M. Alain Bocquet attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur les préoccupations que suscitent ses déclarations prévoyant une réforme du statut de l'Agence France Presse (AFP). Déclarations brutales remettant en cause les évolutions les plus récentes de cette affaire puisque une précédente tentative de modification du statut avait été écartée au début de l'année 2010, et qu'un comité de réflexion sur l'avenir de l'agence avait conclu, rappellent les personnels, « à la non-nécessité d'une modification du statut de l'AFP » dans un rapport remis au Gouvernement le 19 avril 2010. C'est une position partagée souligne d'ailleurs l'ADIAFP, association de défense de l'indépendance de l'AFP, par le PDG qui « a maintes fois affirmé [...] qu'une modification du statut n'était pas à l'ordre du jour ». L'Agence France Presse est aujourd'hui « seule à être absolument hors de portée de l'argent privé ». Si le Gouvernement maintient son projet d'imposer une réforme, quatre conditions essentielles sont mises en avant : renforcer l'indépendance de l'AFP pour « une étanchéité plus grande vis-à-vis de tout pouvoir extérieur » ; afficher une vraie stratégie d'entreprise ; recueillir au préalable l'accord du personnel par référendum ; recueillir une très forte majorité au Parlement. Il lui demande de lui faire connaître les prolongements que le Gouvernement entend donner à cette affaire.
L'Agence France-Presse (AFP) est une agence de presse à rayonnement mondial qui a vocation à fournir une information rapide, vérifiée et complète sur les événements qui font l'actualité internationale. Présente à la source de l'événement, elle couvre l'actualité à partir de cinq centres rédactionnels répartis à travers le monde, qui coordonnent l'activité de ses bureaux dans 165 pays. L'agence produit quotidiennement cinq mille dépêches en six langues et trois mille photos. Elle a développé depuis plusieurs années la production de vidéos, d'infographies d'information, ainsi que des services multimédias pour les médias présents sur Internet et les opérateurs de téléphonie mobile. Elle est aujourd'hui une des trois plus grandes agences de presse mondiales et, parmi elles, la seule francophone. Le statut de l'AFP a varié au fil des ans. Héritière de l'agence Havas créée en 1835 sous la forme d'une société commerciale, elle est devenue un établissement public autonome par ordonnance du 30 septembre 1944, puis la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'AFP l'a transformée en un « organisme autonome doté de la personnalité civile et dont le fonctionnement est assuré selon les règles commerciales ». Compte tenu de sa situation financière difficile depuis plusieurs années, il est apparu nécessaire d'envisager une modification de ses statuts. Le président-directeur général de l'agence a remis un rapport en ce sens au Gouvernement le 30 mars 2009. Il indiquait que l'agence devait se réinventer pour faire face aux mutations du monde de l'information et disposer des moyens financiers et du cadre juridique à même de porter ses ambitions. Il proposait, en conséquence, un changement de nature juridique en transformant l'AFP en une société anonyme à capitaux publics. Cette proposition s'est heurtée à des réticences internes. Aussi le ministre de la culture et de la communication souhaitant s'entourer de l'avis de personnalités qualifiées a-t-il installé, le 10 décembre 2009, un comité de réflexion sur l'avenir de l'AFP dont les travaux ont été coordonnés par M. Henri Pigeat. Le rapport de ce groupe de réflexion proposait notamment la création, sous le contrôle de l'AFP qui détiendrait au moins 51 % du capital social, d'une société par actions simplifiée dénommée AFP-SE à qui elle transférerait l'ensemble de ses activités commerciales et son personnel. Cette proposition n'a pas non plus été favorablement accueillie en interne à l'AFP. Par ailleurs, il lui paraissait souhaitable de modifier la composition du conseil d'administration. Il était proposé de mettre fin à la prépondérance des médias d'information afin d'éviter tout risque de confusion des genres qui pouvait en résulter en limitant leur représentation au sein du conseil d'administration puisqu'ils sont à la fois clients et administrateurs de l'agence. Cette situation s'est parfois révélée préjudiciable à son développement et pourrait entraver à l'avenir des capacités d'action et de développement. Depuis son arrivée, le nouveau président-directeur général de l'AFP a fait procéder aux études permettant de définir un plan d'affaires prévisionnel permettant à l'AFP de garantir sa première place parmi les agences de presse européenne et francophone, de développer ses activités sur de nouveaux marchés porteurs, et lui conserver sa crédibilité et sa légitimité tant au niveau national qu'à l'international. Ces études ont abouti à la définition d'un projet d'avenir qui doit répondre aux évolutions de l'environnement économique et professionnel de l'agence, totalement bouleversé par la révolution numérique en cours. Ce projet vise à développer ses activités, notamment dans le domaine du multimédia, de la vidéo, des services à forte valeur ajoutée lui permettant de s'imposer dans des segments à fort potentiel où elle est désormais placée en position de concurrence directe avec de nouveaux acteurs. Au-delà de la recherche d'une nécessaire rentabilité économique, les projets de développement de l'agence présentent un intérêt pour toute la profession. Ils permettent d'envisager des plates-formes de développement mutualisé ou agrégatif, bénéficiant par exemple à ses partenaires de la presse française qui pourrait les utiliser pour leur compte, que ce soit dans le domaine de la sauvegarde et de la numérisation du patrimoine ou dans celui de la vulgarisation des nouvelles technologies numériques de l'information. Le président-directeur général de l'AFP considère que ce plan de développement ambitieux nécessite d'une part de mettre en cohérence ses organes de gouvernance et d'autre part de clarifier ses relations contractuelles avec l'État. La priorité est donc actuellement donnée à des aménagements statutaires destinés à adapter la composition du conseil d'administration de l'agence à son nouvel environnement et à clarifier les relations qu'elle entretient avec l'État, notamment au travers de la définition de ses missions d'intérêt général. En tout état de cause, si une réforme est envisagée afin de lui permettre d'atteindre ses objectifs de développement, il conviendra de s'assurer avant tout que l'agence a les moyens de conserver son rôle dans la collecte, la vérification et la diffusion d'informations au niveau mondial, dans le respect des règles communautaires et des principes d'indépendance éditoriale qui en font aujourd'hui une agence de référence internationale.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.