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Danielle Bousquet
Question N° 95680 au Ministère de la Justice


Question soumise le 14 décembre 2010

Mme Danielle Bousquet attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur l'arrêt rendu le 23 novembre 2010 par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH). En effet, dans cette décision, la CEDH a à nouveau condamné la France en estimant que les procureurs ne sont pas des autorités judiciaires. La CEDH considère en effet que « les membres du ministère public, en France, ne remplissent pas l'exigence d'indépendance à l'égard de l'exécutif ». Conforme aux précédents arrêts de la CEDH, cette décision est importante sur notre organisation judiciaire. De plus, l'arrêt apporte un éclairage singulier sur le projet de réforme de la procédure pénale du Gouvernement, dont le fondement même reposait sur la suppression du juge d'instruction et un renforcement du rôle du parquet dans l'enquête, mais sans prévoir d'évolution du statut du parquet. Elle lui demande donc de lui indiquer si le Gouvernement entend infléchir significativement sa réforme de la procédure pénale. Elle lui demande également si le Gouvernement entend enfin résoudre la question de la réforme du statut du parquet, pour qu'il soit réellement indépendant de l'exécutif. Elle lui demande enfin si le Gouvernement entend supprimer les instructions individuelles et modifier le mode de nomination des membres du parquet.

Réponse émise le 20 décembre 2011

Il résulte certes des décisions de la Cour européenne des droits de l'Homme qu'un magistrat du parquet ne peut être considéré, pour l'application de l'article 5 de la Convention - et uniquement au regard de cette disposition - comme le juge ou le magistrat habilité à exercer des fonctions judiciaires devant lequel, en application de cet article, doit être présentée une personne privée de liberté dans le cadre d'une procédure pénale. Toutefois, les exigences conventionnelles n'imposent pas une présentation immédiate, celle-ci pouvant intervenir dans un délai de trois ou quatre jours. Cet impératif est ainsi parfaitement respecté par notre législation nationale, qui, notamment en matière de garde à vue, impose qu'une décision de prolongation après quarante-huit heures soit prise par un juge du siège. L'intervention d'un juge dans ce délai n'exclut cependant pas une garantie supplémentaire, qui découle des exigences résultant de notre Constitution. Celle-ci consiste en une intervention immédiate du magistrat du parquet en cas de privation de liberté, ce magistrat faisant partie de l'autorité judiciaire gardienne des libertés individuelles au sens de l'article 66 de la Constitution, comme l'a rappelé à plusieurs reprises le conseil constitutionnel. C'est pourquoi le procureur de la République doit être avisé immédiatement de tout placement de garde à vue et, comme l'indique expressément l'article 62-3 du code de procédure pénale résultant de la loi du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, il peut ordonner à tout moment la remise en liberté de la personne. En outre, si les magistrats du ministère public sont hiérarchisés et placés sous l'autorité du ministre de la justice, qui peut leur adresser des instructions individuelles à condition toutefois qu'il s'agisse d'instructions écrites et versées au dossier, c'est pour permettre une application homogène sur l'ensemble du territoire de la politique d'action publique déterminée par le Gouvernement. Enfin, toutes les nominations des magistrats du parquet, y compris celle des procureurs généraux depuis la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, doivent faire l'objet d'un avis préalable du Conseil supérieur de la magistrature. Pour ces différentes raisons, il n'est pas envisagé par le Gouvernement de supprimer les instructions individuelles, ni de modifier le mode de nomination des magistrats du parquet.

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