, plus de 120 000 logements par an auront été financés, niveau jamais atteint depuis trente ans, dont plus de 22 000 PLAI destinés aux plus modestes. Pour 2011, cet effort sera poursuivi avec un objectif de 120 000 nouveaux logements sociaux.
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